Les résultats des cultures alternatives :
Dans le contexte de la lutte contre le trafic illicite de drogues, il a été décidé au niveau international, une stratégie pour la promotion des cultures alternatives, expérimentée dans des pays comme la Thaïlande en 1969, la Turquie en 1970, le Pérou en 1981 qui consiste à inciter et encourager les populations à s’orienter vers des cultures légales qui assurent des revenus équivalents ou même dépassant ceux de cultures non-légales auxquelles ils s’adonnent. Comme résultat, le rapport de l’Organe international de contrôle des stupéfiants en 2005, a montré l’inefficacité de cette stratégie en se basant sur les expérimentations menées dans les montagnes du Liban et au Maroc dans le Rif, ce qui a amené les tenants de cette stratégie à la changer pour une autre stratégie plus globale dans le cadre d’un développement alternatif qui lui-même rencontre beaucoup d’obstacles.
En plus des cultures alternatives, le développement alternatif se base sur une approche globale qui privilégie les grands chantiers avec la création des infrastructures en vue d’insérer ces populations et de les intégrer dans le tissu économique national. Mais confrontée à la réalité, cette politique a montré son inefficacité, laissant les populations dans le même état de confusion et sans perspectives, ce qui a déçu la communauté internationale. Le rapport de l’Organe international de contrôle des stupéfiants a mis en évidence que la cause de l’échec réside dans le fossé entre l’intérêt de l’Etat et les attentes des populations.
La dimension culturelle du cannabis
Les systèmes culturels de la société sont composés d'éléments matériels et immatériels considérés comme indissociables; le patrimoine culturel constitue la dimension immatérielle tandis que celle relative à l’aspect matériel favorise les conditions d’expression du développement durable. Le patrimoine culturel doit donc être reconnu et enrichi afin qu'il puisse devenir une véritable réalité. Ainsi, toute personne, toute agence investie dans les défis que pose le développement, reconnaît que ces objectifs matériels ne peuvent être atteints par des moyens uniquement matériels. En effet, dans l’aire géographique de la culture du cannabis, les paysans manifestent, lors des cérémonies coutumières, par exemple le moussem de Tidghin, l’incarnation du caractère sacré de cette plante, ce qui montre son importance dans les traditions locales. Cette dimension culturelle, voire spirituelle est partie intégrante des coutumes de cette région. Il est donc impératif d’en tenir compte, dans le cadre d’une stratégie de développement globale.
Réflexion sur la légalisation du Cannabis pour développer le Rif (Nord du Maroc)
Actuellement au Maroc, le débat sur la légalisation du cannabis s’impose et devient une réalité. Cette situation informelle avec les risques encourus en termes d’environnement, d’impact sur les volets social, économique et politique n’est plus une solution réaliste et des nouvelles approches pour la culture du cannabis au Maroc doivent être mises en place pour différentes raisons notamment :
· l’échec constaté de la politique de la lutte contre le trafic illicite des drogues, et les cultures alternatives dans les régions historiques.
· les atouts éventuels de la culture:
En terme de spécificité de la région, produit de terroir,
En terme de patrimoine culturel de la région,
En terme de la sauvegarde de la biodiversité naturelle,
En terme de diversification de la valorisation de cette ressource,
En terme d’amélioration des revenus des ruraux du Rif,
En terme de développement du tourisme rural,
En terme de retombées financières.
La nécessité d’une vraie stratégie de légalisation du cannabis pour des raisons de:
Reconnaissance : le cadre illicite a toujours été source de problèmes,
Perspective d’élaborer des programmes de recherches pour s’orienter vers d’autres usages thérapeutiques, pharmaceutiques et industriels en particuliers,
Recherche de projets alternatifs en associant les paysans.
Optimiser le rôle de la coopération internationale dans ce domaine,
Assainissement de l’environnement global de la région qui subit l’emprise du trafic de la drogue sur le plan social, politique, économique et culturel.
De nombreuses définitions «opérationnelles» du développement durable sont proposées mais aucune ne peut satisfaire simultanément les besoins légitimes de tous les individus, et des peuples qui cherchent à le mettre en oeuvre. Cependant, les dimensions sociales, économiques, culturelles et environnementales du développement restent toujours les fondements essentiels qui permettent de l'atteindre.
Il vise trois objectifs :
1.Maintenir l'intégrité de l'environnement, c'est-à-dire intégrer la préoccupation du maintien de la diversité des espèces et de l'ensemble des écosystèmes naturels,
2.Améliorer l'équité sociale, c'est-à-dire permettre la satisfaction des besoins essentiels de la communauté humaine en améliorant leurs qualités de vie, en respectant leurs droits et libertés et en les faisant participer au processus de prise de décision,
3. Améliorer l'efficacité économique, c'est-à-dire favoriser une gestion optimale des ressources afin de permettre la satisfaction des besoins des communautés humaines.
Ainsi, la légalisation du cannabis comme étant la seule solution pratique pour les régions historiques de la culture de cette plante, permettra de pallier à la difficulté de mettre en places des projets alternatifs. Les défis de la bonne gouvernance, de la sauvegarde de la diversité culturelle et de la biodiversité, et du développement démocratique ne peuvent être abordés en ordre dispersé. Ils doivent être appréhendés dans un cadre unique, légal et légitime pour atteindre les objectifs du développement durable et faire face aux enjeux qu’impose la mondialisation en terme de libéralisation des échanges commerciaux, sécurité alimentaire, changement climatique, et poids du coût des énergies et du processus de démocratisation. Pour cela, des instruments et moyens sont à mettre en œuvre pour atteindre le développement auquel tous les Rifains aspirent. Il s’agit:
· des instruments à caractère institutionnel et juridique,
· la loi de la montagne pour éviter l’extension de la culture avec la délimitation de l’espace forestier en associant les vrais représentants de la population,
· l’écartement de la logique de répression,
· l’engagement et mesures sur la baisse de la demande, surtout étrangère, en ce produit,
· le caractère ancestral et social de la culture du Cannabis du Rif,
· l’élaboration des programmes nécessaires à la recherche,
· la mobilisation des fonds et des populations pour l’adhésion à la stratégie,
· la programmation et le suivi des actions retenues,
· le développement intégré du Rif (désenclavement, urbanisation, remembrement des terres, l’organisation des producteurs de cette culture).
Conclusion
Le développement intégré du Rif est un problème complexe et nécessite une vraie stratégie pour que les populations adhèrent fortement et ne soient plus aussi durement affectées par la seule approche de l’éradication du Cannabis. C’est un problème historique, culturel et favorisé par les conditions difficiles du terrain (pauvreté, relief accidenté, etc.) et la marginalisation.
En effet, les solutions doivent être recherchées, en prenant en considération les volets historique, et culturel, dans la légalisation de la culture à travers la mise en place d’une stratégie globale et moyennant un certain nombre d’actions, de mesures et de règlements permettant de dépasser les blocages existants et ouvrir le dialogue avec l’ensemble des concernés.
Aussi, la stratégie en question devra prendre préalablement en considération lors de son élaboration certaines actions comme la tenue d’un séminaire international au Maroc sur le Cannabis, la politique de l’émigration et salariale à mettre en place à l’égard des travailleurs et paysans, la légalisation des dérivés du cannabis en Europe, la rationalisation de l’espace géographique de la culture du cannabis, l’élaboration de la loi sur la montagne, et en fin le projet sociétal voulu pour le Rif.
Source : CMA