Les Algériens accusés de xénophobie
A l’exception de quelques paragraphes où l’Algérie est pointée du doigt pour le mauvais traitement et l’exploitation inhumaine qu’elle réserve aux migrants subsahariens appréhendés au niveau de nos frontières terrestres, le réseau Migreurop de défense des droits des migrants dans le monde ferme étrangement les yeux pour la seconde fois sur le cas des harraga algériens.
En effet, à la lecture de son volumineux rapport 2009-2010 (132 pages) intitulé «Aux frontières de l’Europe, contrôles, enfermements, expulsions» et rendu public le week-end dernier, pas un seul passage n’a été consacré à nos harraga, dont bon nombre ont péri en mer, dans l’anonymat, ou demeurent en rétention dans des centres européens, notamment en Italie. Ainsi, tout porte à croire qu’aux yeux de Migreurop, ces derniers sont des sous-êtres par rapport à leurs semblables subsahariens, marocains, indiens, pakistanais, roumains, polonais ou autres. En revanche, il considère l’Algérie comme étant un nouveau gendarme de l’Europe de par sa position géographique stratégique, tant pour les départs de ses propres ressortissants (les harraga) vers le continent européen, que pour le transit et l’installation de migrants subsahariens.
Notre pays a été amené, toujours selon cette ONG, à l’image du Maroc et de la Turquie, à jouer son rôle dans le contrôle externalisé des frontières, comme le prescrit l’Union européenne (UE). Ceci s’est traduit par l’adoption d’une loi sur l’immigration en 2007, calquée sur les textes français, qui «vient consacrer les rafles et déportations pratiquées par l’Algérie depuis de nombreuses années, laisse deviner la collaboration avec l’UE en termes de ‘’gestion’’ des flux migratoires…», est-il indiqué dans son rapport 2009-2010. Comme cela s’est passé chez le voisin marocain, rapportent les auteurs du document, pour certains migrants, le transit s’est prolongé dans le temps jusqu’à se transformer en une installation plus durable, l’étape algérienne permettant de mettre de l’argent de côté en vue de poursuivre la route migratoire en Afrique ou vers l’Europe.
Plus grave encore, les «enquêteurs» de Migreurop font savoir que «les chantiers de construction en Algérie, qui nécessitent de la main-d’œuvre, regorgent de Subsahariens sous-payés et soumis à de mauvaises conditions de travail». Allant plus loin dans leurs accusations, ils ont relevé que de mèche avec les chefs de chantiers, les autorités nationales procèdent à des arrestations de travailleurs migrants lorsque les gros œuvres sont terminés, et cela juste avant la date théorique du versement des salaires. Ces rafles s’effectuent dans les villes à forte concentration d’étrangers, comme Alger, Oran, In Salah ou Tamanrasset, mais aussi vers Djanet (à la frontière avec la Libye). Pour effectuer les rafles, les policiers parcourent les rues et entrent dans les maisons ou pénètrent sur les lieux de travail. Partant, ces migrants se retrouvent dans l’incapacité de se dépêtrer de l’engrenage du refoulement dans lequel les autorités algériennes les ont piégés.
Le rapport souligne que ces arrestations mènent automatiquement à une garde à vue pendant laquelle les migrants sont amenés devant un tribunal, sans avocat, avec des interprètes (en anglais et en français uniquement). Le jugement conduit systématiquement à l’enfermement, soit dans une prison de droit commun, où des cellules sont réservées aux migrants, soit dans de réels camps de détention pour étrangers. S’appuyant sur des témoignages de migrants rencontrés à Gao, Kidal et Tinzaouaten, juste après leur refoulement d’Algérie, les rapporteurs de Migreurop dénoncent les conditions de détention dans les camps algériens.
«Les migrants interrogés racontent avoir été obligés de vivre dans des cellules insalubres, entassés sur quelques mètres carrés, sous-alimentés (un morceau de pain et un litre de lait pour 5 personnes par jour). Ils sont transférés tous les dix ou quinze jours dans des camps qui se trouvent plus au sud. Transportés par groupes de 50 à 100 personnes dans des camions depuis leurs lieux d’arrestations respectifs, tous confluent vers le camp de Tamanrasset», ont-ils écrit. Migreurop va jusqu’à accuser de xénophobie la population de cette ville devenue un lieu de transit plus ou moins long pour les migrants venus du Sud.
«Ceux qui ne sont pas dans le camp vivent soit en ville, soit cachés dans des grottes à la périphérie de la ville, craignant parfois le racisme de la population locale, et surtout l’éventualité de problèmes avec la police», rapportent les émissaires de Migreurop, tout en précisant que de Tamanrasset, les policiers algériens rassemblent les migrants par groupes d’une centaine de personnes et organisent des convois de «camions prisons», qui traversent le Sud algérien, et les «déversent» ensuite dans le no man’s land de Tinzaouaten (à la frontière Algérie-Mali). Quant aux conditions d’arrestation, d’enfermement et de refoulement de nos compatriotes harraga, Migreurop nous les décrira peut-être dans son prochain rapport.
Naima Benouaret ( El Watan
A l’exception de quelques paragraphes où l’Algérie est pointée du doigt pour le mauvais traitement et l’exploitation inhumaine qu’elle réserve aux migrants subsahariens appréhendés au niveau de nos frontières terrestres, le réseau Migreurop de défense des droits des migrants dans le monde ferme étrangement les yeux pour la seconde fois sur le cas des harraga algériens.
En effet, à la lecture de son volumineux rapport 2009-2010 (132 pages) intitulé «Aux frontières de l’Europe, contrôles, enfermements, expulsions» et rendu public le week-end dernier, pas un seul passage n’a été consacré à nos harraga, dont bon nombre ont péri en mer, dans l’anonymat, ou demeurent en rétention dans des centres européens, notamment en Italie. Ainsi, tout porte à croire qu’aux yeux de Migreurop, ces derniers sont des sous-êtres par rapport à leurs semblables subsahariens, marocains, indiens, pakistanais, roumains, polonais ou autres. En revanche, il considère l’Algérie comme étant un nouveau gendarme de l’Europe de par sa position géographique stratégique, tant pour les départs de ses propres ressortissants (les harraga) vers le continent européen, que pour le transit et l’installation de migrants subsahariens.
Notre pays a été amené, toujours selon cette ONG, à l’image du Maroc et de la Turquie, à jouer son rôle dans le contrôle externalisé des frontières, comme le prescrit l’Union européenne (UE). Ceci s’est traduit par l’adoption d’une loi sur l’immigration en 2007, calquée sur les textes français, qui «vient consacrer les rafles et déportations pratiquées par l’Algérie depuis de nombreuses années, laisse deviner la collaboration avec l’UE en termes de ‘’gestion’’ des flux migratoires…», est-il indiqué dans son rapport 2009-2010. Comme cela s’est passé chez le voisin marocain, rapportent les auteurs du document, pour certains migrants, le transit s’est prolongé dans le temps jusqu’à se transformer en une installation plus durable, l’étape algérienne permettant de mettre de l’argent de côté en vue de poursuivre la route migratoire en Afrique ou vers l’Europe.
Plus grave encore, les «enquêteurs» de Migreurop font savoir que «les chantiers de construction en Algérie, qui nécessitent de la main-d’œuvre, regorgent de Subsahariens sous-payés et soumis à de mauvaises conditions de travail». Allant plus loin dans leurs accusations, ils ont relevé que de mèche avec les chefs de chantiers, les autorités nationales procèdent à des arrestations de travailleurs migrants lorsque les gros œuvres sont terminés, et cela juste avant la date théorique du versement des salaires. Ces rafles s’effectuent dans les villes à forte concentration d’étrangers, comme Alger, Oran, In Salah ou Tamanrasset, mais aussi vers Djanet (à la frontière avec la Libye). Pour effectuer les rafles, les policiers parcourent les rues et entrent dans les maisons ou pénètrent sur les lieux de travail. Partant, ces migrants se retrouvent dans l’incapacité de se dépêtrer de l’engrenage du refoulement dans lequel les autorités algériennes les ont piégés.
Le rapport souligne que ces arrestations mènent automatiquement à une garde à vue pendant laquelle les migrants sont amenés devant un tribunal, sans avocat, avec des interprètes (en anglais et en français uniquement). Le jugement conduit systématiquement à l’enfermement, soit dans une prison de droit commun, où des cellules sont réservées aux migrants, soit dans de réels camps de détention pour étrangers. S’appuyant sur des témoignages de migrants rencontrés à Gao, Kidal et Tinzaouaten, juste après leur refoulement d’Algérie, les rapporteurs de Migreurop dénoncent les conditions de détention dans les camps algériens.
«Les migrants interrogés racontent avoir été obligés de vivre dans des cellules insalubres, entassés sur quelques mètres carrés, sous-alimentés (un morceau de pain et un litre de lait pour 5 personnes par jour). Ils sont transférés tous les dix ou quinze jours dans des camps qui se trouvent plus au sud. Transportés par groupes de 50 à 100 personnes dans des camions depuis leurs lieux d’arrestations respectifs, tous confluent vers le camp de Tamanrasset», ont-ils écrit. Migreurop va jusqu’à accuser de xénophobie la population de cette ville devenue un lieu de transit plus ou moins long pour les migrants venus du Sud.
«Ceux qui ne sont pas dans le camp vivent soit en ville, soit cachés dans des grottes à la périphérie de la ville, craignant parfois le racisme de la population locale, et surtout l’éventualité de problèmes avec la police», rapportent les émissaires de Migreurop, tout en précisant que de Tamanrasset, les policiers algériens rassemblent les migrants par groupes d’une centaine de personnes et organisent des convois de «camions prisons», qui traversent le Sud algérien, et les «déversent» ensuite dans le no man’s land de Tinzaouaten (à la frontière Algérie-Mali). Quant aux conditions d’arrestation, d’enfermement et de refoulement de nos compatriotes harraga, Migreurop nous les décrira peut-être dans son prochain rapport.
Naima Benouaret ( El Watan