La répression du prosélytisme évangéliste tourne au harcèlement des chrétiens. Si l’on s’en tient à la remarquable mobilisation institutionnelle et médiatique, la foi des Algériens serait en danger. Heureusement donc que nous avons des autorités politiques, religieuses, judiciaires et policières vigilantes qui s’efforcent de nous en préserver avec résolution et efficacité. Pour un profane, c’est difficile de mesurer le danger et de comprendre la riposte. Les voies du seigneur sont impénétrables ; celles des États aussi. La foi est-elle à ce point vulnérable pour qu’elle soit menacée par une campagne de marketing d’une croyance concurrente ? Pourtant, nous sommes dans l’Algérie qui a subi une colonisation de plus de cent trente ans ; et les églises, missions, couvents, prieurés qui y ont sévi, souvent avec les méthodes — sincères ou calculées — les plus séduisantes n’ont réussi, au cours d’une présence de plus d’un siècle, qu’un taux de conversion marginal. Qu’est-ce qui fait alors que ces derniers mois, nos tuteurs trouvent que notre foi est subitement mise en péril par la présence de quelques prêcheurs, dont certains sont là depuis leur naissance et d’autres depuis des décennies ? Peut-on exiger la pratique légale et transparente des religions et laisser dans un pays soumis à la terreur des apprentis sorciers proclamer la démocratie “kofr”, le gendarme “taghout” et interdire la parabole et, par endroits et par moments, le journal et la cigarette ? Il suffit d’assister à une veillée funèbre, à un enterrement, à un mariage ou à tout événement rituel pour voir s’imposer à la conscience commune les exégèses les plus hétérogènes des commandements divins. Cela dit, que ne faisions-nous de tapage médiatique pour la moindre conversion de chrétien à l’islam, même quand elle se résume à une formelle procédure commandée par le devoir de mariage confessionnel imposée à nos femmes ! Le zèle d’un protestant n’est peut-être pas plus dangereux pour la foi musulmane que la conversion solennelle et publique d’un musulman d’origine égyptienne à Rome. On peut le mépriser comme apostat, mais on se doit de méditer le cas de conscience qui l’a amené à renier sa foi héritée : le statut de la violence dans le discours de l’islam ordinaire et académique. Le refus de débat et de réforme — dû d’abord au conservatisme politique ! — comme noté par l’imam Soheib Bencheikh, est probablement à la source de la dérive meurtrière qu’on observe dans tant de pays musulmans. Et des remises en question de leur foi par certains musulmans. Quand le terrorisme traquait nos coreligionnaires, dont des intellectuels, beaucoup d’entre eux se sont réfugiés dans les locaux de l’Église… nationale (si on revendique… Mohamed Duval, il faut revendiquer ses ouailles). Ils n’en sont pas, à notre connaissance, sortis convertis. Il semble malheureusement qu’ils n’en sont pas sortis reconnaissants non plus, sinon ils auraient pu réagir à cette campagne excessive en témoignant que les chrétiens d’Algérie ne sont pas que des prosélytes et que beaucoup d’entre eux sont d’abord des concitoyens qui ont partagé nos épreuves et les risques de nos dérives qui ont plus de couleurs politiques que religieuses. M. H. musthammouche@yahoo.fr |
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