Quand la guerre de Libération se déclenche le 1er novembre 1954, il rejoint spontanément le maquis et devient officier de l’ALN. Après l’indépendance, Mizouni Abdelkrim reprend ses études et décroche le diplôme d’ingénieur en électronique. Il est alors recruté à l’entreprise nationale Sonelec actuellement l’Enie de Mohammadia (ex-Perrégaux) et devient chef de projet, poste qu’il occupera jusqu’à 1981, date de son départ en mission pour l’Allemagne où il suivra une carrière d’ingénieur en électricité pendant trois années. A son retour, il effectuera une carrière d’ingénieur en chef. Mis à la retraite en 1984, il se lie d’amitié avec un voisin de quartier, âgé de 38 ans, féru d’électronique et qui voit en lui un maître extraordinaire. Le troisième ami est Merrouane Miloud âgé de 65 ans, amateur de mer et de pêche. Mizouni possède une embarcation.
Un jour, les trois amis décident une sortie de pêche, au large, et tous les trois se donnent rendez-vous pour le 8 novembre 1984 à 14 heures. A la date et heure fixées, les trois amis quittent Oran à 14 heures à bord du véhicule de Mizouni Abdelkrim, une Mercedès de couleur beige, et se dirigent vers la plage de Bouzedjar (wilaya de Aïn Témouchent) où l’embarcation se trouve. Les préparatifs de sortie en mer accomplis, les trois hommes changent leur tenue vestimentaire et déposent leurs pièces d’identité de peur de les mouiller ou de les perdre en mer. A 18 heures, ils quittent la plage et la tempête se déclenche, interdisant aux trois hommes de regagner la côte. Les vagues sont très hautes et la barque est ballotée comme un fétu de paille. La nuit noire les isole encore plus. Aucun secours en vue. Le lendemain, 9 novembre 1984, l’alerte est donnée. Les éléments de la Gendarmerie nationale, ceux de la Protection civile et les gardes-côtes entrent en action, mais les recherches effectuées ne donnent aucun résultat. Elles se poursuivront pendant quatre jours, en vain. Le lundi 12 novembre 1984, radio «Medi Internationale» dont le siège est à Tanger (Maroc) annonce le sauvetage de deux naufragés au large de la côte de Saïdia (Maroc).
L’information précise que les deux rescapés ont reçu des soins. Le lundi 19 novembre 1984, des pêcheurs algériens se trouvant au large de la côte de Aïn Témouchent repêchent dans leur filets le cadavre d’un homme. Alertés, les gendarmes l’identifient rapidement. C’est celui de Abdou, le second ami de Mizouni. Son épouse reconnaît le cadavre au signe particulier qu’il portait sur sa poitrine. Les familles des deux autres naufragés étant rassurées sur leur sort attendent leur retour de l’hôpital d’Oujda. A l’époque, la frontière Ouest était fermée. Cette attente va durer plusieurs mois sans le moindre écho des deux recherchés. L’épouse de M. Mizouni,très inquiète tente alors ses propres recherches et rencontre des pêcheurs algériens qui lui apprennent que l’embarcation de son époux est à Saïdia, au Maroc. Kheira, l’épouse, contactera les autorités algériennes, sans résultat.
Cinq mois plus tard, le 26 avril 1985, Kheira reçoit une lettre d’un sujet marocain habitant à Mohammadia (Maroc). Dans sa lettre, il lui apprend que l’affaire de M. Mizouni Abdelkrim est grave et que seuls le Croissant-Rouge et la Croix-Rouge internationale peuvent faire quelque chose…Le 6 avril 1988, elle reçoit une autre lettre qui confirme le contenu de la précédente… En juin 1988, Mme Mizouni se rend au consulat marocain à Sidi Bel Abbès, elle raconte la disparition de son époux… mais elle n’y reçoit aucune réponse. Même chose du côté du Croissant-Rouge algérien. Seule la Croix-Rouge internationale l’informe par lettre que les recherches effectuées sont demeurées vaines.
Le 17 août 1988, Mme Mizouni écrit au ministre algérien de l’Intérieur, ainsi qu’à la Ligue algérienne des droits de l’Homme. Elle ne reçoit aucune réponse. Elle se déplace au Maroc, à Oujda, où elle se fait confirmer que son époux et Merouane Miloud, tous deux admis à l’hôpital El Farabi d’Oujda, à la suite de leur naufrage, avaient été bien inscrits sur le registre des admissions. Elle apprend surtout que les deux hommes ont subi des interrogatoires par la DST durant leur séjour à l’hôpital avant d’être dirigés vers une destination inconnue. En juin 1989, Mme Mizouni se déplace une nouvelle fois au Maroc. Elle rencontre des personnes influentes, l’une résidant à Rabat lui apprendra que son époux et son ami seraient peut-être en vie. La seconde, sujet marocain résidant à Casablanca, lui dira de ne pas perdre espoir car les deux hommes seraient en vie, mais les deux interlocuteurs ne pouvaient en dire plus. Toujours à Rabat, Mme Mizouni contacte le Croissant-Rouge marocain, mais dès que les responsables entendent les noms des deux naufragés, ils mettent immédiatement fin à l’entretien et s’empressent de changer de sujet !
Malgré les démarches des familles des disparus, ces deux citoyens algériens croupiraient quelque part dans les cachots d’un bagne marocain. Leur crime ? Ils ont voulu faire une partie de pêche en mer… et cela a tourné au drame. Seulement, nous qui avons suivi cette affaire depuis ses débuts avons été déçus par le comportement des autorités algériennes de l’époque qui n’avaient même pas manifesté une simple sympathie à l’égard des familles des disparus. Aujourd’hui, si le jeune roi du Maroc apprenait l’histoire de ce drame, nul doute qu’il serait sensible de connaître la vérité sur leur sort. Nota : Lorsqu’on avait contacté Mme Mizouni pour le présent reportage, elle attendait toujours que son mari réapparaisse. Mais, depuis, aucune nouvelle de nos Algériens disparus.
Lebbad Youcef
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Un jour, les trois amis décident une sortie de pêche, au large, et tous les trois se donnent rendez-vous pour le 8 novembre 1984 à 14 heures. A la date et heure fixées, les trois amis quittent Oran à 14 heures à bord du véhicule de Mizouni Abdelkrim, une Mercedès de couleur beige, et se dirigent vers la plage de Bouzedjar (wilaya de Aïn Témouchent) où l’embarcation se trouve. Les préparatifs de sortie en mer accomplis, les trois hommes changent leur tenue vestimentaire et déposent leurs pièces d’identité de peur de les mouiller ou de les perdre en mer. A 18 heures, ils quittent la plage et la tempête se déclenche, interdisant aux trois hommes de regagner la côte. Les vagues sont très hautes et la barque est ballotée comme un fétu de paille. La nuit noire les isole encore plus. Aucun secours en vue. Le lendemain, 9 novembre 1984, l’alerte est donnée. Les éléments de la Gendarmerie nationale, ceux de la Protection civile et les gardes-côtes entrent en action, mais les recherches effectuées ne donnent aucun résultat. Elles se poursuivront pendant quatre jours, en vain. Le lundi 12 novembre 1984, radio «Medi Internationale» dont le siège est à Tanger (Maroc) annonce le sauvetage de deux naufragés au large de la côte de Saïdia (Maroc).
L’information précise que les deux rescapés ont reçu des soins. Le lundi 19 novembre 1984, des pêcheurs algériens se trouvant au large de la côte de Aïn Témouchent repêchent dans leur filets le cadavre d’un homme. Alertés, les gendarmes l’identifient rapidement. C’est celui de Abdou, le second ami de Mizouni. Son épouse reconnaît le cadavre au signe particulier qu’il portait sur sa poitrine. Les familles des deux autres naufragés étant rassurées sur leur sort attendent leur retour de l’hôpital d’Oujda. A l’époque, la frontière Ouest était fermée. Cette attente va durer plusieurs mois sans le moindre écho des deux recherchés. L’épouse de M. Mizouni,très inquiète tente alors ses propres recherches et rencontre des pêcheurs algériens qui lui apprennent que l’embarcation de son époux est à Saïdia, au Maroc. Kheira, l’épouse, contactera les autorités algériennes, sans résultat.
Cinq mois plus tard, le 26 avril 1985, Kheira reçoit une lettre d’un sujet marocain habitant à Mohammadia (Maroc). Dans sa lettre, il lui apprend que l’affaire de M. Mizouni Abdelkrim est grave et que seuls le Croissant-Rouge et la Croix-Rouge internationale peuvent faire quelque chose…Le 6 avril 1988, elle reçoit une autre lettre qui confirme le contenu de la précédente… En juin 1988, Mme Mizouni se rend au consulat marocain à Sidi Bel Abbès, elle raconte la disparition de son époux… mais elle n’y reçoit aucune réponse. Même chose du côté du Croissant-Rouge algérien. Seule la Croix-Rouge internationale l’informe par lettre que les recherches effectuées sont demeurées vaines.
Le 17 août 1988, Mme Mizouni écrit au ministre algérien de l’Intérieur, ainsi qu’à la Ligue algérienne des droits de l’Homme. Elle ne reçoit aucune réponse. Elle se déplace au Maroc, à Oujda, où elle se fait confirmer que son époux et Merouane Miloud, tous deux admis à l’hôpital El Farabi d’Oujda, à la suite de leur naufrage, avaient été bien inscrits sur le registre des admissions. Elle apprend surtout que les deux hommes ont subi des interrogatoires par la DST durant leur séjour à l’hôpital avant d’être dirigés vers une destination inconnue. En juin 1989, Mme Mizouni se déplace une nouvelle fois au Maroc. Elle rencontre des personnes influentes, l’une résidant à Rabat lui apprendra que son époux et son ami seraient peut-être en vie. La seconde, sujet marocain résidant à Casablanca, lui dira de ne pas perdre espoir car les deux hommes seraient en vie, mais les deux interlocuteurs ne pouvaient en dire plus. Toujours à Rabat, Mme Mizouni contacte le Croissant-Rouge marocain, mais dès que les responsables entendent les noms des deux naufragés, ils mettent immédiatement fin à l’entretien et s’empressent de changer de sujet !
Malgré les démarches des familles des disparus, ces deux citoyens algériens croupiraient quelque part dans les cachots d’un bagne marocain. Leur crime ? Ils ont voulu faire une partie de pêche en mer… et cela a tourné au drame. Seulement, nous qui avons suivi cette affaire depuis ses débuts avons été déçus par le comportement des autorités algériennes de l’époque qui n’avaient même pas manifesté une simple sympathie à l’égard des familles des disparus. Aujourd’hui, si le jeune roi du Maroc apprenait l’histoire de ce drame, nul doute qu’il serait sensible de connaître la vérité sur leur sort. Nota : Lorsqu’on avait contacté Mme Mizouni pour le présent reportage, elle attendait toujours que son mari réapparaisse. Mais, depuis, aucune nouvelle de nos Algériens disparus.
Lebbad Youcef
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