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Dossier : 05 octobre ou la fin d'une époque

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admin"SNP1975"
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admin"SNP1975"

admin
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Dossier : 05 octobre (Dimanche 05 Octobre 2008)


Produit d’un ras le bol populaire et des contradictions du système
Octobre, la rupture politique
Par :Mustapha Hammouche
Lu : (72 fois)

Vingt ans après, l’affrontement des deux thèses du soulèvement spontané et du complot n’en finit pas.

Deux choses sont certaines, cependant : l’absence de slogans chez les émeutiers malgré l’insertion immédiate des éléments du Pags et le squat tardif de la manifestation par les islamistes.
En octobre 1988, l’Algérie subissait une grave crise financière qui l’étouffait depuis près de trois ans. Sans que rien ne prédise son redressement, le prix du baril gravite autour des douze dollars ; les frais de structures des entreprises sont démultipliés par la réforme, et les devises font défaut, réduisant les montants des “autorisations globales d’importation” par lesquelles les entreprises s’approvisionnent en matières premières et pièces de rechange. Les salaires sont gelés par un “statut général des travailleurs” statique.
Sécheresse, pénurie, influence, essor inédit du chômage, sécheresse. Le gouvernement qui ne pouvait pas rééditer le PAP (plan antipénurie), venait de supprimer l’allocation devise. Alors que l’horizon se bouche pour les plus jeunes, le complexe commercial et de divertissement de Ryadh EL-Feth et le monument Maqam Echahid se dressent, d’un coût d’un milliard de dollars, pour symboliser la différence de préoccupation qui sépare le pouvoir de son peuple. La corruption avait atteint les institutions dans leur efficacité opérationnelle ; la nécessaire austérité achevait de les dévitaliser. L’article 120, qui continuait à imposer une allocation politique des privilèges de la rente, constitue le dernier paradoxe d’un système qui n’a plus les moyens de son injustice.
En cet été 1988, le pouvoir avait-il perçu l’aspect pré-insurrectionnel du contexte ? Son discours du 19 septembre s’adresse aux “responsables” pour les “mettre au courant des développements, des nouvelles données de la situation économique et des perspectives dans la région”. Il dénonce la résistance aux réformes de gestionnaires qui “paraissent aujourd’hui hésitants, craignant la perte de leurs postes” et de responsables “incapables de s’adapter à la nouvelle situation”. Il précise que “certains de ces responsables exercent au sommet, au sein d’institutions du parti et du gouvernement ou d’autres institutions”, ne pouvant désigner que l’armée.
Pour marquer la disqualification de l’article 120, il dira : “Je crois vivement en l’intégrité, la compétence, la sincérité et l’engagement (…) mais je dirai, aujourd’hui, avec franchise et sans complaisance que nous croyons en la compétence en premier lieu.” La commission de préparation du congrès du FLN est gelée depuis juillet.
La dimension sociale est ignorée, même si une étrange allusion à la “révolte du pain” en Égypte est faite, insinuant la nécessité, pour le peuple, de se battre pour améliorer sa condition.
Le 5 Octobre, réaction conservatrice suscitée contre “les mesures de réformer” dont Chadli prévoit d’entamer l’application “au début de l’année” ou mouvement suscité pour justifier l’accélération des réformes.
Chadli ne semble tout de même pas avoir opté d’emblée pour une rupture avec le système du parti unique. Il juge, pour l’heure, que le multipartisme est “un danger pour l’unité nationale”, dans l’immédiat. Sans l’exclure pour l’avenir.
Sur le terrain, la profondeur du mouvement d’octobre et la brutalité de la répression ont créé une ambiance révolutionnaire qui rendait irrésistible la demande d’ouverture qui, rapidement, s’est organisée. Les foyers de lutte, jusqu’ici étouffés et donc obscurs, se révèlent, notamment autour du Comité contre la torture et de la Commission des droits de l’Homme de Miloud Brahimi.
Octobre capitalise les luttes identitaires, politiques, sociales et des droits de l’homme, qui depuis 1980, jalonnent le difficile chemin vers la démocratie. Pour la première fois, la société civile est organisée en tant que tel autour de thèmes de libertés et de droits.
Le slogan “plus jamais ça” est un slogan de rupture avec la pratique de la torture mais aussi avec la conception policière de la vie publique. Qu’octobre fût un complot fomenté par l’un ou l’autre des courants réformateur et conservateur du pouvoir, qu’il fût l’expression déliée d’une désespérance juvénile, les évènements lui ont octroyé un sens historique. Il fallait une réponse politique à la mesure de la nouvelle culture politique qui vient de s’imposer sur le terrain.
Chadli annonce dans son allocution du 9 octobre, une réforme “dans tous les domaines” et un prochain référendum constitutionnel. La fin du parti-État institutionnalisé est paraphée par le FLN, et l’ANP se démet officiellement de son rôle politique. La Constitution de février 1989 rend effectif le système du multipartisme et la loi d’avril 1990 met fin au monopole public de la presse.
C’est la première fois depuis l’indépendance que l’Algérie vit une évolution politique qui réponde à une expression politique de la société. Et, pour l’heure, la dernière.

M. H.

Le 10 octobre, Chadli annonce une nouvelle Constitution et un train de réformes économiques et politiques.



Dernière édition par Admin le Dim 5 Oct - 9:40, édité 1 fois

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admin"SNP1975"

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Ce qu’ils en pensent
Par :Rédaction de Liberte
Lu : (70 fois)

Ahmed Ouyahia, SG du RND “C’est une vaste manipulation”
Ahmed Ouyahia est formel : les événements d’Octobre 1988, dont nous célébrons le 20e anniversaire, sont “les fruits des contradictions du système. Je les ai vécus dans une situation tragique. C’est une vaste manipulation, ce n’est pas un sursaut démocratique, c’est la conjonction de deux facteurs : l’effondrement du prix du pétrole qui a vu le rêve de notre jeunesse s’évaporer et le débat contradictoire dans le système. Il y avait des manœuvres d’appareils”, car Chadli pour lequel Ouyahia rend hommage “a voulu opérer des changements”. “Les contradictions systémiques internes se sont soldées dans la rue. Notre armée de conscrits a dû descendre dans la rue pour ramener le calme et l’État s’est trouvé secoué gravement.”
Pour le chef du gouvernement, “c’est vrai, il y avait une soif de changement dans la société, mais ce n’est pas la rue qui a ramené le pluralisme. L’histoire s’écrira un jour”, indique-t-il, en concluant qu’“il y a une évolution démocratique pas assez vite qu’on le souhaite mais en avance”.

PS : Cette déclaration a été faite lors de sa dernière conférence de presse en réponse à une question de Liberté.

Saïd Bouhedja, chargé de la communication au FLN “Il n’y a pas une véritable démocratie
en Algérie”
n La période qui nous sépare du 5 Octobre 88 est “très courte pour évaluer les choses”. C’est, du moins, ce qu’a indiqué Saïd Bouhedja, le chargé de la communication au Front de libération nationale (FLN), en guise de réaction à vingt ans après les évènements du 5 Octobre 88. “L’Algérie avance avec des pas constants vers la concrétisation de la démocratie réelle”, note le responsable du FLN avant d’expliquer qu’“il n’y a pas une véritable démocratie en Algérie”. “La démocratie est synonyme de culture, et sans culture, nous ne pouvons pas enraciner la démocratie”, explique à ce sujet Bouhedja.
Aussi, la construction démocratique, du point de vue du représentant de la formation majoritaire, “a besoin de gens capables ayant la culture institutionnelle et avec des programmes politiques”. Or, selon lui, “il y a beaucoup de médiocrité”. “Nous avons dès lors besoin d’alternatives.”
Quoi qu’il en soit, notre interlocuteur pense qu’il y a “une volonté politique pour changer les choses”. Toutefois, aux yeux de notre interlocuteur, il y a au moins un acquis, “le multipartisme”. “Le multipartisme c’est devenu quelque chose de clair, net et précis dans notre pays”, note Bouhedja pour lequel “il y a une tolérance entre les différentes formations politiques”. Définissant le multipartisme comme étant “un dialogue entre les différents partis pour créer une complémentarité dont l’aboutissement est de bâtir le pays”.

Tarik MIRA, Secrétaire national aux relations internationales du RCD “Octobre 1988 demeure un repère fondateur”
Les évènements du 5 Octobre 1988, au-delà de l’importance de son aspect tragique, ont d’abord révélé a posteriori que le multipartisme s’est installé par effraction dans notre pays. À cette période, les contradictions internes avaient, en effet, atteint leur sommet au sein d’un système déjà obsolète et vieillissant. Ce dernier a implosé. Le souffle de la légitimité historique, elle-même usurpée, s’est épuisé.
Une nouvelle génération frappe à la porte de la scène politique avec ses propres aspirations et d’autres espérances.
Le 5 Octobre, c’est une jeunesse marginalisée, ignorant toute manipulation, qui quêtait le changement, synonyme d’une meilleure vie dans le respect de la dignité humaine. Contre la hogra, cette revendication portée par les manifestants n’est autre que cet immense désir d’être respecté et considéré. La pureté et la fraîcheur juvéniles d’une population en révolte tournant au drame ont révélé, à la face du monde, la vraie nature du système : une variante sous-développée du totalitarisme qui recourt sans vergogne à la violence sanguinaire.
Quelles que soient les manipulations, Octobre 1988 n’est pas le fruit du hasard. La société civile a commencé à s’émanciper de la force tutélaire de l’État et revendiquait la fin du monopole partisan, et ce depuis le début des années 1980. Le combat pour les libertés démocratiques et les droits de l’homme a pénétré en profondeur les esprits jusqu’à ébranler un certain nombre au sein même du système.
La chute brutale des prix du pétrole en 1986 a précipité la chute en aiguisant les frictions internes.
Octobre 1988 demeure un repère fondateur car il a soulevé une formidable espérance qui reste d’actualité. Les promesses non tenues et les détournements qui ont pu être opérés sur ce moment historique, au nom de la démocratie réduite exclusivement à l’arithmétique du nombre, ne peuvent détourner notre génération de notre mission relancée par l’élan d’Octobre 1988 : réconcilier l’Algérie avec son passé, réconcilier les Algériens avec leur État grâce à cet instrument — but et moyen — qu’est la démocratie dans sa plénitude.

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Dossier : 05 octobre (Dimanche 05 Octobre 2008)


Les symboles du système étaient la cible
La révolte des jeunes
Par : Noureddine toualbi-thaâlibi (*)
Lu : (27 fois)

En ce jour fatidique donc, les jeunes avaient trouvé un prétexte politique pour crier au monde l’étendue de leur détresse et en découdre, au péril de leur vie, avec un pouvoir disqualifié.

Le 5 octobre 1988 ! Alger offre l’image d’un désordre absolu. Voitures brûlées, édifices publics saccagés, anathèmes incessants à l’adresse des responsables de l’État algérien et, en particulier, du premier d’entre eux, le chef de l’État lui-même : le président Chadli Bendjedid. Qu’en a-t-on dit et écrit depuis cet événement inédit dans la vie d’un pays qui promettait, sous la bannière d’un socialisme ethnocentré mais triomphant, monts et merveilles à une jeunesse aujourd’hui lasse de promesses non tenues et totalement désabusées. En ce jour fatidique donc, les jeunes avaient trouvé un prétexte politique pour crier au monde l’étendue de leur détresse et en découdre, au péril de leur vie, avec un pouvoir disqualifié car réputé inapte à porter plus loin leurs aspirations vers le bien-être. Ce que des esprits mal avisés s’empressèrent aussitôt de confondre avec un banal “chahut de gamins” ou un simple “éclair dans un ciel serein” allait, de proche en proche, constituer le point de départ d’une crise politique sans précédent dans le pays et le début d’un long processus de déstructuration sociale avec, en corollaire, l’émergence d’une violence politique à connotation religieuse rarement égalée dans l’histoire du monde. Et comme ce fut le cas pour les événements de Mai 1968 en France, il faudra patienter quelques années avant que l’ensemble des analystes de cette drôle de jacquerie en admettent, par-delà les manipulations politiques qui l’ont évidemment rendue possible, le caractère symptomatique d’une structure sociale déjà malade de ses ambivalences idéologiques autant que de sa mauvaise gouvernance.

Une structure sociale malade de ses ambivalences
Pour ma part, j’étais à l’époque des faits recteur de l’université d’Alger et j’avais donc, en cette qualité, tout le loisir d’observer de près l’étendue des contradictions qui travaillaient en profondeur la société globale, dysfonctionnements multiples auxquels j’avais d’ailleurs déjà consacré plusieurs ouvrages. J’y notais en particulier le caractère syncrétique et particulièrement dangereux, du point de vue des processus psychologiques de construction de l’identité individuelle et sociale, du système d’enseignement national singulièrement porté par des valeurs paradoxales : apologie du socialisme concomitamment à celle d’un ethnocentrisme culturel et religieux, populisme tapageur servant de justification à une loi d’orientation de l’enseignement où la démocratisation du savoir se confondait avec la massification des effectifs scolaires et universitaires ; rejet des idées de qualification et de performance dans les systèmes de formation au prétexte qu’elles pouvaient conduire à un élitisme de type néocolonial… Le manuel scolaire était pour sa part tellement saturé de messages contradictoires qu’il figeait la pensée de l’élève dans des conflits de signification se situant, parfois, aux confins de la posture schizoïde : le référent au sacré y côtoyait, comme dans une litanie religieuse, le profane et l’ensemble du message pédagogique était mû par un antagonisme de valeurs reproduisant celui du pouvoir politique lequel butait de longue date sur une équation fermée : comment faire pour changer (gagner la bataille du développement) tout en restant le même (valorisation des constituants de l’identité nationale et rejet corrélatif des facteurs de l’altérité culturelle) ? N’était-ce pas l’époque où le concept de l’algérianisation s’était assorti d’un culte quasi religieux des “constantes nationales” procurant ainsi une justification politique aux obsessions authenticitaires des dirigeants algériens ? On ne sait encore de quel corpus idéologique ils s’étaient alors inspirés, mais le fait est qu’ils semblaient convaincus que leur légitimité politique gagnerait en densité avec le parachèvement d’un système de gouvernance à nul autre pareil : qui ne se souvient que c’est à partir de l’idée saugrenue d’un socialisme spécifique qu’on a pu ensuite halluciner une “industrie industrialisante”, mélanger tradition et modernité, associer islam et “révolution permanente”, le rouge et le noir (mais sans Stendal)… Syncrétisme de valeurs érigé en système de gouvernance, voilà qui va — pour le moins — donner du fil à retordre à tous ceux qui, minorés et déconfits, militaient encore pour une Algérie plurielle et résolument tournée vers les catégories de la modernité intellectuelle et sociale.
De sorte qu’il devient un truisme psychologique de dire, aujourd’hui, que les jeunes générations d’Octobre 1988 furent tout naturellement imbibées, depuis l’école et l’université, par ces ambivalences culturelles et politiques. Sans doute en a-t-il résulté une confusion prévisible dans leurs repères identitaires et, dans certains cas étudiés, une angoisse latente qui attendait le moment idoine pour se manifester violemment. Et, cependant, que ce facteur endogène posait déjà problème, un second facteur, exogène celui-là, allait rendre l’explosion d’Octobre inévitable : il faut se souvenir, en effet, qu’en ces temps d’incertitude politique, la société algérienne était déjà engluée dans un processus de paupérisation inquiétant et que ces jeunes avaient certainement intériorisé les angoisses existentielles de leurs parents dont ils n’étaient pas dupes. On peut alors supposer que la formidable logique d’exclusion sociale qui frappait leurs aînés les interpellait douloureusement avant qu’ils ne soient eux-mêmes et par identification gagnés par la même détresse.
Qui ne se souvient de tous ces jeunes exclus du système scolaire, livrés à la rue et vivant au quotidien une misère à variables multiples, sociale, économique et sexuelle ? Ceux que l’on appelait les hitiste, sobriquet infamant désignant des jeunes subissant l’exclusion sociale, sont encore dans toutes les mémoires. Ailleurs, ce sont des cohortes entières de nouveaux licenciés des universités qui allaient brutalement déchanter en découvrant que leur diplôme avait cessé d’être, sur le marché du travail, ce sésame qui devait leur ouvrir grandes les portes de l’ascenseur social.

Mouvement prévisible
Et les exemples peuvent se multiplier à l’infini pour confirmer le caractère prévisible de ce vaste mouvement de protestation sociale qui avait donné naissance aux tragiques événements du 5 Octobre 1988. On voit bien aujourd’hui que les conditions politiques et sociologiques qui les avaient précipités sont restées, mutatis mutandis, inchangées sinon qu’elles se sont exacerbées sous l’effet combiné d’une gestion encore intuitive de la cité, d’une globalisation économique féroce accentuant les clivages sociaux et les égoïsmes et, surtout, en raison de la même défection des pouvoirs publics à l’égard du sort d’une jeunesse aujourd’hui plus vulnérable que jamais : gageons que “le harrag” d’aujourd’hui qui rêve de quitter le pays au péril de sa vie est exactement le même que le “hitiste” d’hier qui aura à présent décidé d’aller au bout de sa logique suicidaire ; que le jeune sommairement formé dans la mosquée à une représentation eschatologique du monde (la vie n’a de sens que si elle prépare la mort) et qui “monte au maquis”, se suicide de la même façon que cet autre jeune qui met discrètement fin à ces jours bien que sans raison apparente, comme on dit. C’est pourquoi je prétends, en dernière analyse, que tous ces jeunes oubliés et laissés pour compte de la société participent de la même problématique en tant qu’ils partagent en commun le même désespoir, le même dégoût vital.
Au cœur du problème, il y a – il faut bien le dire et le redire — un formidable déficit d’espérance ! (el amal en arabe). Et en terminant cette rapide incursion dans un épisode particulièrement douloureux de l’histoire nationale, il me revient à l’esprit le mot de Napoléon Bonaparte qui disait que l’on ne conduit le peuple que si l’on a un projet à lui proposer et qu’un chef est avant tout “un marchand d’espérance”. L’espérance en cette terre d’Algérie ? Denrée rare s’il en fut !

N. T.-T.
*Professeur écrivain-psychanalyste

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Dossier : 05 octobre (Dimanche 05 Octobre 2008)


Chadli s’adresse aux algériens le 19 septembre 1988
Le discours qui met le feu aux poudres
Par :Hamid Saïdani
Lu : (155 fois)

Beaucoup d’encre a coulé sur le fameux discours du président Chadli prononcé le 19 septembre 1988, en réponse au climat politique et social délétère qui régnait dans le pays à cette période.

Des observateurs et même des acteurs politiques de l’époque estiment que le lien était direct entre les propos du chef de l’État et les évènements du 5 Octobre 1988. Cette allocution a-t-elle été réellement la mèche qui a poussé au drame d’Octobre ? Contenait-elle, comme le disaient d’autres, les germes de l’explosion sociale tant redoutée ? Serait-il vrai que sans ce discours, il n’y aurait pas eu Octobre 1988 ? Mais qu’est-ce qui aurait poussé Chadli à se montrer aussi dur dans son discours ? Ce que l’histoire retient en tout cas, c’est que le Président n’avait fait que réagir à une véritable campagne de déstabilisation venant de l’intérieur même du régime et qui l’avait ciblé y compris dans sa famille. Le climat social, avec des pénuries chroniques des produits de première nécessité, doublé des rumeurs les plus folles, n’était en réalité que la partie visible de l’iceberg. En haut lieu, les opposants au Président — classés dans la catégorie des conservateurs — étaient décidés à en découdre avec le pouvoir en place. C’est donc là une situation qui n’était pas pour arranger le chef de l’État qui, malgré tout, n’était décidément pas près de céder devant ses détracteurs. En atteste, en effet, son discours du 19 septembre, lors duquel Chadli riposte et annonce clairement qu’il ne veut pas se laisser faire.
Les cercles opposés à Chadli auraient interprété ce message comme une déclaration de guerre. Les hostilités étaient donc ouvertes avec au milieu de l’arène une population prise en otage et excédée par la corruption qui ronge le pays et la répression des libertés. L’un des éléments à retenir de ce discours, c’est qu’il a révélé au grand public, à l’opinion nationale et internationale, ce conflit jusque-là larvé qui empoisonnait les rapports au sein du régime. Le chef de l’État ne franchit, cependant, pas le pas pour désigner nommément ses opposants. Qui avait suggéré à Chadli une telle réplique ? Mouloud Hamrouche et Ghazi Hidouci, à l’époque respectivement secrétaire général de la présidence de la République et ministre de l’Économie, tous deux très proches du chef de l’État, étaient chargés de cette mission.
“Nous avons, comme c’était notre rôle, préparé au Président un discours radical dans le fond et non dans la forme”, tient à nuancer M. Hidouci (Octobre : ils parlent, de Sid-Ahmed Semiane). “Dans les conditions de crise économique et de décomposition des appareils politiques et administratifs de l’époque, nous avions proposé que le Président devait signifier aux protagonistes, qui se démenaient pour partager le pouvoir après un nouveau congrès du FLN dans le gouvernement et l’armée, qu’il refusait de négocier avec eux un nouvel équilibre au pouvoir parce que les démarches politiques, sociales et économiques sur lesquelles ils se positionnaient aboutissaient toutes à l’impasse”, explique-t-il. Tentant de rejeter sa responsabilité quant à la tournure des évènements, l’ancien ministre de l’Économie estime que “le Président a fait un discours radical dans la forme et non dans le fond”. “Il a préféré menacer tout le monde sans proposer de changement. C’était politiquement inefficace et cela a entraîné la levée de boucliers. En réalité, nous avons été déçus par ce discours”, reconnaît-il, cependant.
Même Larbi Belkheir, qui était à l’époque directeur de cabinet au palais d’El-Mouradia, a préféré prendre ses distances par rapport au discours du 19 septembre et admet le caractère provocateur du laïus. “J’ignorais le but recherché à travers ce discours. Je ne sais pas comment il a été préparé car je n’y avais pas pris part. Je crois que le Président a voulu surtout sensibiliser l’opinion sur ses projets de réformes et sur les difficultés qu’il rencontrait dans leur mise en œuvre”, avait-il affirmé dans l’ouvrage consacré par Sid Ahmed Semiane aux évènements d’Octobre 1988. Pour M. Belkheir, le discours “bousculait les réfractaires aux réformes et il prenait à témoin l’opinion publique”. Ce qui a, selon lui, “exacerbé un peu plus les antagonismes au sein du parti et des institutions de l’État entre, d’une part, les conservateurs qui s’opposaient aux réformes ou qui tentaient de les retarder et, d’autre part, les tenants des réformes”. Les observateurs sont unanimes à relever le manque de sérénité chez le Président lors de son discours à la nation. Chose qui, semble-t-il, a surpris même ses proches collaborateurs. Quoi qu’il en soit, Chadli a rapidement suivi son discours d’actes qui ont bouleversé le cours des évènements. Si l’on se fie aux déclarations des assistants du chef de l’État, cela faisait déjà longtemps que ce dernier voulait mener des réformes.
Cependant, il ne s’attendait certainement pas à la réaction violente de la rue et les manipulations qui avaient accompagné les manifestations populaires d’Octobre 1988. Et comme le coup était déjà parti, il était décidé à aller au bout de sa logique. Il commence, ainsi, par un changement de gouvernement en désignant le défunt Kasdi Merbah comme chef de gouvernement à la place d’Abdelhamid Brahimi. L’équipe des réformistes lance la révision de la Constitution qui va, après le 23 février 1989, modifier fondamentalement la donne politique dans le pays en consacrant l’ouverture démocratique et en instituant pour la première fois depuis l’indépendance le multipartisme.

H. S

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Dossier : 05 octobre (Dimanche 05 Octobre 2008)


Témoignage de m. Messaoudi, secrétaire général de l’union locale UGTA de Rouiba
“La zone industrielle de Rouiba n’a pas enfanté le 5 Octobre, elle l’a subi”
Par : Madjid T.
Lu : (19 fois)

Rouiba, samedi 22 septembre 1988. Une atmosphère lourde règne sur la zone industrielle. Les travailleurs de la Société nationale des véhicules industriels (Snvi) arborés de leur “bleu” commentent les propos de Chadli tenus trois jours auparavant. Des propos que tout le monde trouvaient surprenants, y compris ces ouvriers qui ont trouvé curieux qu’un président de la République incite le peuple et ses travailleurs au soulèvement. “Les ouvriers égyptiens ont fait la grève pour contester le prix de la viande”, une phrase factieuse qui va apporter de l’eau au moulin des 18 000 travailleurs de la SNVI exacerbés par l’érosion de leur pouvoir d’achat. D’autant plus que ce discours concordait avec cette histoire de “prime du jouet” de 200 DA que la direction de la Snvi a décidé, pour des raisons économiques, de ne plus accorder aux travailleurs. Une décision qui souleva un tollé général chez les travailleurs et qui va enclencher une vague de protestation au niveau de toutes les unités de la Snvi. “Le discours provocateur de Chadli qui coïncidait avec la contestation des lycéens a pris tout le monde de vitesse”, témoigne M. Messaoudi, secrétaire général de l’union locale UGTA de Rouiba. Le lendemain, soit le 29 septembre, des centaines de travailleurs se regroupent à l’intérieur du complexe Snvi. En plus de la prime du jouet, les grévistes exigent la valorisation des salaires et la baisse des prix des produits alimentaires. La contestation ne tarde pas à gagner les autres unités telles que l’Enel, l’Emal, Anabib, GTP, Batimetal, l’Enab et l’Enag. “Les conseils de Chadli et les pénuries de l’époque (café, cigarettes, semoule et huile) ont contribué au pourrissement du climat social”, dit M. Messaoudi qui ajoute que “des assemblées générales ont été organisées même à 5h, mais, curieusement, à chaque fois qu’un accord est conclu, il est torpillé le lendemain”. Les sections syndicales et les fameuses cellules d’entreprise du parti FLN sont dépassées, voire contestées par une frange des travailleurs sous l’impulsion d’islamistes visiblement déterminés. Ces derniers, qui étaient en hibernation, ont pu développer en douceur leur offensive grâce aux moussalas (mosquées aménagées à l’intérieur) mises à leur disposition. Ce sont ces noyaux qui donneront naissance, quelques mois plus tard, au SIT (Syndicat islamique des travailleurs). Le samedi 1er octobre, les travailleurs sortent dans la rue. “La manifestation se voulait pacifique et elle répondait à la volonté des travailleurs qui ne demandaient que leurs droits, mais d’autres personnes animées par d’autres considérations ont bloqué la route”, affirme pour sa part M. Chebab Aomar, secrétaire général de l’union de wilaya de Boumerdès. La manifestation dégénère et la police a eu recours aux bombes lacrymogènes pour dégager la route. “Le lendemain, des groupes d’individus étrangers sont venus à bord de véhicules banalisés pour inciter les travailleurs à sortir dans la rue”, indique M. Chebab. Et c’est ainsi que le mardi 3 octobre, des manifestants survoltés s’attaquent à l’unité de l’Enatb et à la brasserie de Réghaïa, et tentent de l’incendier. L’attaque est repoussée par des centaines de travailleurs armés de gourdins et de bâtons. Le 5 octobre 1988, d’autres casseurs gonflés à bloc se dirigent vers les zones industrielles de Rouiba et de Réghaïa. Ils seront chassés encore une fois par les ouvriers. “Non, la zone industrielle a subi le 5 Octobre et ne l’a pas enfanté !” affirme M. Messaoudi. Ce fervent défenseur du secteur public avertit que “ceux qui n’ont pas vécu le 5 Octobre au niveau de la zone ne peuvent pas comprendre notre combat contre la privatisation et le bradage de nos entreprises”. Mais beaucoup pensent que ce “chahut de gamins” a pour origine une prime du… jouet.

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Dossier : 05 octobre (Dimanche 05 Octobre 2008)


Des témoins racontent
Azwaw Hadj Hamou : “J’ai fait le mort de peur d’être achevé…”
Par :Karim Kebir
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A lui seul, il incarne sans doute toute l’étendue du drame des évènements d’Octobre dont nous célébrons le 20e anniversaire. Et, probablement, les désillusions qui les ont accompagnés. À 41 ans, Azwaw Hadj Hamou, issu d’une famille révolutionnaire, père de trois enfants, aujourd’hui travailleur chez les cheminots, n’est pas près d’oublier cette fatidique journée du 10 octobre 1988, lorsqu’il a été criblé d’une dizaine de balles à hauteur de la DGSN. Amputé du bras gauche, portant toujours des cicatrices des éclats de balles sur son bras droit et au nez, Azwaw garde toute sa lucidité malgré les traumatismes endurés. Témoin privilégié des évènements pour avoir été au cœur de la tourmente, il nous raconte cette période où sa vie a basculé et où l’Algérie a été ébranlée dans ses fausses certitudes post-Indépendance.
“Fin de matinée du 5 Octobre, moi j’étais à Réghaïa. Les gens parlaient déjà de la situation difficile du pays et la tension était déjà dans l’air. Ce jour-là, je suis resté à la maison et je n’ai pas bougé. Deux jours après, soit samedi, je décide de descendre sur Alger. Je n’ai pas le souvenir avec précision, mais je crois que c’était ce jour où j’ai vu pour la première fois un char stationné en plein cœur d’Alger, précisément à la place baptisée aujourd’hui la “place de la Liberté de la presse”, sur l’avenue Hassiba-Ben-Bouali. Les militaires étaient souriants. J’avais à l’époque 21 ans, mais je commençais à prendre conscience déjà des enjeux et des difficultés quotidiennes. Je me rappelle aussi quand ils ont attaqué le ministère de la Jeunesse et des Sports, sis à la place du 1er-Mai, dont le rez-de-chaussée était un monoprix. Un climat de psychose y régnait. Des rumeurs sur des morts par balle ainsi que l’arrestation de militants Pagsistes (Parti de l’avant-garde socialiste, ancêtre du MDS) alimentaient les discussions des initiés. C’est alors que je décide de repartir à Réghaïa en compagnie de mon père. Sur le chemin du retour, hormis quelques barricades, aucun service d’ordre n’était à signaler. Deux jours plus tard, je redescends sur Alger, chez mon père, qui tenait un restaurant à la rue Hassiba, en contrebas du marché Clauzel, non loin de la place Maurétania. Après trois jours de fermeture, nous avions décidé de rouvrir. Vers dix heures, je reçois un appel de ma sœur qui habitait Belcourt. “Des gens, pour la plupart barbus, veulent faire une marche”, me prévient-elle. Rapidement, j’accours vers mon oncle qui avait également un restaurant non loin de l’hôpital Mustapha pour l’informer et lui dire de baisser les rideaux. À mon retour, mon père, résolu à travailler, me demande d’aller chercher du pain. La plupart des boulangeries du coin étant fermées, je décide alors d’aller vers Bab El-Oued. Sur le chemin, je rencontre une amie qui m’accompagne. Arrivés à hauteur de la place des Martyrs, nous croisons les marcheurs venus de Belcourt. Nous continuons notre chemin, lorsque arrivés à hauteur de la DGSN, des coups de sommation retentissent. Ils ne dissuadent pas pour autant les marcheurs. Et, brusquement, des coups de feu tirés on ne sait d’où sèment la panique. Les militaires postés devant l’immeuble de la DGSN commencent à tirer sans discernement. Touché par neuf balles, affalé à même le sol, près du lycée émir-Abdelkader (ex-Bugeaud), j’avais du sang partout. Des corps gisaient à côté de moi et la fille était morte entre mes bras sans que je m’en rende compte. J’ai fait le mort pendant quelques instants de peur d’être achevé. Et malgré les douleurs qui m’étreignaient, le bras gauche qui pendait, j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai marché quelques mètres en sens inverse. Le premier homme que je croise enlève sa chemise et tente de me placer un garrot sur mon bras dans l’espoir de stopper le sang qui continuait à couler. Arrivé près de la mosquée Betchine, à la place des Martyrs, un barbu me prend à l’infirmerie de la société de rénovation de La Casbah pour me prodiguer les premiers soins. De là, quelqu’un, dont je ne me souviens pas très bien, me prend dans sa fourgonnette vers l’hôpital Mustapha. J’y resterai trois mois. Je n’oublierai jamais la solidarité du service médical de l’hôpital. Ce n’est que le lendemain que mon père sera informé grâce à une femme de nationalité française qui y travaillait. Depuis, il souffre du diabète…”
Malgré cette dure épreuve, Azwaw n’obtiendra pas le statut pour lequel l’association des victimes d’Octobre, créée quelques mois après les évènements, s’est battue. “Bitat (président de l’Assemblée alors) nous a reçus le 1er anniversaire des évènements ; il nous a promis de satisfaire toutes nos doléances mais, malheureusement, il démissionnera après…” “On avait l’espoir en Boudiaf, il est mort après…” Que retient-il de ces vingt ans ? Un seul mot revient dans la bouche de cet homme qui ne semble pas être gâté par le sort : la désillusion. “Il faut que Chadli, Hamrouche et Betchine parlent pour connaître la vérité sur ces évènements. Au début, il y avait un grand espoir pour la démocratisation du pays, mais aujourd’hui, tous les acquis ont été remis en cause. Et rien de plus édifiant que l’emprisonnement de Benchicou, un homme auquel il voue un grand respect et auquel il a tenu à rendre un hommage à travers ces colonnes.” Azwaw, qui perçoit une pension de près de 18 000 da le trimestre et qui n’a commencé à travailler qu’il y a quelques années seulement, dispose d’un statut… “d’accidenté de travail”.

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Dossier : 05 octobre (Dimanche 05 Octobre 2008)


Les évènements ont duré une semaine
Les 7 jours qui ébranlèrent le système
Par :Rédaction de Liberte
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L’explosion populaire d’Octobre 1988 a été précédée pendant tout l’été 1988 de mouvements de colère de la population dans plusieurs villes du pays (Tazmalt, Mostaganem, Béjaïa, Sétif…), mais aussi par des mouvements de grève dans plusieurs entreprises du pays (SNVI Rouiba et zone industrielle d’Alger). Ces signes avant-coureurs ont culminé dès la fin du mois de septembre par le mot d’ordre de grève générale pour le 5 octobre 1988.

Mardi 4 octobre - Dès le début de la journée, une angoisse palpable règne sur Alger. En fin de matinée, les lycéens d’El-Harrach sortent dans la rue et sont violemment réprimés par les forces de l’ordre.
Dans la soirée, des manifestations éclatent dans les quartiers de Bab El-Oued, Chevalley, Fougeroux, Climat-de-France ainsi qu’à Bachdjarrah. Cette nuit, la première barricade a été dressée à Bab El-Oued avec un camion du service de nettoiement.
Les heurts avec les forces de l’ordre sont très violents (utilisation de gaz lacrymogènes) et durent jusqu’à l’aube. C’est au cours de cette journée que les premières arrestations sont opérées.

Mercredi 5 octobre - Le mouvement s’étend à d’autres quartiers de la capitale (El-Biar, Bouzaréah, Ben Aknoun, Alger-Centre, 1er-Mai, Belcourt, Hussein Dey, El-Harrach, Kouba) et à plusieurs villages de l’Algérois (Dély-Ibrahim, Boufarik, Blida, Aïn Taya, Bordj El-Bahri, Chéraga, Aïn Benian, Staouéli… ).
Les manifestants détruisent sur leur passage tout ce qui symbolise l’État, la répression, l’arbitraire, les pénuries et le luxe (ministère de
l’Éducation nationale, ministère
de la Jeunesse et des Sports, commissariats de police, kasmas, Souks El-Fellah, Galeries, Riad El-Feth ainsi que certains magasins privés de luxe). Ce jour-là, les premiers morts de l’intifadha sont signalés.

Jeudi 6 octobre - De grosses manifestations et de violents accrochages ont lieu vers 10h dans le centre-ville (Didouche-Mourad, Mohammed-V) et vers 12h à Belcourt et à la place du 1er-Mai. La police (commissariat de la rue Robertseau), et des francs-tireurs (rue Ferhat-Boussaâd) tirent sur les manifestants.
Devant l’ampleur de l’intifadha, l’état de siège est instauré dans Alger et l’Algérois, et l’armée encercle les quartiers populaires et protège les quartiers résidentiels dès le début de l’après-midi. À El-Biar, vers 17h, un char tombe en panne et les soldats tirent sur les manifestants : 2 morts sont dénombrés et le bilan s’alourdit d’heure en heure dans tous les quartiers de la ville. En effet, l’armée tire sur la foule qui tente d’incendier le magasin Districh de la place des Martyrs.

Vendredi 7 octobre - La première nuit d’état de siège a été relativement calme et le couvre-feu relativement respecté. L’armée en profite pour se déployer dans toute la ville.
Après la prière du vendredi, partent de Bab-El-Oued et de Belcourt deux marches silencieuses vers l’hôpital pour réclamer les corps des victimes. Elles sont bloquées à proximité de l’hôpital. Après avoir parlementé avec les soldats, l’imam de Bab El-Oued, organisateur de la marche, demande aux manifestants de se disperser, évitant ainsi le pire.
Dans l’après-midi, l’intifadha s’étend à d’autres régions du pays (Oran, Annaba, Mostaganem, Tiaret, Guelma, Chlef, Médéa, Djelfa... ).
Dans certaines villes, l’armée intervient sans que l’état de siège soit élargi à l’ensemble du territoire national. À Alger, le couvre-feu est avancé à 22h et l’armée se déploie à l’intérieur du quartier de Bab El-Oued.

Samedi 8 octobre - Un calme relatif règne durant toute la journée, mais des manifestations éclatent à Kouba, Bachdjarrah, 1er-Mai, Didouche-Mourad et Mohammed-V. L’armée riposte violemment, et des observateurs notent la recrudescence des francs-tireurs. Vers 23h, le ministre de l’Intérieur intervient et reconnaît explicitement l’ampleur de l’explosion populaire.

Dimanche 9 octobre - Les arrestations continuent, les médias annoncent que le Président s’adressera à la nation le lendemain, lundi 10 octobre à 20h.

Lundi 10 octobre - À l’appel d’Ali Benhadj, des milliers de citoyens (jeunes, vieux, femmes) se rassemblent à Belcourt, les jeunes des quartiers nord-ouest (Casbah, Bab El-Oued, Bologhine, Soustara) entreprennent une marche silencieuse et pacifique vers Bab El-Oued. Au niveau
du siège de la DGSN, un franc-tireur ouvre le feu, l’armée riposte en mitraillant la foule, bilan : 36 morts. À 20h, les Algérois, encore sous le choc du massacre, écoutent le discours du Président. L’appel au calme semble être entendu par les manifestants et la situation revient peu à peu à la normale. L’état de siège est levé le 12 octobre. Vient ensuite l’heure des bilans : 179 morts sont dénombrés officiellement, plus de 500 d’après les Algérois, des milliers d’arrestations et les personnes libérées témoignent des tortures subies.
Le soulèvement par lequel le peuple a manifesté sa colère n’a pu trouver, en l’absence de cadre crédible d’expression et de débat, que la rue comme lieu d’expression de son malaise, son désarroi et sa révolte. Il trouve son origine dans :
n les inégalités sociales criantes, en particulier le contraste existant entre les privilèges, le confort indécent et le luxe d’une classe liée au régime et la dégradation des conditions sociales de la majorité du peuple algérien ;
n la baisse du pouvoir d’achat, l’envol du prix des produits de première nécessité et la stagnation des salaires, pour la majorité insignifiants ;
n la pénurie de produits de première nécessité (aliments et médicaments) ;
n les problèmes de la vie quotidienne (logement, eau, transport) ;
n la faillite du système éducatif qui jette chaque année des milliers de jeunes à la rue, sans travail ni qualification ;
n une politique de compression de personnel et de non-création d’emplois qui se traduit par un chômage endémique et laisse notre jeunesse sans perspectives ;
n l’abolition d’acquis sociaux tels que la médecine gratuite, la sécurité sociale et le soutien des prix ;
n mais aussi, il traduit un désir profond de changement du système politique et une crise profonde de confiance entre le peuple et l’État représenté par le parti, les autorités locales et les organisations de masse.
Source : bulletin du Comité de coordination interuniversitaire

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y’a un avant et un après le 5 octobre, dont nous n’avons pas mesuré encore toute les conséquences. Octobre 88 n’est pas un accident de parcours, mais le résultat d’une gestion, la Conséquence d’une politique, dont les signes avant coureurs se sont multipliés dés le début de la décennie 1980, fertile en événements qui ont secoué le pays en profondeur. La politique intransigeante du pouvoir a porté les fruits de la violence, avec le 20 avril 1980, l’arrestation des dirigeants islamiques, le maquis de Bouyali, le procès des dirigeants de la LADDH et des enfants de martyrs de la Révolution, l’agitation dans les mosquées, les stades, les universités, le prix très bas du baril de pétrole, le chômage très élevé, la dette extérieure très importante, l’affaire Mecili.
Les violences policières sont entrées dans l’ère du quotidien. L’impunité est la règle. L’humiliation une fois vécue et acceptée, prépare à subir d’autres, à obéir et à se taire en toutes circonstances, à ne plus pouvoir vivre et penser qu’en aliéné.
Le peuple algérien dévoré par son Etat a le sentiment que la politique nationale, la vie politique, telles qu’elles sont gérées, se font au dessus de lui, sans lui et contre lui. Ceux qui monopolisent le pouvoir, trouvent qu’il n’est pas bon de le partager, ni de l’éclairer, n’écoutent personne, croient tout savoir, n’avoir rien à apprendre, mais tout à enseigner. Ils ont besoin pour durer de bafouer les règles les plus élémentaires de la démocratie, d’exercer une répression qui a tendance non pas à régler les problèmes, mais à éliminer ceux qui les posent, à supprimer les contradictions en éliminent les contradicteurs.
Le divorce est entre le peuple dépouillé de ses droits et le FLN parti unique, qui est supposé le représenter et parler en son nom, pour l’empêcher de parler.
L’année sociale 1988 s’annonce morose et même pleine de périls. Une réaction populaire profonde est au bout du chemin.

I- Les événements du 5 octobre 1988.

Je m’incline une nouvelle foi avec émotion indicible, devant la mémoire des victimes d’octobre 1988, et représente 20 ans après mes condoléances les plus attristées à tous les membres de leurs familles, avec l’expression de mon profond respect.
Les événements d’octobre 88 découlent d’une lutte de clans exaspérée au sein du pouvoir. C’est à l’intérieur de ce dernier que se déroule à huit clos, secret, rude, le plus dur des combats, entre deux tendances divergentes, contradictoire, l’appareil du FLN pour qui la vie politique est conçue avec un seul objectif, pérenniser le système politique en place depuis l’indépendance du pays, et la présidence de la république avec les partisans de l’ouverture contrôlée, du libéralisme. Le FLN dont l’UGTA est une de ses organisations de masse, a incité discrètement les 18000 ouvriers de la zone industrielle de faire grève, qui s’est étendue à tout le pays, bien que sachant que c’est l’armée qui est au pouvoir, et qu’il n’est que l’instrument de sa domination. En Algérie, qui détient l’armée, tien le pouvoir.
Pour camoufler les rivalités et les divergences stratégiques au sommet de l’Etat, le pouvoir a déclaré le parti d’avant-garde socialiste(P.A.G.S) qui avait infiltré de nombreux syndicats, responsable de la tragédie, et a procédé à de nombreuses arrestations de ses cadres et militants. Cette déclaration est de toute évidence contraire à la réalité des faits. La rue disponible qui ne supporte pas le vide, est occupée par les jeunes qui ont détruit de nombreux symboles du pouvoir. Ce dernier sous-estimant la profondeur du mécontentement et du désespoir des jeunes, en particulier l’exaspération de ceux sans débouchés, en rupture d’école et de travail, flottant entre petits boulots aléatoires et les combines inavouables, qui se posent avec angoisse la question relative à leur avenir, et celui de la société, a vu leur irruption brutale dans la rue. La coupe est pleine, c’est le ras le bol, car les jeunes ne peuvent aller plus loin dans la démission et la soumission.
L’explosion populaire du 5 octobre 1988, s’inscrit dans la mémoire collective du peuple algérien, comme une rupture du pays légal avec le pays profond, un cri de colère et de désespoir d’une jeunesse stressée, flouée, soufrant du double syndrome d’exclusion et de frustration, longtemps drapée dans le silence, en accusations muettes, qui refuse un pouvoir centralisé, bureaucratique, dictatorial. Elle clame par sa descente dans la rue, sa volonté de mettre fin aux entraves à ses droits et à sa liberté, par la mise en œuvre de la démocratie et des droits de l’Homme.
L’état de siège décrété par le président Chadli Bendjedid le 6 octobre 1988 a placé sous le commandement militaire, les forces de sécurité et toutes les autorités civiles et administratives. Chaque jour apporte une sinistre moisson d’outrages à la dignité humaine qui est plus chère que la vie. Quand l’homme est humilié, il oublie qu’il habité par la vie et il la risque. La ligne rouge celle du sang a été franchie par les militaires, les gendarmes et les policiers, qui ont tiré avec des armes de guerre, sur des enfants, des adolescents, des jeunes et des moins jeunes, qui n’avaient comme défense que leurs mains nues.
Pour le pouvoir la répression doit être sans pitié afin d’être efficace, menée dans le plus grand secret, en dehors des fondements essentiels de l’Etat de droit, des lois et des droits de l’Homme. Les violations des droits de l’Homme ont été à grande échelle, systématiques, massives. Le pouvoir a avoué 500 morts, le double est à retenir. La torture est de notoriété publique, généralisée. Défendre les droits de l’Homme, c’est en premier lieu dénoncer la torture, dont l’interdiction doit être immédiate, globale, efficace. De nombreux témoignages des victimes sont bouleversants, difficiles à supporter. Une manifestation islamique dirigée par Ali Benhadj, dispersée au niveau du siège de la DGSN à Bab el Oued a fait 10 victimes.
Au nom de la sécurité, les libertés ont été altérées et aliénées. Il faut naviguer au milieu des vents violents, et faire face à la tempête, condamner les atrocités commises et les horreurs perpétrées.
La LADDH s’est fixée un devoir, une obligation et une règle, parler et écrire pour dénoncer les arrestations arbitraires, la torture, les camps de travaux forcés dans le sud du pays, diffusés par la télévision. Marcherait-on à ce point sur la tête en Algérie ? J’ai été convoqué par le général Mohamed Betchine qui venait d’être désigné à la tête de la sécurité militaire par le président en remplacement du général Lekhal Ayat. Trois raisons sont supérieures à la raison d’Etat : celle du droit contre l’injustice, celle de la liberté contre la tyrannie, celle de l’humanité contre la barbarie.
Les intellectuels dans leur grande majorité ont renoncé à leur rôle de critiques et d’analystes rigoureux, pour servir de simples relais et d’instrument du pouvoir.qui sait flatter sait aussi calomnier. Les médias tous publics, la télévision, et la radio et la presse en particulier, ont diffusé non pas l’information mais la propagande, règle totalitaire, qui a pour but de manipuler l’opinion publique considérée comme étant passive et perméable aux principes idéologiques et doctrinaux du pouvoir, qui justifient la dictature.
La justice ne contrôle pas la police politique, qui a le pas sur elle. Il faut compter avec la sécurité militaire, bien rodée, d’une redoutable efficacité. Pour qui la fin justifie les moyens ; elle détient l’essentiel des leviers de la justice, pèse d’un poids démesuré sur son fonctionnement et sur ses décisions. Les tribunaux et Cours de justice, ne sont pas des lieux ou la justice est rendue, mais des instances politiques où le pouvoir juge ses adversaires.

II- L’après octobre 1988

Quel regard peut-on parler sur l’après octobre 1988 ? Je ne propose pas une solution mais un élément de réflexion. Il faut avancer en regardant devant vers l’avenir et laisser au temps le soin de découvrir toute la vérité sur octobre 1988.
La meilleure façon de commémorer octobre 88, c’est d’attirer l’attention sur les tâches qui ne sont pas accomplies par manque de direction ; pour certains le 5octobre a été une vague, mais une fois que la marée s’est retirée, il n’est resté que des pierres. L’action menée était en effet dispersée, n’a pas été plus soucieuse de rigueur et de cohérence, mais a ouvert malgré ses faiblesses un espace politique qui a profité au peuple. La politique menée est ouverte sur le mouvement du temps, dispose d’une peine liberté de conception, d’expression, et d’initiative, a obtenu des résultats concrets et peut en espérer d’autres ;
Lorsque des jeunes manifestent pour retrouver le chemin de la dignité et de la liberté, luttent pour sortir le pays de l’arbitraire, de l’injustice et de la corruption, c’est que rien n’est perdu et que l’espoir est permis ; tout pouvoir a besoin d’être contesté ; il ne peut être que contesté de l’extérieur et non transformé de l’intérieur.
Le pouvoir a compris que la réforme de la société n’est possible que par la démocratisation, d’où : la Constitution du 23 février 1989, la ratification des pactes internationaux des droits de l’Homme de 1966, reconnaissance d’associations à caractère politique (A.C.P) et d’associations autonomes, la liberté de la presse.
Allons dire un jour que le pire est derrière nous, et que le meilleur est devant ?
Le peuple algérien ne peut vivre dans la dignité, la justice et la liberté, car il n’y’a pas de justice sans liberté, ni de liberté sans justice, que s’il a acquis ses droits humains, qui sont l’un des rares lieux privilégiés de rencontre des Algériens de tous bords, l’ultime valeur à défendre.
La devise dans la voie du devoir nous rappelle constamment, que les droits de l’Homme reviennent de loin en Algérie, mais qu’ils ont encore un long chemin à parcourir, et qu’il faut être plus sensible, plus motivé, plus déterminé à poursuivre la route à faire, qu’au chemin parcouru.

Alger le 30 septembre 2008
Maître Ali Yahia Abdennour

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5 Octobre 88, tout bascule : Vingt ans après... la grande désillusion
par Mohamed Bensalah

Deux décennies après le redoutable «Tsunami» qui a failli ravager la capitale et d'autres villes, où en est l'Algérie?

La situation politique, sociale et économique, s'est-elle améliorée? Les Algériens vivent-ils mieux? Que reste-t-il finalement d'Octobre 88?

La sentence de l'algéro-baromètre est sans nuance. Non seulement le pays ne s'est pas redressé mais en plus, la température politique ambiante suscite bien des soucis. Seul le désenchantement est en hausse. Au désespoir suicidaire des jeunes, à l'érosion constante du pouvoir d'achat, à la crise du logement, à l'enracinement de la pauvreté, sont venus s'ajouter, un terrorisme endémique, un chômage ravageur, une corruption diabolique qui a pris racine dans tous les secteurs et à tous les niveaux et enfin un saccage méthodique de l'environnement. Tapie à l'ombre du pouvoir, la mafia politico-financière, veille au grain.

Et pourtant, vus de loin, tous les attributs, tous les insignes dignes d'un Etat de droit semblent réunis: une Constitution, un Sénat, un Parlement, une Assemblée populaire, des juges et des magistrats pour dire le droit, des avocats pour plaider en faveur des citoyens lésés, des tribunaux administratifs chargés de trancher les litiges et de réparer les injustices, un pluralisme politique à la place de l'inamovible parti unique, une économie de marché en remplacement du dirigisme économique, un champ médiatique ouvert à toutes les formes d'expressions, des prud'hommes et des inspections de travail chargées de faire respecter le droit du travail et de poser des limites à l'arbitraire des pouvoirs privés et administratifs... Mais, à y voir de plus près, le tableau n'est guère enthousiaste. Un léger zoom laisse entrevoir les failles et les tares d'un système à bout de souffle. La mauvaise gouvernance a été sanctionnée par le fort taux d'abstention durant les élections législatives du 17 mai 2007 (plus de 70% si l'on inclut les bulletins nuls). Lorsque la paupérisation gagne de larges couches de la société, aucune paix sociale ne peut être durable lorsqu'elle est la résultante de la distribution passive de la rente issue des hydrocarbures.

Que diraient nos valeureux «chouhada» s'ils pouvaient revenir et voir les nouveaux maquis de la désespérance, de la drogue, du suicide, de la «hogra» et de la «harga» pour un quignon de pain, du banditisme en col bien blanc? Que diraient-ils des privilèges indécents (salaires faramineux, jusque 30 fois le smig, retraites dorées, villas somptueuses, terrains sans limites, terres agricoles...), que s'est octroyée la nouvelle «l'élite» autoproclamée?

Vingt années après les évènements tragiques qui ont secoué le pays, le souvenir s'est estompé dans les esprits. Inaudibles sont les appels des intellectuels, des médias et autres empêcheurs de tourner-en-rond qui n'ont pas encore été récupérés par le système.

Espérons que ce 20e anniversaire soit, enfin, «commémoré» comme il se doit. Espérons qu'il soit rendu hommage aux centaines de jeunes «martyrs» sacrifiés sur l'autel de la bêtise humaine, alors qu'ils manifestaient pour un emploi, pour un logement ou tout simplement contre la malvie. Espérons, enfin, que la lumière soit faite sur ces massacres sanglants qui ont endeuillé le pays, car jusqu'à ce jour, rien, ou presque rien, n'a été dévoilé sur cette «tache noire dans l'histoire du pays».

Soulèvement populaire? Mouvement spontané d'essence démocratique? Conspiration planifiée bien à l'avance? Complot d'obscures officines? Règlement de compte au sein du sérail politique? «chahut de gamins»?... A ce jour, les thèses les plus contradictoires s'affrontent, chacun y allant de sa propre interprétation. Une chose est certaine: la majorité des victimes fauchées par des balles et torturées par les services de sécurité de l'époque, étaient des adolescents. Les survivants handicapés, qui ont la quarantaine aujourd'hui, veulent percer le mystère afin de sortir du statut décidé en haut lieu, «d'accidentés du travail», alors qu'ils étaient chômeurs.

Le moment n'est-il pas venu de faire la lumière sur ce pan dramatique de notre histoire? Pourquoi ce lourd silence de la part de nos historiens? Qu'est-ce qui empêche les responsables de constituer une autorité nationale moralement inattaquable formée de personnes ayant prouvé leur capacité à assumer courageusement leurs opinions pour éclaircir les zones d'ombre? Ces personnes auraient la charge de faire un audit exhaustif de la situation en Algérie depuis 1988, y compris au sujet des morts, des disparus, des massacres collectifs et bien d'autres drames...

Quelles leçons tirer de ces vingt dernières années?

Des améliorations? Des acquis décrochés au lendemain de l'octobre sanglant? Certes, mais plus qu'éphémères. Vingt ans après, le bilan est particulièrement édifiant, sur tous les plans. Sur le terrain politique, le Front de Libération nationale (FLN), fortement contesté en 1988, est revenu en force. Aujourd'hui, majoritaire dans toutes les institutions de l'Etat, il accepte de faire alliance avec des «opposants» d'accord avec lui sur tous les plans. Soudainement appréhendée comme obstacle majeur à la bonne marche du système, la loi fondamentale du pays fait l'objet d'une levée de boucliers. Acquise au prix du sang et du sacrifice suprême, la Constitution de février 1989 va bientôt voir ses verrous forcés, son article 74 ne permettant pas les prolongations après les deux mi-temps réglementaires. Le «verrouillage protectionniste» est partout de rigueur et dans tous les domaines. Minée par le mimétisme et inquiète pour son avenir, la presse dans sa globalité n'ose plus aborder «les sujets qui fâchent». Rares sont les journaux à audience indéniable qui ne caressent pas dans le sens du poil. Que dire de la véritable OPA sur le puissant média public, la chaîne nationale aux harmonies dissonantes, qui demeure «unique» malgré ses nombreux clones.

Au plan sanitaire, tout commentaire reste superflu. Une visite dans un hôpital vaut mieux que mille discours: structure en abandon, délabrement des locaux, malades livrés à eux-mêmes... Les nantis, qui ne font plus confiance aux structures sanitaires locales, préfèrent se soigner en Europe. Au plan religieux, la manipulation de la religion à des fins politiques se poursuit. A croire que les leçons n'ont pas été tirées de cette véritable perversion meurtrière dont les conséquences furent désastreuses. Au plan syndical, la loi autorise le pluralisme (ils étaient nombreux à avoir déposé des demandes d'agrément) mais l'application des textes semble poser problème. Au niveau éducatif, aux pesanteurs bureaucratiques et obscurantistes qui ont toujours pesé sur les institutions, sont venues s'ajouter l'absence d'esprit critique et d'autonomie et les restrictions en matière de pensée rationnelle, fermée aux valeurs universelles. La rentrée 2008 houleuse a bien montré les limites d'une gestion désastreuse. Au plan sécuritaire, la déferlante meurtrière dont on ne finit pas de voir les rebondissements, continue de sévir outrageusement. En l'espace de quelques mois, la liste des morts et des blessés à Zemmouri, Skikda, Jijel, les Issers, Bouira et ailleurs, continue à s'allonger.

Au plan économique, loin de s'estomper la crise s'est amplifiée. Une énigme insoluble! Comment est-il possible qu'un pays qui n'a jamais vendu autant de pétrole à des prix aussi élevés, et qui dispose d´un matelas de 120 milliards de dollars, se trouve dans l'incapacité de sortir du cruel sous-développement qui le mine? Comment est-il possible que tant de richesses accumulées fondent comme neige au soleil, alors que la machine économique demeure en panne, que l'exode des cerveaux se poursuit, que le taux de chômage augmente et que les listes des «harraga» tentés par l´aventure de l´exil s'allongent. Le malaise général se nourrit de la désillusion. La spirale est infernale. La misère est, aujourd'hui, endémique. Les jeunes, même diplômés, appréhendent l'avenir avec circonspection. Nombreux sont ceux qui avouent ouvertement ne plus se sentir concernés par le devenir du pays.

Le système mafieux qui s'est consolidé d'année en année, blanchit, au vu et su de tout le monde, l'argent du racket et les butins de guerre. Le retentissant procès de la plus grande affaire d'escroquerie qu'a connue le pays, a laissé un goût amer. Il n'a même pas réussi à mettre fin aux appétits voraces des ripoux qui continuent à faire main basse sur toutes les richesses du pays.

Après l'arrêt du processus électoral de 1991, Jean Ziegler député européen de Genève avait fait parvenir à feu Boudiaf, fraîchement arrivé à la présidence, une lettre dénonçant l'existence de beaucoup de biens immobiliers, sur les boulevards de Berne et de sa ville (Genève), appartenant directement à des notables du régime ou à des intermédiaires. Ce dernier, malheureusement, n'a pas eu le temps de les récupérer. Il fut assassiné, au terme de six mois d'exercice. On peut en vouloir à Transparency international qui vient de classer l'Algérie à la 92e place sur 140 pays. On peut se révolter verbalement contre la corruption (comme le fait en permanence le discours officiel qui ne cesse de souligner que la corruption devenue fatalité). Mais l'essentiel est dans l'action et cette action tarde à devenir réalité. Les preuves de laxisme abondent: le projet de création d'une agence gouvernementale de lutte contre la corruption est reporté aux calendes grecques malgré la publication de son décret de création, il y a 22 mois, ou encore le rejet du sacro-saint principe de déclaration du patrimoine qui constitue une voie royale à l'enrichissement illicite.

Alors que se rapproche l'échéance présidentielle d'avril 2009, alors que le pays semble être un vaste chantier, jamais l'avenir de l'Algérie n'a semblé aussi incertain. Jamais l'espoir n'a autant manqué à une jeunesse mise hors-jeu par une caste qui pratique le mandarinat politique.

La criminalité qui s'enracine dans les villes, les agressions, les viols, les violences, les kidnappings et les émeutes qui se multiplient sont à prendre au sérieux, tout autant que la paupérisation de la société. Il y a urgence à agir et à prendre en charge les véritables préoccupations et besoins de la société. Tous les signes de lassitude et de mécontentements qui se manifestent, ici et là, ne doivent pas être pris à la légère. Il y a véritablement problème et ce problème c'est nous.

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Octobre, ses promesses, son gâchis
par Abed Charef *

Le «chahut de gamins» d'Octobre 1988 a définitivement transformé l'Algérie. Bilan de deux décennies de tâtonnements.

Octobre n'a pas tenu ses promesses. Malgré la facture très élevée payée par l'Algérie en vies humaines et en traumatismes, l'après-Octobre 88 n'a pas seulement déçu, mais il a donné lieu à un immense gâchis, d'autant plus dur à admettre, que les premiers moments qui ont suivi ces événements avaient laissé entrevoir un formidable espoir de libération de la société.

Sur fond de crise financière aigue et d'impasse politique, Octobre 1988 a donné l'impression accélérer la mort d'un système politique qui arrivait au terme de son existence. Malgré les drames, la brutale intrusion de la rue dans la vie politique répondait à une réelle attente de la société. Mais, non seulement Octobre n'a pas permis l'émergence d'un nouveau système politique, moderne et performant, mais après une courte récréation, le pouvoir a repris la main pour tenter de recoller les morceaux et rétablir progressivement l'ancien système.

Deux décennies après ces événements, le bilan est donc bien maigre. Le multipartisme n'a pas abouti, et l'économie de la prébende a remplacé celle de la rente, alors que le pays aspirait à une économie de marché performante. La corruption s'est étendue de manière effrayante, et les gaspillages atteignent des sommets insoupçonnés. Le système économique a atteint un degré d'inefficacité difficile à imaginer, avec un mélange destructeur d'inégalités, de passe-droits et d'opacité.

Ce n'est pourtant pas dans le domaine des richesses matérielles que le pays a le plus souffert, même si les dégâts sont énormes. Ce sont d'autres domaines qui ont connu la dégradation la plus grave, et qui confirment définitivement que la richesse d'un pays n'est pas faite de l'accumulation d'argent ou d'usines, mais plutôt par les valeurs morales, le savoir et le savoir-faire, la viabilité des institutions et la cohésion sociale. Sur nombre de ces terrains, l'Algérie a énormément reculé par rapport à 1988.

Le pays a perdu la stabilité, la sécurité et la paix civile qui étaient en vigueur avant Octobre 1988, tout en subissant une aggravation effrénée des aspects négatifs du système du parti unique. Cela donne, au bout du compte, cette impression d'un pays totalement bloqué, incapable de prendre la moindre initiative. A l'heure actuelle, tout le monde admet que la situation est intenable, y compris le Président Abdelaziz Bouteflika, qui a admis que le pays était dans l'erreur. Mais il n'y a pas de force politique, sociale ou administrative en mesure de mettre fin à la dérive et de réorienter le pays vers la construction d'un projet viable.

Les dégâts sont d'une gravité exceptionnelle. Le pays est condamné à subir de terribles hémorragies sans pouvoir y remédier. Ces hémorragies sont de toutes sortes. Hémorragies financières, par exemple, avec un pays qui transfert annuellement plus de 30 milliards de dollars à l'étranger, soit mille dollars par personne, sans arriver à assurer le bien-être de ses habitants. Hémorragies humaines, surtout, avec ces élites systématiquement aspirées par des pays dont les systèmes politiques sont plus performants : l'Algérie a transféré vers la France, en quelques années, plus de médecins, de professeurs d'université et d'ingénieurs que le France n'en a formé en 130 années.

L'élite, au sens du savoir, était réduite à l'obéissance ou au silence sous le système du parti unique. Aujourd'hui, elle est condamnée au silence ou à l'exil, ce qui donne un appauvrissement affligeant de la pensée et du débat politiques. Seule l'allégeance est admise comme activité politique, comme en attestent les campagnes en faveur du troisième mandat : ce n'est pas le troisième mandat lui-même qui pose problème ; le vrai problème se trouve plutôt dans la servilité, la déchéance morale et politique dont font preuve les laudateurs du troisième mandat.

Deux décennies après Octobre 1988, ce fonctionnement du système politique algérien apparaît absurde. Personne n'y trouve son compte. Pas même l'homme introduit qui brasse des milliards, car il sait que sa situation est très fragile, et que sa fortune est à la merci d'une décision bureaucratique ou d'un fait du prince. Quant à ceux qui sont au bas de l'échelle sociale, il n'est même pas nécessaire de les évoquer. Ils sont condamnés à un désespoir quotidien, tragiquement exprimé à travers le phénomène des harraga.

Octobre aura finalement été une grande illusion. Les luttes qui l'ont précédé, les énergies qu'il a mobilisées et les espoirs qu'il a nourris n'ont pas débouché. Le débat politique, de bonne facture, qui a précédé Octobre s'est poursuivi après les événements, avant d'être emporté dans la tourmente, lorsqu'un parti de type totalitaire, a voulu remplacer un système totalitaire par une dictature religieuse. Depuis, le pays continue de s'enfoncer.

En Octobre 1988, l'Algérie tendait à se rapprocher de la Corée du Sud. Vingt ans plus tard, elle a tendance à s'africaniser. En Octobre 1988, le pays n'avait pas d'argent, mais il y avait une réelle volonté de s'en sortir. En 2008, l'Algérie a de l'argent, mais elle est incapable de se dessiner un avenir.


* Auteur de «Octobre, un chahut de gamins», paru en 1989.

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Octobre n’a pas inspiré nos artistes
L’oubli collectif
Par : Rachid boudjedra
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Les émeutes d’Octobre 1988 ont été une déferlante qui allait déclencher une véritable révolution en Algérie. Une révolution, c’est-à-dire un changement radical et très profond de la situation existante. Une mort lente et une léthargie profonde régnaient à cette période dans le pays, coincé entre une corruption déchaînée et sans vergogne, et une situation économique désastreuse.
Le pays était à la limite de la faillite et de la cessation de paiement avec une dette énorme de 24 milliards de dollars et un baril de pétrole à 9 dollars. En outre, les islamistes se préparaient dans l’ombre à prendre le pouvoir par tous les moyens, d’autant plus que l’État était faible, voire inexistant, et surtout obnubilé par son impuissance et sa gabegie.
Pourquoi cette tornade meurtrière n’a-t-elle pas inspiré les artistes algériens d’une façon générale ? En ce qui me concerne, j’ai tout de suite réagi contre cette boucherie effroyable et cette torture systématique par un gros roman écrit en arabe et intitulé le Désordre des choses, paru en 1990 aux éditions Bouchène, à Alger, et dont la traduction en français a été publiée par les éditions Denoël à Paris en 1991. Je ne pense pas avoir été le seul artiste qui ait réagi à cette tragédie dont nous payons encore aujourd’hui les effets. Mais il est évident que la plupart des supports artistiques n’ont pas été inspirés par ce sujet holocaustique.
Pourquoi cette cécité ou cet oubli collectif ? Je pense que ce que la presse occidentale avait appelé, à l’époque, les émeutes de la faim mais qui étaient une véritable révolution politique, avait surpris tout le monde. Ensuite, il est vrai que les artistes ne créent pas tout de suite sur des sujets trop brûlants mais ont besoin de recul pour pouvoir exprimer, à travers leurs supports, leur révolte, leur honte et leur chagrin devant de tels horreurs de l’histoire. L’histoire ne se met pas en scène à chaud.
Pour l’écrivain, le photographe, le peintre, le cinéaste et le musicien, le temps de la maturation est assez
long. La preuve en est que, maintenant, beaucoup d’œuvres d’art produites par la nouvelle génération de jeunes artistes est en train de s’emparer de ce thème. Et c’est peut-être une bonne chose que ce temps de latence et ce besoin de recul aient fonctionné pour donner aux nouveaux créateurs le moyen de s’exprimer talentueusement sur cette révolution d’Octobre 1988.

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Le vent d’octobre a soufflé aussi sur la braise islamiste
Jusqu’aux portes de “la décennie rouge”
Par :Saïd Chekri
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C’est le grand paradoxe d’octobre 1988 : porteur d’ouverture et de changement démocratiques, il n’aura pas permis de disqualifier la mouvance islamiste. Celle-ci pèsera lourdement, durablement et de manière sanglante sur la suite des événements.

Chahut de gamins” pour certains, œuvre de la lutte des clans à l’intérieur d’un système, alors à bout de souffle, pour d’autres ; le 5 Octobre aura été, en dépit de toutes les lectures fondées ou non, un tournant majeur dans l’histoire de l’Algérie indépendante. Il aura engendré, comme effet immédiat et durable, la fin du règne du parti unique, marquant ainsi un moment de transition entre deux époques bien distinctes. Un moment de transition, à coup sûr, mais pas forcément un moment de rupture radicale. Car un vent de liberté et de démocratie aura soufflé certes, cet automne-là, sur la vie politique et sociale du pays, mais ce vent-là aura également eu l’effet d’un éventail sur “la braise islamiste” qui, déjà, ne manquait pas de vivacité.
L’explosion d’Octobre intervenait alors que la “pensée intégriste”, incarnée par un Benhadj tonitruant et déjà célébrissime et un Abassi à l’affût de son heure, avait profondément imprégné la société. Dans ces cités-dortoirs qu’étaient devenus les quartiers populaires des grandes villes, notamment chez les jeunes et quelquefois même dans les universités, ces deux noms étaient plus connus que ceux de Saïd Sadi, Hachemi Cherif, Sadek Hadjerès ou même Aït Ahmed et Boudiaf ! L’école est passée par là. Mais pas seulement, la mosquée et les médias du parti unique étant déjà de la partie. Il faut dire que, tout au long des années 1980, les deux hommes, ainsi que d’autres, comme Bouslimani et Nahnah, avaient largement eu le temps de bâtir leur réputation, aidés, tolérés, voire encouragés par un régime plus soucieux de sa survie qu’angoissé par les menaces que l’instrumentalisation de la religion faisait peser sur la paix civile, la cohésion nationale et la pérennité de l’Etat. Même les maquis du MIA (Mouvement islamique armé) de Bouyali et de ses lieutenants qui écumaient la Mitidja n’avaient pas suffi à alarmer les tenants du pouvoir. Ces derniers étaient plus assidus et plus déterminés dans leur lutte contre les foyers de la contestation sociale qui commençait à se faire entendre, à la faveur d’un mécontentement grandissant au sein du monde du travail frappé alors de plein fouet par la récession économique. Le pouvoir montrait encore plus de vigilance et autant de méfiance envers l’opposition démocratique qui faisait des libertés et des droits de l’homme les principaux axes de son discours. Apparue dès les premières années de l’indépendance, elle devenait de plus en plus entreprenante depuis le Printemps berbère et commençait à prendre le pas sur la mouvance de gauche qui, mue par son célèbre mot d’ordre de “soutien critique”, était plus ou moins tolérée du fait qu’elle ne se posait pas en alternative au régime d’alors.
Du coup, ce dernier aura vite trouvé “la bonne riposte” : dresser les partisans de la religion contre ceux des libertés et des droits de l’homme et vice-versa. La recette, jugée infaillible, devait amener les uns et les autres à se neutraliser, et le pouvoir n’avait plus qu’à jouer le rôle d’arbitre en dosant savamment répression et permissivité, manœuvre et laxisme. C’est ainsi qu’il arrivait à Benhadj de croiser à Lambèse Sadi, Ferhat Mehenni et Ali Yahia Abdenour, des hommes qui ne lui ressemblaient en rien. Abassi Madani pouvait pendant ce temps sillonner le pays et multiplier les conférences dans les universités. Au lendemain des événements d’Octobre, lorsque des réformes en profondeur, devenues incontournables, allaient être mises en œuvre, cette “ruse” qui tenait lieu de stratégie sera reconduite. C’est en son nom que sera légalisé le Front islamique du salut (FIS) fondé par Abassi Madani et Ali Benhadj. “Nous avons besoin du FIS comme abcès de fixation.” L’aveu était de Mouloud Hamrouche, qui venait de succéder à Kasdi Merbah à la tête du gouvernement et dont les propos, jamais démentis à ce jour, étaient rapportés par l’hebdomadaire le Nouvel Hebdo.
Certes, il n’était pas facile d’enrayer un mouvement qui prenait les allures d’un raz-de-marée. La mouvance islamiste était devenue si populaire qu’il y avait un risque réel et immédiat à tenter de l’endiguer, encore plus de la combattre dans le contexte d’octobre et de ses lendemains.
Au demeurant, la fameuse marche du 10 octobre, qui était conduite par Benhadj lui-même et qui s’était soldée par le bain de sang que l’on sait, était plus une démonstration de force qu’une tentative de récupération de la révolte populaire. “Il va falloir compter avec nous.” Tel était le message des islamistes. Un message qui sera reçu cinq sur cinq puisque, depuis, plus aucun obstacle ne sera dressé devant l’irrésistible avancée de l’aile dure de l’islamisme en Algérie. Si bien que, bientôt, Benhadj s’en ira en treillis au ministère de la Défense où il sera reçu par le général Khaled Nezzar. Celui-ci a dû faire semblant d’oublier que le port de la tenue militaire était interdit aux civils ! Aux yeux de certains, cela n’était, au mieux, qu’un geste purement anecdotique à mettre à l’actif d’un trublion, d’un jeune agitateur qui avait du mal à vieillir. Sauf que pour les troupes à Benhadj, le geste achevait de faire de lui “le héros qui défie les impies” dans leur antre même. Un tel acte s’ajoutant à l’attaque contre la caserne de Guemmar, menée par un élu local du FIS, voilà qui annonçait bien la couleur. Bien avant cela, en novembre 1982, l’assassinat de l’étudiant Kamel Amzal à Ben Aknoun déclinait déjà la nature violente de l’islamisme incarné alors par les Frères musulmans, mais aussi l’incroyable permissivité du régime.
De fait, la suite allait couler de source, jusqu’aux portes de “la décennie rouge” : grève insurrectionnelle de mai-juin 1991, marquée par des semaines de violence, puis le coup de massue du 26 décembre 1991, suivi de l’arrêt du processus électoral. La “décennie rouge” pouvait commencer. On y avait bien travaillé tout au long de “la décennie noire”. Si bien travaillé que le vent de démocratie d’octobre n’y aura rien pu.

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Octobre se répétera-t-il ?
Par : Nasser Djabi (*)
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Avant chaque automne, la presse nationale se distingue par des manchettes du genre “Une rentrée sociale dure attend les Algériens”, “L’Algérie au bord de l’explosion sociale”. Cela dans le but évident de rappeler au citoyen que ce qui s’est produit le 5 octobre 1988 risque de se répéter. Avant d’expliquer pourquoi les événements d’Octobre 1988 ne risquent plus de se reproduire, il convient d’abord de comprendre réellement ce qui s’est passé ce jour-là. À mon avis, ce qui s’est passé est en rapport direct avec la crise du système politique algérien, miné de l’intérieur par des antagonismes de clans et des intérêts qui l’ont mis dans une impasse.
Les multiples forces politiques présentent au sein de différentes institutions politiques et sécuritaires et dans les appareils du système que les tentatives de réformes entamées au début des années 1980 ont fait chou blanc. Il n’est plus possible dès lors d’envisager la réforme du système de l’intérieur. Des centres du Pouvoir ont expérimenté des réformes en se basant sur les antagonismes des clans, mais très vite, ces derniers se sont rendu compte que le rapport de force à l’intérieur des appareils ne permet pas d’entreprendre ces réformes, du fait des forces conservatrices qui ont un poids considérable dans plusieurs institutions importantes. Ce qui a créé, à l’époque, un équilibre paralysant. Le recours aux couches sociales intermédiaires citadinisées, comme base sociale jouissant et bénéficiant de l’aval de l’opinion internationale, fait partie des scénarios expérimentés pour réformer le système (exemple de l’hebdomadaire Algérie actualité, création de l’Association des enfants de chouhada et la Ligue des droits de l’homme). Mais le non-ancrage social de ces couches bourgeoises, l’atomisation de leurs directions, leur clivages linguistiques les disqualifient pour assumer le rôle de catalyseur de la scène politique. Du coup, l’appel de ces couches embourgeoisées en faveur de la démocratie, la liberté d’expression et d’organisation n’a pas trouvé de prolongement au sein des masses populaires.
Après plusieurs tentatives de réformes, toutes avortées, le mouvement social, qui commençait à apparaître dans les grandes villes, sous la houlette de jeunes citadins, est envisagé comme alternative pour réformer le système. Ce mouvement social naissant se caractérisait par la faiblesse de son encadrement politique. C’est, en tout cas, ainsi qu’apparaissait à ses débuts le mouvement social qui se présentait, en dépit de ces limites, comme une force de pression politique en dehors du système pour faire bouger la scène politique et remettre sur les rails les réformes bloquées jusque-là. Cependant, au sein du système, on était loin de penser que ce mouvement social pouvait être récupéré par l’islamisme politique, dont la présence est importante dans les milieux populaires. La force de ce courant et sa capacité de mobilisation ont été négligées par les responsables de l’époque qui n’avaient pas mesuré aussi le risque de manipulation du mouvement social dérapé vers la violence. Ce qui a exacerbé la crise dans la mise en œuvre des réformes lancées au lendemain du 5 Octobre, c’est le fait qu’elles sont lancées dans un climat caractérisé par des luttes opaques entre les différents clans qui cherchaient à accaparer, à l’exclusion des autres, les bénéfices de ces réformes. Cette absence de consensus entre les différents clans sur la manière de gérer la nouvelle dynamique, générée par une large implication des couches sociales, constitue aujourd’hui une leçon pour les centres décisionnels, soucieux de ne pas voir le scénario du 5 Octobre se reproduire une deuxième fois.
Ce qui nous manque en Algérie, c’est moins le désir d’assister à un autre soulèvement populaire que la nécessité d’un consensus entre les élites, les institutions politiques et sociales pour réformer le système politique national, lequel vit une crise étouffante depuis des années. Une crise qui dépasse aujourd’hui les individus et porte en elle les prémises d’une paralysie et les risques d’une confrontation violente au sein de la société. C’est aussi la promotion de mécanismes de dialogues et de représentations politiques, comme les partis, le syndicat, le Parlement, la presse. Autant d’espaces et d’instruments de réformes pour en finir avec les pneus incendiés, les barricades sur la voie publique et toutes les autres formes de violence qui sont les seuls instruments de communication de générations d’Algériens avec l’État et ses institutions.

N. D.
* Universitaire sociologue

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Elle était otage du parti unique
La presse algérienne sort du tunnel
Par : Azzeddine bensouiah
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Que serait la presse algérienne aujourd’hui sans les “événements d’Octobre 1988” ? La question mérite d’être posée, sachant que les journalistes, qui se battaient en 1988 et bien avant, n’avaient à aucun moment songé à voir le pluralisme médiatique et la liberté d’expression devenir une réalité palpable. Mais comment en est-on arrivé là ? Flash-back.

Tout a commencé un certain 9 mai 1988. Dans une déclaration datée de ce jour-là, “au terme d’un débat large et franc organisé au siège de l’Union des journalistes, écrivains et interprètes (UJEI), (structure satellite du parti unique), plus tard baptisé Sid-Ali-Benmechiche (du nom du journaliste de l’APS tué par balle durant les émeutes d’Octobre 1988), le collectif interorgane des journalistes, qui s’appellera par la suite Mouvement des journalistes algériens (MJA) relève (...) un recul évident du professionnalisme (...). Cette dévalorisation de notre métier constitue une grave atteinte à la crédibilité de l’information (...), une pratique généralisée de la censure et de l’autocensure (...), les journalistes souhaitent vivement que leurs unions professionnelles et sections syndicales soient à la hauteur des exigences”.
Cette mobilisation allait aboutir, quelques mois plus tard, à des “revalorisations générales des postes de travail, (attribution) de primes d’indemnités avec effet rétroactif (...), augmentation de près de 40% du salaire moyen des rédacteurs et de près de 20% celui des assimilés.
C’est la première fois que les journalistes se dotent d’un plan de carrière et d’une grille de salaires unifiée qui mettait fin aux injustices constatées jusque-là d’un organe de presse à un autre”.
Forts de leur succès et devant l’adhésion de la majorité des journalistes de l’époque, les animateurs du mouvement poursuivent leur action revendicative et signent une seconde déclaration, le 28 septembre 1988, où ils annoncent la couleur : “Il s’agit de mettre fin à l’arbitraire, (...) à la censure, à la complaisance (...), aux interdits.” Les Bureaux de sécurité et de prévoyance (BSP), installés dans toutes les rédactions de l’époque, sont vite dépassés. Même l’UJEI, du parti unique, après moult tentatives de décrédibiliser le mouvement et de le taxer d’être à la solde du Parti d’avant-garde socialiste (PAGS), finit par abdiquer.
L’explosion populaire du 5 Octobre allait donner aux journalistes une opportunité inespérée pour briser la loi de l’omerta et s’affirmer comme une force sociale et politique incontournable. Même si, dans les rédactions, les journalistes ont été empêchés de relater “les événements d’Octobre”, 70 d’entre eux se sont réunis le 10 octobre 1988 pour publier un communiqué qui entrera dans l’histoire. Ce dernier “condamne l’utilisation violente et meurtrière de la force armée”. Le mouvement se prononce pour “une information régie par un secteur public puissant et démocratique qui conserve et développe la totalité des médias et titres existant à la date d’adoption de la nouvelle Constitution au côté d’une presse d’opinion pluraliste”.
Ce fut la première déclaration politique, alors que les chars investissaient les rues d’Alger.
Le quotidien El Moudjahid sera secoué, en mars 1989, par une grève d’écriture qui durera vingt-sept jours. Cette “première grève d’envergure de la presse algérienne” n’affectera pas sa parution.
Les autres rédactions, à l’instar de celle de Révolution africaine, organiseront des journées de protestation. Un vent de liberté venait de souffler sur les salles de rédaction, même si personne n’entrevoyait la suite des événements. Le 23 février 1989, 73,43% d’Algériens approuvent par référendum la troisième Constitution algérienne qui garantit au citoyen “les libertés d’expression, d’association et de réunion” (article 39) et reconnaît le droit de “créer des associations à caractère politique” (article 40).
Par la suite, le 13 février 1990, le Conseil des ministres décide d’ouvrir le secteur de la presse écrite. “Afin de permettre l’émergence d’une presse d’opinion de qualité, le Conseil des ministres a décidé d’autoriser les journalistes en fonction actuellement dans les entreprises de presse appartenant au secteur public d’exercer dans les organes qui leur paraissent les plus conformes à leurs opinions et à leur vocation. Leurs rémunérations et l’évolution de leur carrière demeureront garanties par le budget de l’État”, lit-on dans le communiqué du Conseil des ministres.
Le MJA était, alors, déjà mort et enterré par ses propres animateurs. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c’est le jour où devait être officialisée la légalisation du mouvement, à l’occasion de la conférence nationale tenue les 13 et 14 octobre 1989 à la salle Atlas, que le MJA avait signé son arrêt de mort. Ce jour-là, Mouloud Hamrouche et son staff gouvernemental étaient les invités d’honneur. Ce jour-là, également, un invité surprise, un certain Abassi Madani, s’était joint aux funérailles.
C’est que, entre la révision de la Constitution et l’amendement de la loi sur l’information, des tractations, chapeautées par un Mouloud Hamrouche, encore en poste à la présidence de la République, ont permis d’entrevoir l’avenir de la presse publique.
Du coup, les principaux animateurs du MJA se sont retrouvés patrons de journaux privés ou publics et la parenthèse d’Octobre fut vite fermée, pour laisser place à “l’aventure intellectuelle”.

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La fin de la “récréation” démocratique ?
Par :Arab Chih
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Il est des automnes maussades qui accouchent de printemps resplendissants. Parce qu’il avait été à l’origine du printemps démocratique algérien. Octobre 88 est de ces automnes-là. Son entrée dans une nouvelle ère de liberté, l’Algérie la doit, en effet, à cette jacquerie urbaine qui, au prix de plus de 400 morts, avait réduit en décombres le système de parti unique. Certes, c’était grâce au Printemps berbère d’avril 80 que la chape de plomb qui pesait lourdement, deux décades durant, sur le peuple algérien avait été brisée. Force est de reconnaître toutefois que ce n’est qu’au lendemain des sanglants évènements d’Octobre 88, qui avaient secoué d’abord Alger puis plusieurs villes du pays, que la pensée monolithique érigée jusque-là en dogme officiel d’État avait été emportée par les vents du changement qui avaient soufflé sur le pays. Le pluralisme consacré dans la Constitution de février 1989, l’aspiration démocratique des Algériens s’était traduite sur le terrain par un formidable emballement jamais connu par le pays. Une multitude de partis politiques représentant tous les courants de pensée qui traversaient la société avait vu le jour pour disputer la représentation politique à un FLN tombé de son piédestal. Jusque-là chasse-gardée d’une UGTA omnipotente, le monde du travail avait enregistré la naissance de syndicats autonomes combatifs à souhait. Réservé aux seules organisations satellites du FLN (l’UNJA, l’UNFA...), le mouvement associatif s’était enrichi d’une foultitude d’associations activant dans divers domaines. La scène médiatique, occupée alors par une petite poignée de journaux du pouvoir de l’époque (El Moudjahid, Echaâb, Horizons, El Djoumhouria…), avait été marquée par l’avènement de la presse libre et indépendante.
Le paysage médiatique s’était agrémenté de plusieurs dizaines de titres aux différentes lignes éditoriales, au grand bonheur des lecteurs algériens qui découvraient un autre traitement de l’actualité nationale. Citadelle imprenable de la pensée unique, l’ENTV n’était pas restée en marge du changement qui avait traversé la société algérienne en organisant des débats contradictoires auxquels étaient invitées des figures de proue de l’opposition.
Ce sont là, entre autres, les inestimables acquis de la révolte juvénile d’Octobre 88 même si pour la déprécier, certains l’avaient à l’époque déjà qualifié, avec un tantinet de mépris, de “chahut de gamins” alors que d’autres la présentent aujourd’hui encore comme une manipulation s’inscrivant dans la lutte féroce entre clans au pouvoir. Il reste que c’est grâce à ces acquis-là, considérés comme l’apanage des grandes nations, que l’Algérie s’était vu attribuer le qualificatif fort élogieux d’“exception démocratique du monde arabe”. Mais vingt ans après le soulèvement d’Octobre 88, que reste-t-il vraiment de sa plus-value démocratique ?
Partis politiques d’opposition, ligues des droits de l’Homme, syndicats autonomes et ONG internationales s’accordent à dire qu’en matière de libertés, l’Algérie a enregistré, ces dernières années, une forte régression. Il est vrai que l’empiétement sur les espaces de liberté avait commencé avec l’instauration de l’état d’urgence quand l’Algérie était aux prises avec l’hydre terroriste. À la décharge des autorités de l’époque, le pays était en butte à un péril majeur qui menaçait les fondements républicains de l’État algérien.
Mais depuis 2000, la situation sécuritaire s’est nettement améliorée, clame la rhétorique officielle. Or, c’est depuis, précisément, que l’Algérie démocratique a commencé à manger son pain noir. L’adoption du code pénal en juin 2001 avait sonné comme une fin de récréation à une presse indépendante par trop insolente avant qu’elle ne fasse l’objet d’un bâillonnement qui ne dit pas son nom au lendemain de l’élection présidentielle d’avril 2004. En cédant de son ton critique, la presse algérienne s’est aseptisée et le journalisme d’impertinence a cédé la place à un journalisme de connivence.
Si le multipartisme est toujours en vigueur, les partis politiques ne bénéficient plus des mêmes conditions pour exercer leur rôle. Exclue des médias publics comme la télévision et pénalisée par les fraudes électorales successives, l’opposition s’est vue contrainte à jouer le rôle de figurant dans un paysage politique dominé par un chef d’État omniprésent et une alliance présidentielle constituée par le triumvirat FLN-RND-MSP. Depuis juin 2001, aucune manifestation publique n’est tolérée. Le Parlement algérien, qui compte en son sein quelques députés de l’opposition, n’est qu’une chambre d’enregistrement ne jouissant, dans les faits, d’aucune prérogative à même de contrôler et encore moins contester l’action de l’Exécutif. C’est dire que le champ politique algérien est à ce point verrouillé qu’aucune remise en cause des options du régime n’est possible. S’ils sont seuls à animer la scène syndicale, les syndicats autonomes ne sont toujours pas reconnus officiellement, au grand bonheur de l’UGTA qui, avec la bénédiction des autorités, garde le monopole de la représentation du monde du travail.
Sans conteste, en Algérie, l’espace des libertés s’est réduit comme une peau de chagrin. Et cette crispation politique imposée au pays par le régime a amené certains à dire de l’Algérie d’aujourd’hui qu’elle vit dans un système de parti unique sans le parti unique. Question : s’achemine-t-on vers une remise en cause du cap démocratique pris par l’Algérie au lendemain des évènements sanglants d’Octobre 88 en passant par pertes et profits les 400 victimes et tous les malheurs qui s’en sont suivis ? On n’en est pas encore là, certes. Mais cette sombre perspective est loin d’être une vue de l’esprit.

A. C.

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Elles ont été initiées Sous la pression des évènements
Les réformes ont démarré dans le sang
Par :Khaled R.
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Les leçons économiques de la révolte populaire ne semblent pas être tirées. Les évènements d’Octobre 88 ont justifié les réformes économiques. En novembre 1988, étaient publiés les cahiers des réformes, couronnement des travaux de l’équipe des réformateurs, qui comptait comme membres, Ghazi Hidouci, l’un des architectes des changements, marquant le démarrage des réformes. Le modèle d’économie dirigée en faillite, ayant conduit, selon des analystes, à la crise d’Octobre, l’Algérie prenait depuis carrément option pour l’économie de marché. Les premières décisions importantes le furent en 1991, avec la nomination de Hamrouche à la tête du gouvernement. L’Algérie ouvrait son marché. Pour la première fois, le principe du commerce industrialisant était brandi. Une liste de grandes sociétés étrangères qui voulaient investir en contrepartie de l’accès au marché. Les constructeurs Renault, Peugeot, Fiat, notamment, annonçaient leur intention de réaliser des usines d’assemblage automobile en Algérie. Cette parenthèse libérale a été vite fermée. La dégradation de la situation politique allait conduire à un changement à la tête de l’État. La démission de Chadli, l’arrêt du processus électoral, le retour de Boudiaf et son assassinat jusqu’à l’installation du HCE dans un contexte de montée de la violence islamiste, autant d’évènements saillants ayant marqué une époque sanglante, à l’origine d’une mise en œuvre difficile de l’agenda des réformes.
L’Algérie évoluait, notons-le, dans un contexte de dégradation de la situation économique et sociale. La chute des prix du baril en 1986 allait conduire à une aggravation de l’endettement du pays. Une grande partie des ressources en devises tirées des exportations d’hydrocarbures était utilisée pour rembourser la dette. Cette mauvaise santé financière conjuguée à l’inertie politique liée à la lutte de clans au pouvoir allait détériorer le climat social et conduire au 5 Octobre. L’Algérie était entrée dans un engrenage dangereux où elle devait employer l’essentiel de ses moyens financiers pour rembourser sa dette.
C’était intenable. En situation de cessation de paiement en 1993, elle était contrainte de rééchelonner sa dette. Pour cela, elle devait conclure avec le FMI, en 1994 et 1995, des accords de mise en œuvre d’un plan d’ajustement douloureux, en contrepartie d’un allégement de sa dette extérieure. Sous contrainte du FMI, l’Algérie allait, de 1994 à 1998, accélérer les réformes. Elle a libéralisé son commerce extérieur en 1995, procédé à la convertibilité du dinar pour les opérations courantes en 1997, appliqué un programme de liquidation des entreprises déficitaires ayant entraîné la suppression de 400 000 emplois et entamé le processus de privatisation.
Au terme de ce plan, l’inflation était plus maîtrisée, les équilibres macroéconomiques rétablis et la vérité des prix enregistrée pour la quasi-totalité des produits. La nouvelle époque était marquée par la fin des monopoles publics dans la majorité des secteurs de l’économie. À partir de 1998, l’Algérie allait avoir les coudées plus franches. Elle a reconquis sa souveraineté financière. Mais deux objectifs fondamentaux du plan d’ajustement n’étaient pas atteints : une plus grande diversification de l’économie et un système statistique fiable. Dix ans après la fin de ce programme, peu de progrès ont été enregistrés dans ces deux chantiers. “Ce plan d’ajustement, c’était de la cosmétique”, observe un expert. Du reste, le bilan de la privatisation reste modeste. Des pans de l’appareil de production, restant dans le giron de l’État, risquent de fermer.
Aujourd’hui, si l’Algérie a bien avancé dans la mise en place d’une économie de marché : secteur privé prédominant, liberté du commerce et des prix, liberté accordée en principe à l’initiative privée, elle n’est pas sortie d’une logique de rente. Il faut voir là l’une des causes d’un taux de chômage hyperélevé chez les jeunes. L’efficacité et la compétitivité ne sont pas encore au rendez-vous. Résultat : comme en 1986, l’Algérie n’est pas, à moyen terme, à l’abri d’un retournement du marché pétrolier.

K. R.

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Témoignage d’une jeune fille née le 5 octobre 88
Jungle en folie
Par : Miled Abbès
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Je somnole dans ma rivière assoupie, lorsque de sourdes clameurs me parviennent. Ça ne ressemble en rien au ramage enchanteur qui égaye ordinairement mon heureux barbotage. Mes yeux charbon, troublés par la fumée des eaux, arrivent à distinguer un mouvement inaccoutumé de jeunes cerfs. Herbivores, pacifistes, sédentaires, ils avaient pour habitude de brouter une herbe de plus en plus rare, la croupe adossée à des arbres plus que jamais présents. Leur impétuosité dépassait rarement le bruyant heurt de leurs bois. Mais là, carrément ça gronde, ça se déchaîne, ça a tout l’air d’un soulèvement. Et le souvenir des lynx qui rôdaient la nuit d’hier me revient subitement à l’esprit. Avaient-ils détecté l’émeute qui fermentait ? La vue devient plus nébuleuse, les revendications plus persistantes, mais je distingue tout de même les guépards qui chargent. Qui peut être aussi véloce, autant féroce, qui tue et se perpétue, qui offre les meilleurs festins aux charognards ? Je les devine en cercle autour d’un triangle qui s’ouvre puisque le centre gît. Je les perçois, humant l’odeur du sang, tantôt ricanant, tantôt dissimulant un rictus infâme. Et quand le crépuscule frappera avec la prévisibilité que ne lui dispute que le mensonge, je verrai toute cette laideur se délecter de la beauté qui n’est plus. Je ferai la connaissance des hyènes, cette société à la dominance femelle. Entre-temps, ce qui m’intrigue, c’est le lion et ses sempiternelles siestes diurnes ! Je conçois bien que le jaguar, perché sur cette branche, savoure son spectacle attitré, mais le lion, paresseux même en de telles circonstances, c’est sidérant !Je suis oppressée, je dois absolument sortir de là, il faut que je descende le cours de la rivière, mais le vent de la colère ne cesse de souffler, et le courant ne facilite rien. Il fait nuit et je ne veux pas assister au funeste lâchage des tigres et des léopards, les félidés solitaires. Le tigre distingue les couleurs, il sait où aller, il ne partage jamais son territoire, il le marque, il attaque de côté ou de dos, jamais de face. Le léopard est éclectique dans son menu, il sait que faire, il tue par strangulation et suspend ses victimes pour les tenir hors de portée du lion et des hyènes.
L’inquisition a démarré et moi je dors, dors, dors, pour mieux jaillir.
- Mon Dieu !
- Qu’as-tu ma fille, tu trembles, tu transpires ?
- Je viens de faire un affreux cauchemar !
- Raconte, ma chérie
- J’étais un poisson et…
- Tu te rappelles hier, à ton anniversaire, lorsque tu nous as accablés en nous demandant de te raconter les évènements du 5 Octobre 88, mais autrement. J’ai remarqué que tu es partie dormir désappointée par la répétitivité du scénario. Je crois que dans ton sommeil, tu as dégringolé vers ton état fœtal, tu as exploité la base de données qui était stockée, tout en faisant ta propre lecture. Autrement dit, tu t’es montrée créative, on ne peut y échapper lorsqu’on est né un 5 Octobre 88. N’est-ce pas ce jour que tout ce qui allait bercer et percer l’Algérie a été créé ! Dors ma fille, demain tu dois te lever tôt pour aller à l’université.
- En tout cas maman, le poisson que je ne suis plus sait que je ne serai jamais une biche !
Miled Abbès



Dernière édition par Admin le Dim 5 Oct - 23:55, édité 1 fois

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ont une idée vague de cet événement historique de l’Algérie 5 Octobre 1988 : ce qu’en pensent les étudiants
Par : Djazia SAFTA
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Interrogés sur les évènements du 5 Octobre 1988, la grande majorité des étudiants ignore tout ou presque de cette date fatidique. Souvent pensifs, ces jeunes, pour la plupart, sont âgés de 19 ans. C’est-à-dire moins âgés que les évènements eux-mêmes. Dans leur tête, il n’y a que des clichés. Ce que les autres, ceux qui s’en souviennent, leur ont rapporté, chacun à sa manière.
Wassim et AdEl, 19 ans, étudiants en 1re année sciences commerciales “Il y avait des échauffourées et le pillage des magasins”
Rencontré à la faculté centrale, Wassim a été d’emblée pris d’un fou rire. Quelques instants plus tard, il reprendra ses esprits pour nous affirmer : “Vous vous êtes adressé à la mauvaise personne. Je ne sais rien du sujet. Posez plutôt la question à mon ami Adel. Je suis sûr qu’il a sa petite idée. C’est quelqu’un qui lit beaucoup. Me concernant, tout ce que je sais est qu’il y a eu des échauffourées.” Il continue sur sa lancée : “On m’a raconté que ce jour-là, on a distribué de la nourriture gratuitement.” Son ami Adel le corrigera tout de même : “C’était du pillage ! Les gens ont commencé à casser les magasins et ont volé tout ce qui se trouvait à l’intérieur.”

Imène, 21 ans, étudiante en interprétariat “Le 5 Octobre 88, ils ont distribué de la nourriture gratuitement. Non ?”
l “Le 5 Octobre 88 ? C’est deux jours avant mon anniversaire. Je crois que c’est le jour où ils ont distribué de la nourriture gratuitement. Non ? Je ne sais pas. Pour moi, c’est un jour comme tous les autres”, nous surprendra Imène, 21 ans, étudiante en deuxième année interprétariat.
Nesrine, 20 ans, étudiante en 2e année interprétariat “Il y avait des émeutes, ensuite le terrorisme”
Notre interlocutrice ne semble pas maîtriser le sujet. Le 5 Octobre 88 ne l’inspire guère. La jeune étudiante s’est même excusée sur le fait qu’elle ne connaît pas grand-chose. “Je suis désolée, je ne connais pas grand-chose sur le sujet. Je sais seulement que c’est le jour où beaucoup de choses ont changé dans le pays”, nous dit-elle. Elle argumente : “Tout ce que je peux dire est qu’il y avait des émeutes et juste après, il y a eu le terrorisme.” Pour finir, Nesrine nous dit : “Ce sont les seules informations que j’ai eues sur cet événement, j’espère que ça vous servira.”
Malik, 26 ans, diplômé en informatique “Il y avait 400 morts et beaucoup de manipulation !”
Exerçant dans une entreprise étatique, Malik semble maîtriser le sujet quelque peu par rapport aux autres interlocuteurs. “C’est le jour où les jeunes se sont révoltés. Ensuite, l’Algérie a connu une montée de la violence qui a coûté la vie à 400 personnes.”
D’après lui, ce soulèvement populaire est dû à de multiples raisons. “Il y a plusieurs raisons qui ont poussé les jeunes à sortir dans la rue. Le peuple était las. C’était le ras-le-bol. C’était un soulèvement contre la hogra et l’injustice.
Il y eu des manipulations politiques internes également.”

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Elle était otage du parti unique
La presse algérienne sort du tunnel
Par : Azzeddine bensouiah
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Que serait la presse algérienne aujourd’hui sans les “événements d’Octobre 1988” ? La question mérite d’être posée, sachant que les journalistes, qui se battaient en 1988 et bien avant, n’avaient à aucun moment songé à voir le pluralisme médiatique et la liberté d’expression devenir une réalité palpable. Mais comment en est-on arrivé là ? Flash-back.
Tout a commencé un certain 9 mai 1988. Dans une déclaration datée de ce jour-là, “au terme d’un débat large et franc organisé au siège de l’Union des journalistes, écrivains et interprètes (UJEI), (structure satellite du parti unique), plus tard baptisé Sid-Ali-Benmechiche (du nom du journaliste de l’APS tué par balle durant les émeutes d’Octobre 1988), le collectif interorgane des journalistes, qui s’appellera par la suite Mouvement des journalistes algériens (MJA) relève (...) un recul évident du professionnalisme (...). Cette dévalorisation de notre métier constitue une grave atteinte à la crédibilité de l’information (...), une pratique généralisée de la censure et de l’autocensure (...), les journalistes souhaitent vivement que leurs unions professionnelles et sections syndicales soient à la hauteur des exigences”.
Cette mobilisation allait aboutir, quelques mois plus tard, à des “revalorisations générales des postes de travail, (attribution) de primes d’indemnités avec effet rétroactif (...), augmentation de près de 40% du salaire moyen des rédacteurs et de près de 20% celui des assimilés.
C’est la première fois que les journalistes se dotent d’un plan de carrière et d’une grille de salaires unifiée qui mettait fin aux injustices constatées jusque-là d’un organe de presse à un autre”.
Forts de leur succès et devant l’adhésion de la majorité des journalistes de l’époque, les animateurs du mouvement poursuivent leur action revendicative et signent une seconde déclaration, le 28 septembre 1988, où ils annoncent la couleur : “Il s’agit de mettre fin à l’arbitraire, (...) à la censure, à la complaisance (...), aux interdits.” Les Bureaux de sécurité et de prévoyance (BSP), installés dans toutes les rédactions de l’époque, sont vite dépassés. Même l’UJEI, du parti unique, après moult tentatives de décrédibiliser le mouvement et de le taxer d’être à la solde du Parti d’avant-garde socialiste (PAGS), finit par abdiquer.
L’explosion populaire du 5 Octobre allait donner aux journalistes une opportunité inespérée pour briser la loi de l’omerta et s’affirmer comme une force sociale et politique incontournable. Même si, dans les rédactions, les journalistes ont été empêchés de relater “les événements d’Octobre”, 70 d’entre eux se sont réunis le 10 octobre 1988 pour publier un communiqué qui entrera dans l’histoire. Ce dernier “condamne l’utilisation violente et meurtrière de la force armée”. Le mouvement se prononce pour “une information régie par un secteur public puissant et démocratique qui conserve et développe la totalité des médias et titres existant à la date d’adoption de la nouvelle Constitution au côté d’une presse d’opinion pluraliste”.
Ce fut la première déclaration politique, alors que les chars investissaient les rues d’Alger.
Le quotidien El Moudjahid sera secoué, en mars 1989, par une grève d’écriture qui durera vingt-sept jours. Cette “première grève d’envergure de la presse algérienne” n’affectera pas sa parution.
Les autres rédactions, à l’instar de celle de Révolution africaine, organiseront des journées de protestation. Un vent de liberté venait de souffler sur les salles de rédaction, même si personne n’entrevoyait la suite des événements. Le 23 février 1989, 73,43% d’Algériens approuvent par référendum la troisième Constitution algérienne qui garantit au citoyen “les libertés d’expression, d’association et de réunion” (article 39) et reconnaît le droit de “créer des associations à caractère politique” (article 40).
Par la suite, le 13 février 1990, le Conseil des ministres décide d’ouvrir le secteur de la presse écrite. “Afin de permettre l’émergence d’une presse d’opinion de qualité, le Conseil des ministres a décidé d’autoriser les journalistes en fonction actuellement dans les entreprises de presse appartenant au secteur public d’exercer dans les organes qui leur paraissent les plus conformes à leurs opinions et à leur vocation. Leurs rémunérations et l’évolution de leur carrière demeureront garanties par le budget de l’État”, lit-on dans le communiqué du Conseil des ministres.
Le MJA était, alors, déjà mort et enterré par ses propres animateurs. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c’est le jour où devait être officialisée la légalisation du mouvement, à l’occasion de la conférence nationale tenue les 13 et 14 octobre 1989 à la salle Atlas, que le MJA avait signé son arrêt de mort. Ce jour-là, Mouloud Hamrouche et son staff gouvernemental étaient les invités d’honneur. Ce jour-là, également, un invité surprise, un certain Abassi Madani, s’était joint aux funérailles.
C’est que, entre la révision de la Constitution et l’amendement de la loi sur l’information, des tractations, chapeautées par un Mouloud Hamrouche, encore en poste à la présidence de la République, ont permis d’entrevoir l’avenir de la presse publique.
Du coup, les principaux animateurs du MJA se sont retrouvés patrons de journaux privés ou publics et la parenthèse d’Octobre fut vite fermée, pour laisser place à “l’aventure intellectuelle”.
A. B.

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Les acquis d’octobre 88 se sont effrités
La fin de la “récréation” démocratique ?
Par :Arab Chih
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Il est des automnes maussades qui accouchent de printemps resplendissants. Parce qu’il avait été à l’origine du printemps démocratique algérien. Octobre 88 est de ces automnes-là. Son entrée dans une nouvelle ère de liberté, l’Algérie la doit, en effet, à cette jacquerie urbaine qui, au prix de plus de 400 morts, avait réduit en décombres le système de parti unique. Certes, c’était grâce au Printemps berbère d’avril 80 que la chape de plomb qui pesait lourdement, deux décades durant, sur le peuple algérien avait été brisée. Force est de reconnaître toutefois que ce n’est qu’au lendemain des sanglants évènements d’Octobre 88, qui avaient secoué d’abord Alger puis plusieurs villes du pays, que la pensée monolithique érigée jusque-là en dogme officiel d’État avait été emportée par les vents du changement qui avaient soufflé sur le pays. Le pluralisme consacré dans la Constitution de février 1989, l’aspiration démocratique des Algériens s’était traduite sur le terrain par un formidable emballement jamais connu par le pays. Une multitude de partis politiques représentant tous les courants de pensée qui traversaient la société avait vu le jour pour disputer la représentation politique à un FLN tombé de son piédestal. Jusque-là chasse-gardée d’une UGTA omnipotente, le monde du travail avait enregistré la naissance de syndicats autonomes combatifs à souhait. Réservé aux seules organisations satellites du FLN (l’UNJA, l’UNFA...), le mouvement associatif s’était enrichi d’une foultitude d’associations activant dans divers domaines. La scène médiatique, occupée alors par une petite poignée de journaux du pouvoir de l’époque (El Moudjahid, Echaâb, Horizons, El Djoumhouria…), avait été marquée par l’avènement de la presse libre et indépendante.
Le paysage médiatique s’était agrémenté de plusieurs dizaines de titres aux différentes lignes éditoriales, au grand bonheur des lecteurs algériens qui découvraient un autre traitement de l’actualité nationale. Citadelle imprenable de la pensée unique, l’ENTV n’était pas restée en marge du changement qui avait traversé la société algérienne en organisant des débats contradictoires auxquels étaient invitées des figures de proue de l’opposition.
Ce sont là, entre autres, les inestimables acquis de la révolte juvénile d’Octobre 88 même si pour la déprécier, certains l’avaient à l’époque déjà qualifié, avec un tantinet de mépris, de “chahut de gamins” alors que d’autres la présentent aujourd’hui encore comme une manipulation s’inscrivant dans la lutte féroce entre clans au pouvoir. Il reste que c’est grâce à ces acquis-là, considérés comme l’apanage des grandes nations, que l’Algérie s’était vu attribuer le qualificatif fort élogieux d’“exception démocratique du monde arabe”. Mais vingt ans après le soulèvement d’Octobre 88, que reste-t-il vraiment de sa plus-value démocratique ?
Partis politiques d’opposition, ligues des droits de l’Homme, syndicats autonomes et ONG internationales s’accordent à dire qu’en matière de libertés, l’Algérie a enregistré, ces dernières années, une forte régression. Il est vrai que l’empiétement sur les espaces de liberté avait commencé avec l’instauration de l’état d’urgence quand l’Algérie était aux prises avec l’hydre terroriste. À la décharge des autorités de l’époque, le pays était en butte à un péril majeur qui menaçait les fondements républicains de l’État algérien.
Mais depuis 2000, la situation sécuritaire s’est nettement améliorée, clame la rhétorique officielle. Or, c’est depuis, précisément, que l’Algérie démocratique a commencé à manger son pain noir. L’adoption du code pénal en juin 2001 avait sonné comme une fin de récréation à une presse indépendante par trop insolente avant qu’elle ne fasse l’objet d’un bâillonnement qui ne dit pas son nom au lendemain de l’élection présidentielle d’avril 2004. En cédant de son ton critique, la presse algérienne s’est aseptisée et le journalisme d’impertinence a cédé la place à un journalisme de connivence.
Si le multipartisme est toujours en vigueur, les partis politiques ne bénéficient plus des mêmes conditions pour exercer leur rôle. Exclue des médias publics comme la télévision et pénalisée par les fraudes électorales successives, l’opposition s’est vue contrainte à jouer le rôle de figurant dans un paysage politique dominé par un chef d’État omniprésent et une alliance présidentielle constituée par le triumvirat FLN-RND-MSP. Depuis juin 2001, aucune manifestation publique n’est tolérée. Le Parlement algérien, qui compte en son sein quelques députés de l’opposition, n’est qu’une chambre d’enregistrement ne jouissant, dans les faits, d’aucune prérogative à même de contrôler et encore moins contester l’action de l’Exécutif. C’est dire que le champ politique algérien est à ce point verrouillé qu’aucune remise en cause des options du régime n’est possible. S’ils sont seuls à animer la scène syndicale, les syndicats autonomes ne sont toujours pas reconnus officiellement, au grand bonheur de l’UGTA qui, avec la bénédiction des autorités, garde le monopole de la représentation du monde du travail.
Sans conteste, en Algérie, l’espace des libertés s’est réduit comme une peau de chagrin. Et cette crispation politique imposée au pays par le régime a amené certains à dire de l’Algérie d’aujourd’hui qu’elle vit dans un système de parti unique sans le parti unique. Question : s’achemine-t-on vers une remise en cause du cap démocratique pris par l’Algérie au lendemain des évènements sanglants d’Octobre 88 en passant par pertes et profits les 400 victimes et tous les malheurs qui s’en sont suivis ? On n’en est pas encore là, certes. Mais cette sombre perspective est loin d’être une vue de l’esprit.
A. C

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Elles ont été initiées Sous la pression des évènements
Les réformes ont démarré dans le sang
Par :Khaled R.
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Les leçons économiques de la révolte populaire ne semblent pas être tirées. Les évènements d’Octobre 88 ont justifié les réformes économiques. En novembre 1988, étaient publiés les cahiers des réformes, couronnement des travaux de l’équipe des réformateurs, qui comptait comme membres, Ghazi Hidouci, l’un des architectes des changements, marquant le démarrage des réformes. Le modèle d’économie dirigée en faillite, ayant conduit, selon des analystes, à la crise d’Octobre, l’Algérie prenait depuis carrément option pour l’économie de marché. Les premières décisions importantes le furent en 1991, avec la nomination de Hamrouche à la tête du gouvernement. L’Algérie ouvrait son marché. Pour la première fois, le principe du commerce industrialisant était brandi. Une liste de grandes sociétés étrangères qui voulaient investir en contrepartie de l’accès au marché. Les constructeurs Renault, Peugeot, Fiat, notamment, annonçaient leur intention de réaliser des usines d’assemblage automobile en Algérie. Cette parenthèse libérale a été vite fermée. La dégradation de la situation politique allait conduire à un changement à la tête de l’État. La démission de Chadli, l’arrêt du processus électoral, le retour de Boudiaf et son assassinat jusqu’à l’installation du HCE dans un contexte de montée de la violence islamiste, autant d’évènements saillants ayant marqué une époque sanglante, à l’origine d’une mise en œuvre difficile de l’agenda des réformes.
L’Algérie évoluait, notons-le, dans un contexte de dégradation de la situation économique et sociale. La chute des prix du baril en 1986 allait conduire à une aggravation de l’endettement du pays. Une grande partie des ressources en devises tirées des exportations d’hydrocarbures était utilisée pour rembourser la dette. Cette mauvaise santé financière conjuguée à l’inertie politique liée à la lutte de clans au pouvoir allait détériorer le climat social et conduire au 5 Octobre. L’Algérie était entrée dans un engrenage dangereux où elle devait employer l’essentiel de ses moyens financiers pour rembourser sa dette.
C’était intenable. En situation de cessation de paiement en 1993, elle était contrainte de rééchelonner sa dette. Pour cela, elle devait conclure avec le FMI, en 1994 et 1995, des accords de mise en œuvre d’un plan d’ajustement douloureux, en contrepartie d’un allégement de sa dette extérieure. Sous contrainte du FMI, l’Algérie allait, de 1994 à 1998, accélérer les réformes. Elle a libéralisé son commerce extérieur en 1995, procédé à la convertibilité du dinar pour les opérations courantes en 1997, appliqué un programme de liquidation des entreprises déficitaires ayant entraîné la suppression de 400 000 emplois et entamé le processus de privatisation.
Au terme de ce plan, l’inflation était plus maîtrisée, les équilibres macroéconomiques rétablis et la vérité des prix enregistrée pour la quasi-totalité des produits. La nouvelle époque était marquée par la fin des monopoles publics dans la majorité des secteurs de l’économie. À partir de 1998, l’Algérie allait avoir les coudées plus franches. Elle a reconquis sa souveraineté financière. Mais deux objectifs fondamentaux du plan d’ajustement n’étaient pas atteints : une plus grande diversification de l’économie et un système statistique fiable. Dix ans après la fin de ce programme, peu de progrès ont été enregistrés dans ces deux chantiers. “Ce plan d’ajustement, c’était de la cosmétique”, observe un expert. Du reste, le bilan de la privatisation reste modeste. Des pans de l’appareil de production, restant dans le giron de l’État, risquent de fermer.
Aujourd’hui, si l’Algérie a bien avancé dans la mise en place d’une économie de marché : secteur privé prédominant, liberté du commerce et des prix, liberté accordée en principe à l’initiative privée, elle n’est pas sortie d’une logique de rente. Il faut voir là l’une des causes d’un taux de chômage hyperélevé chez les jeunes. L’efficacité et la compétitivité ne sont pas encore au rendez-vous. Résultat : comme en 1986, l’Algérie n’est pas, à moyen terme, à l’abri d’un retournement du marché pétrolier.
K. R.

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Abdelhamid Mehri s’exprime sur octobre 88
“Les jeunes revendiquaient le changement”
Par :Hafida Ameyar
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Pour lui, les ingrédients qui ont donné lieu à la révolte d’Octobre 88 sont actuellement en train de se mettre en place, en référence aux phénomènes des harragas, des kamikazes et des évènements de Kabylie en 2001.
àmon avis, la revendication principale des évènements du 5 Octobre 88 était le changement.” C’est ce qu’a déclaré, hier, Abdelhamid Mehri, au siège de la Fondation Friedrich-Ebert, à Alger. Invité par l’Association Raj, dans le cadre d’un séminaire consacré à la commémoration du XXe anniversaire du “mouvement d’octobre 1988”, l’ancien patron du parti FLN a précisé plus loin : “La construction de l’État avait des défaillances et octobre était alors une demande de changement. Les jeunes demandaient le changement.” L’intervenant a laissé entendre que l’Algérie a raté le coche, il y a 20 ans, alors que “la résolution des problèmes du pays devait passer par la voie de la construction d’un État démocratique”. “La génération de la Révolution devait passer le flambeau à la nouvelle génération”, a-t-il soutenu. Celui qui occupait le poste d’ambassadeur d’Algérie à Rabat, pendant les évènements douloureux de 1988, et qui avait ensuite pris les rênes de l’ex-parti unique, a également estimé que “ce qui se passe actuellement en Algérie est la continuité d’Octobre 1988”, en référence aux phénomènes des harragas et des kamikazes, ainsi qu’aux évènements de Kabylie d’avril 2001. Interpellé par une assistance majoritairement jeune, composée essentiellement de militants de Raj, des membres de l’association SOS disparus et de celle des parents de harragas de Annaba, Abdelhamid Mehri s’est voulu très explicite : il a ainsi insisté avec force sur le fait qu’“Octobre 88 appelait le changement” et déploré dans le même temps que “le régime (soit) resté toujours le même”. Est-il à présent trop tard pour emprunter la voie du changement ? “La seule voie reste el- nidhal (la lutte)”, a répondu le militant de la cause nationale.
Abordant le mouvement national et la période du congrès de Tanger de 1958, ce dernier a souligné que l’histoire de l’Algérie est “pleine de résistance et d’héroïsme”. D’après lui, les nationalistes algériens, mais aussi maghrébins, étaient à l’époque très sensibles aux questions se rapportant à la démocratie. La preuve, a-t-il révélé, “la démocratie était la revendication politique essentielle”, lors du congrès de Tanger. Et, aujourd’hui comme hier, le militantisme et la lutte sont à l’ordre du jour pour accéder à “une démocratie réelle”. Pour M. Mehri, ceux qui avaient peur qu’on ternisse l’histoire de la Révolution, qui “voulaient garder seulement les aspects positifs” de cette histoire, étaient “dans l’erreur”. Cela, parce que l’histoire doit être connue et lue “avec ses aspects positifs et ses aspects négatifs”. “La connaissance de notre histoire et des expériences collectives représentent des leçons pour les batailles à venir”, a assuré l’intervenant. Non sans relever l’existence d’un fossé entre les dirigeants maghrébins et leur peuple. L’actuel secrétaire général du Congrès panarabe a même été critique vis-à-vis de l’Union pour la Méditerranée (UPM), signalant que l’existence d’un tel projet “montre que la politique de nos pays n’est ni réaliste ni objective”. Il a insinué que la priorité est la construction d’un ensemble maghrébin et à l’ouverture démocratique.
H. A.

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20e anniversaire des événements d’octobre 88
Hocine Zehouane : “Je n’avais pas cru au processus démocratique”
Par :Arab Chih
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Décidément, le président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) Hocine Zehouane est un véritable iconoclaste. À contresens de l’idée reçue qui fait du soulèvement d’Octobre 88 l’acte fondateur de la démocratie algérienne, le défenseur des droits de l’Homme trouve ce soulèvement-là ambigu et dit ne pas avoir eu foi dans le processus démocratique engagé par les dirigeants de l’époque. “Il faut sortir de la tendance à magnifier des événements pour leur donner une illusion de grandeur”, assène-t-il lors d’une conférence de presse animée hier au siège de son organisation à Alger. Et d’enfoncer le clou : “La situation d’octobre est très ambiguë. L’explosion de la jeunesse était chargée de virtualités. À aucun moment les manifestants d’Octobre 88 n’ont appelé à la démocratie. Les deux seuls mots d’ordre clamés par la foule sont : “Chadli assassin” et “Messaâdia serak el malia.” L’illusion démocratique est venue après.” “Je n’ai pas cru à ce processus démocratique”, s’est confié Me Zehouane. Son pessimisme est motivé par trois raisons : primo, l’absence d’agent social capable de porter un tel processus. Deuzio, la montée de puissances économiques qui sont celles de la spéculation et de l’accaparement du capital national et l’inexistence de facteurs objectifs (agent social et catégories sociales). Cette appréciation quelque peu dépréciative des événements d’Octobre 88 n’a pas empêché M. Zehouane de faire sienne la lecture qui en a été faite par le sociologue Mohammed Boukhabza en présentant ces événements comme “une rupture avec les système qui prévalait à l’époque”. La cause de ce soulèvement populaire ? “L’inadéquation du système de gouvernance avec les réalités sociales de notre pays”, estime Me Zehouane. Les leçons de ces sanglants événements ont-elles été tirées ? Non, répond-il sans détour. “20 ans après, on retient la hantise de la réédition de tels événements”, redoute-t-il. “Dans une envolée polémique, l’actuel Chef du gouvernement A. Ouyahia avait récemment mis en cause des forces qui, à ses yeux, voudraient voir rééditer les événements du 5 Octobre 1988 à des fins d’exploitation politique. Une telle évocation sous forme de repoussoir et d’appréhension signifie que l’on n’effectue aucune lecture sérieuse et exhaustive de ces événements, et que le spectre de troubles massifs hante encore les esprits vingt ans après”, est-il souligné dans la déclaration préliminaire de la LADDH.
À une question sur les risques d’une autre explosion sociale similaire à celle d’Octobre 88, Me Zehouane répond : “Je ne le souhaite pas à mon pays, l’Algérie n’a pas besoin d’un autre carnage. Il faut que les Algériens apprennent à lutter pacifiquement. Les soulèvements sont improductifs quand ils ne sont pas encadrés politiquement.” Mais il reconnaît que les ingrédients d’une déflagration sociale sont présents. “20 ans après, notre pays est toujours vulnérable. Tant que les équilibres sociaux ne sont pas rétablis, notre pays sera toujours en danger”, avertit-il. La solution ? La Laddh préconise trois axes de travail : l’Algérie doit d’abord réorienter ses énergies vers une économie autocentrée et mettre un terme au pillage de ses ressources par les opérateurs étrangers. Ensuite, il y a lieu de reconsidérer les équilibres sociaux comme “facteurs majeurs d’une stratégie de sécurisation et de développement de notre pays”. Enfin, sortir l’Algérie de “l’enfermement de la dynamique crisogène” et avoir l’audace d’aller vers “une refondation constitutionnelle qui, à l’avenir, permettra à notre société de se doter de mécanismes de régulation pacifique et dynamique de ses conflits”. Tout un programme, en somme.
A. C.

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Fragments de réflexions d’universitaires
Le pluralisme au cœur de la revendication
Par : Dahou Djerbal
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Mieux qu’une analyse historique comparative des contextes et des déterminations de la crise qui a secoué la société algérienne en Octobre 1988 et de ceux qui nous accablent aujourd’hui, il m’a semblé plus judicieux d’offrir aux lecteurs du quotidien Liberté quelques fragments des réflexions et prises de position des universitaires engagés en ce temps-là dans la lutte pour la démocratie.
De la démocratie en Algérie

"De nouveau, le problème de la démocratie se pose en Algérie et l’Intifadha du 5 Octobre a fait qu’il se pose avec encore plus d’acuité. Encore une fois, les défenseurs autant que les détracteurs de cette alternative sont montés au créneau.
Beaucoup d’encre a coulé sur le sujet dans la presse nationale comme dans la presse étrangère, tandis que les différents courants d’opinion font circuler sur la place publique une multitude de tracts.
Cette fois-ci cependant, ce qui est nouveau, c’est la focalisation du débat autour de la question du pluralisme entendu comme celui des partis et des organisations politiques. Cela se fait avec une telle insistance et un tel degré d’intensité dans le discours politique comme dans les aspirations populaires que tout se passe comme si l’Intifadha n’avait eu pour seul but que le refus du système du parti unique.
Alors que le pouvoir semblait avoir adhéré aux revendications politiques populaires, nous avons relevé la réaction violente des éléments de l’appareil du parti unique. Après avoir monopolisé le pouvoir pendant plus d’un quart de siècle, ceux-ci aboutissaient à un constat de faillite du fait même de l’absence de débat démocratique en leur propre sein comme de leur propre incapacité à évoluer. Cette faillite s’explique par la nature même du système et non par la nature des individus qui le composent.
En réalité, l’appareil du parti n’a pas été seul à s’opposer à l’alternative démocratique ; d’autres secteurs tels que les salafistes et les conservateurs les y ont aidés, de leur propre chef et sans qu’on le leur demande.
Les premiers l’ont fait avec l’argument que la démocratie est une innovation (hérésie) occidentale. Les seconds semblaient plutôt préoccupés par leur souci pour l’unité nationale qui risquait d’être remise en question par les laudateurs de la démocratie. L’une et l’autre des deux attitudes ont été marquées par autant de surenchères que de simplismes s’imaginant que la démocratie pluraliste ne repose sur aucune base ni règle de fonctionnement sans garde-fous contre toute forme d’extrémisme."
De la Constitution

Une nouvelle Constitution régit formellement depuis quelques mois l’exercice des libertés publiques. La survivance d’institutions, d’appareils et de comportements de pouvoir inchangés et bien décidés à se pérenniser fait que ce texte s’avère à ce jour un simple jeu d’écritures.
Plus que jamais, ce que notre bulletin se donnait pour mission dans la présentation de son numéro un demeure une nécessité : participer sans relâche à l’action des forces démocratiques que renferme la société. Mais celle-ci n’est pas sortie indemne d’un siècle et demi d’oppression coloniale, relayée, après le sursaut vital et douloureux grâce auquel elle s’est libérée, par une longue période d’étouffement de toute vie démocratique réelle. Dans le désespoir de la stagnation qui a précédé Octobre 1988, l’absence de démocratie a semé dans certaines composantes du corps social les ferments de l’intolérance.
Les discours et les actes d’intimidation dirigés contre la femme dans la rue, sur les lieux de travail et dans les institutions d’enseignement se sont multipliés. L’égalité des droits, les libertés de conscience et d’opinion sont ouvertement niés du haut des tribunes mêmes que le débat démocratique a pu s’ouvrir. Les universitaires se doivent donc d’affirmer que le consensus démocratique, dont ils se réclament, est à l’exact opposé du monolithisme sectaire et simpliste que certaines forces rétrogrades tentent de substituer à l’unanimisme de façade de ces dernières années.
De l’intolérance et de ses effets

Ils considèrent que la violence sociale fondée sur un titre d’autorité morale et spirituelle est aussi dangereuse que la violence institutionnalisée dont elle veut se faire.
Ils estiment, enfin, que la protection par l’État des libertés qu’il affirme proclamer au profit de tous et de toutes est le test crucial de sa volonté de démocratisation. […]
L’appel au meurtre n’est pas Ia manifestation d’une humeur ou l’expression d’une opinion. C’est un acte que la morale universelle réprouve et que Ia loi de tout État punit.
C’est une honte que nos censeurs officiels, dont les rigueurs s’abattent rapidement sur l’expression de simples opinions politiques divergentes, ou contre la dénonciation de trafics d’influence prouvés par des documents officiels, montrent une complaisance systématique au regard de ces appels au crime.
Ces appels au crime se transforment en actes. Des groupes fanatiques imposent "l’ordre" dans certains quartiers, lycées, instituts, cites universitaires, et... à coups de poignard et de barres de fer.
Face à la montée des périls, certains proposent de dialoguer calmement. Mais pour apaiser la bête féroce, ils font déjà leur "Munich" idéologique...
Oui, il faut dialoguer, mais dans la clarté. II faut appeler un chat un chat. Les courants islamistes modérés sont eux-mêmes victimes d’agressions physiques, jusque dans les mosquées et à l’université islamique, de la part de ces forcenés.
II faut expliquer à tout notre peuple le danger que représentent ces groupes fanatiques, pour les isoler et les empêcher de nuire. Leurs conceptions, leurs méthodes, leurs slogans, leurs expressions s’apparentent au fascisme hitlérien.
Hommes de gauche, patriotes fidèles aux idéaux du mouvement de libération nationale, démocrates, islamistes modérés, nationalistes arabes, défenseurs des cultures populaires, libéraux, syndicalistes, féministes, rationalistes, esprits indépendants, créateurs, hommes de science, hommes de culture, chacun de nous est menacé dans sa liberté, dans sa dignité, dans sa vie même.
Faites barrage au danger qui menace les valeurs universelles que l’humanité a mis longtemps à élaborer et qui ont été à la base de notre mouvement de libération nationale. Demain, il sera trop tard. Demain si ces groupes fanatiques triomphent, attendez-vous, comme cela se passe sous nos yeux ailleurs, à subir massivement la mise en œuvre de ce cri barbare : "Voilà vos ennemis. Tuez-les !"
De la jeunesse et de son désespoir

Dans ce dossier, nous tenterons de dévoiler pudiquement ce que nous avons douloureusement compris durant cet été 1989 au contact des jeunes qui auront fait "Octobre 88". Entre autres que les désirs insatisfaits — tous les désirs insatisfaits — de notre jeunesse ne sont pas seulement un symptôme alarmant de notre pauvreté sociale, mais bien l’essence même de notre société. Notre originalité, ce sont nos désirs insatisfaits qui sont aussi notre plus grande misère vécue, ressentie mais pas toujours comprise.
Nous, universitaires intellectuels, nous pensons comprendre et certains la comprennent. Nous savons de façon plus ou moins pertinente que l’élimination, l’éradication de nos "manques" ne dépendent pas seulement des projets de développement planifiés, plus ou moins techniquement conçus, mais bien de la promotion d’une culture du "DÉSIR". Car en fait, la plus authentique, la plus belle manifestation culturelle du désir est la violence. Halte à l’assistanat de l’État-providence distributeur de miettes ! Halte à la mendicité — toutes les mendicités —, tradition venue d’une piété liturgique rédemptrice qui a été l’une des causes de notre stagnation sociale et de la mystification politique.
Le comportement d’un jeune — sevré de tout — est la violence et cette violence n’est point primitive comme celle de son tortionnaire. Elle est d’essence révolutionnaire. Elle est esthétiquement belle. Elle provoque le moment où le pouvoir daigne s’apercevoir enfin de l’existence de la jeunesse.
Ces jeunes, qui sont-ils ? Pourquoi eux, et non ces milliers d’autres qui leur ressemblent ? Répondre, c’est dire, entre eux et nous, le traumatisme vécu communément en Octobre dont il faut se défaire. Nos citadins, ils ont entre 20 et 25 ans, possèdent le niveau du baccalauréat sans avoir le "diplôme", exercent des "métiers temporaires" et bien qu’issus de milieux sociaux différents (du fils d’ambassadeur au fils de chômeur, en passant par le fils du concierge et celui du gros bourgeois commerçant), ils vivent le même désarroi. Ils se connaissent entre eux pour avoir été les acteurs des "évènements d’Octobre", se reconnaissent dans la sauvagerie des interrogatoires musclés qu’ils ont subis, leurs blessures encore vivaces un an après, et ce même désir fou d’accéder à un moi collectif sécurisant qu’ils recherchent à travers des pratiques culturelles improvisées : chanson, musique, peinture, poésie…
Autre chose, ils ont tous été rejetés par leurs propres familles et vivent dans la société en état de marginalisation intégrale. Ils maudissent les appareils d’État et les partis politiques qui les ignorent et qu’eux-mêmes avouent méconnaître totalement. Deux rêves les maintiennent paradoxalement en vie : la "fuite" vers un ailleurs mythique et les fantasmes de réussite sociale qui l’accompagnent ou le suicide dont l’idée même les angoisse. Un an après Octobre 88, ils chôment toujours et rêvent encore.
D. D.

Ces textes, dont les auteurs sont de bords et de sensibilités différents, sont extraits de trois numéros d’un bulletin du Comité interuniversitaire pour la démocratie (CCIU) né en octobre 1988.

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5 OCTOBRE 1988: VINGT ANS APRÈS
Les problèmes sont toujours là
06 Octobre 2008 - Page : 10
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Dossier : 05 octobre ou la fin d'une époque TP081006-04

"Nous n´avons pas reçu cette planète en héritage, nous l´empruntons seulement à nos petits-enfants", Antoine de Saint-Exupéry

Souvenons-nous à l´échelle mondiale, l´Empire soviétique miné par sa guerre en Afghanistan, et les révoltes réprimées, orchestrées en Pologne à la fois par un Occident au faîte de sa puissance et un pape polonais qui a fait de Solidarnosc son fer de lance pour combattre l´Empire soviétique. On découvre la pérestroïka, la glasnost et autres concepts mis en place pour dynamiter l´Empire soviétique. Pour le bonheur des Russes, l´Empire a disparu, la Russie perdait ses provinces, au grand bonheur du monde unipolaire sous la gouverne américaine. Comme l´avait annoncé George Bush père après la deuxième guerre du Golfe de 1991, les Etats-Unis prenaient le leadership d´un nouvel ordre mondial basé sur la puissance des armes et la puissance du libéralisme sauvage. La Russie traversa des moments difficiles, mais avec des dirigeants de la trempe de Vladimir Poutine, elle refit surface.
Parallèlement et pendant les années 90- 2000, la balkanisation du monde se poursuit. Après l´Union soviétique qui perdit toutes ses Républiques, la Yougoslavie fut le second domino à tomber. Le problème palestinien connut plusieurs redditions des Arabes en rase compagne; ce furent les accords de Madrid, puis celui d´Oslo. Les potentats arabes, plus divisés que jamais, cherchèrent protection auprès des Etats-Unis, maintenant que le "monde était américain". L´Occident se cherchait un nouvel ennemi, maintenant que la guerre froide était terminée, le capitalisme triomphant et le complexe militaro-industriel avaient besoin d´entretenir la tension mondiale. L´Islam, le tiers exclus de la révélation abrahamique, fut le coupable idéal. On donna du service à tous ceux qui ont combattu l´Empire soviétique au nom de l´Islam, aidés en cela par la CIA. Bin Laden reprit du service et on aboutit, après bien des années, au 11 septembre 2001. La doctrine Monroe et le consensus de Washington formatèrent le monde et gare à celui qui avait des velléités de s´en affranchir!
Pendant ce temps et malgré toutes les manoeuvres, un pays a réussi le tour de force de marier l´efficacité du capitalisme avec la dimension sociale, la Chine qui a traversé ces deux décades à la vitesse d´une fusée en étant pratiquement première partout, notamment dans les réserves de change où ses 1800 milliards de dollars sont d´un grand secours pour l´économie américaine.

Ce que nous savons d´octobre 88
1988: Nous sommes à la fin d´un règne sans partage avec un parti unique et sa poigne de fer qui a verrouillé le paysage politique. Pendant plus de 12 ans, le pays détricotait minutieusement ce que le défunt président Boumediene avait construit laborieusement. Nous sommes bien contents que, par sa fameuse phrase à la face du monde "Kararna ta´emime el mahroukate", il ait pu sauver la souveraineté de l´Algérie. Avec seulement 22 milliards de dollars, Boumediene avait assis les fondations de l´Etat et nous lui sommes reconnaissants qu´il nous ait laissé un outil de raffinage de 22 millions de tonnes- le premier d´Afrique- et un embryon de pétrochimie qui, heureusement, ont échappé au rouleau compresseur des adeptes de la dictature du marché...
Que se passe-t-il après? Il faut dire que le début des années 80 a correspondu avec l´euphorie d´un baril à 40 $ et un dollar à 10 francs. L´Algérien découvrait le PAP (programme anti-pénurie), ce fut le début de la bazarisation du pays, à coups de dollars, l´Algérien découvrait- sans effort, sans sueur, le fromage Emmental, la machine à laver, le hors-bord- même pour ceux du Sud, au nom de l´équilibre régional...- C´était aussi l´époque de la suppression de l´autorisation de sortie avec possibilité de changer l´équivalent en dinars de 5000 francs!
A partir de 1984, la consommation mondiale connaissait une pause, notamment à cause du prix élevé, du développement des énergies renouvelables mais aussi et surtout de l´irruption sur le marché pétrolier de nouveaux producteurs hors Opep. Ce fut le cas notamment de la Norvège et de la Grande-Bretagne. L´Opep ou plutôt l´Arabie Saoudite, voulant protéger sa part de marché du fait de la diminution de la part de l´Opep qui est passée de 30 à 15 millions de barils/jour, a cru bon d´inonder le marché. Résultat des courses: le baril tombe à moins de 10 dollars en juillet 1986. Ce qu´on appela le contrechoc pétrolier. Du même coup, des petits pays furent ruinés. Les recettes de l´Algérie ne dépassèrent pas les 4, 5 milliards de dollars. L´Algérie s´endetta lourdement pour nourrir la population.
Les Algériens se réveillèrent brutalement et découvrirent que le mirage était terminé, la révolte du pain fut certainement un facteur déclenchant de la mal-vie qui a donné lieu à l´éruption sociale et ouvert la porte à toutes les récupérations de la douleur des jeunes.

Où en sommes-nous vingt ans après?
A la veille de 88, dans un de ses discours, le chef de l´Etat avait assuré la nation en disant que nous n´étions pas concernés par les convulsions du monde. Mal lui en a pris. Ce fut Octobre 88, qui attend toujours son autopsie sur les tenants et aboutissants de ce début de tragédie qui a fait rentrer l´Algérie dans la spirale de la violence. On cite 500 morts. Pourquoi sont-ils morts? Bien que son intérêt est beaucoup plus historique, la question reste toujours posée.
A défaut de lister tout ce qui ne va pas et qui pourrait aller mieux, écoutons ce qu´écrit dans un article pertinent Khaled R à propos de la rémunération de nos chers "élus". Interviewant un responsable du CNES, il écrit: "Pour une catégorie privilégiée, la rémunération ne tient pas compte du résultat, voire de l´efficacité. En plein mois de Ramadhan, l´État a décidé d´une augmentation des salaires des députés de 300%. Cette hausse a créé un malaise au sein de la masse des fonctionnaires. Le membre de l´APN ou du Sénat touche désormais un salaire de 30 millions de centimes, sans compter les primes et autres avantages, contre 13 millions de centimes auparavant, avec effet rétroactif à partir de janvier. Il recevra donc en sus un pactole de 240 millions de centimes. La décision crée ainsi de grandes disparités dans le système de rémunérations. "Cette augmentation des députés n´a aucun sens. On verse,de très hauts salaires à des députés qui se tournent les pouces. Pourquoi ces députés n´ont pas demandé par exemple un débat sur la politique des salaires en Algérie...En somme, le système des salaires, en Algérie, est lié à la rente.
On ne demande en contrepartie du versement de hauts salaires aucune contrepartie en termes de rendement, de résultat ou de performance. Tant que le baril de pétrole dépasse les 80 dollars, ces salaires de la rente ou de la honte menacent, en outre, la cohésion sociale et démobilisent les travailleurs. " Khaled R. Après l´augmentation des rémunérations des parlementaires, quels salaires pour les hauts cadres algériens? Liberté du 29 septembre.
Certes, nous avons traversé plusieurs décennies, la décennie noire, la décennie rouge, voire aussi les décennies blanches en ce sens que nous n´avons rien créé de pérenne. La population de 1988 n´est pas celle de 2008 qui, à bien des égards, est toujours aussi fragmentée et en errance.
A quand la décennie verte de l´espoir? Certes, il ne faut pas nier en bloc des réalisations qui, malheureusement, n´ont pas associé des Algériens et des Algériennes à qui on distribue une rente sans qu´il y ait une contrepartie tangible. Il est vrai que l´on ne peut pas mettre sur le même pied, l´ouvrier d´El Hadjar qui sue sang et eau et le député gros et gras car bien nourri.
Il est vrai que l´on ne peut pas mettre sur le même plan, l´enseignant qui fait son djihad au quotidien pour des clopinettes et le trabendiste du conteneur qui gagne en une fois le salaire d´un enseignant qui doit se réincarner plusieurs fois comme High Lander pour y arriver.
Par ailleurs, le pays est plus fragmenté que jamais. Quand on montre à la télévision, plus indigente que jamais, des harraga, c´est que nous sommes en train de traverser le no man’s land qui nous amène inexorablement au chaos. Et pourtant, le pays n´a jamais été aussi riche!
Qu´avons-nous fait depuis vingt ans, à part manger la rente? Que faisons-nous de notre seule source de devises? Selon l´analyste de la Banque Merrill Lynch, en cas de forte récession mondiale, le baril du brut de pétrole pourrait tomber à 50 dollars. Pour la banque américaine, "le déclin de la demande de pétrole aux Etats-Unis dépasse nos attentes, la demande européenne recule également rapidement".
Le cours du brut léger américain s´établissait, hier, autour des 98 dollars à New York et le baril de Brent de la mer du Nord, autour et sous la barre des 90 dollars. Que fait l´Opep à laquelle nous avons lié notre sort? Rien! tétanisée, elle ne bouge pas; nous risquons à la fois de perdre sur les prix et les volumes. Depuis le 11 juillet dernier le baril a perdu 58 dollars soit 40% de sa valeur, et nous continuons à produire 1,5 million de barils/jour qui nous donnent une autonomie d´une génération.
C´est tout ceci qui fait mal. Ne peut-on pas mettre à profit toute cette expérience, toute cette douleur accumulée pour repartir du bon pied. L´Algérie appartient à celles et ceux qui croient en elle. Où en sommes-nous? maintenant à la veille d´une échéance électorale? Nous n´avons pas tiré les leçons de 88, nous avons 20 fois plus de ressources qu´en 1988 et, pourtant, nous sommes toujours en panne.
Quand les partis politiques ne réagissent pas dans le coulage de l´école, qui ne disent rien du scandale de la rapine des députés, qui voient l´économie de bazar s´installer et les Algériens au chômage, c´est qu´il y a quelque chose de détraqué dans la mécanique Algérie.
Comment, vingt ans après, conjurer ces signes indiens qui font que l´on continue à errer. Seuls le consensus, le dialogue, la parole désarmée, l´intérêt supérieur du pays permettront de réconcilier les Algériens et mettre fin à la guerre sourde de positions entre deux visions pour l´Algérie, celle d´une Algérie satellite d´une nation arabe qui n´existe pas et celle, nostalgique de fafa, d´un art de vivre, type quartier latin. Ces deux visions tentatrices n´ont évidemment aucune idée de ce que pourrait être la vie selon la mentalité algérienne.
Qu´allons-nous laisser aux générations suivantes? Mutatis mutandis. La boutade de Saint-Exupéry s´applique sans conteste à notre frénésie de gaspillage d´une ressource qui ne nous appartient pas. A nous de nous organiser pour donner de l´espoir à cette jeunesse qui a perdu ses illusions. Pour cela, seul le parler vrai, le patriotisme, la fidélité à des valeurs nous permettront enfin de bâtir une Algérie qui sortira de la malédiction de la rente pour se mettre au travail.

(*) Ecole nationale polytechnique

Pr Chems Eddine CHITOUR (*)

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