ENQUÊTE. Explosion sexuelle au Maroc
--------------------------------------------------------------------------------
Reportage: TelQuel
Entre pratiques érotiques “no limit” et méthodes de séduction plus “cash”, femmes et hommes bravent de plus en plus les interdits et les tabous…
Corniche de Casablanca, 2 heures du matin dans une boîte de nuit branchée. La musique techno défonce les cavités sonores et les corps échauffés se déhanchent et se frôlent sur la piste de danse. Naïma, 28 ans, célibataire et nouvelle venue dans le monde de la nuit, est attablée au bar, avec ses copines, des fêtardes invétérées. De l’autre côté, un jeune homme, la trentaine, lui fait signe et l’invite à se joindre à lui. Il commence par lui offrir une coupe de champagne, puis une deuxième, histoire de faire connaissance. Naïma est heureuse, son partenaire lui plaît bien. A 4 heures du matin, elle est convaincue que cet homme est pour elle et le suit chez lui. Après une fin de nuit agitée et brouillonne, dans le plaisir d’un moment suspendu vécu à deux, elle s’habille et rentre chez elle. Ils ne s’échangent même pas leurs numéros de téléphone ; c’est à peine si elle sait ce qu’il fait dans la vie. Elle ne risque pas de le revoir et en est triste, un peu. “C’est juste un one night stand”, la rassure sa meilleure amie, qui a le chic pour trouver les bons mots avant de poser la bonne question : “Tu as pris ton pied, au moins ?”
On s’affranchit, on (se) découvre
Naïma illustre bien cette liberté nouvelle, tout à fait dans l’air du temps. Une liberté de corps, d’esprit, et de dialogue, qui choque encore mais que l’on remarque de plus en plus. “Dans les villes, certaines femmes de 20-30 ans, ayant fait des études et côtoyé des garçons, commencent à revendiquer leur liberté d’agir, d’être aussi demandeuses que les hommes, de faire le premier pas, de choisir leurs partenaires, et de leur faire part de leurs désirs”, explique le sexologue Aboubakr Harakat. On pourrait penser que la nouvelle Moudawana apporte sa contribution au changement, puisque elle a accordé aux femmes plus de droits et leur a permis d’avoir voix au chapitre. Mais si le Code de la famille de 2003 a révolutionné les mœurs, ce n’est pas encore l’égalité entre les deux sexes, loin de là.
Si certaines femmes ont appris à mieux s’assumer en tant qu’individus, à demander plus facilement le divorce, ou encore à se libérer du joug religieux et moral, c’est aussi grâce à la nouvelle réalité sociale et économique. Selon Fouzia Assouli, présidente de la Ligue démocratique des droits de la femme, “ce n’est pas tant la Moudawana qui a délivré les femmes, mais plutôt d’autres facteurs, comme le recul de l’âge du mariage, ou le fait qu’elles font de plus en plus d’études supérieures”.
Aujourd’hui, l’âge moyen pour convoler au Maroc est de 30 ans. Femmes et hommes font des études plus longues, et le mariage coûte cher, très cher. “Avec mon salaire, je ne peux pas assumer un foyer, car qui dit mariage dit enfants. Et puis, coucher avec une seule femme, ce n’est pas vraiment mon truc”, atteste Ghali, 32 ans,Casablancais et cadre supérieur heureux de vivre sa vie sans entraves, tant matérielles que physiques. Si le mariage se désacralise petit à petit, l’attrait et le besoin de découvertes avant de franchir le grand pas se profilent, eux, de plus en plus. Et qui dit découverte, dit découverte de son propre corps, du plaisir, du frisson sacré.
On surfe, on plane, on fait des rencontres
Bien entendu, l’appel des sens est stimulé par le monde vu de l’extérieur. D’abord le cinéma et la musique, ensuite la télévision et les chaînes satellitaires, en passant par le téléphone… et Internet. Bien sûr. Des sites comme Facebook, Meetic, ou encore MSN, sont autant d’espaces publics d’échange à l’échelle mondiale, des laboratoires ouverts à toutes les expériences. Pourvu que l’on soit connecté(e). Plus besoin de mettre le nez dehors, dans une rue forcément hostile à toute union non légitimée par un acte de mariage. Le Web crée des salons de discussion, des forums, et surtout la possibilité de fixer des rendez-vous en toute discrétion. “Quand j’ai besoin d’affection, les nuits de grande solitude, je surfe sur des sites de rencontres. Je ne vais pas souvent jusqu’à la prise de rendez-vous mais si cela arrive, le tout se fait dans la plus grande discrétion, parfois le soir même”, raconte Majdouline, 40 ans, divorcée deux fois. Les hommes y trouvent aussi leur compte : “Sur Internet, souvent, il suffit de répondre à une petite annonce ou de s’inscrire sur un site de rencontres pour dénicher quelques rendez-vous intimes, notamment parmi les femmes les plus âgés” explique Karim, célibataire r’bati et toujours à la recherche d’un bon plan.
Les quadras triomphants, cadres supérieurs, médecins, entrepreneurs, indépendants, souvent surbookés et célibataires, sont en général les plus à même d’assumer une sexualité libre et épanouie. Qu’ils comblent selon les possibilités du moment. “Avant, les rencontres se faisaient sur les terrasses, on se voyait de loin et on fantasmait. Après, on est passé au téléphone. Maintenant, Internet allie la voix et l’image et raccourcit les distances. Car la plupart utilisent la Toile comme un moyen d’obtenir un rendez-vous, le plus souvent à finalité sexuelle”, confirme Aboubakr Harakat.
Dessous chic, idées chocs
Mais le bon plan n’est pas toujours sur la Toile. Le sexe, physique ou simplement “mental”, se consomme et se “conçoit” partout. Comme dans ces espaces publics, où les hommes ont rarement accès : les salons d’esthétique, ou les arrières-boutiques de lingerie. Dans ces endroits, entre la cire qui dégouline sur les jambes, et la vendeuse de dessous dits “hot”, le sexe est à l’honneur. “La dernière fois que je suis allée acheter de la lingerie, la vendeuse m’a prise entre deux portes et m’a convaincue, à force de détails érotiques, que l’ensemble très coûteux que j’essayais était idéal pour faire tourner la tête d’un homme”, se remémore Soraya, 31 ans, célibataire casablancaise, convaincue sur le coup que cet attirail en dentelle finirait bien par lui servir un jour ou l’autre.
Idem pour les séances d’épilation dont les formules se déclinent selon le programme de la soirée. “Le salon d’esthétique est un espace où les femmes se relâchent, se laissent aller, partagent leurs expériences, surtout dans des villes fermées”, explique Nisrine, propriétaire d’un salon à Meknès.
En dehors du strict besoin de se faire belle et désirable, le sexe est forcément au cœur des discussions pour ces dames à moitié nues, l’esprit occupé par la nuit à venir, le rendez-vous promis. “Même les esthéticiennes te poussent à avoir ce genre de discussions, et t’incitent ainsi, très souvent, à prendre la formule complète. C’est ce qui m’arrive tout le temps”, témoigne Meriem, 29 ans, en couple, avec un sourire un peu gêné.
SUITE...
--------------------------------------------------------------------------------
Reportage: TelQuel
Entre pratiques érotiques “no limit” et méthodes de séduction plus “cash”, femmes et hommes bravent de plus en plus les interdits et les tabous…
Corniche de Casablanca, 2 heures du matin dans une boîte de nuit branchée. La musique techno défonce les cavités sonores et les corps échauffés se déhanchent et se frôlent sur la piste de danse. Naïma, 28 ans, célibataire et nouvelle venue dans le monde de la nuit, est attablée au bar, avec ses copines, des fêtardes invétérées. De l’autre côté, un jeune homme, la trentaine, lui fait signe et l’invite à se joindre à lui. Il commence par lui offrir une coupe de champagne, puis une deuxième, histoire de faire connaissance. Naïma est heureuse, son partenaire lui plaît bien. A 4 heures du matin, elle est convaincue que cet homme est pour elle et le suit chez lui. Après une fin de nuit agitée et brouillonne, dans le plaisir d’un moment suspendu vécu à deux, elle s’habille et rentre chez elle. Ils ne s’échangent même pas leurs numéros de téléphone ; c’est à peine si elle sait ce qu’il fait dans la vie. Elle ne risque pas de le revoir et en est triste, un peu. “C’est juste un one night stand”, la rassure sa meilleure amie, qui a le chic pour trouver les bons mots avant de poser la bonne question : “Tu as pris ton pied, au moins ?”
On s’affranchit, on (se) découvre
Naïma illustre bien cette liberté nouvelle, tout à fait dans l’air du temps. Une liberté de corps, d’esprit, et de dialogue, qui choque encore mais que l’on remarque de plus en plus. “Dans les villes, certaines femmes de 20-30 ans, ayant fait des études et côtoyé des garçons, commencent à revendiquer leur liberté d’agir, d’être aussi demandeuses que les hommes, de faire le premier pas, de choisir leurs partenaires, et de leur faire part de leurs désirs”, explique le sexologue Aboubakr Harakat. On pourrait penser que la nouvelle Moudawana apporte sa contribution au changement, puisque elle a accordé aux femmes plus de droits et leur a permis d’avoir voix au chapitre. Mais si le Code de la famille de 2003 a révolutionné les mœurs, ce n’est pas encore l’égalité entre les deux sexes, loin de là.
Si certaines femmes ont appris à mieux s’assumer en tant qu’individus, à demander plus facilement le divorce, ou encore à se libérer du joug religieux et moral, c’est aussi grâce à la nouvelle réalité sociale et économique. Selon Fouzia Assouli, présidente de la Ligue démocratique des droits de la femme, “ce n’est pas tant la Moudawana qui a délivré les femmes, mais plutôt d’autres facteurs, comme le recul de l’âge du mariage, ou le fait qu’elles font de plus en plus d’études supérieures”.
Aujourd’hui, l’âge moyen pour convoler au Maroc est de 30 ans. Femmes et hommes font des études plus longues, et le mariage coûte cher, très cher. “Avec mon salaire, je ne peux pas assumer un foyer, car qui dit mariage dit enfants. Et puis, coucher avec une seule femme, ce n’est pas vraiment mon truc”, atteste Ghali, 32 ans,Casablancais et cadre supérieur heureux de vivre sa vie sans entraves, tant matérielles que physiques. Si le mariage se désacralise petit à petit, l’attrait et le besoin de découvertes avant de franchir le grand pas se profilent, eux, de plus en plus. Et qui dit découverte, dit découverte de son propre corps, du plaisir, du frisson sacré.
On surfe, on plane, on fait des rencontres
Bien entendu, l’appel des sens est stimulé par le monde vu de l’extérieur. D’abord le cinéma et la musique, ensuite la télévision et les chaînes satellitaires, en passant par le téléphone… et Internet. Bien sûr. Des sites comme Facebook, Meetic, ou encore MSN, sont autant d’espaces publics d’échange à l’échelle mondiale, des laboratoires ouverts à toutes les expériences. Pourvu que l’on soit connecté(e). Plus besoin de mettre le nez dehors, dans une rue forcément hostile à toute union non légitimée par un acte de mariage. Le Web crée des salons de discussion, des forums, et surtout la possibilité de fixer des rendez-vous en toute discrétion. “Quand j’ai besoin d’affection, les nuits de grande solitude, je surfe sur des sites de rencontres. Je ne vais pas souvent jusqu’à la prise de rendez-vous mais si cela arrive, le tout se fait dans la plus grande discrétion, parfois le soir même”, raconte Majdouline, 40 ans, divorcée deux fois. Les hommes y trouvent aussi leur compte : “Sur Internet, souvent, il suffit de répondre à une petite annonce ou de s’inscrire sur un site de rencontres pour dénicher quelques rendez-vous intimes, notamment parmi les femmes les plus âgés” explique Karim, célibataire r’bati et toujours à la recherche d’un bon plan.
Les quadras triomphants, cadres supérieurs, médecins, entrepreneurs, indépendants, souvent surbookés et célibataires, sont en général les plus à même d’assumer une sexualité libre et épanouie. Qu’ils comblent selon les possibilités du moment. “Avant, les rencontres se faisaient sur les terrasses, on se voyait de loin et on fantasmait. Après, on est passé au téléphone. Maintenant, Internet allie la voix et l’image et raccourcit les distances. Car la plupart utilisent la Toile comme un moyen d’obtenir un rendez-vous, le plus souvent à finalité sexuelle”, confirme Aboubakr Harakat.
Dessous chic, idées chocs
Mais le bon plan n’est pas toujours sur la Toile. Le sexe, physique ou simplement “mental”, se consomme et se “conçoit” partout. Comme dans ces espaces publics, où les hommes ont rarement accès : les salons d’esthétique, ou les arrières-boutiques de lingerie. Dans ces endroits, entre la cire qui dégouline sur les jambes, et la vendeuse de dessous dits “hot”, le sexe est à l’honneur. “La dernière fois que je suis allée acheter de la lingerie, la vendeuse m’a prise entre deux portes et m’a convaincue, à force de détails érotiques, que l’ensemble très coûteux que j’essayais était idéal pour faire tourner la tête d’un homme”, se remémore Soraya, 31 ans, célibataire casablancaise, convaincue sur le coup que cet attirail en dentelle finirait bien par lui servir un jour ou l’autre.
Idem pour les séances d’épilation dont les formules se déclinent selon le programme de la soirée. “Le salon d’esthétique est un espace où les femmes se relâchent, se laissent aller, partagent leurs expériences, surtout dans des villes fermées”, explique Nisrine, propriétaire d’un salon à Meknès.
En dehors du strict besoin de se faire belle et désirable, le sexe est forcément au cœur des discussions pour ces dames à moitié nues, l’esprit occupé par la nuit à venir, le rendez-vous promis. “Même les esthéticiennes te poussent à avoir ce genre de discussions, et t’incitent ainsi, très souvent, à prendre la formule complète. C’est ce qui m’arrive tout le temps”, témoigne Meriem, 29 ans, en couple, avec un sourire un peu gêné.
SUITE...