Maroc-prostitution: Chair à bordel
SABEL DA COSTA
Les jours de trois Marocaines sont comptés dans une prison de Téhéran où elles ont été condamnées à mort. L’information est parue dans la presse il y a tout juste une semaine mais ne semble susciter aucun remou. Une erreur de parcours tout au plus… Ce n’est pas en Iran qu’elles auraient dû finir mais à Dubaï. Elles font partie de ces jeunes «artistes» et «employées d’hôtel» reconverties en professionnelles du sexe. Un topo clair comme de l’eau de roche et qui finit très souvent en queue de poisson. Toutes ces filles disposent de garants ou passeurs qui les prennent paraît-il en charge une fois sur place, s’occupent de leurs papiers et leurs trouvent des clients fortunés. Les trois jeunes filles ont ainsi atterri sur l’île de Kich (une île iranienne) le temps pour leur garant de renouveler leurs visas. Manque de pot comme on dit, c’est avec la police qu’elles avaient rendez-vous. Ayant déjà eu affaire aux forces de l’ordre pour prostitution, elles ont écopécette fois ci de la peine capitale (la loi est formelle pour les récidivistes) et devront être pendues dans quelques jours. Des officiels marocains ont été dépêchés sur place afin de négocier leur libération, seulement vu le contexte diplomatique actuel, prêcher dans le désert serait peut-être plus fructueux ! Séduites par le faste et l’argent facile, de plus en plus de jeunes marocaines s’embarquent pour les Emirats afin d’y exercer le plus vieux métier du monde… En tant que musulmanes elles seraient paraît-il beaucoup plus prisées que les Asiatiques et autres Slaves. Les sanctions édictées par la législation schizo-émirienne ne les dissuadent hélas pas plus que cela. Difficile de suivre leurs traces car une fois à bon port nos artistes ne se précipitent pas vraiment sur leurs services consulaires. Discrétion oblige !
Quitte ou double
A 27 ans, Merième a échappé au pire. Lorsqu’une de ses amies lui présenta en décembre dernier le chargé de recrutement d’un centre de remise en forme situé aux Emirats, cette jeune monitrice de sport pensait être tombée sur un plan clean et très bien rémunéré. Vite fait bien fait, elle se voit proposer un contrat en béton pour donner des cours d’aérobic et de danse dans le centre en question. «Il m’avait proposé un salaire net de 10000Dh et la prise en charge de tous mes besoins une fois sur place, le calcul est vite fait. Pas de loyer, ni de nourriture à payer, j’allais pouvoir réaliser des économies et aider ma famille avec tout cet argent. Ce qui acheva de me décider c’est que mes frais de voyage allaient également être pris en charge. Tout était a priori réglo». Lorsqu’elle arriva sur place, tout semblait normal hormis le fait que son employeur lui retira son passeport prétextant des formalités administratives. «J’ai obtempéré. Lorsque j’ai voulu le récupéré une semaine après, on m’a répondu que ce n’était pas possible pour le moment. J’ai passé mes premières journées à donner quelques cours de fitness et de danse orientale, le soir je rentrais dans un appartement que je partageais avec 7 autres Marocaines, des monitrices que je ne voyais pas beaucoup dans la salle... Un jour j’ai été demandée par la femme du propriétaire. Celle-ci avait entendu dire que mes cours de danse orientale étaient très appréciés des clientes et voulait que je lui fasse une démonstration. Je me suis exécutée de bon cœur à la suite de quoi elle me proposa de venir animer à plein temps les soirées privées qu’elle organisait fréquemment. Elle en parlait comme d’une banalité, des fêtes pour ses amis tout au plus… Je n’étais pas du tout convaincue, elle m’invita donc à passer chez elle vers 23 h ce soir là pour mieux comprendre le sens de son offre et la chance qu’elle me donnait de gagner cette fois l’équivalent de 30000 DH par mois. J’arrivais donc comme convenu chez mes employeurs, un peu angoissée mais n’ayant pas vraiment le choix. Ce que j’y vis n’avait rien à voir avec une fête entre amis, loin de là… Je reconnus certaines de mes collocatrices dansant sur des tables vêtues de tenues osées, d’autres étaient en train de réaliser des strip teases. Pour l’heure je ne devais rien faire hormis regarder et apprendre. J’ai vu des choses obscènes se dérouler sous mes yeux. Je n’étais pas préparée à ça. Bien sûr je me doutais bien que ces soirées privées n’étaient pas des concours de poésie, mais tout de même pas à ce point là. Je commençais à comprendre pourquoi mes collègues travaillaient si peu dans la journée. Je ne voulais absolument pas tremper dans cette sauce, pour moi ce serait juste mes séances d’aérobic à 10000 DH le mois avec une conscience tranquille. Quand j’ai expliqué la chose à l’épouse du patron, j’ai senti qu’elle était mécontente mais n’a rien laissé transparaître. Seulement, à partir de là, tout le monde s’est donné le mot pour me rendre la vie difficile. Mes affaires disparaissaient, mes supérieurs me parlaient de plus en plus mal, les filles avec qui je vivais me cherchaient sans arrêt des problèmes. Pour qui je me prenais pour refuser de faire comme tout le monde ? Je commençais à prêter plus attention à leur mode de vie, j’avais quelques soupçons au début, qui se sont avérés par la suite. Bon nombre d’entre elles se droguaient, un vice qui leur avait été inculqué par celui qui m’avait emmenée ici. Complètement dépendantes, elles se prêtaient plus facilement au jeu, surtout si cela pouvait leur garantir quelques doses supplémentaires. Les prestations ne se limitaient pas à danser, chacune d’elles avait des clients réguliers (les invités et amis des propriétaires) chez qui elles devaient se rendre en dehors des soirées. Je voulais quitter Dubaï, mais j’étais liée par un contrat et toute brèche dans l’engagement m’exposait à des poursuites judiciaires. J’étais à mon premier mois et mes employeurs avaient commencé à me mettre la pression. Mes parents ne savaient rien de ce qui se passait. Je n’osais pas aller vers les autorités. Comme je n’avais aucune preuve, c’était ma parole contre celles des patrons qui, eux, en revanche disposaient d’un contrat en bonne et due forme. Ils pouvaient raconter ce qu’ils voulaient sur moi à la police... J’ai fini par mettre ma sœur dans la confidence, elle seule pouvait m’aider à sortir de là. Pour rompre mon contrat il fallait une raison valable. Je résolus de me faire passer pour malade au moyen d’un certificat médical portant une ancienne date et signé d’un praticien marocain. Ma sœur essaya auprès de plusieurs médecins de Rabat, mais en vain. Dès quel leur soumettait le cas, ils se rétractaient craignant l’embrouille. Elle a tout de même fini par dénicher la perle rare et m’envoyer le fameux papier. Je l’ai présenté au manager. Ils devaient bien se résoudre à me laisser partir puisque la lettre attestait que j’étais épileptique et que je risquais de convulser à n’importe qu’elle moment. Personne n’y croyait mais me demander une contre expertise était trop risqué pour eux. On m’a rendu mon passeport et j’ai pu payer le billet de retour avec mon salaire. Jusqu’à cette minute mes parents ne savent pas pourquoi je suis revenue aussi vite. J’ai prétexté le mal du pays et ils ont marché. A aucun moment je n’ai pensé que travailler là-bas aurait pu m’entraîner dans les bas-fonds de la prostitution, certaines ont moins de chance, d’autres encore savent très bien ce qu’elles vont chercher aux Emirats et reviennent tout sourire chez elles, en faisant miroiter monts et merveilles. C’est tout un monde, mais c’est surtout le commencement de l’enfer». Aujourd’hui Merième exerce dans une petite salle à Rabat. Elle essaie de se reconstruire et garde ses souvenirs pour elle. «Les gens seraient pressés de se faire des idées à mon sujet, alors que Dieu seul sait que j’y suis allée de bonne foi». Que penser réellement… ?
SABEL DA COSTA
Les jours de trois Marocaines sont comptés dans une prison de Téhéran où elles ont été condamnées à mort. L’information est parue dans la presse il y a tout juste une semaine mais ne semble susciter aucun remou. Une erreur de parcours tout au plus… Ce n’est pas en Iran qu’elles auraient dû finir mais à Dubaï. Elles font partie de ces jeunes «artistes» et «employées d’hôtel» reconverties en professionnelles du sexe. Un topo clair comme de l’eau de roche et qui finit très souvent en queue de poisson. Toutes ces filles disposent de garants ou passeurs qui les prennent paraît-il en charge une fois sur place, s’occupent de leurs papiers et leurs trouvent des clients fortunés. Les trois jeunes filles ont ainsi atterri sur l’île de Kich (une île iranienne) le temps pour leur garant de renouveler leurs visas. Manque de pot comme on dit, c’est avec la police qu’elles avaient rendez-vous. Ayant déjà eu affaire aux forces de l’ordre pour prostitution, elles ont écopécette fois ci de la peine capitale (la loi est formelle pour les récidivistes) et devront être pendues dans quelques jours. Des officiels marocains ont été dépêchés sur place afin de négocier leur libération, seulement vu le contexte diplomatique actuel, prêcher dans le désert serait peut-être plus fructueux ! Séduites par le faste et l’argent facile, de plus en plus de jeunes marocaines s’embarquent pour les Emirats afin d’y exercer le plus vieux métier du monde… En tant que musulmanes elles seraient paraît-il beaucoup plus prisées que les Asiatiques et autres Slaves. Les sanctions édictées par la législation schizo-émirienne ne les dissuadent hélas pas plus que cela. Difficile de suivre leurs traces car une fois à bon port nos artistes ne se précipitent pas vraiment sur leurs services consulaires. Discrétion oblige !
Quitte ou double
A 27 ans, Merième a échappé au pire. Lorsqu’une de ses amies lui présenta en décembre dernier le chargé de recrutement d’un centre de remise en forme situé aux Emirats, cette jeune monitrice de sport pensait être tombée sur un plan clean et très bien rémunéré. Vite fait bien fait, elle se voit proposer un contrat en béton pour donner des cours d’aérobic et de danse dans le centre en question. «Il m’avait proposé un salaire net de 10000Dh et la prise en charge de tous mes besoins une fois sur place, le calcul est vite fait. Pas de loyer, ni de nourriture à payer, j’allais pouvoir réaliser des économies et aider ma famille avec tout cet argent. Ce qui acheva de me décider c’est que mes frais de voyage allaient également être pris en charge. Tout était a priori réglo». Lorsqu’elle arriva sur place, tout semblait normal hormis le fait que son employeur lui retira son passeport prétextant des formalités administratives. «J’ai obtempéré. Lorsque j’ai voulu le récupéré une semaine après, on m’a répondu que ce n’était pas possible pour le moment. J’ai passé mes premières journées à donner quelques cours de fitness et de danse orientale, le soir je rentrais dans un appartement que je partageais avec 7 autres Marocaines, des monitrices que je ne voyais pas beaucoup dans la salle... Un jour j’ai été demandée par la femme du propriétaire. Celle-ci avait entendu dire que mes cours de danse orientale étaient très appréciés des clientes et voulait que je lui fasse une démonstration. Je me suis exécutée de bon cœur à la suite de quoi elle me proposa de venir animer à plein temps les soirées privées qu’elle organisait fréquemment. Elle en parlait comme d’une banalité, des fêtes pour ses amis tout au plus… Je n’étais pas du tout convaincue, elle m’invita donc à passer chez elle vers 23 h ce soir là pour mieux comprendre le sens de son offre et la chance qu’elle me donnait de gagner cette fois l’équivalent de 30000 DH par mois. J’arrivais donc comme convenu chez mes employeurs, un peu angoissée mais n’ayant pas vraiment le choix. Ce que j’y vis n’avait rien à voir avec une fête entre amis, loin de là… Je reconnus certaines de mes collocatrices dansant sur des tables vêtues de tenues osées, d’autres étaient en train de réaliser des strip teases. Pour l’heure je ne devais rien faire hormis regarder et apprendre. J’ai vu des choses obscènes se dérouler sous mes yeux. Je n’étais pas préparée à ça. Bien sûr je me doutais bien que ces soirées privées n’étaient pas des concours de poésie, mais tout de même pas à ce point là. Je commençais à comprendre pourquoi mes collègues travaillaient si peu dans la journée. Je ne voulais absolument pas tremper dans cette sauce, pour moi ce serait juste mes séances d’aérobic à 10000 DH le mois avec une conscience tranquille. Quand j’ai expliqué la chose à l’épouse du patron, j’ai senti qu’elle était mécontente mais n’a rien laissé transparaître. Seulement, à partir de là, tout le monde s’est donné le mot pour me rendre la vie difficile. Mes affaires disparaissaient, mes supérieurs me parlaient de plus en plus mal, les filles avec qui je vivais me cherchaient sans arrêt des problèmes. Pour qui je me prenais pour refuser de faire comme tout le monde ? Je commençais à prêter plus attention à leur mode de vie, j’avais quelques soupçons au début, qui se sont avérés par la suite. Bon nombre d’entre elles se droguaient, un vice qui leur avait été inculqué par celui qui m’avait emmenée ici. Complètement dépendantes, elles se prêtaient plus facilement au jeu, surtout si cela pouvait leur garantir quelques doses supplémentaires. Les prestations ne se limitaient pas à danser, chacune d’elles avait des clients réguliers (les invités et amis des propriétaires) chez qui elles devaient se rendre en dehors des soirées. Je voulais quitter Dubaï, mais j’étais liée par un contrat et toute brèche dans l’engagement m’exposait à des poursuites judiciaires. J’étais à mon premier mois et mes employeurs avaient commencé à me mettre la pression. Mes parents ne savaient rien de ce qui se passait. Je n’osais pas aller vers les autorités. Comme je n’avais aucune preuve, c’était ma parole contre celles des patrons qui, eux, en revanche disposaient d’un contrat en bonne et due forme. Ils pouvaient raconter ce qu’ils voulaient sur moi à la police... J’ai fini par mettre ma sœur dans la confidence, elle seule pouvait m’aider à sortir de là. Pour rompre mon contrat il fallait une raison valable. Je résolus de me faire passer pour malade au moyen d’un certificat médical portant une ancienne date et signé d’un praticien marocain. Ma sœur essaya auprès de plusieurs médecins de Rabat, mais en vain. Dès quel leur soumettait le cas, ils se rétractaient craignant l’embrouille. Elle a tout de même fini par dénicher la perle rare et m’envoyer le fameux papier. Je l’ai présenté au manager. Ils devaient bien se résoudre à me laisser partir puisque la lettre attestait que j’étais épileptique et que je risquais de convulser à n’importe qu’elle moment. Personne n’y croyait mais me demander une contre expertise était trop risqué pour eux. On m’a rendu mon passeport et j’ai pu payer le billet de retour avec mon salaire. Jusqu’à cette minute mes parents ne savent pas pourquoi je suis revenue aussi vite. J’ai prétexté le mal du pays et ils ont marché. A aucun moment je n’ai pensé que travailler là-bas aurait pu m’entraîner dans les bas-fonds de la prostitution, certaines ont moins de chance, d’autres encore savent très bien ce qu’elles vont chercher aux Emirats et reviennent tout sourire chez elles, en faisant miroiter monts et merveilles. C’est tout un monde, mais c’est surtout le commencement de l’enfer». Aujourd’hui Merième exerce dans une petite salle à Rabat. Elle essaie de se reconstruire et garde ses souvenirs pour elle. «Les gens seraient pressés de se faire des idées à mon sujet, alors que Dieu seul sait que j’y suis allée de bonne foi». Que penser réellement… ?
Dernière édition par admin le Lun 31 Aoû - 17:27, édité 6 fois