[center]LA BATAILLE DE MEDJEZ-AMAR[/center]
EL HADJ AHMED
Il est étrange que l'histoire de l'occupation de l'Algérie ne fasse pas état, en République Démocratique Algérienne, de l'occupation turc. Il est dommage que le genre truculent ne soit plus à la mode dans la littérature Jamais héros du romantisme échevelé n'a été plus féroce et plus noir que El-Hadj-Ahmed bey de Constantine.
C'est un de ces monstres abominables comme le despotisme sans frein en a produit quelques-uns sous l'ardent soleil d'Afrique. La moindre contrariété le mettait en fureur, il tirait son poignard et frappait. Alors la vue du sang le rendait fou ; sa face de tigre devenait si effrayante que tout le monde s'écartait terrifié. Il ne reconnaissait pas d'autres règles que son désir. Quand on lui signalait une belle fille, il la faisait enlever, appartînt-elle aux plus grandes familles de la province. Il en réunit ainsi trois cent quatre-vingt cinq, en y comprenant les négresses qui faisaient le service du harem. Un jour, ayant remarqué une enfant de dix ans qui puisait de l'eau à une fontaine, il l'emmena ; puis comme la petite, inquiète et intimidée, pleurait, il se fâcha et la poignarda pour la faire taire. Une de ses favorites ayant cueilli en sa présence une orange dans son jardin, il lui fit clouer la main contre l'arbre. Un homme auquel il voulait marier sa fille s'étant permis d'aimer une autre femme, il fit jeter cette malheureuse dans le ravin du Rummel. Une de. ses femmes s'étant amusée à singer ses manières, il la surprit, et lui fit coudre la bouche pour avoir osé fumer dans sa pipe. Deux négresses ayant été accusées de souhaiter sa mort, il les découpa en morceaux de sa propre main .Il aimait le sang, et il ne se passait guère de jour où il ne fit procéder à une exécution. Cette bête fauve avait ses heures de jovialité. Pour s'assurer de la fidélité de ses femmes, il inventa des serrures à sonnerie. Il faisait monter ses ministres, ou quelque vieux général à barbe blanche, dans la voiture d'enfant de sa fille, que traînaient quatre chiens, et riait de leurs contorsions. Un jour, il se donna la fête d'une chasse aux lions dans ses jardins. Il en fit amener deux, lâcha sur eux des dogues qui furent mis en pièces et, bien abrité au premier étage, il les abattit à coups de fusil. La France fut pleine de bienveillance pour cet être aimable, elle lui fit une pension à Alger, et, quand une de ses femmes fuyait l'enfer de son harem, nos agents la lui ramenaient, probablement en vertu de la loi qui porte qu'il n'y a point d'esclaves sur le territoire français. Ahmed, ayant fait à la Mecque le pèlerinage après lequel il eut droit au surnom de El-Hadj, revint émerveillé des palais qu'il avait vus en Egypte, et résolut d'en avoir un semblable. C'était vers l'année 1825. Quand cet homme terrible avait un désir, toutes les forces qu'un despotisme sans limite lui mettait dans la main étaient employées à le satisfaire. Il ruina sa province pour avoir un palais. II commença par se faire céder, de gré ou de force, l'emplacement nécessaire. Une vieille femme tenait à sa demeure et ne voulait pas s'en aller. Le monstrueux farceur en fit murer les portes et les fenêtres. On passait des vivres par un trou à la malheureuse. An bout d'un mois de claustration, elle s'avoua vaincue et partit. Ahmed s'empara de la sorte de vingt-huit maisons, de quatre boutiques et d'un atelier. Il fit venir les plus-célèbres ouvriers indigènes qui se mirent immédiatement à l'ouvrage. Un marchand génois lui envoya d'Italie des colonnes de marbre, et se fit donner en échange du blé que les indigènes durent fournir. Ces colonnes arrivées à Bône, il n'y avait pas de routes pour les amener à Constantine. Alors la population fut réquisitionnée pour le transport. On passait des perches sous une colonne, et vingt ou trente porteurs la chargeaient sur leurs épaules. Les poutres et les planches furent apportées de la même façon de la Kabylie et de l'Aurès. Puis, les matériaux ainsi amassés se trouvant insuffisants, Ahmed eut une idée auprès de laquelle pâlissent les exactions les plus fameuses de Verres : il mit tout simplement la province au pillage. Sculptures, serrureries, menuiseries, marbres, colonnes, faïences, montants de porte, portes de cèdre, chambranles de fenêtre, il fit tout saisir. Des nuées de démolisseurs s'abattaient sur les édifices les plus remarquables, et des caravanes en apportaient les débris aux architectes du palais.
Quand la maison est Unie, dit le proverbe arabe, la mort arrive. Cette fois, ce fut l'ennemi. A peine son palais était-il achevé, qu'Ahmed en fut chassé par les Français. Cet effort colossal, où les ressources de tout un peuple furent mises en jeu pour satisfaire la fantaisie d'un homme, a produit un édifice vaste sans être grandiose, et original sans être beau. On y sent partout l'insuffisance des artistes qui l'ont élevé, et le procédé barbare qui en a réuni les matériaux.
Tel était l'homme que les Français allaient combattre
Ahmed, bey de Constantine El Hadj Ahmed, fils de l'ancien Khalifa Mohammed, et petit-fils d'Ahmed bey El Kolli ; avait été nommé par le dey d'Alger Hosseïn, bey de Constantine, en août 1826. C'était un homme énergique et cruel, né dans cette ville, Koulour'li (koulougli)d'origine, (père turc mère indigène)et âgé alors d'une trentaine d'années. Il y avait rempli, sous de précédents beys, les fonctions importantes de Khalifa, sorte de premier ministre, et s'était créé d'implacables inimitiés; cela, joint à quelques actes véritablement irréfléchis, avait motivé son internement à Blida, d'où le dey venait de le tirer.
Ahmed Bey considère, le camp de Medjez-Amar, à quelques dizaines de lieues de sa capitale, comme une provocation personnelle. Il est certain d'une victoire facile, il clame la djihad et sur ce point, il sait qu'il fait l'unanimité, même les kabyles hostiles de nature aux arabes, répondent qu'ils acceptent pour faire la guerre aux français de se joindre aux cavaliers du Bey. Ahmed sait également par ses informateurs, que les Français ont réarmé et reformé des bataillons de Turcs, qu'ils ont aussi incorporé des unités indigènes venant des tribus proches du camp de Guelma et de la région de Bône. L'armée a observé des regroupements et des mouvements de cavalerie arabe autour de Constantine. Danremont averti par ses indicateurs n'ignore pas que Ahmed Bey réglera cette affaire par la guerre. Les escarmouches sévères, les courtes batailles dans la plaine de Guelma, ou les embuscades sur la piste qui mène de Medjez-Amar à Ras-el-Akba lui ont permis d'éprouver la valeurs des formations Françaises et de ses alliés. Ahmed est un Hadj, il a derrière lui, pour le soutenir, la majorité des marabouts de Constantine, il ne peut pas perdre la face. Tous ces préparatifs des Français, cette concentration de troupes, le pousse à agir. L'anéantissement du camp de Medjez-Amar l'affirmerait dans ses prétentions ; être considéré comme un "Abdelkader de l'Est", et, pour exterminer ces infidèles, il aligne ses meilleures troupes.Les Français ont appris a leur dépend que contre cette guerre spéciale, originale comme le pays lui même, pleine comme lui de pièges et de guet-apens, il fallait une armée spéciale, familiarisée avec ce genre d'ennemis et de lutte, qui se fut mise, pour ainsi dire, à l'école de son adversaire, et eu appris à le battre avec ses propres armes. Dans ce pays, où coule en cette fin d'été 1837 la Seybouse boueuse des orages d'été, entrelacé et comme embrouillé de montagnes striés de pistes menant nulle part, coupé de défilés propices aux embuscades, semé de broussailles protectrices, de fourrés, de buissons perfides,où l'homme imite de la bête fauve ses allures sournoises et redoutables, où se tapit l'indigène en attendant sa proie; dans cette contrée de soleil ardent qui connaît par moments la neige et les tourmentes mortelles, les soldats 7 ans après avoir touché la terre d'Afrique, traversés des plaines arides ou marécageuses, dormi à l'abri précaire des ruines de Calama, ou sous de mauvaises tentes, il convenait que ces hommes d'une trempe exceptionnelle qui avait la garde de ce verrou fussent, après ce long apprentissage, rompus aux difficultés locales, acclimatés au ciel, accoutumés au sol, aguerris de toutes les manières, avaient une revanche à prendre et attendirent d'un pied ferme l'armée de Hadj Ahmed.Cependant, cette fois, les rôles étaient renversés, c'était lui, le bey qui attaquait une position ennemie fortifiée, commandée par des officiers d'expérience habitués à ce genre de guerre de siège de type européen et qui manoeuvraient leurs troupes admirablement bien. Les artilleurs avaient eu le temps de pointer en tirs croisés leur obusiers et canons afin de se couvrir mutuellement, les fantassins contrôlaient les défilés, et pour se préserver, ils avaient bâti des murs avec des sacs de terre.Mais laissons témoigner les écrits;
Guelma le 24 septembre 1837, compte rendu de la bataille de Medjez-Amar des 21/22/23 septembre 1837.
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EL HADJ AHMED
Il est étrange que l'histoire de l'occupation de l'Algérie ne fasse pas état, en République Démocratique Algérienne, de l'occupation turc. Il est dommage que le genre truculent ne soit plus à la mode dans la littérature Jamais héros du romantisme échevelé n'a été plus féroce et plus noir que El-Hadj-Ahmed bey de Constantine.
C'est un de ces monstres abominables comme le despotisme sans frein en a produit quelques-uns sous l'ardent soleil d'Afrique. La moindre contrariété le mettait en fureur, il tirait son poignard et frappait. Alors la vue du sang le rendait fou ; sa face de tigre devenait si effrayante que tout le monde s'écartait terrifié. Il ne reconnaissait pas d'autres règles que son désir. Quand on lui signalait une belle fille, il la faisait enlever, appartînt-elle aux plus grandes familles de la province. Il en réunit ainsi trois cent quatre-vingt cinq, en y comprenant les négresses qui faisaient le service du harem. Un jour, ayant remarqué une enfant de dix ans qui puisait de l'eau à une fontaine, il l'emmena ; puis comme la petite, inquiète et intimidée, pleurait, il se fâcha et la poignarda pour la faire taire. Une de ses favorites ayant cueilli en sa présence une orange dans son jardin, il lui fit clouer la main contre l'arbre. Un homme auquel il voulait marier sa fille s'étant permis d'aimer une autre femme, il fit jeter cette malheureuse dans le ravin du Rummel. Une de. ses femmes s'étant amusée à singer ses manières, il la surprit, et lui fit coudre la bouche pour avoir osé fumer dans sa pipe. Deux négresses ayant été accusées de souhaiter sa mort, il les découpa en morceaux de sa propre main .Il aimait le sang, et il ne se passait guère de jour où il ne fit procéder à une exécution. Cette bête fauve avait ses heures de jovialité. Pour s'assurer de la fidélité de ses femmes, il inventa des serrures à sonnerie. Il faisait monter ses ministres, ou quelque vieux général à barbe blanche, dans la voiture d'enfant de sa fille, que traînaient quatre chiens, et riait de leurs contorsions. Un jour, il se donna la fête d'une chasse aux lions dans ses jardins. Il en fit amener deux, lâcha sur eux des dogues qui furent mis en pièces et, bien abrité au premier étage, il les abattit à coups de fusil. La France fut pleine de bienveillance pour cet être aimable, elle lui fit une pension à Alger, et, quand une de ses femmes fuyait l'enfer de son harem, nos agents la lui ramenaient, probablement en vertu de la loi qui porte qu'il n'y a point d'esclaves sur le territoire français. Ahmed, ayant fait à la Mecque le pèlerinage après lequel il eut droit au surnom de El-Hadj, revint émerveillé des palais qu'il avait vus en Egypte, et résolut d'en avoir un semblable. C'était vers l'année 1825. Quand cet homme terrible avait un désir, toutes les forces qu'un despotisme sans limite lui mettait dans la main étaient employées à le satisfaire. Il ruina sa province pour avoir un palais. II commença par se faire céder, de gré ou de force, l'emplacement nécessaire. Une vieille femme tenait à sa demeure et ne voulait pas s'en aller. Le monstrueux farceur en fit murer les portes et les fenêtres. On passait des vivres par un trou à la malheureuse. An bout d'un mois de claustration, elle s'avoua vaincue et partit. Ahmed s'empara de la sorte de vingt-huit maisons, de quatre boutiques et d'un atelier. Il fit venir les plus-célèbres ouvriers indigènes qui se mirent immédiatement à l'ouvrage. Un marchand génois lui envoya d'Italie des colonnes de marbre, et se fit donner en échange du blé que les indigènes durent fournir. Ces colonnes arrivées à Bône, il n'y avait pas de routes pour les amener à Constantine. Alors la population fut réquisitionnée pour le transport. On passait des perches sous une colonne, et vingt ou trente porteurs la chargeaient sur leurs épaules. Les poutres et les planches furent apportées de la même façon de la Kabylie et de l'Aurès. Puis, les matériaux ainsi amassés se trouvant insuffisants, Ahmed eut une idée auprès de laquelle pâlissent les exactions les plus fameuses de Verres : il mit tout simplement la province au pillage. Sculptures, serrureries, menuiseries, marbres, colonnes, faïences, montants de porte, portes de cèdre, chambranles de fenêtre, il fit tout saisir. Des nuées de démolisseurs s'abattaient sur les édifices les plus remarquables, et des caravanes en apportaient les débris aux architectes du palais.
Quand la maison est Unie, dit le proverbe arabe, la mort arrive. Cette fois, ce fut l'ennemi. A peine son palais était-il achevé, qu'Ahmed en fut chassé par les Français. Cet effort colossal, où les ressources de tout un peuple furent mises en jeu pour satisfaire la fantaisie d'un homme, a produit un édifice vaste sans être grandiose, et original sans être beau. On y sent partout l'insuffisance des artistes qui l'ont élevé, et le procédé barbare qui en a réuni les matériaux.
Tel était l'homme que les Français allaient combattre
Ahmed, bey de Constantine El Hadj Ahmed, fils de l'ancien Khalifa Mohammed, et petit-fils d'Ahmed bey El Kolli ; avait été nommé par le dey d'Alger Hosseïn, bey de Constantine, en août 1826. C'était un homme énergique et cruel, né dans cette ville, Koulour'li (koulougli)d'origine, (père turc mère indigène)et âgé alors d'une trentaine d'années. Il y avait rempli, sous de précédents beys, les fonctions importantes de Khalifa, sorte de premier ministre, et s'était créé d'implacables inimitiés; cela, joint à quelques actes véritablement irréfléchis, avait motivé son internement à Blida, d'où le dey venait de le tirer.
Ahmed Bey considère, le camp de Medjez-Amar, à quelques dizaines de lieues de sa capitale, comme une provocation personnelle. Il est certain d'une victoire facile, il clame la djihad et sur ce point, il sait qu'il fait l'unanimité, même les kabyles hostiles de nature aux arabes, répondent qu'ils acceptent pour faire la guerre aux français de se joindre aux cavaliers du Bey. Ahmed sait également par ses informateurs, que les Français ont réarmé et reformé des bataillons de Turcs, qu'ils ont aussi incorporé des unités indigènes venant des tribus proches du camp de Guelma et de la région de Bône. L'armée a observé des regroupements et des mouvements de cavalerie arabe autour de Constantine. Danremont averti par ses indicateurs n'ignore pas que Ahmed Bey réglera cette affaire par la guerre. Les escarmouches sévères, les courtes batailles dans la plaine de Guelma, ou les embuscades sur la piste qui mène de Medjez-Amar à Ras-el-Akba lui ont permis d'éprouver la valeurs des formations Françaises et de ses alliés. Ahmed est un Hadj, il a derrière lui, pour le soutenir, la majorité des marabouts de Constantine, il ne peut pas perdre la face. Tous ces préparatifs des Français, cette concentration de troupes, le pousse à agir. L'anéantissement du camp de Medjez-Amar l'affirmerait dans ses prétentions ; être considéré comme un "Abdelkader de l'Est", et, pour exterminer ces infidèles, il aligne ses meilleures troupes.Les Français ont appris a leur dépend que contre cette guerre spéciale, originale comme le pays lui même, pleine comme lui de pièges et de guet-apens, il fallait une armée spéciale, familiarisée avec ce genre d'ennemis et de lutte, qui se fut mise, pour ainsi dire, à l'école de son adversaire, et eu appris à le battre avec ses propres armes. Dans ce pays, où coule en cette fin d'été 1837 la Seybouse boueuse des orages d'été, entrelacé et comme embrouillé de montagnes striés de pistes menant nulle part, coupé de défilés propices aux embuscades, semé de broussailles protectrices, de fourrés, de buissons perfides,où l'homme imite de la bête fauve ses allures sournoises et redoutables, où se tapit l'indigène en attendant sa proie; dans cette contrée de soleil ardent qui connaît par moments la neige et les tourmentes mortelles, les soldats 7 ans après avoir touché la terre d'Afrique, traversés des plaines arides ou marécageuses, dormi à l'abri précaire des ruines de Calama, ou sous de mauvaises tentes, il convenait que ces hommes d'une trempe exceptionnelle qui avait la garde de ce verrou fussent, après ce long apprentissage, rompus aux difficultés locales, acclimatés au ciel, accoutumés au sol, aguerris de toutes les manières, avaient une revanche à prendre et attendirent d'un pied ferme l'armée de Hadj Ahmed.Cependant, cette fois, les rôles étaient renversés, c'était lui, le bey qui attaquait une position ennemie fortifiée, commandée par des officiers d'expérience habitués à ce genre de guerre de siège de type européen et qui manoeuvraient leurs troupes admirablement bien. Les artilleurs avaient eu le temps de pointer en tirs croisés leur obusiers et canons afin de se couvrir mutuellement, les fantassins contrôlaient les défilés, et pour se préserver, ils avaient bâti des murs avec des sacs de terre.Mais laissons témoigner les écrits;
Guelma le 24 septembre 1837, compte rendu de la bataille de Medjez-Amar des 21/22/23 septembre 1837.
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Dernière édition par Admin le Mer 1 Oct - 9:01, édité 3 fois