Algérie-Maroc


Rejoignez le forum, c’est rapide et facile

Algérie-Maroc
Algérie-Maroc
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Algérie-Maroc

Forum de discussion entre Maghrébins, expulsés marocains d'algerie,algerie-maroc


Le Deal du moment : -28%
-28% Machine à café avec broyeur ...
Voir le deal
229.99 €

Vous n'êtes pas connecté. Connectez-vous ou enregistrez-vous

Sans Nom Patronymique - S.N.P. M'barek

Aller en bas  Message [Page 1 sur 1]

admin"SNP1975"

admin
Admin

Sans Nom Patronymique - S.N.P.

Il s'appelle M'barek et doit avoir aujourd'hui dans les quatre-vingts ans. M'barek, ou l'être béni, est connu de tous, respecté et toujours salué. Il faut dire que les gens peuvent, à n'importe quel moment de la journée, avoir besoin de ses services puisqu'il exerce le métier de "laveur de morts". En plus, il ne peut être confondu avec une autre personne : M'barek est l'unique Noir à habiter cette ville. Sa vie et celle de ses enfants est quelque peu bizarre, car l'injustice est sa trame principale. Aucun habitant de cette ville montagnarde ne sait d'où est venu ce Noir. La seule explication qui est restée dans les mémoires, c'est qu'un jour, il y a de cela plus de soixante ans, cet homme a débarqué dans les bagages d'un officier, un capitaine de la coloniale, muté à Médéa, dans cette ville du Nord de l'Algérie.
M'barek était son homme à tout faire, une sorte d'ordonnance en civil. Même après la démobilisation de Hadj Smain - ainsi se nommait ce militaire - et l'accession de l'Algérie à l'indépendance, M'barek est resté à son service. Des années plus tard, son maître le maria à une jeune Noire qu'il fit expressément venir du grand Sud du pays. Ce ne fut pas, de sa part, un geste de charité musulmane, mais l'acte avait un but bien précis. Hadj Smain, marié bien avant son domestique, n'avait jamais eu d'enfants. Il décida donc de marier son boy et d'adopter par la suite ses enfants. Chose qu'il exécuta à la lettre, au point qu'il devint, pour les garçons qu'eut M'barek par la suite, leur véritable père.
Faisant fi de la couleur de la peau qu'ils partageaient avec M'barek, ils le traitèrent, des années durant, comme un serviteur qui devaient répondre à tous leurs caprices. Hadj Smain, un homme influent, respecté et craint par tous, n'eut à aucun moment à subir critiques ou sarcasmes. Les gens finirent vite par accepter cette situation, d'autant qu'elle émanait d'un homme qui avait réussi une carrière militaire et qui jouissait d'une retraite dorée. M'barek, homme de toute fidélité et de grande discrétion, n'eut jamais à faire part à quiconque d'un ressentiment à l'égard de son maître. Au contraire, il était heureux et fier que sa progéniture soit considérée et assimilée comme descendance de Hadj Smain. Cette situation se conforta encore plus après le décès de sa jeune femme, survenu à l'accouchement difficile de Mahmoud, le troisième des garçons.
********

Le temps passa et les enfants grandirent heureux. Rien ne leur manquait. C'était la fin de la guerre. Si les Algériens manquaient de tout, eux par contre occupaient une jolie villa qu'avaient abandonnée des colons. Ils allaient à l'école en voiture, étaient très bien habillés, et de surcroît leur mère adoptive n'omettait jamais de leur bourrer les poches de friandises. Quand, pour une quelconque raison, Hadj était absent, M'barek allait attendre les gamins à la sortie de l'école. Il était toujours aux petits soins avec eux, mais devait observer de la distance. Les enfants ne supportaient aucune familiarité de sa part.
A la fin des années soixante-dix, Hadj Smain tomba gravement malade et décéda en quelques jours. Une accablante tristesse tomba sur M'barek qui, des jours durants, restait inconsolable et refusait de desserrer les dents. Il pleurait la perte de son maître, mais s'il était éploré à un tel point, c'est qu'il y avait une raison encore plus importante. En effet, il venait de se rendre compte brutalement de la fin d'un rêve, voire du début d'un cauchemar qui allait durer très longtemps et dont les victimes ne seraient autres que ses propres enfants.
M'barek ne pouvait plus rester à leur service. Hadj Smain étant mort, il était mal venu qu'il continue à habiter sous le même toit que la veuve de son maître. Après l'enterrement, il dut quitter la maison pour aller s'installer dans une minable petite chambre. Du coup les enfants, qui étaient en pleine adolescence, furent livrés à eux-mêmes, et ce n'était pas une petite vieille complètement abattue par la mort de son mari qui pouvait avoir de l'autorité sur eux. Mohamed, l'aîné, avait dix-sept ans. Il comprit très vite que les choses allaient changer en mal. Sans le dire à personne, un beau matin, il prit un bus : direction inconnue. Ahmed, son cadet, allait sur ses seize ans. Il était en classe de troisième. Du jour au lendemain, ses professeurs qui, auparavant, étaient très gentils, commencèrent à lui parler sur un autre ton. De tempérament très doux et élève travailleur, il accepta ce changement. L'essentiel pour lui restait la réussite de ses études. Mahmoud, le plus jeune, douze ans, était à l'opposé du caractère de son frère. Turbulent et frondeur, il était incapable d'accepter la moindre réflexion. Très affecté par la disparition soudaine de son père adoptif, il décida, malgré toutes les supplications de M'barek, de cesser de fréquenter l'école.

http://www.marocainsdalgerie.net

admin"SNP1975"

admin
Admin

Mahmoud, complètement dénué de sentiments à l'égard de son père naturel, aimait toujours à le contrarier. D'ailleurs, quand il parlait de lui à ses copains, il ne mâchait pas ses mots. Cruellement, il aimait à répéter cette phrase : "Ce n'est pas mon père, ce n'est qu'un nègre qui a juste tiré un coup pour que je vienne au monde. Mon père, c'est Hadj Smain !". Doué d'une grande imagination et d'une riche faculté de fabulation, il aimait à raconter dans les détails, à ses copains de quartier, les pseudo-faits d'armes de son père adoptif. Selon lui, Hadj Smain avait combattu des tribus rebelles dans le Sud de l'Algérie, au Mali et au Niger. Et c'est lors d'une de ses victoires qu'il avait reçu d'un chef défait, à titre de cadeau, M'barek. A l'époque, c'était un noiraud qui devait avoir l'âge de quinze ans. Depuis, il l'a suivi comme son ombre et servi avec docilité et obéissance.
********

Mahmoud avait deux passions, le foot et la cuisine. Pour assouvir la première, il s'inscrit dans le club local et devint très vite titulaire dans l'équipe des seniors. A l'époque, c'était très agréable de voir évoluer un Noir parmi des joueurs blancs. En tout cas, c'était une mode et cela ne déplaisait pas du tout aux supporters. Mahmoud, de surcroît, avait un jeu très intelligent et tout en finesse. Ses dribbles étaient redoutables et ses tirs, le plus souvent, inquiétaient les gardiens les plus expérimentés. Mais, pour une simple chute dont il était victime, Mahmoud pouvait rentrer dans des colères insoupçonnables, capables de faire dégénérer la partie en une bagarre générale. Mahmoud était un sanguin et ne pouvait supporter la moindre petite injustice. Cette tendance s'accentua en lui, jusqu'au jour où, à grand renfort de coups de pieds, il laissa à moitié mort un joueur de l'équipe adverse qui l'avait taclé dans le dos, alors qu'il était en situation de marquer un but. Après son expulsion séance tenante de la partie par l'arbitre, la sanction sportive tomba sans appel. Mahmoud fut radié à tout jamais des terrains de football pour grande violence.
Cette première décision amorça donc le cycle infernal qu'allait connaître la très courte vie de ce jeune. Chassé donc des terrains de sport, il essaya de s'adonner à son autre passion, et du même coup à en faire son gagne-pain. Sans grande difficulté, il trouva un restaurant pour l'employer comme cuisinier. Loin des regards de la foule, il se démenait comme un diable noir, luisant de sueur, à faire de très bons plats : couscous, rôtis et sauces bien mijotés n'avaient aucun secret pour lui. Devant ses fourneaux, il était heureux et passait des heures durant à travailler sans ressentir aucune fatigue. Tout en travaillant, il aimait siroter, verre après verre, du bon rouge des coteaux de Médéa. De temps en temps, il se roulait un joint, histoire de garder toujours la bonne humeur. Très tard, il quittait son lieu de travail, mais refusait de rentrer chez lui. Il préférait rester à traîner dans les rues que de voir son frère Ahmed, avec qui il ne s'entendait pas du tout. A force de fuir la maison, il devint une sorte de S.D.F., qui toute la nuit partageait la compagnie des clochards et des ivrognes pour, le matin venu, aller travailler comme le plus commun des habitants de la ville de Médéa.
Mahmoud finit par perdre à ce jeu et à se transformer, en l'espace de quelques mois, en délinquant qui en a gros sur le coeur contre tout le genre humain. Ainsi, il perdit son boulot et put à loisir s'enfoncer dans l'alcoolisme et la drogue. Pour pouvoir continuer à boire et à fumer, il devint à l'occasion voleur, agresseur de vieilles dames et dealer. La prison, du coup, devint son domicile légal. Il en sortait pour vite y revenir. Lui qui était d'une force herculéenne perdit très vite sa santé. Un méchant ulcère à l'estomac le rongea en quelques mois. Il mourut sur un lit d'hôpital après avoir hurlé toute une nuit de douleur. Lors de ses rares moments de lucidité, il continua à refuser avec rage l'accès de sa chambre à son père naturel qui voulait le voir une dernière fois. M'barek passa toute la nuit à pleurer et à attendre dans le hall de l'hôpital. Mahmoud, à sa mort, n'avait que 32 ans. Durant sa très courte vie, il s'était battu pour être reconnu comme un homme parmi les hommes. M'barek l'enterra et inscrit sur sa tombe : "Ci-gît Mahmoud S.N.P.".
********

Dans cette famille, la mort avait déjà frappé une première fois, il y a de cela quelques années. Elle avait emporté Ahmed, le deuxième des garçons alors qu'il n'avait pas trente ans. Ahmed était le plus gentil et le plus triste des trois. C'était aussi un véritable solitaire. Il passait ses jours à éviter la compagnie de ses frères et de tous les adultes. Après la mort de Hadj Smain, leur protecteur, Ahmed, malgré toute son abnégation au travail et ses bons résultats scolaires, quitta le lycée en première. Sans argent, il ne pouvait poursuivre ses études. Il devint donc instituteur à la campagne. A l'époque, les besoins en enseignants étaient énormes et une loi permettait donc à tous les titulaires du niveau de troisième de rejoindre l'Éducation Nationale, à la condition qu'ils acceptent durant cinq ans un poste dans une école rurale. Ahmed accepta sans réfléchir. Il voulait quitter cette ville, fuir sa famille et tous les habitants. Il était heureux de se consacrer exclusivement aux enfants, êtres innocents et sans grande méchanceté. Durant deux années, il ne mit que rarement les pieds en ville, et à chaque fois, le moins de temps possible. Il ne cherchait pas à reprendre contact avec M'barek, car pour lui, il n'avait lui aussi que de l'indifférence. S'il lui arrivait de le rencontrer par hasard, il allait toujours au devant de sa rencontre, et tout en restant courtois, il ne faisait rien pour avoir des rapports chaleureux avec lui. Ahmed aimait à vivre caché, et son métier lui donnait tout le plaisir d'être utile, efficace tout en restant discret.

http://www.marocainsdalgerie.net

admin"SNP1975"

admin
Admin

Mais cette embellie dans sa vie ne dura pas longtemps. Elle fut même interrompue avec brutalité et sans aucun appel. Un jour qu'il était de retour en ville, un courrier l'attendait. C'était l'académie, plus exactement le service du personnel. Par routine, on avait vérifié son dossier de recrutement et on avait remarqué qu'une pièce importante manquait : le certificat de nationalité. Il était convoqué de toute urgence pour remettre le document exigé. En lisant cette lettre, Ahmed sut tout de suite que c'était la fin de sa carrière d'instituteur. La machine bureaucratique s'était mise en branle et elle allait inexorablement le broyer. Édifié sur l'histoire de son père naturel et des dispositions des lois dans l'Éducation Nationale, il était sûr qu'aucune dérogation n'allait lui être accordée. La réglementation était plus que claire : "Ne peut être enseignant dans le corps de l'Éducation Nationale que toute personne jouissant pleinement de ses droits de nationalité algérienne". Et lui, il n'avait pas ce fameux papier et ne pourrait jamais l'obtenir, car son père était d'origine inconnue : nulle trace de sa naissance n'avait été retrouvée dans les registres d'État Civil algérien.
Maintes fois auditionné par la justice, M'barek avait été incapable de dire de quelle région ou pays il venait. Il ne se souvenait pas de son père ou de sa mère. Tout ce qu'il avait pu dire et répéter, c'est qu'il vivait dans une famille où il y avait beaucoup d'enfants et qu'un jour, le chef de la tribu lui avait ordonné de suivre un Blanc. Quelques jours après l'entrevue qu'il eut avec le chef du personnel et malgré ses explications, Ahmed reçut la notification qui mettait fin à ses fonctions d'instituteur rural. Il rentra chez lui et s'enferma dans un silence de muet. Durant des années, il ne travailla que rarement et vécut très chichement. Sa santé périclita tout doucement. La pauvreté et l'indifférence eurent petit à petit raison de sa résistance. Il mourut un soir de grand froid d'hiver, sans chauffage, tout seul, dans une grande maison livrée à l'abandon et aux chats errants. M'barek le pleura beaucoup et paya tous les frais de son enterrement. Il inscrit aussi sur la pierre tombale : "Ci-gît Ahmed S.N.P., un homme de bien !".
********

L'histoire de cette famille sinistrée par la vie et la bêtise humaine aurait pu s'arrêter là, mais le sort implacable qui la poursuivit le voulait autrement. Juste après la mort d'Ahmed, Mohamed, l'aîné des enfants, celui qui était parti des années durant, revint sans s'annoncer. Il était accompagné de sa femme et de deux enfants, des garçons en bas âge. L'un se prénommait Smain, en mémoire de son père adoptif, l'autre Amine. Ce retour de l'enfant prodigue égailla quelque peu la maison, et contre toute attente, fit le bonheur de M'barek. Les rapports qu'il commença à entretenir avec ses petits enfants n'avaient rien à voir avec ceux qu'il avait eus avec ses enfants. Avec son fils aîné, une personne très imbue de sa personnalité et avare en mots, il renforça le statu quo. Par contre, avec ses petits enfants, M'barek eut beaucoup de chance puisqu'ils l'adoptèrent du premier coup.
M'barek était aux anges avec les deux mômes. Il vivait l'amour filial qui lui avait été interdit toute sa vie. Il ne se lassait jamais de leur compagnie et s'occupait sans relâche de leur confort. Tous les matins, il les accompagnait à l'école. Tous les trois, ils se payaient une franche partie de rigolade à la sortie de l'école et n'omettaient point de passer par les magasins pour se remplir les poches de friandises et les mains de jouets. En voyant cela, Mohamed leur père se déchargea de toutes ses responsabilités sur les épaules de leur grand-père. Il se permit même le luxe de repartir on ne sait où et de confier sa petite famille à M'barek.
Smain, l'aîné, avait une personnalité toute simple. Il était de caractère extraverti et ne se vexait jamais. Sans aucun problème, il allait à la rencontre des gens et recherchait l'échange. Il aimait aussi faire le pitre. Le naturel qu'il dégageait faisait qu'il était vite adopté. Contrairement à lui, son frère Amine était un grand timide et n'accordait sa confiance qu'avec parcimonie. Seul son grand-père lui inspirait une totale confiance. D'ailleurs, ces deux êtres s'aimaient beaucoup. Dès qu'il terminait l'école, Amine allait le rejoindre à la mosquée. M'barek, homme de grande piété et aussi pour des raisons professionnelles, passait la majeure partie de sa journée dans ce lieu, une très belle et vieille mosquée datant de l'époque turque. C'est dans les dépendances de ce lieu de culte qu'il entreposait son matériel mortuaire : le corbillard à bras municipal, les grandes planches plates servant pour le lavage des cadavres et les nombreux flacons qui renferment des produits hygiéniques et autres parfums qui permettent de combattre l'odeur de la mort.
Amine passait son temps dans cette ambiance de mort et de religion. Il ne ressentait jamais le besoin de jouer avec les autres enfants. Même adolescent, il ne recherchait jamais particulièrement la compagnie des jeunes de son âge. Les seuls qu'il fréquentait, c'étaient ceux qui venaient à la mosquée où officiait son grand-père, et d'autres qu'il rencontrait à la salle de gymnastique, où il s'entraînait régulièrement à faire du karaté. A dix-sept ans, il mesurait déjà 1,80m et pesait plus de soixante-cinq kilos. En plus de la force, il avait des traits fins et un visage radieux. Il était également très studieux au lycée et vouait un grand respect à ses professeurs. La fréquentation régulière de la mosquée lui permit d'acquérir des connaissances solides en matière d'islam, ce qui lui ouvrit la voie pour s'abreuver des nouvelles théologies rédemptrices, que développait toute une génération de théologiens en rupture avec la société musulmane, qui continuait à se complaire dans le fatalisme et refusait de passer à l'action pour secouer le joug des despotes régnants.
Amine fut subjugué d'admiration devant ce réveil spirituel, souvent porté par de jeunes musulmans partis chercher savoir, connaissance et sagesse dans les grandes universités du Moyen-Orient, à la Mecque, au Caire et à Islamabad. M'barek ne voyait pas toujours d'un bon oeil les nouvelles fréquentations de son petit-fils, mais ne disait mot. Amine ne faisait aucun mal à vouloir connaître à fond sa foi et sa religion. Au fil des mois, Amine devint plus discret. Il cessa d'aller à la mosquée où officiait son grand-père, car il avait décidé de fréquenter une autre mosquée, construite avec des fonds privés et animée par un imam qui n'était pas à la solde du gouvernement. Cette décision affecta beaucoup M'barek, mais habitué aux vicissitudes de la vie, il n'en tint aucun grief à son petit-fils qui, d'ailleurs, passait le voir avec une grande régularité.
En 1991, l'Algérie rentra dans une période de grande instabilité politique, suite à l'interruption du processus électoral. Les islamistes avaient en un temps record fait jonction avec le mécontentement populaire. Lors des élections législatives pluralistes organisées par le pouvoir, le F.I.S., parti des intégristes, rafla la majorité des sièges de l'assemblée, dès le premier tour. Sans attendre, il promit au peuple l'avènement d'une République Islamique en Algérie. L'armée réagit et annula ces élections. Les militants intégristes déclenchèrent en riposte un soulèvement armé. Médéa, ville qui avait plébiscité le F.I.S. à 97% des voix, devint naturellement un haut lieu de cette insurrection. Parmi les insurgés, on finit vite par parler d'un certain Amine S.N.P., fils de Mohamed S.N.P. et petit-fils de M'barek S.N.P.
Quand il avait pris le maquis, il avait juste vingt ans. Durant plus de deux années, il fit des ravages dans les rangs des policiers et gendarmes qui apprirent à leurs dépens à le redouter et à reconnaître ses qualités militaires. Sa réputation de chef local n'eut à aucun moment à souffrir de contestation parmi ses hommes, qui lui obéissaient et lui faisaient confiance. Amine était autant exigeant d'eux que de lui-même. Un jour, lors d'une opération téméraire, il captura en plein centre ville un officier supérieur des renseignements de l'armée. Après l'avoir emmené dans une planque sûre, il le tortura pour lui soutirer des informations capitales et finit par lui trancher la tête. La nuit même, un de ses agents alla déposer la tête du supplicié sur un banc de la grande place de la ville de Médéa avec un écriteau mis bien en évidence. Il était écrit dessus : "Voilà comment nous traitons les ennemis de l'Islam !". Après cet affront suprême fait à l'armée, on décida en haut lieu de dépêcher un détachement spécial pour le pourchasser, lui et son groupe. Au bout d'une année de traque sans répit "Seif El Islam" (glaive de l'Islam) fut abattu lors d'un accrochage. Sa dépouille, criblée de balles, fut exposée pendant trois jours et trois nuits sur le même lieu où avait été retrouvée la tête décapitée de l'officier des renseignements.
M'barek, homme de paix, de coeur et de tolérance, n'avait aucune haine, ni à l'égard de ceux qui avaient fourvoyé son petit-fils dans cette voie de sang et de larmes, ni à l'égard des militaires, qui étaient en droit d'exercer une violence légale contre tous ceux qui mettaient en péril la stabilité de l'État et du pays. Il fit néanmoins des pieds et des mains pour récupérer le corps d'Amine. Au bout de deux semaines d'attente, les autorités accédèrent à sa demande. De ses mains, et aussi de ses larmes, il baigna son petit-enfant, excella de tout son art mortuaire pour lui donner figure humaine, après avoir suturé avec du fil chirurgical toutes ses blessures. Il l'enterra en toute discrétion comme l'avaient exigé les militaires. Avant de quitter le cimetière, il inscrivit sur un petit panneau de bois : "Ci-gît Amine S.N.P. Il n'avait que 23 ans. Sa vie durant, il a cherché son identité. Il ne trouva au bout que la violence et la mort".
Lyès Abdelmalek
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

http://www.marocainsdalgerie.net

admin"SNP1975"

admin
Admin

Voyage dans l’état civil algérien
Aux origines des noms de famille

Le patronyme est un support de notre identité. C’est un héritage familial inaliénable. Il nous parvient du fond des âges comme une chaîne qui nous lie à un ancêtre. A cheval entre la science du langage et l’histoire, ce nom si familier à notre mémoire recèle parfois le code d’accès qui perce le secret d’énigmes séculaires.

Il arrive que les noms résistent étonnament à l’effet du temps. Pour l’exemple, nous retiendrons Aouchich, Rezzoug ou Mazigh consignés par l’historien Hérodote dans son périple africain en 405 avant l’ère chrétienne. Nous proposons dans ces lignes une petite ballade festive et sans prétention savante dans cette heureuse association historico-identitaire que le lecteur attentif complètera selon ses besoins. Du point de vue de la loi, le nom de famille est un patrimoine protégé par le code civil. Il a valeur de propriété privée. La loi permet, en effet, de modifier ou de changer de nom, mais consacre son caractère personnel. Un changement de patronyme doit obligatoirement faire l’objet d’une publicité pour vérifier l’éventualité d’une opposition puisqu’il a valeur de propriété privée inaliénable. A sa naissance, l’enfant algérien reçoit deux noms propres : le patronyme de son père et un ou plusieurs prénoms. Les parents ont le libre choix des prénoms, mais l’enfant portera obligatoirement le nom patriarcal. L’ordonnance 75-58 du 26 septembre 1975 portant code civil considère le nom et les prénoms comme un attribut de la personnalité identifiant la personne. Cette ordonnance a permis la nomination des personnes qui étaient dépourvues de nom et identifiées sous « SNP » (sans nom patronymique). Depuis la publication de cette loi, les dépositaires des registres d’état civil sont tenus de ne pas reproduire ce sigle « SNP », lors de la délivrance des copies conformes des actes d’état civil. Dans cette première partie, nous nous pencherons sur quelques noms d’origine turque....


Istanbul, Istanbul...

Les liens de l’Algérie avec l’empire Ottoman apparaissent sur une multitude de noms de famille. Baba Ali désignait le fonctionnaire de la sublime porte, autrement dit « El Bab El Ali ». Tout comme de nos jours, il arrive qu’une personne soit désignée du nom de l’institution qui l’emploie. Jusqu’au XIIe siècle, le mot « porte » désignait couramment, le palais impérial sous le règne ottoman. Plus tard, il a évolué pour définir les quartiers du grand vizir, siège du gouvernement à Istanbul. A partir du XIIIe siècle, ce siège ne sera connu que sous le terme de la sublime porte. Pour de nombreux chercheurs, y compris le grand spécialiste de l’Islam, Bernard Lewis, le nom « Istanbul » a été adopté en remplacement de Constantinople à sa conquête le 29 mai 1453 par Mehmed Ali. En réalité, Istanbul est une simplification phonétique du nom original « Constantinopoolis » qui s’est édulcoré dans le langage populaire en Stanpool pour se stabiliser définitivement en Stanbul et Istanbul. Les signes particuliers ont été une source assez importante dans la formation des noms propres chez les Ottomans. Ainsi, sari qui définit l’homme au teint clair, blond ou roux, va se compléter par un préfixe et devenir Bendissari, Bensari. Tobbal qu’on confond souvent avec le joueur de tambour signifie le boîteux. Dali est la qualité de l’homme particulièrement courageux face à l’ennemi, autrement dit, « le téméraire ». Si on le définit comme « le fou », c’est dans le sens de guerrier intrépide. Il a donné les Bendali, les Dali Bey. Quant à Mami, il qualifie les Européens réfugiés en pays d’Islam notamment sous l’inquisition. L’homme frappé d’un défaut de langue est appelé tétah. De sobriquet, il devient un nom de famille. L’homme grand de taille est appelé ouzzou et devient Bouzzou. Sous l’empire ottoman, l’armée, pilier de la dynastie, était un grand pourvoyeur d’emplois. C’est pourquoi on constate tant de noms liés à la fonction militaire. Ainsi, Boumabadji, c’est le bombardier. Tobji ou bachtobji sont artilleurs ou canonniers. Quant à danedji ou dennane, c’est le maître des forges. Il coule les bouches de canons et les boulets des projectiles. Alemdar, tout comme Sandjak sont les porte-étendards. Raïs, c’est bien évidemment le capitaine du navire. Ghazi appartient à la caste militaire chargée de la garde des frontières de l’empire. Dans leur immense majorité, ils étaient turcs et parlant turc. Le yéni cheri qui a donné le mot janissaire signifie le « nouveau soldat ». Il était reconnaissable à son grand bonnet blanc. Baltadji, c’est littéralement « l’homme à la hache ». Il fait partie du corps d’armée affecté exclusivement à la garde du harem du sultan à Topkapi. Baïri est probablement un raccourci de bey raïs. La fonction juridique a donné kazi qui est une prononciation turque de Qadi. Kazi ouel et kazitani (Tlemcen) signifient « el qadi el awwal et el qadi etthani » premier et second juge. Hadji est un arrangement de hachti qui désigne le cuisinier. Il s’est largement répandu en tant que patronyme. L’officier de police se nommait Zabanti de l’arabe dhabet. Il devient patronyme en se déclinant Sabati. Zabanti survit encore sous l’appellation argotique de zbaïti, èquivalent de flic en français.

http://www.marocainsdalgerie.net

admin"SNP1975"

admin
Admin

D’où viens-tu ?

L’origine géographique est une source importante dans la formation des patronymes. C’est une règle universelle. L’empire Ottoman avait, sous son contrôle, une mosaïque de peuples de l’Asie centrale, de l’Europe centrale, du Monde arabe et de l’Afrique du Nord à l’exception du Maroc. Le Qara-Bagh est une région du sud-ouest du Caucase. Elle donne les Karabaghli. Le suffixe « li » indique l’origine géographique. Menemen, décliné en Moumen est le chef-lieu de Kaza, dans la région d’Aïdin. Quant à la ville d’Izmir, elle a donné les Zemirli, Zemirline (Medéa, Tizi Ouzou, Alger Mostaganem), Kara signifie, le Noir. Entendons, le mat foncé. Ainsi, Karadeniz, c’est la mer Noire. Les habitants d’Albanie se nomment les Arouani. Le Kossovar donne Kosbi. Fochtali vient de Phocée. Il existe aussi les Fechtali en berbère il s’agit certainement d’une coïncidence linguistique. Khorci transcrit de plusieurs façons, indique le Corse, tout comme l’île de Rodhes a donné Rodesli. Djenoui vient de Gènova (Gênes). Venise se disait Ounis. Ses habitants se nomment Ounesli (Ounes = Venise et Li = originaire de...) Lounis et Ounissi. Il devient aussi El Ounès. Kherchi c’est le Crétois et Bouchnak, c’est le Bosniaque. Le port turc de Bodrum (ancienne Alicarnas de la haute antiquité) a tissé des liens avec la côte algérienne. C’est pourquoi on retrouve tant de Bedroni, Betroni, Bedrina, Trari, nom berbère appartient aux Trarast ; ensemble de tribus de la région du nord de Tlemcen entre la côte méditerranéenne et les monts Fellaoucen ayant Nedroma comme centre géographique. Les Traras regroupent Oulhaci, Jebbala, Msirda, Souahlya, Beni Khaled, Beni Menir, Beni Abed, Beni Warsous, et Mesahlia d’où sont, probablement, originaires les Mesli qui donneront Messali. L’Andalousie a fourni une multitude de noms. Le Galicien devient Ghennouchi. Ghennoudja, comme prénom, c’est la Galicienne toujours en vogue à Annaba et à Azzaba. Il en est de même pour l’exemple de « Olga » qu’on attribuait d’office à toutes les captives d’Europe centrale. Ce prénom slave devient Aldjia en passant par El Oldja qu’on retrouve couramment dans la littérature populaire. El Aychi et Ayachi sont les originaires de Ouadi Aych, le nom arabe de la ville de Cadix en Espagne une transposition de Ouadi Aych du Nejd, dans la péninsule arabique. Chebli, qui vient Chbilia, (Séville) et Gharnati de Grenade et Korteby de Cordoba. Le quartier El Blansa au centre de Blida indique une population originaire de Valence installée dans la nouvelle cité sous la protection de Sid Ahmed El Kebir. De même que les émigrés de Cadix vont fonder Oued Aych dans la périphérie de BLida vers 1510. Après la chute de Grenade en 1492, des musulmans et des juifs ont tenté de se maintenir en Andalousie. Ils ne quitteront définitivement leur patrie qu’après plus d’un siècle de présence dans la résistance et la clandestinité. Cette longue attente a eu des effets sur les noms. On retrouve ainsi des indicateurs d’identité dont la signification est parfois énigmatique. C’est le cas de Tchicou (El Chico), Randi, (El Grandé) Longo, le long, Gad el Maleh (Oued El Malah) .


Les arts et métiers

Les métiers et les arts sont une source de patronymes. Le tarzi, c’est le tailleur. Quand il est collé au préfixe « bach », il devient bachtarzi, autrement dit chef d’atelier dans l’art de la confection. Il est en lien direct avec Tellidji, le tisseur de brocard. Dans ce même corps de métier, on retrouve el kettani. Il fabrique la matière première, el kettan d’où dérive le coton. Le cordonnier se dit papoudji qui se prononce baboudji et parfois, il se dit tout simplement babou. Debbagh, c’est le tanneur et daouadji, le caravanier ou l’administrateur du caravansérail. Serkadji signifie le fabricant de vinaigre. Kateb et racim, noms prédestinés, désignent l’écrivain et l’artiste des arts graphiques. Quant à Sermadji, c’est l’industriel de la cosmétique et produits de beauté, en particulier le khôl, essentiel pour protéger la vue chez les marins et les caravaniers. Damardji s’occupe de la gestion de l’eau. Le sermadji se dit yantren et yataghen en tamazight car dérivant de iaattaren de attar. Tout comme ihaddaden désigne le forgeron et ioualalen, le potier. La guerre a aussi ses metiers, allag, en tamazight signifie le lancier et ghozzali (de ghozz) est un corps d’archers turkmènes venus à Tlemcen à l’appel de Youcef Ibn Tachfin pour renforcer la défense de la ville aux prises avec ses ennemis de l’Ouest. Dans son long poème consacré au tatoueur el ouchem, Ben El Messayeb évoque « bled er roum, bled el ghozz. » En ce qui concerne le nom « berbère » proprement dit, assez courant dans les milieux citadins (Blida, Médéa), il désigne le coiffeur en turc. On le retrouve aussi sous d’autres formes comme Barbar. Djerrah et Bachdjerrah, un mot arabe passé au turc désigne le chirurgien. Bestandji, jardinier, saboundji, savonnier, kahouadji, cafetier, halouadji, pâtissier, fnardji gardien de phare, Fekhardji, fabricant de porcelaine (équivalent d’ioualalen en berbère). Guerrache ou kerrache, c’est l’homme qui se consacre à lutte sportive. Et quand on dit mokdad il faut comprendre, évidemment, le guide. Des surnoms peuvent devenir des patronymes au point de faire oublier l’identité d’origine. Embarek est une déclinaison populaire El Moubarek. Cet homme fut un personnage illustre de Constantine originaire de Mila. D’où Embarek El Mili. Ahmed Ben Omar était nommé Cheïkh El Hadj Ahmed El Moubarek. Il est né à Constantine vers 1800 et vécu toute sa vie dans cette ville jusqu’à sa mort en 1870. Il appartenait à la confrérie des Hansalyya, implantée à Constantine par Cheïkh Ahmed Ezzouaoui. Grand savant de l’Islam. Il occupa la chaire de Djamaâ El Kebir et succèda au grand mufti Mohamed El Annabi. Il est révoqué du poste de magistrat du haut conseil par les autorités coloniales pour « intelligence avec l’ennemi » en raison des rapports secrets qu’ils entretenait avec le Bey Ahmed de Constantine. Il écrivit une quantité d’ouvrages parmi lesquels Histoire de Constantine, non publié jusqu’à ce jour. Il existerait deux exemplaires du manuscrit dans les fonds d’archives de la Bibliothèque nationale et l’ancienne Médersa d’Alger.

http://www.marocainsdalgerie.net

admin"SNP1975"

admin
Admin

Ruines romaines et usures phonétiques

Bon nombre de noms de famille portent une marque latine sans équivoque datant de l’époque romaine. Ils se reconnaissent à la finale « us » prononcée et écrite en ouche. Maouch dérive de Marius. La chute de la voyelle médiane « r » et le suffixe ouch constituent une réhabilitation du schème berbérophone. C’est la même règle qui va transformer « Cassius » ou « Caïus » en Chaouche. Cette pratique latine ancienne qui fait terminer un nom par une finale « ouch » est encore vivace. C’est l’exemple de Mouhouch Saïtoche... On retrouve, aujourd’hui Titus conservé sous sa forme la plus latine avec une phonétique qui a gardé l’accent de l’époque antique Titous. Dans les régions est, le « t » s’est adouci en « d ». Mathieu et Mathias (père de la Kahina) deviennent Maâti. Quant à Saint Paul (Paulus) apôtre de Jésus, son nom se perpétue en Ballouche et Belhouche. Aurélius devient Allouch et Ouenjelli, est une légère dérive de Evangelii autrement dit, l’homme qui enseigne les Saintes écritures. En ce qui concerne Guechtouli, il s’agit d’Augustin. Memmius est un nom tout aussi classique de la période romaine et survit sous sa forme actuelle de Mammech. Hammadouch, si commun à Béjaïa et à sa région vient de Amadeus (aimé de Dieu) prononcé amadéouch en latin. Claudius devient Gaddouch. Jerôme subsiste en Guerroum et Kherroum et Grégoire de l’époque byzantine, se retrouve après 2000 ans en Guergour et Benguergoura. Driouche dérive de Andréouch (Andréus). Certains patronymes opèrent des modifications, des « usures » jusqu’à faire perdre le sens original. C’est le cas de Abdiche qui est un nom composé. Il faut scinder les deux parties pour découvrir ave deouch autrement dit « salut à Dieu » supplantant progressivement le respectueux Ave César qui était le « bonjour » classique de l’époque antérieure à l’avènement du Christ en Afrique. Cette rébellion à l’autorité de César pouvait conduire à la peine de mort. L’arabisation d’un nom d’origine latine ou berbère se fait souvent dans le but de donner un sens et rendre compréhensible le patronyme. Nous citerons l’exemple du toponyme Oued Messelmoun qui dérive de oued Ousselmoun tirant son nom d’une écorce recherchée par les marchands phéniciens pour la teinture des cheveux et du lainage. En y ajoutant un « m » au préfixe, le toponyme prend un sens identifiable. Les divinités carthaginoises ont aussi laissé des monuments de traces dans les noms de famille : Amon et Baal se retrouvent dans Hammou, Hammani, Baali, Bellil. De cette époque punique, on hérite de Kert et Kirat, qui signifie la cité. Aussi, retrouve-t-on des Benkirat et Boukirat pour nommer le citadin. Ce qui n’a pas de lien avec El Kirat arabe équivalent au carat grec connu des bijoutiers en tant qu’unité de poids et mesure.


Les noms Toponymiques

Bon nombre de noms de famille sont tirés de noms de lieux (toponymie). Il se trouve que tous les noms de lieux, de villes et village, de cours d’eau, de vallées et de montagnes portent des noms berbères à quelques rares exceptions. En comparant la carte d’Algérie avec celle de l’Espagne, on constate ce paradoxe : la toponymie espagnole est nettement plus arabisée que celle d’Algérie. Parmi les synonymes de montagne en berbère, on a Adrar et Amour qui vont donner Ammouri, Amraoui, Drari et Bouzina, un pic des Aurès. Le Touat qui traverse le boulevard de la date au Sahara était une région convoitée par le passé, de par sa position stratégique sur la route du Soudan. Cette riche région a donné les Touati. Oued Draâ, dans le sud-ouest a donné les Draï tout comme Metidja a donné les Metidji. Tayebi désigne un originaire de Tayiba (la douce) qui est la cité de Médine, qualifiée ainsi par le Prophète (QSSSL) . Aggoun, Laggoun, (ne pas confondre avec le muet en arabe) sont également des toponymes qui désignent un relief. (Plateau surélevé, plateforme dominante comme la Table de Jugurtha dans la zone est des Aurès. La part de la faune et de la flore est tout aussi importante dans la formation des patronymes. Ouchen, (le chacal), Aflelou (papillon) Ouar (le lion). Kerrouche le chêne ainsi que l’une de ses variétés le zane, (déformation phonétique de dhane) recherché pour l’industrie des arcs et les flèches. Depuis la nuit des temps, le corail sert de support identificatoire ; c’est le prénom Boussad, typique de Grande Kabylie (voir encadré). Quant à Bahmane, bien que le même patronyme existe dans les contrées iraniennes, en Afrique du Nord, il désigne une racine médicinale aux propriétés stimulantes.


Sur la piste des Banou Hilal

Le milieu du XIe siècle de J. C. a été marqué par une fracture politique significative entre les Zirides du Kairouan sous le règne d’El Moezz et le calife fatimide du Caire. En guise de représailles, le calife d’Egypte El Moustançar Billah lance sur le Maghreb les turbulentes tribus Banou Hilal et Banou Souleym. Ces vagues humaines originaires de la péninsule arabique allaient modifier durablement et structurellement les fondements sociopolitiques du Maghreb, de la Cyrénaïque au Maroc. Ibn Khaldoun consacre à cet épisode une partie essentielle dans sa volumineuse Histoire des Berbères. Guerriers redoutables, ils étaient originaires de la région de Ghazouan près de Taïf et pratiquaient la transhumance d’hiver et d’été sur les confins de l’Irak et de la Syrie. Ils émigrent dans la Haute Égypte sur la rive orientale du Nil. Au premier choc contre l’armée d’El Moezz, les Canhadja furent défaits et l’Ifriqiya livrée au partage. Ces deux grandes tribus issues des Beni Amer tirent leur légitimité de leur appartenance aux Beni Saâd d’où est originaire Halima Essaâdya, la nourrice du Prophète (QSSSL). A ces deux souches se rattachent des fractions, des clans et des familles dans une structure pyramidale. Parmi ces fractions, il y a les Djachem, les Athbedj, les Zughba (nombreux à Ouargla), les Kholt, les Sofyane, les Hamyane les Riyah, les Rabiâ et les Addi. Plusieurs familles vont se former à partir d’une fraction. Ainsi, les Riyah se divisent en Merdaci, Banou Attyya, Kerfali, Zemmam, Dhyab, Dhahhak, Hymmier. De ces familles, des figures vont émerger. Ibnou Abil Ghaïth (celui qui annonce la pluie) occupe Tunis avec son clan et perpétue son nom sous la forme actuelle de Belghiche et Belghith. De ces nombreuses tribus, nous retiendrons des noms comme Assam, Ayad (dépositaires des clés de La Kaâba) Muqaddem, Dridi, Douadi, Taâllah, Allahoum, Saâdallah, Rezkallah, Difallah, Khelfellah, Ata’illah (Ataïlyya), Brahimi, Brahmia, Benbrahim, Kerfali, Benyagoub, Abid, Aounellah d’où sont issus les Aouni, Chaffaï, El Amri, Sellami, Sakhri, Saâdani, Saïdani, Ben Cherif, Yahlali, Benhelal. Ouled Metaref (Metref) Ouled Salah (Salhi) Ouled Menia, Kraïche, Reddad, Attaf, Ouled Daoud, Ouled Ghanem, Ouled Rebbab, Ouennadi, Arif, Ouled Zian, Ouled Choaïb, Saâdi , Selmi, Slaïmi, La liste n’est pas exhaustive. Jusqu’au bouleversement colonial, ces familles et ces clans ont vécu, des siècles durant, sous le mode de production pastoral et sont restés fidèles à une sensibilité littéraire très proche des classiques arabes des temps préislamiques que recèle la poésie bédouine, en particulier.

http://www.marocainsdalgerie.net

admin"SNP1975"

admin
Admin

L’estampille berbère

On dénombre deux formes constitutives des patronymes amazighs : maz et zagh. Il n’est pas exclu que le radical « zagh » soit relatif au teint de la peau et par conséquent à une forme de noblesse de sang. Le fondement maz va former une longue série de noms : Mazouni, Mazouna, Mazari, Mezghich, Mzali, Mezali, Mazi (Naït Mazi) Messis, Mezghenna et même Massinissa qui est un nom amazigh adapté au prononcé latin par les historiens Tite-Live (troisième décade) et Salluste (La guerre de Jugurtha). On retrouve dans Massinissa le radical maz qui peut laisser penser qu’il s’agirait à l’origine d’un nom proche de Mazghenni. Le débat reste ouvert. Ce préfixe se modifie dans les dialectes du Sud algérien pour devenir madh (Aïn Madhi). De même que le mot tamazight devient, chez les zénètes du sud, tamachek de même que l’oasis de Djanet est issue vraisemblablement de zénète. Avec le second radical zagh, on liste les Zaghbib, Benzaghou (berbère Masmouda), Zaâmoucha, (la finale moucha rappelle Moussa) Zaâmoum, Zaghrani, Sakrani, Bouzeghrane, Zerouali, Zaghidour, Zeggar, Zaccari (djebel Zeccar) Zouccal, Zerari, Zighi, Zeghbouche Zaghouane, Zaghloul (Djaghloul dans le parler zénète), Zeggaï, Izghen, Zeghni, Segni, Rezzag, Rezzoug, Rzighi etc. Les patronymes berbères ont conservé la nomination des origines tribales fondatrices répertoriées par Ibn Khaldoun : Zemmouri et Meskouri, Soumati, Merniz, Oulhaci sont des familles des N’fousa. Fetani, Mediouna, Maghili se rattachent au même ancêtre éponyme, Faten fils de Tamzit, selon Ibn Khaldoun. Mais il est fort probable que tamzit serait une contraction de tamazight. Les Semghouni, Zenati, Zouaoui, Meknassa, Foughali ont la même filiation berr. Dans la chaîne des Bernis, on retrouve les Canhadja, les Arouaba, les Djazouli, Ghoumari, Masmouda.


Les noms écorchés

A partir de 1871, l’administration coloniale a systématisé le registre de l’état civil. Ce travail correspond à la phase active de la colonisation avec l’arrivée des civils réfugiés d’Alsace et de Lorraine. C’était aussi le début des troubles en France avec la commune de Paris, les révoltes des Hananchas et le soulèvement dans les Babors à l’appel d’El Mokrani. Les années 1870 seront celles de la plus terrible famine qu’a connue l’Algérie avec une mortalité estimée à deux tiers de la population. Ce recensement avait donc pour objet d’organiser l’expropriation des terres « évacuées » de force par les Algériens. Il faut reconnaître que les erreurs de transcription n’ont pas été nombreuses.. Bien qu’ils soient rares, ces noms méritent une réhabilitation. Ainsi, Dzanouni est une transcription hasardeuse de Sahnouni qui désigne l’adepte de Sidi Sahnoun, Imam du Xe siècle. Il a été à l’origine de l’enracinement au Maghreb de la doctrine malékite. C’est à cet Imam que El Hadj M’hammed El Anka consacre sa fameuse pièce Sidi Sahnoun.


Les confréries et les tribus

Les nombreuses confréries religieuses ont été facteur de cohésion sociale à des moments précis de l’histoire. C’est ainsi que la Kadiriya, Chadiliya, Rahmaniya, Ammariya, Aïssaouiya, Hansalya ont donné Kadri, Chadli, Rahmani, Lammari, Aïssaoui, Hansali. Nous recensons aussi une multitude de noms qui font référence à une tribu de rattachement, Nemmemcha, Hrakta, Frarha, Dharissa, Zenata, Djeraoua. C’est pourquoi on retrouve dans la liste des patronymes les Nemchi, Harkati, Ferrah, Deriassa. Souibes est une déformation de Thabet (tribu des Kotama installée sur les hauteurs de Dellys). Dahou est une abréviation de Dahmane, dérivé de Abderrahmane. Les Dahou se rattachent à l’autorité spirituelle de Sidi Dahou Ben Dherfa dans les Beni Chougrane. On relève parfois des noms énigmatiques comme le cas de Baouya. Il s’agit de deux initiales « El Ba Ouel Ya », autrement dit « B.Y. » qui pourrait être « Ben Yamina » ou Ben Yagoub. Le mystère reste entier.


Débarquement français à Jijel

Le 21 juillet 1664, sous le règne de Louis XIV, une flotte française commandée par le duc de Beaufort débarque à Jijel en vue d’une implantation en concurrence avec les Espagnols qui occupent Oran. L’aventure tourne mal pour les marins français affaiblis par les fièvres, la malaria et les attaques incessantes des montagnards. Le 1er novembre de la même année, le corps expéditionnaire français est forcé de quitter la ville sous un déluge de feux de l’artillerie turque. La marine française abandonne sur les rivages des blessés, des malades et une quantité considérable de matériel de guerre. Ils étaient normands, picards, bretons, anglais, hollandais et maltais. Ils ont été adoptés en raison de leur savoir technique : charpentier, bourrelier, spécialiste des cordages, de la navigation. Soignés et nourris, ils passeront chez le coiffeur pour le rituel de la circoncision et s’intègrent dans la population. Leurs descendants se reconnaissent à leur type européen prononcé et leurs patronymes plus ou moins berbérisés ou arabisés. L’événement a eu des effets durables sur la génétique mais aussi sur les noms propres : Dupres, Oudin, Belle-Gueule, Beaufort, Bourbon qu’on devine, aujourd’hui, sous des patronymes parfaitement algérianisés.


Rachid Lourdjane (Article paru dans El Watan, Edition du 29 mars 2005)

publié par Zoundaï dans: Les Berbères
Ajouter un commentaire Commentaire(1) Trackback(0) Recommander



Catégories




  • L'origine des Kutama (2)
  • Textes d'auteurs du Moyen-Age (4)
  • Les Tribus issues des Ketama (2)
  • La généalogie des Kutama (1)
  • Les cartes (1)
  • Les Berbères (12)
  • L'ex-caïdat des Babors, ses tribus, fractions et f (6)
  • La tribu des Beni Zoundaï (4)
  • Les Kabylies (7)
  • Bibliographie (1)



Archives




  • Juin 2008
  • Mai 2008
  • Avril 2008
  • Mars 2008
  • Février 2008
  • Janvier 2008
  • Décembre 2007
  • Novembre 2007
  • Octobre 2007
  • Septembre 2007
  • Août 2007
  • Juillet 2007
  • Juin 2007
  • Mai 2007
  • Avril 2007
  • Mars 2007



Articles récents




  • Un art martial berbère
  • L'Europe des Berbères
  • Les Berbères en Amérique
  • Origine des mots de la langue algérienne
  • La langue algérienne
  • Les Patronymes en Algérie
  • L' origine des Kutama
  • L'origine des Berbères
  • Fractions, sous-fractions et familles
  • Ethnonymie et toponymie du pays Ketama
  • Liste complète



http://www.marocainsdalgerie.net

admin"SNP1975"

admin
Admin

S N P ça veut dire Sans Nom Patronymique.
[
Nos camarades de classe Algériens nous appelaient Son Nom Perdu ou Sans Nom Propre.

L'histoire de sans non patronymique remonte à la presence française en Algerie.
En 1860 la France à imposé l'Etat civile en Algerie pour les indigenes.
C'est à dire les arabes algeriens , le Marocains et tunisiens d'Algerie plus les juifs natifs de ce pays.
Pour tous les marocains le nom SNP à été imposé collectivement à toutes la communauté.
Les arabes algeriens du sud avaient une attitude hostile à l'adoption d'un nom. cette categorie on lui a imposé le snp.
L'ordonnance de 1945 qui octroit la nationalité française a tous les etrangers nés en algerie. Surtout les maltais ; espagnols et italiens.
Cette ordonnance concernait aussi les marocains d'algerie. Puisqu'ils sont nés comme etrangers en Algerie.
Pauvre communauté elle ne savait meme pas qu'elle etait concernée par cette mesure ne naturalisation.
Religion oblige on ne peut pas à cette epoque opté pour la cité française sans etre taxé par les indigenes soit de m'tourné ou tchico.
Les temps ont changé

http://www.marocainsdalgerie.net

Contenu sponsorisé



Revenir en haut  Message [Page 1 sur 1]

Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum