Nous publions ce billet pour protester contre ces pratiques honteuses . Nous protestons contre le laxisme des autorités marocaines qui laissent se propager ce phénomene degradant .
[url]Le Maroc sur la voie thaïlandaise ?[/url]
Le : 2009-05-27 Mohamed Semlali
Toute vérité n’est toujours pas bonne à dire ni à entendre. Oui le Maroc est devenu une destination de tourisme sexuel. Il suffit de parcourir les journaux pour se rendre compte que « le plus beau pays du monde» ne manque pas de charme… charnel. Que ce soit à Marrakech, Agadir, Tanger, Casablanca ou Rabat, des réseaux s’organisent, des filières se mettent en place. Les proxénètes sévissent et tiennent de véritables maisons de rabattage au cœur des villes marocaines. La clientèle est hétéroclite : marocaine, européenne et essentiellement des riches pays du Golfe. Cette traite des «brunes» bat son plein à l’approche de l’été.
Les riches citoyens du Golfe fuient des pays à la température insupportable pour se réfugier dans la chaleur des corps de jeunes filles marocaines. Le tout devant un laisser-aller des autorités qui soulève plusieurs questions. Il ne faut pas se voiler la face. Tout le monde est impliqué et la filière de la prostitution organisée est loin d’être la première préoccupation des autorités. Certes, des rafles sont parfois lancées par les forces de l’ordre, mais d’une manière sporadique. Les rabatteurs courent les rues à la recherche de nouvelles recrues. Il n’est pas rare en effet que de jeunes filles, même accompagnées de leurs mères, se fassent accoster par des entremetteuses en pleine rue. Sinon, les salons de coiffure et les centres de beauté servent généralement de lieu de «recrutement» et de «rassemblement» de la «marchandise». Des villas dans les banlieues et des appartements meublés luxueux tiennent lieu de lupanars permanents.
D’autres réseaux s’activent, eux, dans le domaine de l’export. Des filles sont acheminées par dizaines qui vers le Liban, qui vers la Jordanie, qui vers les pays du Golfe pour meubler les hôtels de passe et les cabarets de ces pays. Sur certains vols bien connus à destination du Moyen-Orient, les avions, en général remplis de drôles de spécimens, effectuent des allers-retours ponctuels et dont tout le monde sait à quel commerce ils s’adonnent.
Aujourd’hui, et au-delà des libertés individuelles de chacun et du droit de la personne de disposer de son corps, un débat doit être ouvert sur le sujet. Parce qu’il ne s’agit plus de cas isolés, mais d’un phénomène qui prend de l’ampleur et qui touche beaucoup de familles marocaines. La prostitution au Maroc est en train de quitter la sphère privée et un aspect jusque-là artisanal pour s’industrialiser petit à petit. Des quartiers entiers sont désormais connus pour abriter des immeubles dédiés à la vente du «plaisir». Des commerces (cafés, hôtels et centres de beauté) ne vivent que de cette industrie.
Trois défis majeurs s’imposent aujourd’hui aux autorités. D’abord, cette prostitution qui dégénère de plus en plus en réseau criminel allant du trafic de drogue à la violence et au racket. Ensuite, la propagation de la prostitution dans plusieurs quartiers des villes marocaines rend difficile tout suivi sanitaire et met en péril la santé des citoyens. Enfin, l’image du pays à l’international qui souffre d’une «thaïlandisation» de plus en plus accrue.
Traite de blanches au cœur de Rabat
Elle n’en revient pas. Ihssan l’a échappé belle. En quittant ce jeudi, à midi, cette villa au beau milieu du quartier Hay Ryad, l’un des lieux les plus huppés de la capitale du royaume, elle croît renaître. Elle vient de vivre une nuit inoubliable, au vrai mauvais sens du terme. Tout commence un jour auparavant. Ihssan, qui se fait entretenir par un vieux Saoudien, fait ses emplettes dans une grande surface de Rabat. Quand elle se fait accoster par un jeune homme étranger, à l’accent moyen-oriental, elle détourne les yeux. Ihssan s’est rangée du milieu il y a plusieurs mois déjà. Elle avait rencontré, lors de ces soirées organisées à Harhoura, Abou Mohammed, un riche dignitaire saoudien qui tombe fou amoureux d’elle. La relation entre les deux ne dépasse pas quelques rencontres dans les parkings des grandes surfaces. Abou Mohammed est marié, deux fois plutôt qu’une. Au bout de quelques semaines, il la demande en mariage. Pas d’acte adoulaire ni aucun autre papier. Juste une fatiha lue devant sa mère et ses amies, et le tour est joué. Ihssan accepte ce mariage bizarre. Elle sait que c’est la porte vers une «légalisation» et donc vers la respectabilité et l’aisance. Elle est prête à s’armer de patience, d’autant plus que L’haj Abou Mohammed se montre convaincant en arguments sonnants et trébuchants.
Alors, quand le jeune homme d’origine moyen-orientale se fait pressant, cela l’agace dans un premier temps, puis elle décide de lui parler. En fin de compte, cela lui évitera de prendre un taxi. Encouragé par le sourire de Ihssan, le jeune homme se montre plus entreprenant. Il lui paie ses achats et lui propose de la raccompagner. La belle brune se laisse faire. L’homme est galant et très respectueux. Ils conviennent de se revoir le lendemain pour prendre un café dans l’Agdal. Ils s’échangent leurs numéros de téléphone et se donnent rendez-vous pour le lendemain.
Aventure
Le mercredi en début d’après-midi, le téléphone portable d’Ihssan retentit. Le jeune homme d’hier revient à la charge. Il lui fixe rendez-vous devant une cafétéria réputée de la capitale. Il arrive dans une berline allemande aux vitres teintées. Le chauffeur est cravaté et le jeune homme se tient derrière. Il demande à Ihssan de monter avec lui pour aller se joindre à quelques amis émiratis qui prennent un verre dans une villa de Hay Ryad. Ihssan hésite un moment. Elle n’a pas envie d’une aventure. Elle veut juste s’éclater un peu et peut-être sentir qu’elle séduit toujours… sentiment très féminin et qui parfois n’engage à rien. Elle monte dans la voiture qui se dirige vers le quartier Hay Ryad. Le jeune homme se veut rassurant… Aucun geste malintentionné, aucun empressement… Poli, mesuré, il se contente de murmurer des mots gentils et anodins. En arrivant devant la cour de cassation, le chauffeur insiste pour que Ihssan se baisse en sorte qu’elle ne soit pas visible de l’extérieur. Devant les protestations de la jeune dame, le chauffeur invoque les policiers en faction devant le tribunal. Au fait, Ihssan le comprendra après coup, cela n’est qu’un stratagème pour qu’elle ne se rappelle pas de l’itinéraire vers la villa dont elle sera l’invitée «forcée» pendant une bonne partie de la nuit et de la matinée.
Le luxe trompeur
La berline allemande franchit rapidement le lourd portail en fer. Ihssan est prise d’un malaise quand elle aperçoit dans le jardin de la villa des gaillards costauds tenant en laisse d’énormes chiens. Leurs mines patibulaires n’auguraient rien de bon. Elle se retourne vers son supposé hôte qui avait le regard absent. Elle descend de la voiture et pénètre à reculons dans l’enceinte de la villa. Et là, le spectacle est terrible : une quarantaine de jeunes filles à peine habillées sont en proie à une vingtaine d’hommes originaires des pays du Golfe, dont la plupart sont d’un certain âge. A peine esquissait-elle un pas de repli qu’une main ferme lui arrache violemment son sac, le fouille et lui demande de se délester de son téléphone portable. Ihssan se débat et crie… Une gifle claque sur sa joue… Ses larmes fusent… La gorge nouée, elle cherche désespérément son hôte des yeux… Le jeune homme détourne son regard et la laisse en proie aux «gardes du corps» imposants. On lui fait comprendre qu’il faut être gentille et surtout docile. Une femme, plus tenancière que femme de ménage, la prend de côté et lui assène sur un ton menaçant : «Ferme ta gueule ******* et enlève tes chaussures à talons. A côté, c’est la maison d’une des ministres. Il ne faut pas faire de grabuge». Ihssan la supplie de lui rendre son téléphone portable. Pas question. Les filles pourraient téléphoner ou bien filmer des scènes insoutenables.
Quand Ihssan se calme et s’assoit dans un coin, elle reprend ses esprits. Elle commence à scruter les lieux. Les filles éparpillées dans les salons se maquillent et s’habillent. Les hommes en fouqiya s’amusent hilares. Ils palpent le corps des jeunes filles qui s’y prêtent. Ihssan qui voulait juste boire un café avec son hôte se sent piégée. Elle tente encore une fois de partir… Elle hausse le ton et insulte le jeune homme émirati qui l’a conviée. Une des filles, apparemment habituée de la villa, se rapproche d’elle et lui demande de se taire : «la dernière fois, une des filles voulait partir avant la fin de la soirée, les gardiens l’ont prise dans une chambre et l’ont rossée de coups», lui raconte-t-elle. Ihssan comprend qu’elle est kidnappée…Une zone de non droit, non loin des principales administrations et des maisons des grands responsables du pays. Elle ne peut rien faire et le sentiment de hogra la fait pleurer.
Vers le coup de 22 heures, une dame âgée mais distinguée arrive à la villa. Les filles semblent toutes la connaître. Les gardiens la respectent. Elle donne des ordres et embarque une dizaine de filles pour une autre soirée. Madame A, c’est comme ça que les filles et les gardiens l’appellent, est une sorte de madame Claude à la sauce marocaine. Quand elle s’en va, on ordonne aux filles de descendre à la «boîte de nuit». L’énorme cave de la villa est aménagée en gigantesque dancing. Tout y est. Mûrs insonorisés, jeux de lumières et DJ. Un grand bar sert gracieusement tous types d'alcool. Les filles boivent pour se mettre dans l’ambiance et les hommes avalent verre sur verre pour pouvoir consommer «la chair fraîche marocaine».
Au petit matin, les hommes choisissent celles des filles qui les accompagneront dans les chambres pour l’acte final. C’est le grand souk et la «chairmarocaine» attend preneur. L’humiliation est suprême. Les refoulées, dont Ihssan, se contenteront d’une ikramiya de 500 dirhams et dormiront seules dans les salons. Elles devront donner au chauffeur 100 dirhams pour les raccompagner vers l’air libre. Celles qui ont eu le «privilège» d’être consommées auront 1000 dirhams amputés de 100 dirhams pour la bonne et 200 pour le chauffeur-entremetteur.
En quittant la villa, la tête baissée, le lendemain à midi, Ihssan vient de quitter un lieu où règnent le non droit, la débauche et la force brutale. Elle n’osait pas imaginer qu’à quelques mètres de là, le Maroc des droits de l’homme, de la sécurité et des institutions efficientes puisse exister...
[url]Le Maroc sur la voie thaïlandaise ?[/url]
Le : 2009-05-27 Mohamed Semlali
Toute vérité n’est toujours pas bonne à dire ni à entendre. Oui le Maroc est devenu une destination de tourisme sexuel. Il suffit de parcourir les journaux pour se rendre compte que « le plus beau pays du monde» ne manque pas de charme… charnel. Que ce soit à Marrakech, Agadir, Tanger, Casablanca ou Rabat, des réseaux s’organisent, des filières se mettent en place. Les proxénètes sévissent et tiennent de véritables maisons de rabattage au cœur des villes marocaines. La clientèle est hétéroclite : marocaine, européenne et essentiellement des riches pays du Golfe. Cette traite des «brunes» bat son plein à l’approche de l’été.
Les riches citoyens du Golfe fuient des pays à la température insupportable pour se réfugier dans la chaleur des corps de jeunes filles marocaines. Le tout devant un laisser-aller des autorités qui soulève plusieurs questions. Il ne faut pas se voiler la face. Tout le monde est impliqué et la filière de la prostitution organisée est loin d’être la première préoccupation des autorités. Certes, des rafles sont parfois lancées par les forces de l’ordre, mais d’une manière sporadique. Les rabatteurs courent les rues à la recherche de nouvelles recrues. Il n’est pas rare en effet que de jeunes filles, même accompagnées de leurs mères, se fassent accoster par des entremetteuses en pleine rue. Sinon, les salons de coiffure et les centres de beauté servent généralement de lieu de «recrutement» et de «rassemblement» de la «marchandise». Des villas dans les banlieues et des appartements meublés luxueux tiennent lieu de lupanars permanents.
D’autres réseaux s’activent, eux, dans le domaine de l’export. Des filles sont acheminées par dizaines qui vers le Liban, qui vers la Jordanie, qui vers les pays du Golfe pour meubler les hôtels de passe et les cabarets de ces pays. Sur certains vols bien connus à destination du Moyen-Orient, les avions, en général remplis de drôles de spécimens, effectuent des allers-retours ponctuels et dont tout le monde sait à quel commerce ils s’adonnent.
Aujourd’hui, et au-delà des libertés individuelles de chacun et du droit de la personne de disposer de son corps, un débat doit être ouvert sur le sujet. Parce qu’il ne s’agit plus de cas isolés, mais d’un phénomène qui prend de l’ampleur et qui touche beaucoup de familles marocaines. La prostitution au Maroc est en train de quitter la sphère privée et un aspect jusque-là artisanal pour s’industrialiser petit à petit. Des quartiers entiers sont désormais connus pour abriter des immeubles dédiés à la vente du «plaisir». Des commerces (cafés, hôtels et centres de beauté) ne vivent que de cette industrie.
Trois défis majeurs s’imposent aujourd’hui aux autorités. D’abord, cette prostitution qui dégénère de plus en plus en réseau criminel allant du trafic de drogue à la violence et au racket. Ensuite, la propagation de la prostitution dans plusieurs quartiers des villes marocaines rend difficile tout suivi sanitaire et met en péril la santé des citoyens. Enfin, l’image du pays à l’international qui souffre d’une «thaïlandisation» de plus en plus accrue.
Traite de blanches au cœur de Rabat
Elle n’en revient pas. Ihssan l’a échappé belle. En quittant ce jeudi, à midi, cette villa au beau milieu du quartier Hay Ryad, l’un des lieux les plus huppés de la capitale du royaume, elle croît renaître. Elle vient de vivre une nuit inoubliable, au vrai mauvais sens du terme. Tout commence un jour auparavant. Ihssan, qui se fait entretenir par un vieux Saoudien, fait ses emplettes dans une grande surface de Rabat. Quand elle se fait accoster par un jeune homme étranger, à l’accent moyen-oriental, elle détourne les yeux. Ihssan s’est rangée du milieu il y a plusieurs mois déjà. Elle avait rencontré, lors de ces soirées organisées à Harhoura, Abou Mohammed, un riche dignitaire saoudien qui tombe fou amoureux d’elle. La relation entre les deux ne dépasse pas quelques rencontres dans les parkings des grandes surfaces. Abou Mohammed est marié, deux fois plutôt qu’une. Au bout de quelques semaines, il la demande en mariage. Pas d’acte adoulaire ni aucun autre papier. Juste une fatiha lue devant sa mère et ses amies, et le tour est joué. Ihssan accepte ce mariage bizarre. Elle sait que c’est la porte vers une «légalisation» et donc vers la respectabilité et l’aisance. Elle est prête à s’armer de patience, d’autant plus que L’haj Abou Mohammed se montre convaincant en arguments sonnants et trébuchants.
Alors, quand le jeune homme d’origine moyen-orientale se fait pressant, cela l’agace dans un premier temps, puis elle décide de lui parler. En fin de compte, cela lui évitera de prendre un taxi. Encouragé par le sourire de Ihssan, le jeune homme se montre plus entreprenant. Il lui paie ses achats et lui propose de la raccompagner. La belle brune se laisse faire. L’homme est galant et très respectueux. Ils conviennent de se revoir le lendemain pour prendre un café dans l’Agdal. Ils s’échangent leurs numéros de téléphone et se donnent rendez-vous pour le lendemain.
Aventure
Le mercredi en début d’après-midi, le téléphone portable d’Ihssan retentit. Le jeune homme d’hier revient à la charge. Il lui fixe rendez-vous devant une cafétéria réputée de la capitale. Il arrive dans une berline allemande aux vitres teintées. Le chauffeur est cravaté et le jeune homme se tient derrière. Il demande à Ihssan de monter avec lui pour aller se joindre à quelques amis émiratis qui prennent un verre dans une villa de Hay Ryad. Ihssan hésite un moment. Elle n’a pas envie d’une aventure. Elle veut juste s’éclater un peu et peut-être sentir qu’elle séduit toujours… sentiment très féminin et qui parfois n’engage à rien. Elle monte dans la voiture qui se dirige vers le quartier Hay Ryad. Le jeune homme se veut rassurant… Aucun geste malintentionné, aucun empressement… Poli, mesuré, il se contente de murmurer des mots gentils et anodins. En arrivant devant la cour de cassation, le chauffeur insiste pour que Ihssan se baisse en sorte qu’elle ne soit pas visible de l’extérieur. Devant les protestations de la jeune dame, le chauffeur invoque les policiers en faction devant le tribunal. Au fait, Ihssan le comprendra après coup, cela n’est qu’un stratagème pour qu’elle ne se rappelle pas de l’itinéraire vers la villa dont elle sera l’invitée «forcée» pendant une bonne partie de la nuit et de la matinée.
Le luxe trompeur
La berline allemande franchit rapidement le lourd portail en fer. Ihssan est prise d’un malaise quand elle aperçoit dans le jardin de la villa des gaillards costauds tenant en laisse d’énormes chiens. Leurs mines patibulaires n’auguraient rien de bon. Elle se retourne vers son supposé hôte qui avait le regard absent. Elle descend de la voiture et pénètre à reculons dans l’enceinte de la villa. Et là, le spectacle est terrible : une quarantaine de jeunes filles à peine habillées sont en proie à une vingtaine d’hommes originaires des pays du Golfe, dont la plupart sont d’un certain âge. A peine esquissait-elle un pas de repli qu’une main ferme lui arrache violemment son sac, le fouille et lui demande de se délester de son téléphone portable. Ihssan se débat et crie… Une gifle claque sur sa joue… Ses larmes fusent… La gorge nouée, elle cherche désespérément son hôte des yeux… Le jeune homme détourne son regard et la laisse en proie aux «gardes du corps» imposants. On lui fait comprendre qu’il faut être gentille et surtout docile. Une femme, plus tenancière que femme de ménage, la prend de côté et lui assène sur un ton menaçant : «Ferme ta gueule ******* et enlève tes chaussures à talons. A côté, c’est la maison d’une des ministres. Il ne faut pas faire de grabuge». Ihssan la supplie de lui rendre son téléphone portable. Pas question. Les filles pourraient téléphoner ou bien filmer des scènes insoutenables.
Quand Ihssan se calme et s’assoit dans un coin, elle reprend ses esprits. Elle commence à scruter les lieux. Les filles éparpillées dans les salons se maquillent et s’habillent. Les hommes en fouqiya s’amusent hilares. Ils palpent le corps des jeunes filles qui s’y prêtent. Ihssan qui voulait juste boire un café avec son hôte se sent piégée. Elle tente encore une fois de partir… Elle hausse le ton et insulte le jeune homme émirati qui l’a conviée. Une des filles, apparemment habituée de la villa, se rapproche d’elle et lui demande de se taire : «la dernière fois, une des filles voulait partir avant la fin de la soirée, les gardiens l’ont prise dans une chambre et l’ont rossée de coups», lui raconte-t-elle. Ihssan comprend qu’elle est kidnappée…Une zone de non droit, non loin des principales administrations et des maisons des grands responsables du pays. Elle ne peut rien faire et le sentiment de hogra la fait pleurer.
Vers le coup de 22 heures, une dame âgée mais distinguée arrive à la villa. Les filles semblent toutes la connaître. Les gardiens la respectent. Elle donne des ordres et embarque une dizaine de filles pour une autre soirée. Madame A, c’est comme ça que les filles et les gardiens l’appellent, est une sorte de madame Claude à la sauce marocaine. Quand elle s’en va, on ordonne aux filles de descendre à la «boîte de nuit». L’énorme cave de la villa est aménagée en gigantesque dancing. Tout y est. Mûrs insonorisés, jeux de lumières et DJ. Un grand bar sert gracieusement tous types d'alcool. Les filles boivent pour se mettre dans l’ambiance et les hommes avalent verre sur verre pour pouvoir consommer «la chair fraîche marocaine».
Au petit matin, les hommes choisissent celles des filles qui les accompagneront dans les chambres pour l’acte final. C’est le grand souk et la «chairmarocaine» attend preneur. L’humiliation est suprême. Les refoulées, dont Ihssan, se contenteront d’une ikramiya de 500 dirhams et dormiront seules dans les salons. Elles devront donner au chauffeur 100 dirhams pour les raccompagner vers l’air libre. Celles qui ont eu le «privilège» d’être consommées auront 1000 dirhams amputés de 100 dirhams pour la bonne et 200 pour le chauffeur-entremetteur.
En quittant la villa, la tête baissée, le lendemain à midi, Ihssan vient de quitter un lieu où règnent le non droit, la débauche et la force brutale. Elle n’osait pas imaginer qu’à quelques mètres de là, le Maroc des droits de l’homme, de la sécurité et des institutions efficientes puisse exister...