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Le maraboutisme comme moyen d'influence politique du makhzen en Algérie

4 participants

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admin"SNP1975"

admin
Admin

[url]Nous allons commencer à partir d'aujourd'hui la publication des textes historiques concernants les rappotrs algéro-marocains.[/url]

L'ALGERIE ET LES CHORFA D'OUEZZANE A LA FIN DU XIXe SIÈCLE

Roger Le Tourneau


L'attitude des chorfa d'Ouezzane à la fin du xix* siècle et leurs relations avec la France ont été étudiées à maintes reprises et notamment par Georges Drague * et Jean-Louis Miège 2, mais d'un point de vue essentiellement marocain.

Or l'Algérie comptait un nombre important d'adeptes de la confrérie d'Ouezzane, les Taïbiya, comme on les appelait à Alger, particulièrement nombreux dans le département d'Oran. De plus la maison d'Ouezzane exerçait son influence sur les régions de la Saoura et du Touat sur lesquelles la France et le gouvernement de l'Algérie avaient des visées.

Il m'a donc paru intéressant d'examiner les relations des autorités françaises d'Algérie et des chérifs pendant le dernier tiers du xix* siècle en se servant des documents conservés aux Archives d'Outre- Mer d'Aix-en-Provence 8.

Il semble que jusqu'en 1872, l'Algérie n'ait pratiquement pas entretenu de rapports avec la Maison d'Ouezzane, bien que le nombre des affiliés à la confrérie fût estimé à 16 000 environ 4. On sait ce que valent ces estimations fort approximatives; il n'en reste pas moins vrai que les Taïbiya n'étaient pas négligeables. Mais leur grand maître, Sidi el-Hajj Abdeslam, qui avait pris la tête de la confrérie en 1850, avait commencé par se montrer hostile aux Européens ou plutôt aux Chrétiens. Eien d'étonnant donc si le gouvernement général de l'Algérie n'entretenait pas de rapports avec lui.

1. G. Drague, Esquisse d'histoire religieuse du Maroc, Paris, s.d., p. 227-250.

2. J.L. Miège, Le Maroc et l'Europe, t. IV, Paris, 1963, p. 47-66 et passim.

3. Archives d'Outre-Mer, séries 30 H B, 9 et 10).

4. Ce chiffre est également fourni par L. Rinn, in Marabouts et Khouan, Alger, 1884 et provient certainement du service des affaires indigènes dont Rinn était le chef.

En 1872, un serviteur du chérif périt assassiné et son maître imputa ce meurtre au gouvernement chérifien de Sidi Mohammed b. Abderrahmane, à tort ou à raison. Peut-être eut-il peur pour lui- même; il estima en tout cas qu'il pourrait être préférable pour lui de résider hors du Maroc. Il avait d'ailleurs plusieurs raisons de songer à une solution de ce genre. Depuis quelques années déjà, il avait souvent résidé à Tanger et s'était épris de modernisme, un modernisme qui était peu de mise dans le Maroc des années 1870. D'autre part, il était en train de conclure un mariage avec miss Emily Keene 5, une Anglaise de bonne famille qui vivait comme demoiselle de compagnie chez des Américains de Tanger, et cette jeune femme exigeait de pouvoir continuer à pratiquer sa religion : autant dire que cette union qui eut lieu en janvier 1873, risquait d'être fort mal vue des Marocains et même des membres de la confrérie.

En conséquence le chérif s'adressa à la fois au ministre de France à Tanger, Tissot, et au général Osmont, commandant la division d'Oran, pour leur faire connaître son éventuel projet de s'installer à Marseille ou en Algérie. En transmettant cette demande surprenante à l'amiral de Gueydon, gouverneur général, le général Osmont marqua sa désapprobation 6, car il considérait que le chérif ne faisait qu'employer un moyen de chantage vis-à-vis du Makhzen et que la France ne pouvait y gagner que des ennuis. Au cas où, par impossible, le gouvernement français engagerait des négociations, ajoutait le général, il faudrait que le chérif quitte le Maroc avec la plus grande discrétion et il ne saurait être question de le transporter sur un navire de guerre.

L'amiral renchérit, comme le ministère des Affaires étrangères lui demandait son sentiment, et répondit que la France ne devait nullement se mêler de la querelle du Chérif et du Sultan, et d'ailleurs il exprimait son complet scepticisme sur une politique de collaboration avec les marabouts et chefs de confrérie7. Il soulevait aussi une question financière : les frais de séjour à Marseille ou en Algérie ne pouvaient pas, selon lui, être prélevés sur les crédits de l'Algérie.

Il est probable que le chérif changea d'avis, puisqu'à partir du

5. Shareefa of Wazan, My life storg, London, s.d.

6. Télégramme du 14 janvier 1873.

7. Cette attitude de l'amiral est signalée d'une manière générale par Ch.-R. Ageron, Les Musulmans algériens et la France (1871-1879), Paris, 1968, t. 1, p. 301.


à suivre

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Dernière édition par admin le Ven 27 Mar - 14:23, édité 2 fois

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admin"SNP1975"

admin
Admin

/algérie et les chorta d'ouessane 155

mois d'avril 1873, on ne trouve plus trace de cette affaire dans les archives du gouvernement général de l'Algérie.

Mais le chérif avait ainsi pris contact avec les autorités d'Algérie et essaya d'en profiter. Il obtint en effet pour son second fils Mohammed qu'il semblait considérer alors comme son héritier présomptif, l'autorisation de faire en Algérie, particulièrement en Oranie, des tournées de visite auprès des adeptes de la confrérie (ziyara). Au cours de ces tournées, le chérif apportait à ses ouailles des secours spirituels fort appréciés et recevait en échange des cadeaux qui venaient grossir les revenus de la Maison d'Ouezzane.

Le chérif s'adressa aussi au ministre de France à Tanger pour qu'il obtînt du gouverneur Chanzy la gracieuse cession de 100 cartouches de fusil Chassepot pour la milice d'Ouezzane (juin 1874). Ces menus services ne pouvaient qu'inciter les chérif s à user en faveur de la France de leur influence sur leurs adeptes d'Oranie.

Mais au début de 1876, les relations prirent un tour nouveau, car el-Hajj Abdeslam offrit ou accepta de s'entremettre afin d'éloigner de la frontière algérienne les Ouled Sidi Cheikh qui s'étaient réfugiés en territoire marocain à la suite de la première révolte de cette tribu de 1864 à 1871. Il avait obtenu du sultan Moulay el-Hasan l'assurance qu'ordre serait donné à ces rebelles de s'installer à l'Ouest de Fès, donc très loin de la frontière 8. Le chérif arriva à Oran le 18 février 1876 et partit pour le Sud, porteur d'une lettre d'introduction de Moulay el-Hasan qui prenait nettement position en faveur des demandes françaises. Il avait en même' temps adressé au général commandant la division d'Oran trois chevaux (un pour lui-même, un pour le préfet d'Oran et un pour le gouverneur général) qui mirent les autorités algériennes dans un grand embarras à plusieurs points de vue. La « mission » du chérif n'eut qu'un succès momentané et il quitta l'Algérie très mécontent parce que le gouverneur général ne lui avait pas fourni les moyens de voyager en France, comme il le souhaitait.

Son mécontentement ne dura pas, puisque le ministre des affaires étrangères consulta peu après le gouverneur général sur une proposition du chérif : celui-ci se déclarait disposé à renoncer à ses tournées et collectes en Algérie, à condition qu'on lui assurât une rente

8. On trouve une allusion à cette négociation dans le livre déjà cité de Ch.-R. Ageron, p. 64.

à suivre


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oranaisfier

oranaisfier

Monsieur admin bonsoir,

Selon votre avis, est-ce que le maraboutisme et la sorcellerie ont le même lien ?

Les Marocains sont connus grands spécialistes de la sorcellerie dans tous les genres ( voyance, divinations etc...)

admin"SNP1975"

admin
Admin

Non mon ami
Il n'ya aucun lien entre le maraboutisme et la sorcellerie.
Le premier est un mouvement idéologique qui a pour vocation le prosélytisme. Quoi qu'il est devenu un instrument de manipulation par le colonialisme.
Géneralement les maraboust ont une génealogie cherifienne.

En vérifiant mon passeport marocain un douanier syrien m'a fait cette remarque,:" Vous les marocains vous avez une grande réputation dans la pratique de la sorcellerie"
Je n'ai pas branché. Le monsieur persiste dans son questionnement.
Alors je lui ai dit qu'il faut etre intelligent pour pratiquer ce métier .
Il était enchanté de ma réponse.



Dernière édition par admin le Dim 29 Mar - 18:43, édité 1 fois

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oranaisfier

oranaisfier

Mais Monsieur l'Admin, les Marocains sont aussi intelligents, comme tous les autres peuples. Mais êtes-vous d'accord que les Marocains sont des grands spécialistes de la sorcellerie? Parait-il, seuls les juifs les surpassent dans ce domaine, est-ce vrai ?

Sincères salutations !

scherifi



- faut pas exagerer!!!

clairefontaine1963

clairefontaine1963

Mais Monsieur l'Admin, les Marocains sont aussi
intelligents, comme tous les autres peuples. Mais êtes-vous d'accord
que les Marocains sont des grands spécialistes de la sorcellerie?
Parait-il, seuls les juifs les surpassent dans ce domaine, est-ce vrai ?

bonjour monsieur l'oranais:

permettez moi de répondre moi aussi à cette interrogation un peu particulière, nous sommes, nous les Marocains, un peuple très ouvert à la connaissance et nous sommes toujours très interessés par toutes les nouvelles technologies, et notre expérience nous a permis de constater qu'il est plus facile de s'informer en appuyant sur les boutons des télécommandes qui nous relient au monde extérieur, alors, moi, pour ma part, je trouve plus facile d'aller travailler comme tout le monde et d'allumer ma radio dans ma voiture et d'allumer ma télé ou mon ordi plûtot, que de passer des heures à genoux en incantations de sorcelleries pour obtenir ce qui nous fait plaisir, bon, d'accord! c'est mon choix, mais d'après mes connaissances, je ne connais personne qui fait cela non plus, ni juifs, ni marocains, nous ne sommes plus au moyen âge!!! Un jour, quelqu'un m'a demandé si nous avions des voitures au Maroc, je lui ai répondu que nous roulions tous en chameaux! à question idiote, réponse idiote!!! Nous les marocains, on sait depuis longtemps que la sorcellerie est la science qui n'ai comprise que par les Algériens!!!! Nous malheureusement, nous ne sommes pas assez intelligent pour pratiquer!!!! Lorsque j'étais enfant, à Clairfontaine en Algérie, je connaissais deux vieilles femmes algériennes qui faisaient de la sorcélerie, une qui s'appellait Aïcha Algazana et Houaria Algazana au Douar Marocain, en face la Pinède, alors, dans mon souvenir, la sorcellerie, c'est pas un truc pour nous.

oranaisfier

oranaisfier

Clairefontaine1963 a dit ... Nous les marocains, on sait depuis longtemps que la sorcellerie est la science qui n'ai comprise que par les Algériens... une qui s'appellait Aïcha Algazana et Houaria Algazana au Douar Marocain,...la sorcellerie, c'est pas un truc pour nous "

Monsieur clairefontaine1963, vos propos me font rire, et n'ont pas besoin d'une réponse de ma part.


oranaisfier

oranaisfier

Bonjour clairefontaine1963
Vous avez je continue toujours a rire et a me demander ce que faisez Houaria et Aicha "el gazanates" au Douar Marocains comme vous l'aviez précisez où habitaient des Marocains comme l'appellation l'indique.
Pouvez vous m'aider, de toutes les façons j'ai une, ou plutot deux hypotèses.

Bonne journée

NB: Je vous conseille de lire " magie et sorcellerie au Maroc" livre écrit par le Docteur marocain Akhmisse Mustapha, Editité par Benimed en 1985.

admin"SNP1975"

admin
Admin

Moi aussi j'ai une hypothése sur ce sujet.
Alors j'attends que tu nous fais part de ton point de vue et moi je le ferai aprés toi l'ami.


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clairefontaine1963

clairefontaine1963

La réponse est dans la question!!!! édité en 1985, mon cher Oranais, comme je vous le disais, nous sommes en 2009 et le Marocains est tourné vers l'avenir. La sorcellerie est l'apanage du monde entier, il n'est pas réservé qu'aux marocain, si vous aviez à faire à un sorcier berrichon, vous tourneriez 7 fois vos doigts avant d'écrire, et la sorcellerie vaudou, c'est pas marocain non plus.
la sorcellerie a toujours existé aucun peuple n'ignore la sorcellerie, même le prophète Mohamed, (SW) a parlé de ça , la bible fait référence à la sorcellerie etc...d âge suffisament avancé pour être respecté dans leur savoir.

Pour répondre, nous les marocains, on accepte des algériens dans le douar marocain, cela n'est pas exeptionnel, elles étaient bien algérienne. sans embiguité!!!! ne cherchez pas dans mes propos autre chose, je suis anti idiotie, mon racisme ne concerne que la bêtise et le gouvernement algérien qui nous a expulsé sans raison et le régime marocain qui n'a pas été à la hauteur. j'ai perdu ma mère à la suite de cette expulsion, et qui peut me dire quelque chose? mes grand prents sont enterrés à Ain El Turk (à Sidi Bouhameur)mes grands père étaient auprès des algériens pendant la guerre, comme beaucoup d'autre, mais, je vais conclure que malgré l'expulsion, malgré la perte de nos biens, malgré la perte des êtres chers, nous, les marocains, nous avons su retomber sur nos pieds et si nous réclamons justice c'est par respect pour nos grands parents et parents
.

oranaisfier

oranaisfier

Mon cher clairefontaine1963

Quand j’ai lu votre message, j’ai conclu que vous voulez noyer le poisson dans l’eau, vous mélangez tout, politique, magie, sorcellerie, expulsion, vaudou, nationalisme, racisme… vous voyez en moi l’anti marocain ou celui qui dénigre le Maroc que j’aime d’ailleurs de tout mon cœur.

Vous vous contredisez, d’un coté vous dites que le Maroc est moderne et n’a rien a voir avec la magie, et d’un autre coté vous dites que la sorcellerie est l’apanage du monde entier.

Une mise au point de moi s’impose :

Montrez moi une seule phrase ou un seul mot de moi qui dénigre le Maroc et les Marocains, en vous rappelons que la 2ème épouse de mon grand père paternel est marocaine, toujours en vie que je rend visite au moins 1 fois par semaine, donc de par cette union j’ai des oncles et des tantes marocains.

La sorcellerie existe depuis les temps anciens, vous dites que le Prophète Mohamed (QSVL) en parle, moi je vous que c’est Dieu qui parle de la sorcellerie dans le Saint Coran.

Je vous rappelle que même dans les pays dits modernes, les cabinets de voyance, magie noire, désenvoûtement etc…éxistent et d'autres poussent comme des champignons, il n’y a qu’à voir cela dans les divers placards publicitaires.Donc qui a dit que la sorcellerie était ll’apanage des Marocains, moi j’avais posé une question à l’Administrateur du forum sur ce sujet, et c’est vous qui avez répondu à sa place d’une façon ironique, oui je dis bien ironique.

Encore une fois, ne parlez pas sur ce topic, du gouvernement algérien qui aurait expulsé les marocains, un topic existe sur ce sujet, car n’oubliez pas que le gouvernement marocain a fait aussi très mal a ses propres sujets marocains, sans que j’oublie que le gouvernement algérien a fait aussi du tort aux algériens. Un topic existe aussi sur l’expulsion des algériens et de la spoliation de leurs terres par l’état Marocain. Mais ce coté ne vous intéresse guère.

Vous parlez de l’hospitalité marocaine, vous ne m’apprendrez rien, je la connais, elle est légendaire, comme celle de l’hospitalité algérienne.

Vous parlez de vos grands parents qui ont combattu auprès des Algériens, je m’incline auprès de leur mémoire, mais vous avez oubliez que des algériens ont aussi combattu avec des marocains contre le colonialisme français ?

Pouvez-vous trouver une seule personne qui n’est pas pour la justice ? Évidemment nous somme tous pour la justice, mais l’homme est égoïste, heureusement qu’une justice existe, celle divine.

Amitié et salutations

clairefontaine1963

clairefontaine1963

Bonsoir,
je crois que nous avons un problème de communication, je ne dis pas que vous êtes anti-marocains, pour la sorcellerie, je dis simplement que c'est pas un sujet qui est primordiale, moi, je dis bien que que c'est vieux comme le monde mais pour moi c'est Hram.

La question que vous posiez prête à confusion et elle est ambiguë
Je n'oublie rien en ce qui les tords des différents gouvernements et j'ai la fâcheuse tendance à désobéir aux ordres, d'autant plus que j'ai été victimes moi aussi comme beaucoup d'autres, nous sommes des pions pour les gouvernements qui nous ont abandonnés à l'époque et je leur en veux beaucoup pour cela, pour moi, et pour les milliers d'autres, algériens et marocains ont été manipulé pour être mieux séparés, mais bon, je ne vous apprends rien,.
salutations

admin"SNP1975"

admin
Admin

de 20 à 25 000 F. Le ministre précisait en même temps qu'il se trouvait dans l'impossibilité d'assumer cette dépense. Le gouverneur général répondit que, comme il n'avait presque jamais refusé au chérif l'autorisation d'organiser de pareilles tournées et qu'il ne disposait pas des crédits nécessaires, il ne lui était pas possible de donner suite à cette offre d'Ouezzane (mai 1878).

Au printemps de 1881 et en liaison avec le massacre de la mission Flatters et les prodromes de la campagne militaire française en Tunisie, l'agitation reprit dans le Sud-Oranais, menée par le marabout Bou Amama. Derechef, le chérif d'Ouezzane entra en scène et proposa au ministre de France à Tanger de s'emparer de Bou Amama et de Si Slimane, le chef des Ouled Sidi Cheikh installés au Maroc, pour les faire interner au Maroc occidental, avec l'approbation de Moulay el-Hasan. Malgré les réserves du chargé d'affaires de Tanger, il tenta d'accomplir cette mission pendant le dernier trimestre de 1881, mais s'en revint bredouille, car Bou Amama ne se laissa pas prendre dans ses rets. A la suite de cette affaire, l'épouse anglaise du chérif, la - chérifa, comme elle se nommait elle-même, intervint pour la première fois, pour tâcher d'obtenir du gouverneur général une nomination en faveur d'un protégé d'Ouezzane, Mohammed Bouchikhi, qui avait porté aide au chérif dans sa vaine tentative auprès de Si Slimane et de Bou Amama. La nomination ne fut pas faite et la chérifa se contenta de demander une indemnité pour les dépenses qu'avait faites Bouchikhi en l'occurrence.

Tout cela, on le voit, n'allait pas bien loin et, en toute occasion l'initiative était venue d'Ouezzane, soit que le chérif prît directement contact avec les autorités algériennes, soit qu'il passât par le ministre de France à Tanger. Quant aux autorités algériennes, elles s'étaient montrées réservées, par scepticisme, par crainte d'empiéter sur le domaine du ministère des Affaires étrangères et surtout, semble-t-il, parce qu'elles ne cherchaient pas à renforcer l'influence du chérif sur ses adeptes d'Algérie.

Puis, le 23 février 1884, le journal algérien El Mobacher annonçait que, conformément aux accords de Madrid sur la protection9, la France venait d'accorder sa protection au chérif d'Ouezzane, el-Hajj 'Abdeslam. Déjà lors de son voyage à Alger en 1876, le chérif avait laissé entendre au gouverneur général Chanzy qu'il souhaitait

9. Sur la convention de Madrid, on trouvera bibliographie et renseignements in J.L. Miêge, op. cit., t. 111, p. 277-292.

acquérir la nationalité ou à tout le moins la protection française. Le ministre de France à Tanger, Tissot, mis au courant, avait alors fait des réserves sur l'une et l'autre solution et Chanzy s'était rallié à son avis.

Mais le nouveau et bouillant ministre de France, Ordega, n'entendait pas se borner à une politique de prudence et passait à l'attaque. Il consulta cependant avant d'agir le gouverneur général Tirman sur l'opportunité, du point de vue de l'Algérie, de la mesure qu'il envisageait. Le gouverneur général, sans se dissimuler les inconvénients qu'elle pouvait comporter, acquiesça, en raison du nombre des Taïbiya en Algérie. Ordega l'informa le 20 janvier 1884 que la mesure était officiellement décidée et, un peu plus tard, que le représentant du sultan à Tanger l'avait acceptée du bout des lèvres. Il pensait que ce succès français aurait un grand retentissement en Algérie.

En tous cas la décision du gouvernement français eut pour premier résultat de faire considérablement baisser le • prestige d'Ouezzane au Maroc. Aussi, lorsqu'en 1885, le gouverneur général Tirman refusa au Chérif l'autorisation d'organiser une tournée en Algérie10, la situation financière de ce dernier devint-elle difficile. La seule façon pour lui d'y faire face était de rcueillir des fonds en Algérie. Féraud, successeur d'Ordéga à Tanger, exposa l'affaire au ministre des Affaires étrangères; celui-ci s'entremit auprès du gouverneur général qui rapporta la mesure l'interdiction qu'il avait prise.

Les liens d'Alger et d'Ouezzane étaient maintenant d'une autre nature : en 1884 le chérif avait obtenu que l'un de ses fils, Moulay Thami, fût pris comme boursier au lycée d'Alger; en 1885, ce fut le tour du fils aîné de la chérifa qui fut admis, lui aussi, dans le même établissement

Ainsi la qualité de protégé français accordée au chérif avait sérieusement modifié ses ' relations avec les autorités algériennes : désormais il obtenait des faveurs spéciales pour lui et les siens.

Néanmoins les choses demeurèrent en l'état jusqu'à un voyage que fit el-Hajj Abdeslam en Algérie à la fin de 1891 et au début de 1892. Les documents que j'ai pu consulter ne me permettent pas de dire si l'initiative appartint au chérif ou au gouvernement général de l'Algérie. Toujours est-il qu'el-Hajj Abdeslam alla jusqu'au Gou-

10. Le gouvernement général redoutait alors beaucoup l'action c panisla- mique» des confréries : V. Ch.-R. Ageron, op. cit., t. 1, p. 310-311.

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admin"SNP1975"

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rara où il avait des adeptes et sur lequel la France avait l'intention d'étendre son influence. Les résultats immédiats du voyage furent minces, vraisemblablement parce que l'action du chérif en faveur de la France fut contrecarrée par celle des Ouled Sidi Cheikh qui y étaient hostiles. Mais il faut croire aussi que le gouverneur général Cambon mettait beaucoup d'espoir dans l'action du chérif au Gourara et au Touat, puisqu'il le reçut à Alger en février 1892 et conclut avec lui un arrangement très précis.

Par cette convention, le chérif s'engageait par écrit à ne nommer aucun moqaddem11 des Taïbiya en Algérie sans l'agrément du gouverneur général. Celui-ci de son côté promettait son « concours pour l'entretien de l'ordre en Algérie ». Enfin le chérif s'engageait verbalement à obtenir de son épouse anglaise qu'elle n'acceptât pas pour elle et ses deux fils la protection britannique qui lui était proposée par le ministre de Grande-Bretagne à Tanger 12.

D'autre part une négociation financière à trois entre la Légation de France à Tanger, le ministère des Affaires étrangères et le gouverneur général Cambon avait abouti à la promesse au chérif de subsides importants se montant à 44 000 francs, dont 20 000 pour lui ou son successeur et 6 000 à chacun de ses quatre autres fils. La moitié de cette somme devait être versée par l'Algérie sur ses fonds secrets, dans la mesure où serait maintenue la dotation du gouvernement général en fonds secrets.

En somme le chérif d'Ouezzane ne se bornait plus à être un protégé de la France, il en devenait un stipendié.

Sa santé lui donnait de graves inquiétudes. Aussi rédigea-t-il le 31 juillet 1892 un testament par lequel il instituait son fils aîné, Moulay Larbi comme son successeur. Celui-ci avait fait un voyage en Algérie en juillet de la même année ; il avait rendu visite au gouverneur général auquel il avait donné l'assurance qu'il suivrait à l'égard de l'Algérie et de la France la même politique que son père.

Le chérif el-Hajj Abdeslam mourut le jeudi 29 septembre à 4 heures et demie du matin. Aussitôt, Moulay Larbi écrivit au gouverneur général de l'Algérie pour lui annoncer cette triste nouvelle et lui renouveler en même temps l'assurance de ses bons sentiments.

11. Chef d'une section de la confrérie.

12. Sur la politique anglaise au Maroc à cette époque, v. J.L. Miège, op. cit., t. IV, p. 26.

Peu après, il lui fit parvenir deux tapis berbères et deux bracelets en souvenir de son père. Le nouveau « règne » commençait donc sous les meilleurs auspices. Quelques jours plus tard, le ministre de France à Tanger, d'Aubigny, écrivait au ministre des Affaires étrangères à Paris pour lui exprimer l'opinion que Moulay Larbi devait bénéficier de la protection française, comme feu son père, et qu'il serait aisé d'expliquer cette succession héréditaire dans la protection, que ne prévoyait pas la convention de Madrid, en excipant de l'influence exercée en Algérie par le grand chérif d'Ouezzane. Toutefois, après la mort d'el-Hajj Abdeslam, la subvention annuelle prévue en 1892 fut ramenée en janvier 1893 à un total de 30 000 francs décomposé comme suit : 12 000 à Moulay Larbi, 6 000 à son frère cadet Mohammed, 3 000 à chacun des deux fils de la chérifa, 3 600 aux gardiens du tombeau du fondateur de l'ordre à Ouezzane et 2 400 mis en réserve pour la distribution de secours éventuels. Le gouvernement général de l'Algérie s'engageait à verser la moitié de la somme totale.

De plus, le XIXe corps d'armée fournit gracieusement au chérif en mai 1893 huit caisses de cartouches pour les besoins de sa milce. Le chérif avait rendu visite à Moulay el-Hasan en février 1893 et avait été bien reçu ; le sultan ne semblait donc pas avoir pris ombrage de la protection française accordée à Moulay Larbi.

Le gouvernement général entendait profiter des bonnes relations ainsi établies avec la Maison d'Ouezzane, car il pensait avoir besoin de celle-ci pour sa politique saharienne. Il obtint qu'un parent du Chérif, el-Hajj Ibrahim, accomplît un voyage et un séjour au Gourara de mai à août 1894, en compagnie d'un affidé d'Ouezzane, Mohammed b. Abderrahmane el-Eulj el Marrakouchi qui n'était autre qu'un fils du renégat français Desaulty, lequel avait connu de beaux jours sous le règne de Moulay Abderrahmane 13.

Ce personnage avait été élevé en Marocain et ne savait pas un mot de français, lorsque Moulay el-Hasan demanda qu'il fût admis dans l'arme française du génie pour y acquérir les connaissances techniques qui avaient valu à son père d'être l'un des favoris de la cour chérifienne à partir de 1845 jusqu'à sa mort survenue en 1879. Le jeune Mohammed fut affecté au 2* régiment du génie à Mont-

13. Sur ce personnage, voir R. Le Tourneau, Fès avant le protectorat, Paris, 1949, p. 181 et M. Emerit, Saulty Abd el-Rahmane au service du Maroc, in Revue Africaine, XCIV (3* et 4» tr. 1950), p. 429.

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