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admin"SNP1975"

admin
Admin

بد الكريم حساني: لقد عينت في أواخر 1960 على رأس القاعدة الوطنية، ديدوش مراد، في طرابلس، إلى جانب عدد من المساعدين، منهم نور الدين يزيد زرهوني، وقاصدي مرباح، ومحمد الصديق بن يحيى... ومعلوم أن هذه القاعدة كانت تحتوي على كل الوثائق السرية للثورة، وكانت كل الأوامر تأتيني من بوالصوف وبومدين.

في بداية مفاوضات إيفيان التقيت عبد الحفيظ بوالصوف، وقلت له بأن الأمور صارت خطيرة، وأن موقفك صار ضعيفا، فأكد لي ما قلت له. وتزامن ذلك مع سقوط اسم رجل "المالغ" الأول من المجلس الوطني للثورة، إلى جانب فرحات عباس، وحل محلهما كل من أحمد بن بلة وبن يوسف بن خدة. في ذلك الوقت أرسل لي بن بلة رسالة قال فيها إن جماعة الحكومة المؤقتة خانوا الثورة وعليك أن تختار بين الوقوف إلى جانبهم أو اختيار صفي.

[b]في هذه الأثناء تم تعيين بومدين على رأس قيادة الأركان، وعلي منجلي نائبا له إلى جانب الكوموندو عز الدين. وبينما كانت الأزمة في أوجها بين بن بلة والحكومة المؤقتة، قفز بومدين إلى الواجهة وأعلن تحالفه مع بن بلة المدعوم بمجلس الثورة..

[b]الشروق: نعود للرسالة التي وجهها إليك بن بلة وأنت على رأس قاعدة ديدوش مراد..


[b]عبد الكريم حساني: .. قلت، قال لي بن بلة كل واحد يجب أن يتحمل مسؤوليته، يعني يجب أن تختار الصف.. بعدها بقليل التقيت بوالصوف، دعوته إلى تناول وجبة غذاء، لكنه فضل ارتشاف فنجان قهوة فقط.. دار بيننا حديث عن التغيرات التي طرأت على رأس مجلس الثورة، واعترف لي سي عبد الحفيظ بأنه فقد وزنه داخل مؤسسات الثورة لصالح بن بلة، وتمنى له التوفيق. كنت أنتظر أن يصدر منه أمر بالوقوف إلى جانبه، ولكنه بدا عليه بعض من الاستسلام للأمر الواقع. عدها تلقيت مكالمة من بوتفليقة الذي كان مساعدا لهواري بومدين في قيادة الأركان بالرباط، قال لي فيها سأرسل لك خليفة لعروسي ومعه ضابط من الولاية الثالثة التاريخية، وطلب مني الالتحاق به في وهران. أخذت كل وثائق الثورة والتحقت به هناك تحت حراسة 100 جندي.

الشروق: في ماذا تتمثل هذه الوثائق؟

[b]عبد الكريم حساني: كانت عبارة عن وسائل الاستخبار والاتصالات وكل المعلومات التي جمعت عن العدو الفرنسي وكذا المتعلقة بالثورة، مرقمة ومرتبة كما يجب، وسلمتها للجيش الوطني.

الشروق: لا شك أنها وثائق سرية وعلى قدر من الأهمية، أليس كذلك؟

[b]عبد الكريم حساني: بلى، ما أثارني فيها توثيق قضية عبان وكيف تعاملت معه الثورة.

الشروق: هذه نقطة مهمة، هل يمكن أن تكشف لقراء الشروق بعضا من تفاصيلها؟

[b]عبد الكريم حساني: هي قصة طويلة، ولكن لا بأس. تسلمت الوثائق الخاصة بقضية عبان رمضان من الراحل محمد الصديق بن يحيى، الأمين العام لمجلس الثورة، بأمر من عبد الحفيظ بوالصوف، وهي عبارة عن عرض حال، يتحدث عن اجتماع كل من بوالوصوف وكريم بلقاسم والشريف بلقاسم، وغاب عن الاجتماع لخضر بن طوبال وعباس فرحات. وجاء في عرض الحال مجموعة من الأسئلة طرحت على هيئة نصبت نفسها محكمة، السؤال الأول: هل عبان رمضان يشكل خطرا على الثورة أم لا؟ الثاني: إذا كان يشكل خطرا على الثورة، ما الوسائل الكفيلة بوضعه عند حده، الإيقاف، السجن أو الإعدام.


في النهاية قررت المحكمة بالأغلبية بأن عبان رمضان يشكل خطرا وقد يتسبب في حدوث انشقاق داخل الثورة. أما الإجراء المقرر في حقه فقد تقرر إبعاده، وكلف بوالوصوف بتنفيذ القرار.بعد صدور القرار طلب بوالصوف من رجاله المقيمين بالمملكة المغربية أن يوافوه بموقف الملك المغربي محمد الخامس تجاه الثورة، فكان الرد أن الملك يريد أن يتحدث إلى أعلى سلطة في الثورة، وهنا طلب من عبان رمضان الذي كان في تونس أن يلتحق بالمغرب.

[b]ولما وصلت الرسالة لعبان حضر نفسه للسفر، غير أن شخصا اسمه ايدير كان يشغل منصب الأمين العام لوزارة الدفاع التي كانت تحت مسؤولية كريم بلقاسم، حذره من الفخ الذي يكون قد نصب له بالمغرب، فرد عبان بأنه لا يخشى المؤامرات التي تصدر من دون تفكير. وعندما وصل تيطوان المغربية كان في انتظاره الشريف بلقاسم وكريم بلقاسم وبوالصوف. طلب بوالصوف من عبان الجلوس في سيارة خاصة به، قبل أن يختفي وإلى الأب
د.


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http://www.marocainsdalgerie.net

admin"SNP1975"

admin
Admin

Vendredi 27 août 2010 5 27 /08 /2010 18:10

Texte intégral de "carences et fléchissements"de Lakhdar Bentobal.


C'est l'un des chapitre de ses mémoires. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] CARENCES ET FLÉCHISSEMENTS II est peut-être nécessaire de faire un petit retour en arrière car il me semble qu'en 1958 il y a eu un événement déterminant pour la poursuite de la Révolution. C'était l'époque où la IVème République française s'effondrait et laissait la place au nouveau régime de De Gaulle. Comme nous l'avons déjà dit, c'est à partir de ce moment qu'avait commencé la vraie guerre. Tous les moyens avaient été mis entre les mains de l'armée française pour en finir avec la résistance algérienne. Les choses avaient commencé à mal tourner pour l'intérieur. Or, il est un fait établi, c'est que quand cela tourne mal à l'intérieur, les problèmes et les dissensions apparaissent au grand jour au sein de la direction politique. Quand l'état de santé du peuple et de l'ALN décline, faute de trouver les solutions adéquates au problème, la crise éclate au sommet. Nous étions à cette époque éloignés du champ de bataille, les moyens de faire la guerre nous manquaient (armes, finances, cadres), ces moyens étaient nécessaires pour que la révolution puisse franchir un nouveau stade, pour qu'elle puisse faire face aux nouvelles méthodes de guerre et aux nouvelles armes de l'armée française. Plus encore, tandis que la stratégie et les techniques de guerre de l'adversaire avaient changé, nous étions, quant à nous, dans l'incapacité de trouver une parade. A l'intérieur, on pouvait certes continuer à mener des actions, mais cela n'était pas tout, encore fallait-il concevoir une nouvelle ligne, une nouvelle stratégie. Et c'est là que le conflit allait éclater Chacun reprochait à l'autre de ne pas en faire assez. Voilà pourquoi j'en viens à dire que les signes avant-coureurs de la crise qui avait éclaté au sein de la direction politique avaient commencé à apparaître à l'intérieur du pays. La situation y avait changé en notre défaveur. Les grandes opérations menées par Bigeard à Geryville (El Bayadh) et à Saïda dans le sud oranais étaient relayées par le Plan Challe et étendues à l'ensemble du territoire. Jusque là, les expéditions militaires françaises étaient menées à partir des PC que les soldats rejoignaient aussitôt le ratissage terminé. Avec Bigeard et le Plan Challe, c'étaient toutes les unités avec leurs officiers qui sortaient sur le terrain. Elles éclataient ensuite, en appliquant nos propres méthodes, en petits groupes très mobiles. Ils ne faisaient plus appel à l'armada des blindés et aux équipements lourds qui ne nous faisaient aucun mal puisqu'ils ne pouvaient pas passer par les chemins escarpés. Quand la nuit venait, ils campaient maintenant sur place sans quitter le terrain des opérations. De notre côté, les choses avaient aussi changé. Les années 1956, 1957 et 1958 avaient drainé dans nos rangs un flot de gens de toutes sortes qui, pensant que la révolution allait triompher ou estimant qu'il n'était plus possible de rester neutres, étaient venus la rallier. Nous avions donc vu arriver des gens qui n'étaient pas du tout les militants nationalistes que nous avions connus auparavant. Jusqu'alors les combattants étaient motivés et habités par une foi à toute épreuve ; ceux qui nous arrivaient semblaient maintenant être ballottés par l'événement. Quand la révolution avait le vent en poupe, ils étaient avec nous à 100 % et, dès que la situation devenait plus difficile, leur moral se mettait à chuter d'une façon vertigineuse. Pour la première fois depuis le début de la lutte armée, il nous était donné de voir des djounoud faits prisonniers qui acceptaient de se joindre à l'ennemi. On voyait bien, auparavant, des éléments de l'ALN qui, sous le fait de la torture, donnaient quelques renseignements, mais ils n'avaient jamais jusque-là franchi le Rubicon. Ils n'avaient encore jamais formé des unités de djounoud repentis, qui tournaient leurs armes contre nous. Les populations elles-mêmes s'étaient mises à former des groupes d'auto-défense pour interdire par les armes l'accès de leurs douars aux éléments de l'ALN. On ne peut même pas dire qu'ils étaient l'objet de pressions directes puisque, pour des groupes de cinquante à soixante hommes armés, un seul Français suffisait pour en prendre la tête. En d'autres temps, les djounoud de l'ALN l'auraient ramené vif ; même en plein ratissage, aucun homme ne désertait son poste. Il y a donc là un phénomène à analyser Je ne sais comment interpréter ce fléchissement aujourd'hui encore. Peut-être la révolution n'avait-elle pas suivi le cours qu'elle devait suivre Elle était restée, me semble-t-il, à son état primaire, à sa phase initiale, avec les mêmes méthodes de guérilla et les mêmes armes qu'à son déclenchement. Comme elle n'avait pas pu franchir un nouveau seuil, elle était appelée non pas peut-être à mourir, mais à perdre l'initiative. Elle avait fini par mener une sorte de combat pour la survie. Des groupes de l'ALN lançaient encore des actions volontaristes, mais ce volontarisme-là était beaucoup plus psychologique qu'autre chose. Il avait pour but de montrer au peuple que l'ALN était toujours présente et il avait aussi pour but de se prouver à lui-même que l'armée de libération avait encore du tonus et qu'elle pouvait ainsi tenir jusqu'au bout, en attendant des jours meilleurs C'est donc de là qu'il faut partir si l'on veut comprendre les crises qui ont éclaté au sein du groupe dirigeant. Les faits sont là qui, aujourd'hui encore, nous donnent la mesure du changement qui s'était opéré à l'intérieur. Vers les années 1959-1960, on comptait 160 000 Algériens armés, combattant du côté de l'armée française, situation que nous n'avions jamais connue auparavant. Cela se passait partout, dans les villes, dans les campagnes et, ce qui était nouveau, cela se passait aussi dans les montagnes. Dans ces régions, l'ALN, avec ses djounoud et ses moussebiline, ne comptait pas plus de 30 000 hommes qui devaient faire face aux 500 000 soldats français et aux 160 000 auxiliaires algériens. A la ligne Morice, on avait ajouté la ligne Challe qui rendait le passage des frontières presque impossible. Selon le propre aveu des Français, on avait posé presque une mine par mètre carré, dans une bande de terre s'étendant sur 350 km du nord au sud et 3 km à l'intérieur des terres. Une fois le problème du passage des frontières réglé, on s'était occupé des populations. Près de deux millions de personnes furent déplacées et regroupées dans des camps et c'est de là qu'est née l'idée des mille villages du Plan de Constantine. Plutôt que de briser l'organisation du FLN par la répression et les tortures, les stratèges français avaient préféré déplacer le peuple lui-même Ce faisant, l'organisation s'était trouvée dispersée. Dans les centres de regroupement, on avait rassemblé des fragments de douars venant de régions différentes. Les structures clandestines, que le FLN avait mises en place dans des conditions différentes, n'avaient désormais plus d'effet. L'appareil avait éclaté de lui-même, sans avoir eu à subir les coups de l'armée française. D'un autre côté, le rôle du peuple avait également changé du tout au tout Auparavant, c'était l'organisation politique mise en place qui s'occupait du recrutement, du ravitaillement, ou qui servait de guide à l'ALN quand le besoin s'en faisait sentir. Mais, après les regroupements, alors que les besoins de l'ALN grandissaient dans le domaine du recrutement, du renseignement et du ravitaillement, la position de la population s'était modifiée. Elle avait perdu de son dynamisme et elle ne soutenait plus la résistance comme auparavant. De réservoir d'hommes pour la révolution, elle était devenue un simple magasin d'intendance. Sans âme politique, elle ne jouait plus le rôle que l'on attendait d'elle et l'ALN s'était trouvée ainsi complètement coupée de ses bases. Les unités de l'armée de libération avaient alors éclaté en petits groupes dont les actions se réduisaient à assurer leur propre survie. D'opérations militaires, on était passé à des actions de fidaï, à des attentats individuels dans les villes pour éliminer des traîtres ou pour atteindre quelque objectif militaire. Concentré aux frontières, le gros de l'armée de libération sombrait dans une sorte d'oisiveté. La mission initiale de l'ALN à l'extérieur était de ravitailler l'intérieur. Ne le faisant plus par impossibilité matérielle, elle laissait libre cours à des conflits internes. Ces crises, d'abord de caractère limité, avaient fini par atteindre la tête du mouvement. Les années 1958-1959 avaient été en définitive les plus dures de toutes et la révolution a été, à ce moment-là, réellement en danger de mort. De là sont venues les différentes crises connues sous le nom de l'affaire L'amouri, de l'affaire Zoubir, celle de la base de l'Est et, pour finir, l'affaire des chefs de wilaya de l'intérieur. Certains chefs de l'intérieur avaient leur moral atteint par la détérioration de la situation. De bonne foi, et croyant bien faire pour sauver ce qui pouvait l'être encore, ils allaient friser la trahison en tentant impossible. Ce fut le cas de certains chefs de la wilaya IV. Azzedine, pendant un moment, avait lui aussi fléchi. Mais, pour les uns comme pour les autres, quelles que furent les motivations, l'acte était le même et le phénomène, loin d'être limité à des personnes, touchait à toute la révolution. Dans ces conditions, il était normal que la lame de fond atteigne la direction et que les divergences éclatent au grand jour. Les problèmes de fond devenaient des problèmes de personnes ; la zizanie battait son plan et les solutions n'étaient en fait que des palliatifs. C'était le temps où nous avions décidé de lancer une grande campagne diplomatique avec des délégations expédiées aux quatre coins du monde. Nous voulions par là laisser entendre que la cause algérienne gagnait an audience internationale et que la solution du problème était proche. Nous cherchions à rassurer l'intérieur, à lui remonter le moral ; nous voulions le persuader que de nouvelles armes allaient maintenant nous être fournies en très grandes quantités. C'était aussi le temps où nous avions décidé de porter la guerre en territoire français, toujours pour les mêmes raisons. Nous voulions obtenir un effet psychologique sur nos troupes sans résoudre pour autant le problème qui continuait à se poser avec insistance. Le moral de la résistance s'est bien relevé après cette décision, mais l'effet n'a été que temporaire. L'argent et les armes ne passaient toujours pas, les frontières étaient toujours aussi étanches et les effectifs de nos troupes s'étaient mis à fondre de jour en jour. Ceux qui quittaient les rangs étaient plus nombreux que ceux qui les rejoignaient. On assistait à des faits absolument nouveaux, des ralliements de groupes entiers de l'ALN à l'armée française. Ceci ne s'était jamais vu. Que vingt ou trente djounoud s'entendent pour déserter n'était même pas pensable quelques temps auparavant. Or, des défections comme celle de Ali Hambli étaient devenues de plus en plus nombreuses. Si, auparavant, c'étaient les harkas qui désertaient les rangs de l'armée française pour se joindre à nous, à présent, c'était l'inverse. Le moral de l'armée française, on s'en doute, s'était relevé, et beaucoup dans ses rangs envisageaient sérieusement la solution définitive du conflit par les moyens militaires. Nous assistions ainsi à un effet de balancier qui voulait que quand notre moral baissait, celui des Français reprenait le dessus et, quand les Français donnaient l'impression de l'emporter, les ralliements à leur cause devenaient plus nombreux. Certains pensant que l'avenir était maintenant du côté français s'étaient mis à jouer la carte de l'occupant. Mais il faut préciser que ce phénomène a été la caractéristique des nouveaux venus. A ma connaissance, il n'y a pas eu un seul djoundi de la première heure, pas un seul de ceux qui faisaient partie de l'OS ou du PPA, de ceux qui avaient foi depuis toujours en la cause nationale, qui ait rallié les Français. Ceux qui l'ont fait étaient, ou bien des anciens collaborateurs de la France qui étaient venus au FLN dans l'euphorie des années 1956-1957, ou bien c'étaient des gens sans formation politique Ils étaient venus à nous emportés par le flot des adhésions. Mais, quand le courant s'était renversé, le reflux les avait ramenés là d'où ils venaient. Ils avaient pris les armes et nous avaient combattus de toute bonne foi. Ils le faisaient sans peur et surtout sans honte ; ce n'était même plus un déshonneur pour eux que de combattre leurs propres frères Cela aussi était nouveau. Ainsi, tout ce que nous avions entrepris sur le plan diplomatique ou sur le plan de la lutte armée en territoire français ne fut ni plus ni moins qu'une suite de diversions. Et, derrière toutes ces diversions, pointait une déviation de la ligne qu'avait observée jusque-là la révolution. Quoiqu'on ait pu dire, la révolution ne se faisait pas aux frontières. Le peuple et la révolution étaient à l'intérieur. L'armée française était à l'intérieur et c'est à l'intérieur qu'il fallait faire en sorte que la lutte passe à un stade qualitativement supérieur. Cependant, il est très difficile aujourd'hui encore de répondre par un postulat, de dire que si la direction était restée à l'intérieur, ces déviations n'auraient pas eu lieu. Une direction à l'intérieur vit dans les conditions mêmes de la lutte. Elle partage le même martyre que le peuple. Elle connaît les besoins réels de l'armée et ses insuffisances. Sur le plan théorique, une direction à l'intérieur est irremplaçable. Cela est aussi vrai pour le chef qui est là, présent, qui vit les mêmes dangers, les mêmes besoins et les mêmes privations que ses hommes. Même sur le plan psychologique, quand le chef est là, le moral des troupes est au plus haut. Maintenant, un fait est certain. Toute direction qui, pour une raison ou pour une autre, sort du pays, cette direction-là est amenée à quitter du même coup le terrain de la lutte. Même si les conditions et les facteurs en cause démontraient qu'il était impossible pour elle de se maintenir à l'intérieur, il était naturel qu'elle s'exposât aux critiques. On pouvait dire alors que les responsables font des déclarations fracassantes, lancent des appels à la lutte, à l'endurance ou au sacrifice alors qu'ils sont eux-mêmes loin des réalités. Cela est vrai. Mais il est tout aussi vrai que le CCE ne pouvait plus se maintenir à Alger. Il pouvait cependant se replier dans les maquis et vivre la même vie que tous les moudjahidine. Il pouvait remplacer chaque membre qui venait à disparaître par un nouveau, de façon ininterrompue, comme c'était le cas pour les chefs de wilaya. Mais, il reste que le problème des armes et du ravitaillement des troupes n'aurait pas été résolu. L'apport de l'extérieur restait toujours nécessaire On peut toutefois se demander si la direction installée à l'extérieur a solutionné tous ces problèmes qui paraissaient insolubles auparavant. La réponse est non. Avec le recul du temps, je peux dire à présent qu'une direction à l'intérieur aurait suppléé à certaines défaillances. Elle aurait pu surmonter les purges ou éviter l'affaiblissement du moral des troupes. En fait, les purges ont été la conséquence de la démoralisation des hommes car, dans ce domaine comme dans d'autres, le corps devient vulnérable quand l'esprit est malade Dans beaucoup de régions du pays, malmenées, talonnées par l'armée française, confrontées au problème des moyens et du recrutement dont la source s'épuisait, des unités de l'ALN finirent par se replier sur elles-mêmes. Les coups qu'elles recevaient et les pertes de plus en plus fréquentes qu'elles subissaient avaient fait que les hommes s'étaient mis à s'interroger sur eux-mêmes, sur ceux qui auraient pu s'infiltrer dans leurs rangs pour renseigner l'ennemi. Le doute et la suspicion avaient commencé à s'emparer des esprits. A mon avis, si la direction était restée à l'intérieur, tout cela ne se serait pas produit. L'AFFAIRE LAMOURI Dans le COM de l'Est, on ne peut pas dire qu'il y ait eu des clivages entre anciens et nouveaux et que les premiers n'aient pas accepté la promotion des seconds aux postes de commandement Nous y trouvons par exemple Benaouda qui était membre du comité des 22, un homme du premier novembre, de ceux qui en ont été les organisateurs. Benaouda était en désaccord avec Mohammedi, qui n'était pas des premiers venus à la Révolution. Mais il l'était aussi avec Lamouri qui, lui, était un ancien du MTLD. Ouachria était venu en 1956 avec Bensalem à la tête d'une compagnie entière de l'armée française C'étaient d'anciens engagés de l'armée française qui avaient déserté du côté de Souk Ahras Au début, aucun de ces responsables n'avait accepté la direction de Mohammedi Saïd, le wilayisme était très vivace et il n'était pas facile de le dépasser. Avant la constitution du COM, chaque wilaya avait un représentant aux frontières qui était chargé d'assurer le ravitaillement des unités venant de l'intérieur. Comme les effectifs stationnés aux frontières avaient augmenté du fait des recrutements opérés sur place, parmi les réfugiés algériens ou du fait de l'accroissement du nombre des unités venant s'approvisionner en armes, il était devenu nécessaire de mettre sur pied un commandement unique. Le COM devait remplir cette fonction mais il. Se trouve qu'au sein des organes dirigeants, chacun des responsables conservait ses forces. Personne ne voulait que l'on s'ingère dans ses affaires. Les hommes de Lamouri ne relevaient que de lui, ceux de Benaouda ne reconnaissaient aucune autre autorité que la sienne. Il en était de même pour ceux de Amara Bouglez. Ainsi, il n'y a jamais eu, dans les faits, de commandement unifié et le wilayisme prenait toujours le pas sur une véritable armée ou sur une quelconque organisation centralisée. Il n'est pas étonnant que dans ces conditions, des dissensions soient apparues qui ont vite éclaté en conflit. L'état-major du COM fut remis en cause par une véritable rébellion et il a fallu se résoudre à dissoudre cet organe que nous avions mis sur pied quelques temps auparavant. Tous ses membres furent éloignés. Certains d'entre eux furent affectés dans la représentation du FLN au Caire, sans fonction définie. La plupart restèrent disciplinés et respectèrent la décision. D'autres, comme Lamouri et Mostefa Lakehal, qui s'était trouvé éloigné au Caire pour des motifs différents, ont commencé à prendre des contacts avec les étudiants algériens. Ils s'étaient mis à faire du travail de sape et à mener une campagne de dénigrement contre le GPRA. Le Deuxième bureau égyptien s'était servi d'eux ainsi que Abdelkrim El Rifi. Ce dernier était un militaire qui était resté avec sa mentalité de militaire. Pour lui, tout homme politique est par définition un homme qui manquait de scrupules et qui était dénué de toute sincérité. Il incitait à se rebeller contre le gouvernement des politiciens. Il visait Ferhat Abbas et les responsables de la délégation du FLN au Caire. Il visait aussi Lamine Debaghine, qu'il connaissait très bien. Mais ce n'est pas l'action de Abdelkrim qui avait été déterminante dans la matérialisation du complot ; c'est celle du Deuxième bureau égyptien qui était entré en contact direct avec Lamouri et Mostefa Lakehal, II avait organisé des rencontres entre eux et Fethi Dib, chargé des affaires algériennes au sein des services de renseignements. A l'époque, les Egyptiens n'étaient pas au fait des particularismes algériens et des dissensions nourries par le wilayisme. Ils avaient déduit des critiques que faisaient leurs interlocuteurs en parlant du kabylisme de Krim et de Mohammedi que le GPRA était hostile à l'arabisme et au nationalisme nassérien. Ils avaient senti par ailleurs, en prenant connaissance de la Plate-forme de la Soummam, que la révolution algérienne avait une coloration marxiste. Ils étaient persuadés qu'il y avait derrière tout cela une main communiste et ils ne voulaient pas se résoudre à admettre la chose. Il ne s'agit pas là de spéculations sans fondements, ce sont des propos qui avaient été tenus à la délégation du Caire, à Lamine Debaghine et à Mehri et que nous avons nous-mêmes entendus. Les Egyptiens, quand ils avaient pris connaissance du texte de la Soummam, avaient dit qu'il s'agissait là d'une déviation de la révolution et que c'était plus du marxisme que du nationalisme. Ils voyaient très mal la révolution algérienne, avec tout l'impact qu'elle pouvait avoir sur le monde arabe, leur échapper. Ils voulaient en outre l'utiliser contre Bourguiba et, de façon officielle, il nous fut demandé de prendre position contre lui, du fait de son hostilité à la cause arabe. On ne peut pas dire que notre position, qui consistait à refuser de nous laisser aller à ces manœuvres, soit le fait d'un nationalisme étroit. En fait, depuis des décennies, les nationalistes algériens avaient cru en l'unité d'un Maghreb arabe dont la spécificité et les particularités ne se retrouvaient pas dans le Machrek. Les Egyptiens ne voulaient pas entendre parler de cette entité. Ils étaient contre la conférence de Tanger. Nous sachant difficilement maniables, connaissant les positions de Bourguiba et de Mohammed V, ils craignaient que ce grand ensemble, une fois constitué, ne leur échappe. D'un autre côté, une telle entité pouvait, pour diverses raisons, être plus viable que les ensembles constitués au Moyen-Orient et, cela, ils ne voulaient pas l'admettre non plus. Pour eux, l'unité maghrébine était une question de conjoncture, de tactique politique. A leur sens, le Maghreb n'avait pas de profondeur politique, pas de racines et ils n'ont jamais, jusqu'à ce jour, compris les liens qui nous unissaient depuis les temps les plus reculés. Le constat qu'ils avaient fait était simple. D'un côté, le docteur Lamine, proche de leurs idées, était maintenant éloigné du gouvernement. Ferhat Abbas, qui présidait le GPRA, était un francophone et ceux qui n'étaient pas considérés comme tels, c'est-à-dire Krim, Boussouf et moi-même, étions trop indépendants et trop attachés à notre pays pour être manœuvrables. L'Algérie nouvelle, dans ces conditions, risquait de ne pas être assez soumise à leurs vues. De là, l'aide qu'ils ont décidé d'apporter au groupe dissident. Plus grave encore, Lamouri et Mostefa Lakehal avaient été reçus par Abd el Nasser lui-même. Une fois la cause entendue, ces derniers prirent contact avec certains de leurs éléments stationnés aux frontières dans l'intention de les soulever contre le GPRA. Selon les déclarations des insurgés eux-mêmes, enregistrées au cours de leur procès, Abdel Nasser leur aurait conseillé de procéder au renversement du GPRA et d'arrêter les principaux dirigeants de la révolution, entre autres Mahmoud Chérif, Krim, Boussouf et Ben Tobbal. Après quoi, ils devaient constituer un nouveau gouvernement dirigé par Lamine Debaghine. Nasser les avait rassurés quant à la position des wilayas de l'intérieur qui étaient contre le gouvernement Abbas et il leur avait garanti que l'Egypte les reconnaîtrait immédiatement après la proclamation de la nouvelle direction. Il s'était engagé à user de son influence pour que tous les autres pays arabes fassent de même et il leur avait promis des livraisons d'armes supplémentaires. Celles-là mêmes qui avaient été bloquées pendant des mois et que les Egyptiens se refusaient à fournir au GPRA Nous avions alors des éléments infiltrés dans les rangs des insurgés qui nous informaient de leurs faits et gestes. Nous ne savions pas qu'ils avaient été reçus par Abdel Nasser. Par contre, nous connaissions le jour de leur départ du Caire ainsi que celui de leur arrivée en Tunisie. C'était leur chauffeur qui nous tenait au courant Nous les avons laissés faire pendant un moment sans intervenir. Ils se réunissaient au Kef en compagnie d'un nombre important de personnes, une cinquantaine environ. Nous hésitions toujours à intervenir parce que nous ne voulions pas que cela dégénère en une bataille rangée en plein territoire tunisien. Nous avons donc chargé les autorités tunisiennes de procéder aux arrestations. Lors de leur interrogatoire, ils ont reconnu la complicité égyptienne dans l'affaire et ils ont avoué avoir été reçus par le président Nasser lui-même. Après quoi, ils ont été internés dans l'attente de leur traduction devant un tribunal. Le gouvernement s'était réuni et avait désigné une délégation de trois membres pour se rendre dans la capitale égyptienne. Et, pour que cette démarche revête toute sa signification, c'est le président du GPRA lui-même qui fut désigné pour en prendre la tête. A plusieurs reprises, la demande d'audience faite au président égyptien resta sans réponse. Pour être reçus, nous fîmes agir des personnalités importantes du régime nassérien telles que le maréchal Amer, mais, à chaque fois, on nous envoyait Fethi Dib ou un ministre pour savoir le but exact de notre visite. Nos démarches s'étaient avérées vaines et toutes les relations furent rompues pendant neuf mois. Nous adoptâmes une nouvelle tactique : faire jouer l'opinion publique arabe contre le gouvernement égyptien. Ahmed Francis et moi-même sommes allés voir l'ancien président de la Syrie (El Kouatly). C'était l'époque de la République arabe unie et El Kouatly restait un personnage important de l'Union. Nous lui avons donc fait la relation du complot et des interventions de Nasser. Il n'en revenait pas. Il lui paraissait incroyable qu'un Arabe - et à fortiori un chef de gouvernement arabe - puisse comploter contre la révolution algérienne. Celle-ci était alors considérée comme une lutte sacrée dans tout le monde arabe. Convaincu par les arguments et les preuves que nous lui avions présentés, il a éclaté en sanglots, répétant à plusieurs reprises : "C'est une trahison... C'est une trahison." Il prit, le lendemain, un avion spécial pour se rendre auprès de Nasser. Il venait lui rappeler que quand la Syrie avait accepté l'union avec l'Egypte, elle n'avait posé qu'une seule condition, à savoir le soutien continu à la révolution algérienne. Ce n'est qu'après cette entrevue que Nasser accepta de nous rencontrer. Une délégation fut à nouveau constituée. Elle était composée de Ferhat Abbas, de Boussouf et de moi-même. J'y étais allé un peu contre mon gré, avec la condition de dire clairement à Nasser ce que je pensais de ses ingérences et de lui faire comprendre que nous étions prêts à déplacer le siège de notre gouvernement vers une autre capitale que le Caire. Nous lui fîmes part de tous les éléments de l'affaire, sans oublier les entrevues qu'il avait accordées aux insurgés, et nous lui fîmes clairement comprendre qu'il s'agissait là d'une initiative qui dépassait les limites que tout gouvernement étranger était tenu d'observer quant au respect de la souveraineté algérienne. Nous lui avons ensuite suggéré de choisir entre trois solutions pour dissiper le doute qui planait sur nos relations : 1 - mettre sur pied une délégation égyptienne qui se rendrait sur place consulter le procès verbal de l'instruction et interroger, si elle le voulait, les internés (nous l'avons fait, bien que nous considérions cela comme un problème interne aux Algériens) ; 2 - constituer une commission mixte qui consulterait le procès-verbal et qui entendrait Lamouri et ses complices ; 3 - recevoir, à titre d'information, l'enregistrement de l'interrogatoire et la copie du procès-verbal. Pour toute réponse, Nasser nous dit que, dans cette affaire, il y avait de l'exagération. C'était tout. Il n'avait pas dit un mot de plus. C'est après cette affaire que le gouvernement provisoire changea de siège et s'installa à Tunis. Dans la déclaration que nous fit Lamouri, ses propos se limitaient à des accusations de régionalisme portées contre Krim. Or, c'était là un domaine très sensible et nous ne voulions pas voir se développer dans nos rangs un tel esprit. C'était le temps où commençaient à se répandre, venant surtout de la base de l'Est et des membres de la wilaya I, des propos désignant les gens par leurs origines. On disait : "Un tel n'est pas Arabe, il est Kabyle", que "Krim choisit ses éléments", "qu'il mène une politique personnelle", etc. Je ne pense pas que cela était fondé. Pour ce qui est de Mohammedi Saïd par exemple, Krim n'avait pas été seul à le désigner comme chef de l'état-major du COM. Nous avions tous participé à sa nomination. Je ne pense pas non plus que Mohammedi ait pratiqué une politique favorable aux Kabyles puisque, de fait, il n'avait jamais réellement dirigé l'appareil. Il ne l'avait pas gardé entre ses mains suffisamment longtemps pour pouvoir réaliser quoi que ce soit. En ce temps-là, les hommes de Lamouri étaient survoltés contre le choix du commandant Idir par Krim. Cet homme-là, que Bénaouda connaissait bien, avait servi comme chef de bataillon de l'armée française lors de la bataille de Catinat dans le nord-constantinois et il avait participé à plusieurs ratissages. Il dirigeait les opérations à la tête de ses hommes dont 90 % étaient d'origine algérienne. On ne pouvait donc pas dire qu'il le faisait sous la contrainte du nombre. Ses hommes de troupe allaient camper jour et nuit dans la région des Béni Sbih, des Ouled Embarek et des Béni Tlilane. Ils appliquaient la nouvelle tactique qu'avait conçue l'armée française pour couper la population des unités combattantes de l'ALN. En tant que commandant, il n'avait pas ordonné de pillages, ni procédé à des exécutions ni même fait torturer. Il se contentait de faire de l'action psychologique. Il rassemblait les gens et leur disait "Voyez-vous, nous savons que vous détenez des armes. Ces armes-là, les djounoud n'en ont pas besoin. Elles risquent de les gêner beaucoup plus qu'autre chose. Elles sont encombrantes et ils ne sauront pas où les cacher. Pour les armes militaires, gardez-les si vous en avez, vous pouvez même les leur donner, mais pour les autres, remettez-les nous. " Je ne sais si c'est par manque de formation politique ou du fait de la méthode pernicieuse utilisée par le commandant Idir ; je ne sais si c'est par peur des représailles, mais beaucoup de personnes avaient fini par remettre leurs armes. Cette méthode avait failli ruiner l'organisation. Les gens étaient surpris par ce nouveau langage et, du fait aussi que dans les rangs du bataillon la plupart des militaires étaient des Algériens, la population avait fini par croire qu'ils n'étaient peut-être pas contre la révolution. Pour conforter la population dans cette idée, il arrivait aux soldats d'origine algérienne de remettre discrètement des cartouches aux femmes et de leur dire de les donner aux moudjahidines si elles le voulaient. Cela faisait bien sûr partie du même plan d'action psychologique. Benaouda savait tout cela puisqu'il était de la région. On peut imaginer son étonnement quand il vit Idir bombardé chef de cabinet de Krim. Hiérarchiquement, c'était Idir qui devait transmettre les directives à Mohammedi et aux autres membres du COM. De leur côté, ceux-ci n'avaient jamais admis l'autorité du nouveau venu.
Notes

[*]
Militant du PPA, membre de l'OS et du Comité des 22, Ancien chef de la wilaya II (Nord-Constantinois) ; membre du CNR A ; ministre du GPRA et membre du Comité Interministériel de la Guerre (CIG). Il a fait partie de la délégation algérienne aux négociations d'Evian.


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Voici le texte intégral de l'intervention de Gilbert Meynier à Alger lors des débats d'El Watan du 22 octobre 2010, aux côtés de Mohammed Harbi et de Mohammed Hachemaoui.

Rappel/introduction Avant d’explorer un passé plus ancien, remontons d’abord à 1830 et aux quatre décennies qui suivirent. Les morts algériens de l’implacable conquête de l’Algérie peuvent être évalués entre 250 000 et 400 000 . Les victimes de la destructuration du vieux mode de production communau-taire, en particulier lors de la grande famine de 1868 suite à une récolte désastreuse, étudiée no-tamment par André Nouschi , furent bien aussi nombreuses, et peut-être plus : au total il y eut disparition peut-être bien d’un quart à un tiers de la population algérienne de 1830 à 1870. La population se mit à remonter à partir de la fin du XIXe siècle, plus du fait de ce que les Québécois appellent la « revanche des berceaux » que de la médecine : en 1914, l’Algérie, colonisée depuis 84 ans, compte 77 médecins de colonisation, moins qu’au Maroc, dont l’occupation a commencé sept ans plus tôt. Il y eut en Algérie aussi dépossession de 2,9 millions d’ha sur 9 millions cultivables : le tiers en quantité, mais plus en qualité car ce sont les meilleures terres qui furent prises – du fait des confiscations, des expropriations pour cause d’utilité publique, de saisies pour dettes de paysans insérés de gré ou de force dans le système monétaire et ayant dû mettre leurs terres en gage. Quant à l’œuvre d’éducation tant vantée, d’après les chiffres officiels, 5% de la population était scolarisée dans les écoles françaises en 1914, moins de 15% en 1954 ; et elle n’augmenta qu’in fine durant la guerre de libération et du fait du plan de Constantine. La langue arabe, relé-guée au second plan, n’était enseignée dans le système français que dans les trois médersas offi-cielles (puis les lycées franco-musulmans après la 2e guerre mondiale). Le congrès des maires d’Algérie de 1909 avait voté une motion demandant « la disparition de l’enseignement indigène », au désespoir du recteur Jeanmaire, apôtre de l’école républicaine française. La discrimination est aussi fiscale : les « impôts arabes » spécifiques (achour, hokor, lezma, zakât) sont payés par les Algériens jusqu’en 1918, dans la continuité du beylik de l’époque otto-mane, et avec sensiblement les mêmes taux. S’y ajoutent les « centimes additionnels » et la corvée – formellement, l’assimilation fiscale fut édictée en 1918. Ce furent ainsi largement les paysans algériens, dont entre le 1/3 et le 1/5 de leurs revenus s’envolait en impôts, qui financèrent la co-lonisation française, c’est à dire leur propre dépossession. Au politique, l’égalité dans une citoyen-neté commune fut refusée pendant longtemps ; puis, avec le statut de l’Algérie de 1947 furent institués deux collèges distincts élisant chacun le même nombre de représentants : un électeur français équivalait à huit électeurs algériens. Comment l’historiographique coloniale a-t-elle traduit ces données historiques indubita-bles ?

-1- La tradition historiographique française coloniale-a- Invention/création coloniale de l’Algérie par la France A la différence du beylik de l’Algérie ottomane, des Français et des Européens s’enracinent en Algérie : c’est une colonisation de peuplement dont la population atteint fin XIXe siècle pres-que le quart de la population algérienne . Il y a, dans l’Algérie coloniale trois départements dits « français », des arrondissements, des communes : dans la logique jacobine française, il y a qua-drillage du pays par une véritable administration, mais conçue pour la domination et la discrimi-nation d’un peuple par un autre, d’une culture par une autre : discriminatoire, le code de l’indigénat existe jusqu’en 1927, et la discrimination persiste par la suite. Existent deux sortes de communes, les communes de « plein exercice » à la française, et les « communes mixtes » régen-tées par l’administration coloniale, par l’administrateur de commune mixte. Et, depuis le Sénatus-consulte de 1865, si les Algériens sont considérés comme français, ils n’ont pas pour l’immense majorité les mêmes droits que les Français : ils sont sujets et non citoyens. Et l’on a parlé des deux collèges du statut de 1947. Il faut revenir sur le narcissisme colonial classique de l’autocélébration : il y a l’avant 1830 désolant et l’après 1830 radieux. L’histoire coloniale exalte l’apport de la civilisation, de la méde-cine, de l’instruction, la construction de chemins de fer et de routes, l’édification de villes moder-nes qui portent une marque résolument française : à Alger la ville nouvelle ceinture la Casbah, à Oran le front de mer est une corniche à l’européenne et l’hôtel de ville d’Oran un bâtiment offi-ciel français typé. Ces villes nouvelles sont le plus souvent édifiées au prix de la destruction de monuments ou de la fragmentation de leurs quartiers antérieurs. Si la Qasbah d’Alger fut relati-vement préservée, la mosquée Ketchaoua fut transformée en cathédrale ; à Constantine, les rues Caraman, de France, Vieux, Nationale, fractionnent la vieille ville ; à 60 km au nord-ouest, à Mila, une des plus vieilles mosquées d’Algérie, la mosquée Sidi Ghanem, fut un temps transformée en écurie pour chasseurs d’Afrique. A Tlemcen, il y eut disparition des deux tiers de la ville intra-muros, sans compter les dommages infligés à des monuments comme la mosquée et la qubba de Sidi Ibrahim de l’époque du souverain zayânide Abû Mûsa II (XIVe siècle) ; mis à part son mina-ret, la mosquée Sidi al-Hasân fut quasiment ruinée et la mosquée Sidi al Halwi transformée en musée… La réalité, on le voit, est loin d’être uniment au diapason des célébrations officielles françaises. On sait que la résistance du peuple algérien se traduisit par de multiples insurrections, écrasées dans le sang, jusqu’à l’éclatement de 1954 et la cruelle guerre de reconquête coloniale (manquée), la guerre d’indépendance algérienne, qui se conclut par l’indépendance de 1962 après les accords d’Évian ; cela malgré les théoriciens de la guerre révolutionnaire comme le général Lacheroy, malgré le 13 mai 1958, malgré Lagaillarde, malgré Alain de Sérigny, malgré Massu et Bigeard, malgré le putsch anti-de Gaulle des généraux du printemps 1961 conduit par Salan, mal-gré l’insurrection à contretemps de l’OAS, malgré tous les révoltés désespérés contre le « bra-dage », y compris d’authentiques intellectuels, et fins connaisseurs de l’Algérie comme Georges Marçais, dont feu le frère William avait été un arabisant renommé. En 1947, l’historien de l’art Henri Terrasse, spécialiste de l’art musulman, écrivait, encore, que c’était un pays d’ « économie égarée » que les colons essaient de remettre dans le droit chemin – certes, il parlait du Maroc mais l’Algérie a suscité nombre de notations de même acabit. La guerre de libération installa côté français des rancœurs durables chez nombre d’Européens d’Algérie, et de productions d’historiens et publicistes de nostalgérie coloniale, dont le dernier et médiatique représentant est, par la plume et la télévision, un compagnon du prési-dent Sarkozy, Patrick Buisson. Cet ex-directeur de l’hebdomadaire d’extrême-droite Minute a pu-blié fin 2009 un luxueux album à la gloire de l’armée française, de ses virils guerriers et de leur œuvre de « pacification », La Guerre d’Algérie, coédité par la chaîne Histoire et des institutions de l’État : mélange de convictions, de mélancolie esthético-guerrière et de ratissage calculé sur les terres du Front National destiné à en attirer les électeurs, sans qu’il soit avéré que la manipulation réussisse, sauf à imaginer, pour 2012, un surréaliste second tour Sarkozy-Marine Le Pen…b/ Ethnicisme colonial, racialisme et fantasmes français A l’époque coloniale, on parle couramment de « races » en Algérie, de Français, d’Européens et d’ « indigènes » selon des catégories racialistes inspirées du scientisme européen de la deuxième moitié du XIXe siècle : la « civilisation » versus « la barbarie ». Les « Arabes » sont opposé aux « Bebères » en tant que « races » distinctes, et pas seulement de locuteurs de langues différentes ; cela alors même que l’Algérie est un pays berbère notablement arabisé, et même auto-arabisé , moins que la Tunisie mais plus que le Maroc . Les « Berbères », bons sédentaires, qui eurent à affronter les méchants nomades arabes, sont déclarés supérieurs auxdits « Arabes », et ressembler aux Gaulois : c’est l’inversion des notations méprisantes du chroniqueur du XIIème siècle et digne sharîf Abû ‘Abdallâh Muhammad al-Idrisî: cet auteur remarque, aussi bien pour Mila que pour Marrakech, que leurs habitants sont des « ramassis de Berbères » (ahluhâ akhlât min al-Barbar)…Mais il est des Français pour interpréter de travers les stéréotypes : le brillant diri-geant socialiste Albert Thomas, normalien issu de l’école normale supérieure de la rue d’Ulm, comme Jaurès, et disciple de Jaurès, écrit sur les Kabyles, réputés sédentaires, que « le goût du voyage inhérent à leur race fait qu’ils sont naturellement nomades ».Ce préjugé favorable aux « Berbères » répond aux fantasmes narcissistes du nationalisme français, projetés sur des tiers – les bons « Berbères » censés ressembler aux Français et dédoua-nant inconsciemment ces derniers de la culpabilité des violences coloniales. Il s’est traduit par les quelques îlots de scolarisation française en Kabylie, mais il était aussi sous-tendu par la politique du « diviser pour régner » : s’attirer les « Berbères » contre les « Arabes » ; cela surtout pour la Kabylie : il y eut un véritable mythe kabyle, l’Aurès plus lointain, moins au cœur du territoire co-lonisé, ayant été davantage mis de côté. Heureusement il est de nos jours d’authentiques cher-cheurs pour rendre compte d’une Kabylie démythifiée . Dans la même logique ethniciste coloniale, l’arrivée des Banû Hilâl (les « invasions hila-liennes »), ces « hordes barbares » arabes survenues au Maghreb à partir du milieu du XIe siècle, fut vue par les historiens coloniaux comme une « catastrophe », ces historiens recopiant Ibn Khaldûn, d’origine andalouse et yéménite, donc arabe et arabophone, mais grand notables cultivé citadin qui parle lui aussi de nakba. On retrouve ce thème plus ou moins martelé chez des auteurs français de l’époque coloniale comme Augustin Bernard, Georges Hardy ou Victor Piquet, et même en mineur chez Charles-André Julien : puis, plus récemment chez Hady Roger Idris, chez Henri-Terrasse. Il faut attendre 1967 pour voir exprimée, dans la revue Annales ESC, défendue par l’historien de la Tunisie Jean Poncet , une thèse équilibrée sur le sujet ; mais Hady Roger Idris contre-attaque dans la même revue l’année suivante. L’historien reconnaît aujourd’hui que l’immigration et l’installation des Banû Hilâl ont certes modifié les structures rurales, en favori-sant l’élevage par rapport à l’agriculture ; mais on sait que l’élevage et la pratique de la transhu-mance (‘ashâba) existaient depuis bien auparavant chez des « Berbères », comme elle existait outre Méditerranée chez les éleveurs provençaux et languedociens (l’alpage, l’estive). Certes la survenue des Hilaliens entraîna des frictions et des affrontements, mais on a la preuve que furent, aussi, conclus des pactes de coexistence entre citadins et bédouin, comme par exemple à Constantine. De toute façon, s’impose, au-dessus de ce monde « indigène » le mythe du Français racia-lement supérieur, lequel porte la marque du nationalisme français. En Algérie, les Européens re-présentent ce que les historiens américains dénomment un Creole people, un peuple créole – l’historienne américaine Lyah Greenfeld dénomme les Américains les « Creole pioneers ».Or, beau-coup de Français d’Algérie sont des Méridionaux d’origine : à la veille de la première mondiale, une enquête apprend que près des 4/5 des Français installés en Algérie sont proviennent de ter-ritoires situés au sud d’une ligne Genève-Bordeaux, c'est-à-dire de gens majoritairement non fran-cophones, en l’occurence occitanophones originels. Avec les immigrés espagnols et italiens, la prédominance de gens originaires du sud de l’Europe est donc flagrante parmi les immigrés euro-péens en Algérie. Raison classique pour laquelle ils tiennent souvent de manière démonstrative à se dire et à se prouver français, en quelque sorte sur-français, ce qu’Althusser dénommait une « introjection idéologique » : le fait d’être englobés dans l’ensemble français leur garantit leurs privilèges face aux Algériens, les soulage de leur sentiment plus ou moins conscient de précarité face au ressen-timent de la masse algérienne colonisée. Bon an mal an, et malgré de vraies luttes sociales inter-nes, malgré un mouvement anarchiste notable, et malgré le Parti Communiste Algérien, objecti-vement leur sort est solidaire de celui des notables coloniaux qui forment le lobby colonial.-c- L’Algérie et le roman national français- Mythe fondateur national et diversité française
Le principal mythe fondateur de la nation française, imaginée comme toute nation (la « imagined community » de l’historien anglais Benedict Anderson, spécialiste des sociétés sud-asiatiques) dans l’ « invented tradition » (cf. les historiens, anglais eux aussi, Eric Obsbawm et Te-rence Ranger) est, comme commun dénominateur, la révolution de 1789, cela bien avant la lan-gue française qui ne s’enracine qu’avec l’œuvre scolaire de Jules Ferry et les brassages occasionnés par la guerre de 1914-1918 : en 1789, près de la moitié de la population de l’hexagone ne parle pas français et le comprend mal : ce sont les Alsaciens, Flamands, Bretons, les occitanophones, au sud de la ligne Genève-Bordeaux, et leurs cousins catalans. Et pourtant l’hymne national, la Mar-seillaise de Claude Rouget de l’Isle, fut chantée pour la première fois en avril 1792 dans les salons du maire Frédéric de Dietrich, grand bourgeois maire de Strasbourg, ville où le peuple ne parlait pas français, mais un dialecte alémanique ; mais où, au pont de Kehl, sur le Rhin qui sépare l’Alsace du pays de Bade allemand, Dietrich avait fait apposer en français le panneau : « Ici com-mence le pays de la liberté ».Trois mois plus tard, elle fut reprise et popularisée par les volontai-res marseillais mobilisés pour la défense de « la patrie en danger », accueillis en triomphe à Paris – d’où le nom de Marseillaise. Cela alors que Marseille n’était pas une ville francophone, mais occi-tanophone, de dialecte provençal marseillais. Sans remettre en cause ces emblèmes nationaux, un historien illustre comme le Parisien Jules Michelet put écrire sans sourciller que « la vraie France [était] la France du Nord », il en voyait le cœur dans l’île de France, jusqu’au val de Loire. Les humains de la moitié sud de l’hexagone étaient plus ou moins vus comme des sauvages folkloriques – de cette représentation témoigne la vogue des histoires marseillaises jusque tard dans le XXe siècle. A 22 ans, le janséniste parisien Jean Racine, en chemin pour aller rendre visite à son oncle, chanoine à Uzès (à 16 km au nord de Nîmes, 26 km à l’ouest d’Avignon), écrit dans une lettre à son ami La Fontaine que, à partir de Mâcon, il comprend mal le langage des naturels. Et à Uzès,« Je vous assure que j’ai autant besoin d’un interprète qu’un Moscovite en aurait besoin dans Paris. Néan-moins, je commence à m’apercevoir que c’est un langage mêlé d’espagnol et d’italien, et comme j’entends assez bien ces deux langues, j’y ai quelquefois recours pour entendre les autres et pour me faire entendre ».Il est aussi surpris par la cuisine à l’huile d’olive, mais après l’avoir éprouvée, il la trouve finale-ment plus fine que la cuisine au beurre.
Il est plausible que le racisme anti-méridional ait été projeté sur l’Algérie sous l’étendard du sens commun national français. On l’a dit, les Français d’Algérie étaient majoritairement origi-naires de l’Europe méridionale, et ils étaient portés par ce racisme instinctif qui est celui de toute communauté de type créole – mais différent par exemple du racisme de système de l’Afrique du Sud, où l’apartheid était vu dans le cadre de la cité de Dieu, non sans imbrication avec telles re-présentations racialistes originelles. En Algérie, rien de tel : les « Pieds noirs » étaient les agents in situ de rapports de domination dont la précarité, face aux Algériens dépossédés et discriminés, renforçait un racisme anti-algérien de compensation : mépriser ces Algériens soumis, c’était se mépriser soi-même en projections sur des tiers, mais un soi-même transmué en vainqueur. Le maréchal Bugeaud, l’adversaire de l’émir Abd el-Kader, avant d’être nommé duc d’Isly, était le marquis de la Piconnerie dont le manoir se trouvait à la Durantie, près d’Excideuil, en Périgord vert profond, au nord-est de Périgueux : il est probable que, avec ses manants, il devait mieux se faire comprendre en dialecte nord-occitan du terroir qu’en français. Et si le Front national de Le Pen obtient de beaux scores à Marseille, n’est-ce pas que, Méditerranéens, les Marseillais ressem-blent quelque peu aux Algériens : pour s’en différencier, ne doivent-ils pas recourir à ce que Freud appelle « le narcissisme de la petite différence », qu’on peut interpréter ici comme le ra-cisme de la petite différence ? A l’inverse, en Algérie, il y eut des petits colons pour défendre les paysans algériens me-nacés de dépossession et tourmentés par leurs administrateurs de communes mixtes, voire même pour se rallier dans l’enthousiasme militant aux revendications algériennes : ainsi Victor Spiel-mann, petit colon ruiné la région de Bordj Bou Arreridj. Ce fils d’un optant alsacien (Alsacien ayant refusé de devenir allemand en 1871 et ayant dû quitter sa patrie) fonda le Cri de l’Algérie, authentique journal de revendication anticoloniale; il fut ensuite le secrétaire en langue française de l’émir Khaled, puis le fondateur des bien nommées Éditions du Trait d’Union. A sa mort en 1938, le shaykh Ibn Bâdis publia dans son journal Al-Shihâb, un émouvant article d’hommage : « l’Algérie perd avec lui son ange gardien » (malâk hâris). Et l’historien peut remarquer qu’il y eut d’autres Alsaciens à lui emboîter le pas, comme son ami Deybach qui s’exprimait dans L’Écho d’Aïn Tagrout. Peut-on peut risquer l’hypothèse : des exilés de leur patrie purent-ils se sentir des affinités avec des Algériens, exilés de l’intérieur ? L’histoire reste à écrire de ces Français d’Algérie à contre-courant colonial, mais elle va probablement tellement à l’encontre des taxinomies cou-rantes qu’elle n’a jusqu’à maintenant tenté aucun chercheur : ne détonnent-ils pas dans le roman national/colonial français ?- L’Algérie, chapitre et illustration du roman national français L’invention coloniale de l’Algérie procède de la conquête française, assumée par le natio-nalisme français. Elle fut d’une part entreprise, d’après l’historien Pierre Guiral, à l’instigation de la chambre de commerce de Marseille pour revigorer son commerce, et d’autre part décidée, quinze ans après la défaite de Waterloo : la conquête d’Alger marque une revanche du nationa-lisme français ; et elle fut bien voulue pour cette raison par le roi Charles X pour ragaillardir son pouvoir battu en brèche – trop tard en tout cas : six semaines après le débarquement français à Sidi Fredj du 14 juin 1830, et guère plus de trois semaines après la reddition d’Alger (5 juillet ), la révolution des « Trois Glorieuses » (27, 28 et 29 juillet 1830) mit à bas son régime. Dans les ma-nuels d’histoire français de la IIIe et de la IVe République, ainsi que chez les historiens coloniaux, tels ceux qui, en 1930, célèbrent le siècle d’Algérie française dans les Cahiers du Centenaire, l’Algérie est présentée comme une création française.
Elle l’est même dans l’Histoire de France et d’Algérie, d’Aimé Bonnefin et Max Marchand , publié en 1950 : ce manuel d’école primaire est une histoire très convenue, une sorte de Lavisse dédoublé France-Algérie – France : pages paires, Algérie : pages impaires –, avec chaque fois une gravure explicative ; cf. les p. 55-56 : à gauche, Boufarik en 1836, à droite, Boufarik aujourd’hui : un beau village prospère en lieu et place d’une terre quasiment déserte, labourée par un Français coiffé d’un képi. Cela alors même que les auteurs sont marqués à gauche et que l’un d’eux, Max Marchand, sera assassiné par l’OAS en mars 1962. Rien sur le système colonial : la conquête de l’Algérie est soft, « la piraterie » (et non « la course ») n’est pas expliquée – serait-ce un fait de na-ture ? – mais sont célébrés les « combattants musulmans de l’armée française »… Nulle part ne sont notées les continuités depuis le beylik d’avant 1830 : jusqu’en 1918, on l’a dit, le pouvoir français continua à pressurer les Algériens par la fiscalité des « impôts arabes » spécifiques. Pour-tant, bien avant même l’apparition des nouveaux historiens engagés dans la décolonisation de l’histoire, il y eut des critiques à être émises : par exemple par le géographe de conviction anar-chiste Élisée Reclus ; et le Jean Jaurès de l’Histoire socialiste estimait que le système colonial, « as-servissement d’une nation par une autre », était « une affaire Dreyfus permanente ». Ceci dit, en Algérie même, si existèrent bien des positions coloniales intangibles reflétant la logique du sys-tème, il y eut des pratiques relativement diverses.
-2- Le système colonial entre politique et primat des armes-a- Des pratiques politiques coloniales relativement diverses Si la conquête fut impitoyable et sanglante, le corps militaire se distingua relativement des pratiques des colons civils, et les deux luttèrent pour s’assurer la mainmise sur l’Algérie et le contrôle de ses populations. Il y eut les « bureaux arabes » de la conquête de l’Algérie et du Se-cond Empire, caractérisés par un encadrement paternaliste à même de toucher des humains régis par la ‘açabiyya des systèmes segmentaires, mieux que par le matraquage permanent indifférencié. Ce fut la tentative de « royaume arabe », méticuleusement analysée par Annie Rey-Goldzeiguer, royaume arabe dont le conseiller de Napoléon III Ismaël Urbain fut le plus écouté. La rupture décisive se produisit avec la répression de la révolte de Mokrani-Bel Haddad, qui se solda par le séquestre de 445 000 hectares de terres. Dès lors, fut engagée la colonisation capitaliste permise par une série de lois, dont la fameuse loi Warnier de juillet 1873. La colonisation foncière fut à son apogée sous la IIIe République pendant les quatre dé-cennies qui suivirent. S’établirent au même moment des entreprises industrielles primaires, l’exploitation de mines notamment, mais pratiquement aucune industrie productive ne fut im-plantée selon les logiques de ce qu’on dénommé en faux sens partiel le « pacte colonial » , les banques se développèrent pendant que les compagnies maritimes françaises prospéraient sous le bouclier du monopole de pavillon. Ce fut en « politique indigène » le triomphe des « civils », à l’exception des TDS (Territoires du Sud). Les militaires ne retrouvent quelque importance que lors de la conquête de l’Afrique subsaharienne et aux approches de la guerre de 1914-1918 – le service militaire obligatoire fut imposé par décret du 3 février 1912, cela contre l’avis du colonat : La Dépêche algérienne du 3 août 1908 écrit crûment « Au point de vue instruction et service mili-taire, laissons donc les Arabes tranquilles ».La conscription fut intégralement appliquée en sep-tembre 1916 ; d’où l’insurrection du Belezma/Aurès de 1916-1917. Mais le recrutement de 173 000 Algériens pour la première guerre ne leur rapporta pratiquement rien hormis l’insignifiante loi Jonnart de 1919 ; et le recrutement de 120 000 autres pour la deuxième guerre mondiale se conclut par la tentative insurrectionnelle et la répression de mai 1945, puis le statut inégalitaire de 1947. Il y eut aussi quelques différences dans les politiques suivies au Gouvernement général de l’Algérie à Alger. Charles Célestin Jonnart, dans la première décennie du XXe siècle, a des atten-tions pour les notables algériens, il se veut ouvert et libéral, il crée le prix Abd el Tif en 1907, il promeut le style mauresque dit « style Jonnart », réalisé entre autres par l’architecte Tardoire : la médersa de Constantine – jusqu’en 1972, en plein centre, elle abrita l’université, avant la mise en service des blocs bétonnés de Niemeyer –, celle de Tlemcen, celle d’Alger, la gare d’Oran, la grande poste d’Alger, l’hôtel de ville de Skikda…Le gouvernement général est dirigé par un grand bourgeois du nord, qui a pour belle famille les banquiers et industriels lyonnais Aynard, relativement en douceur par rapport à son successeur radical et franc-maçon, le gouverneur Char-les Lutaud. A partir de 1911, ce ci-devant préfet du Rhône se révéla un colonialiste raidement intransigeant. En contraste, la figure du gouverneur Maurice Viollette (1925-1927), lui aussi franc-maçon, lui aussi vrai colonial, mais croyant au message de civilisation que la France disait incar-ner, et se mettant pour cela à dos le colonat . Pendant la guerre de libération algérienne, les SAS furent une nouvelle version des bu-reaux arabes – même encadrement, même paternalisme pour attirer et rallier les populations, mais à contretemps de la lutte de libération engagée en 1954 – à cette différence non négligeable que les officiers français des Bureaux arabes apprenaient l’arabe ou le berbère et que les officiers des SAS ignoraient généralement les langues du pays. Il exista même des militaires sensibles aux droits humains, voire même protestataires comme le fut le général Jacques Paris de Bollardière qui fut mis aux arrêts. Et même un vieux routier des Affaires indigènes comme le général Geor-ges Spilmann, commandant la Division territoriale de Constantine en 1954, et mort en service commandé au Maroc en 1955, cria au fou devant les offensives du général Cherrière dans les Au-rès entreprises fin 1954-début 1955 avec d’énormes moyens. Il a laissé un ouvrage décapant, non conformiste, au titre provocateur, Souvenirs d'un colonialiste (1968) et, moins connu Le cas de cons-cience d'un officier (1970) . Quant au général de Gaulle lui-même, tout militaire dans l’âme qu’il ait été, et même s’il n’avait pas spécialement le FLN en sympathie, il dut probablement être assez tôt convaincu de la nécessité de discuter et de négocier avec la résistance algérienne. L’historien peut lire les opérations de reconquête « Jumelles » et « Pierres précieuses » du plan Challe, en 1959-1960, comme la preuve par l’absurde qu’il fallait négocier, à la politique : même une maîtrise mili-taire du terrain ne détruisit pas l’ALN et elle renforça symétriquement le rôle et l’engagement des politiques du FLN dans le monde et à l’ONU. Tout général qu’il était, de Gaulle fut un politique.-b- Le mythe des occasions manquées D’après l’historiographie positiviste, notamment la grande œuvre de Charles-Robert Age-ron, succédant entre autres aux livres de Marcel Émerit, il y aurait eu des « occasions manquées » entre Algériens et Français depuis 1830. Prenons par exemple le sénatusconsulte de 1865 : l’« indigène » est français, mais régi par la loi musulmane, c'est-à-dire par ce qu’on appelait le sta-tut personnel musulman, qui régissait les Algériens au privé (mariage, successions…) en lieu et place du Code civil. Pour se faire « naturaliser » français, un Algérien devait en faire la demande, renoncer à son statut personnel, et après examen, il pouvait par décret être admis à la citoyenneté française de plein droit. Très peu d’entre eux acceptèrent cet abandon : le statut personnel mu-sulman était un symbole d’enracinement et d’opposition à la loi coloniale, il revêtait le sens d’une apostasie, de l’abandon de l’islam : il y avait la peur d’être taxé de « gawrî ».Moins de 5 000 Algériens s’étaient fait « naturaliser » français au moment du centenaire de la conquête en 1930 : un Ferhat Abbas, pourtant de culture largement française, refusa toujours d’abandonner son statut musulman pour devenir citoyen français. Et, pourtant, dans la logique du « diviser pour régner » et pour trouver une assise à son pouvoir, Paris avait, le 24 octobre 1870, promulgué le décret Crémieux donnant la citoyenneté française aux Juifs d’Algérie en leur conservant leur loi reli-gieuse, la loi mosaïque. Au lendemain de la première guerre mondiale, en 1919, fut votée la loi Jonnart, gouver-neur général de l’Algérie, réinstallé début 1918 à la place de Lutaud par Clemenceau, président du conseil et ministre de la guerre. Alors que le service militaire obligatoire institué en 1912 en Algé-rie avait été présenté à dessein comme l’impôt du sang dû par tous les Français, cette loi ne donna le statut de citoyen dans le statut musulman qu’à une infime partie des Algériens, soigneusement triés et sous condition de connaissance du français et d’états de service. En 1936, le projet dit « Blum-Viollette » – en fait c’était le projet Viollette, ministre d’État dans le gouvernement Blum –, reprit les logiques de la loi Jonnart, mais en augmentant le nombre des bénéficiaires de droit (dont les titulaires du certificat d’études primaires) à environ 25 000 hommes . Et, bien que les deux députés socialistes élus en Algérie en 1936, Régis et Dubois, poussent le gouvernement de Front populaire de Blum à adopter le projet Viollette, devant les rodomontades du lobby colo-nial, Blum renonce à même le présenter à la Chambre des députés . Blum ne voulait peut-être pas se mettre le lobby colonial à dos : il put vouloir, en s’inclinant, prouver sa qualité de bon Français, lui qui était qualifié par la presse d’extrême droite de juif allemand, affublé du nom de Karfulkenstein. Mais il y eut bien sûr responsabilité collective du gouvernement de Front popu-laire. Au fond, il y avait bien connivence structurelle entre le lobby colonial et Paris – l’État fran-çais – dont la colonisation de l’Algérie, représentée comme construction nationale française, était ressentie comme partie prenante : comme l’a écrit Jean-Paul Sartre, le colonialisme était bien un « système », un système français. Le contenu du projet Viollette fut repris, et même élargi, par l’ordonnance gaullienne du 7 mars 1944. Elle fut reconduite en loi le 7 mai 1946, avec l’institution des deux collèges : le pre-mier « français », le deuxième « indigène ». Les Algériens eurent cinq députés MTLD à Paris à la première Constituante, dont Mohammed Khider. L’assemblée nationale française vota le 20 sep-tembre 1947 le statut de l’Algérie selon lequel, on l’a noté, chaque collège élisait le même nombre de représentants quand le premier collège ne comprenait en nombre qu’1/8 du chiffre des mem-bres du deuxième collège. Ce qui aurait été peut-être bienvenu et accepté une décennie plus tôt ne pouvait plus l’être en 1947 car le nationalisme algérien avait considérablement évolué devant les blocages français, et il y avait eu la tragédie de mai 1945. Le 2 janvier 1956, les Français votent majoritairement pour la gauche. Le dirigeant socia-liste Guy Mollet proclame son intention de faire la paix en Algérie et dénonce cette « guerre im-bécile et sans issue ». Il est investi président du conseil, c'est-à-dire chef du gouvernement. En visite à Alger, il y est accueilli le 6 février 1956 sous les huées et des jets de tomates par une mani-festation de Français d’Algérie. Et là aussi, Guy Mollet cède aux pressions des manifestants et du lobby colonial qu’ils signifient. Le 12 mars 1956, l’Assemblée nationale vote pour son gouverne-ment les « pouvoirs spéciaux » sur la politique à mener en Algérie, avec entre autres l’approbation des députés communistes. Le contingent français est rappelé, c’est l’engagement dans la guerre. Cependant, pour tenter désespérément de l’arrêter, durant l’été 1956, est préparée l’organisation d’une conférence nord-africaine devant se tenir à Tunis, organisée par le Maroc et la Tunisie, en concertation avec le secrétaire d’État français aux Affaires marocaines et tunisiennes Alain Sava-ry . Il était d’accord pour qu’y participent quatre des neuf chefs historiques du FLN – Hocine Aït Ahmed, Ahmed Ben Bella, Mohammed Boudiaf, Mohammed Khider –, se trouvant alors au Ma-roc . Objectif : préparer en douceur la décolonisation de l’Algérie en lui conférant un statut d’État indépendant en association avec la France dans un cadre fédéral maghrébin, étant entendu que Savary jugeait inéluctable l’indépendance de l’Algérie. Simplement il était un adepte de cet art du compromis que d’aucuns appellent la politique, qui aurait permis, s’il avait été tenté, à l’Algérie d’accéder par étapes à l’indépendance en faisant l’économie d’une terrible guerre. L’avion marocain emmenant du Maroc à Tunis les quatre dirigeants algériens, qui trans-portait aussi l’intellectuel algérien Mostefa Lacheraf , passa sur l’espace aérien, alors français, qu’il aurait dû éviter ; il fut arraisonné par la chasse aérienne française – ce fut l’un des premiers dé-tournements aériens de l’histoire. D’après Ben Bella, « ils nous ont vendus » (les Marocains), de connivence avec les services secrets français et le commandement militaire français en Algérie pour que la conférence n’ait pas lieu. Les cinq Algériens sont appréhendés à leur descente d’avion – ils passeront tout le reste de la guerre en prison. La conférence de Tunis avait bien été sabotée. Malgré ses protestations au gouvernement, Alain Savary ne parvint pas à les faire libérer. Il dé-missionna donc, la mort dans l’âme. L’appareil militaire français dirigeant exulte. De son côté, d’après un témoignage de Salah Boubnider et les mémoires inédits de Lakhdar Ben Tobbal, colo-nel de la wilâya II (Constantinois), à l’écoute de la radio ce dernier aurait fumé, dans l’attente fé-brile, sept paquets de Bastos ; et, lorsqu’il comprit que les cinq Algériens prisonniers ne seraient pas libérés, on aurait fait la fête au commandement de la wilâya II ; explication entendue dans la bouche d’Algériens : on ne pouvait pas trahir l’engagement du 1er novembre 1954 en acceptant un compromis qui ne reconnaîtrait pas d’emblée l’indépendance et la souveraineté totales de l’Algérie. Autre lecture possible : en un temps où l’armée prétorienne des frontières de Boume-diene et son État-Major Général n’existaient pas encore, l’appareil militaire en formation dans les maquis espérait alors encore être maître du jeu dans l’Algérie indépendante à venir, ce qu’une paix négociée aurait entravé car elle aurait mis au premier plan les politiques. Alors, occasions manquées ? Ou occasions non tentées ? Car il ne peut y avoir d’occasions manquées que s’il y a des occasions tentées : le Front populaire n’osa pas affronter le lobby colonial ; le gouvernement Paul Ramadier, le premier de la IVe République, ne prit pas la mesure de l’acuité de la question algérienne en faisant voter le statut de 1947, Guy Mollet plia sous l’hostilité de la foule européenne d’Alger, puis céda au coup des services français qui avaient (à son insu ?) mis un terme à un espoir de paix le 22 octobre 1956. Au total, rien ne fut vraiment entrepris par les gouvernants français pour empêcher le dénouement violent : comme système, le colonialisme restait prévalent dans l’imaginaire nationaliste français.

-c- Le primat des armes La conquête de l’Algérie, commencée en 1830, dura près de deux décennies, ce fut une conquête militaire. Et la résistance algérienne s’est manifestée dans le temps moyen (à partir de 1830) par la résistance armée. Plusieurs révoltes, toutes durement réprimées, scandèrent l’histoire, depuis l’insurrection d’El Mokrani - Bel Haddad en 1871 jusqu’à la tentative du printemps 1945 du Constantinois, en passant par des révoltes en Kabylie orientale, l’insurrection des Oulad Sidi Chaykh qui embrasa l’Algérie du Sud Oranais au Titteri en 1864, la révolte de l’Aurès en 1879 , celle de Bou ‘Amama dans le Sud Oranais en 1881-1882, la révolte plus circonscrite dite de Mar-guerite, près de Miliana, en 1901, l’insurrection du Belezma/Aurès de 1916-1917 dont la répres-sion dura six mois, 38 ans avant l’infijâr du 1er novembre 1954. L’ALN de 1954-1962 avait été esquissée par la création, au congrès du MTLD de février 1947, de l’OS (Organisation Spéciale), organisation paramilitaire, à laquelle, par esprit de consen-sus, avait finalement consenti Messali Hadj, lequel croyait de son côté davantage à une voie poli-tique. Mais au sein du parti existaient aussi des forces qui se défiaient d’une voie politique margi-nalisant la perspective d’un recours aux armes, dont le docteur Mohammed Lamine Debaghine, qui fut politiquement éliminé par Messali en 1949. A la tête de l’OS, se succédèrent Ahmed Ben Bella et Hocine Aït Ahmed. A la réunion de Zeddine, fin 1948, dans le Haut Chélif, à la ferme familiale de l’instructeur chef militaire Djilali Belhadj, dans le Haut Chélif, le rapport d’Aït Ahmed insistait sur la nécessité de mettre au premier plan la lutte armée, et des dirigeants comme Hocine Lahouel firent leur cette perspective. Sans moyens réels et sans organisation d’ampleur, l’OS ne put, au mieux, que conduire un Kriegspiel peu menaçant pour l’ordre colonial : un scoutisme d’apprentis guerriers dont Aït Ahmed décrit savoureusement les pérégrinations en montagne dans ses mémoires . De toute façon l’OS fut démantelée en 1951 par les services français et les rescapés de la répression rongèrent leur frein dans la clandestinité ; jusqu’à ce que, notamment sous la conduite du maître organisateur Mohammed Boudiaf, soit préparée la logistique de l’allumage de la mèche du 1er novembre 1954. Le contexte mondial était celui de la toute récente guerre d’Indochine, et de la victoire de Dien Bien Phu du Viet Congh sur l’armée française où combattaient des soldats algériens. Revenus en Algérie, ils furent les porteurs de la bonne nouvelle : une guerre de libéra-tion anticoloniale pouvait se terminer par la victoire des colonisés. Nombres d’initiateurs du mouvement de novembre 1954 provenaient de l’OS : Le FLN voulut renouer avec la logique de l’OS, en faisant cette fois de l’ALN un instrument efficace Pendant la guerre de libération algérienne, nombre d’officiers français furent de leur côté persuadés de l’avoir emporté par les armes, et donc d’être trahis par le gouvernement du général de Gaulle. Ce fut le général Salan et le putsch des généraux d’avril 1961, ce fut aussi l’OAS, dans son combat désespéré à contretemps. Le récent album de Patrick Buisson, déjà cité, chante en-core le mythe du triomphe de l’armée française sur les « fellaghas ».Du côté algérien, le recours à l’action armée est célébré en Algérie par les descendants des mujâhidûn, des mujâhidât et des shuha-dâ’. Cela permet aussi de magnifier un pouvoir dirigeant se légitimant par la lutte armée de libéra-tion nationale et l’invoquant en toute occasion pour consolider l’appareil militaire – appareil issu de l’armée des frontières et de l’EMG de Boumediene créé par le CNRA début 1960, appareil longtemps maître du jeu. Cela permet d’escamoter le rayonnement du FLN de par le monde et à l’ONU que de vrais politiques s’acharnèrent à édifier ; cela pour aboutir, à partir de 1960, et sur-tout de l’été 1961, avec le GPRA de Ben Youssef Ben Khedda, aux décisives négociations d’Évian, auxquelles Mohammed Harbi fut désigné comme expert. Seule une solution politique était viable, et ce furent bien des civils qui gagnèrent la paix, même si la commotion initiale des armes avaient été le préalable obligé conduisant le pouvoir colonial à lâcher du lest, à négocier : dénouement d’une résistance à l’ordre colonial que l’historien doit étudier sous toutes ses facettes, dialectiquement. Mais avant de tenter de l’analyser in fine, il importe, ce qui est bien peu tenté dans l’historiographie courante, de remonter à ce qui précède la colonisation de l’Algérie, de si-tuer au préalable l’histoire algérienne dans son ancrage profond à l’histoire de longue durée, et plus largement à l’histoire de la Méditerranée dont elle est partie prenante.

-3- L’évolution historique sur la longue durée Cette question de fond renvoie en effet inévitablement à l’histoire de la Méditerranée telle que la conçut et la réalisa Fernand Braudel, historien renommé de l’École des Annales, dans la lignée de Marc Bloch et de la revue des Annales Économie, Sociétés, Civilisations, avec notamment Lucien Febvre et Ernest Labrousse, – ce dernier fut aussi le maître à penser du grand historien ottomaniste algérien Lemnouar Merouche. Braudel, Lorrain d’origine , fut nommé à 22 ans en 1923 professeur à Alger où il enseigna pendant dix ans. Il fut notamment le théoricien des diffé-rents temps de l’histoire : du temps court au temps long ou temps de longue durée. Il faut y insister parce que l’histoire de l’entité spatialo-humaine qui deviendra l’Algérie n’a pas commencé en 1962, non plus en 1830 et pas davantage en 1518, quand Aoudj Barberousse est investi par le sultan ottoman du gouvernement d’Alger. Il faut, pour comprendre le présent et le passé proche, un bref temps d’arrêt sur la longue durée.-a- Société segmentée et emprises étatiques Partons des réflexions de Benjamin Stora sur les différences entre Maroc et Algérie : le Maroc, qui a connu une durée et une forme de colonisation différentes de celles de l’Algérie, cultive d’après lui un rapport à l’histoire qui « s’enracine dans la tradition et insiste sur la continui-té ». En revanche, pour les Algériens qui ont vécu la présence ottomane avant l’arrivée des Fran-çais, c’est « l’histoire (anti)coloniale [qui] invente le territoire […], ces perceptions distinctes en-traînent deux formes de légitimation de l’État-nation : elle passe, au Maroc, par l’histoire longue, tandis qu’elle transite, en Algérie, par la puissance géographique » .Il est vrai que, sur la longue durée, perdure dans al-Maghrib al-awçat (le Maghreb médian, aujourd’hui l’Algérie) une société segmentée en qabâ’il (tribus), familles élargies et clans. L’identité de base y fut longtemps celle de communautés patriarcales, régies par une norme solidariste et unanimiste, l’identité large étant depuis douze siècles fondée sur la référence à al-umma-al-muhammadiyya (littéralement la communauté mahométane [universelle]). Dans la patrie Algérie, al-watan, c’est étymologiquement le lieu natal, référé aux hommes d’un territoire, et non à un groupe humain en soi (al-qawm) : wataniyya peut être traduit en français par nationalisme alors que patrio-tisme serait stricto sensu plus exact. Mais ailleurs, en Égypte et dans le reste du monde arabe, c’est le terme de qawmiyya qui est plus souvent utilisé (qawmiyya miçriyya, qawmiyya ‘arabiyya : nation égyp-tienne, nation arabe). Pour société nationale, on dit sharika wataniyya en Algérie, mais sharika qaw-miyya en Tunisie.
Les groupes qui tentent, du XIe au XIIIe siècle, de conquérir et d’édifier un empire mag-hrébin viennent du Maghrib al-Aqçâ – le Maghreb extrême, aujourd’hui le Maroc : du XIème au XIIIème siècles, ce sont les dynasties des Almoravides (al-Murâbitûn), puis surtout des Almohades (al-Muwahhidûn), le conquérant almohade ‘Abd al-Mu’min étant, lui, originaire de la région de Ne-droma, à une cinquantaine de kilomètres au nord-ouest de Tlemcen ; mais le foyer originel de leur pouvoir est Marrakech. Puis, à partir de Fès, viennent les Marînides (Banû Marîn), originaires du Tafilalet, avant les Saadiens (al-Sa‘adiyyûn) puis les Alaouites (al-‘Alawiyyûn), porteurs de la noble marque chérifienne, eux aussi issus du Sud marocain. Tous sont originaires de groupes humains de l’intérieur. Il en est de même des Zayânides (Banû Zayân) de Tlemcen, issus également du ter-roir profond. Mais eux ne sont pas porteurs de la distinction chérifienne ; et les dynasties instal-lées à Marrakech, puis à Fès, édifient un pouvoir éminent, relativement stable, du moins sur un bilâd al-makhzan (pays de souveraineté de l’État, fiscalement contrôlé) assez bien délimité dans les plaines et ayant échappé à l’emprise ottomane, et le bilâd al-sayba (zones fiscalement incontrôlées, sises surtout en montagne) leur échappant plus ou moins selon le rapport des forces. A l’antiquité tardive, en Numidie-Maurétanie césaréenne – al Maghrib al-awçat : la future Algérie –, le schisme donatiste contre le catholicisme romain peut être vu comme précurseur de l’Islam ; les révolte des circoncellions et de Firmus contre l’autorité romaine installée comme an-nonciatrices des dissidences à vecteur religieux, comme, au VIIIe siècle, la grande révolte du kha-rijite (khârijî) Abû Yazid (l’homme à l’âne : çahîb al-himâr) contre l’État aghlabide sunnite de Kai-rouan ; les royaumes « numides » de l’Antiquité et les principautés « maures » des Ve-VIe siècles comme avant-coureurs de la dynastie rustamide de Tihert, puis du « royaume de Tlemcen » des Banû Zayân. Si, au VIIIe siècle, ‘Abd al-Rahmân ibn Rustam était originaire d’Orient, le pouvoir zayânide des XIIIe-XVe siècles est issu de communautés originaires du Maghreb oriental, repous-sées vers les Hautes plaines oranaises par l’avancée des Banû Hilâl. Mais ce « royaume » est mena-cé, à la fois par les voisins de l’ouest marînides dont les Zayânides ont été un temps les clients, et à l’est par les dissidences endémiques des communautés du Chélif, du Dahra et de l’Ouarsenis. Dans le même temps, les Banû Hafç (Hafçides) de Tunis, eux, édifient peut-être l’état le plus achevé du Maghreb, dont le centre est l’Ifriqiya (al-Maghrib al-adnâ), la future Tunisie. Cette dynas-tie provenant, non du terroir, mais d’une lignée de gouverneurs établis par les Almohades à Tu-nis, domina aussi le Constantinois, jusqu’à Bejâïa, dont la dynastie des Banû Hammâd avait dis-paru au milieu du XIIe siècle sous le choc des Banû Hilâl. Le territoire du Maghrib al-awçat est endémiquement le théâtre d’affrontements entre voi-sins de l’ouest et de l’est, aussi le royaume de Tlemcen doit-il maintes fois négocier sa tranquillité en concédant des iqtâ‘(s) (concessions, fiefs fiscaux) aux communautés indociles. Durant l’Algérie ottomane, connue notamment grâce aux travaux récents des historien(ne)s algérien(ne)s Fatima Zohra Guechi, Abd El Hadi Ben Mansour et Lemnouar Merouche , se produisit une relative stabilisation. Le beylik, mieux établi, reposant notamment sur le corps des janissaires turcs, s’appuie sur les tribus makhzan qui pressurent les tribus ra‘âiya, soumises comme un troupeau à son berger. Mais de tous temps, les ancêtres des Algériens ont vu avec méfiance tout pouvoir prétendant s’imposer à l’ordre communautaire de base : ils ne croient pas à l’État parce que, pour eux, l’État s’est continûment confondu avec un appareil d’origine extérieure (Rome, Algérie colo-niale, et même ottomane) ou un segment de la société répugnant à rendre des comptes à la socié-té, autrement que comme des sujets fiscaux à dompter ou avec qui négocier pour acheter leur innocuité. De ce point de vue, il y a ressemblance avec le royaume de France de Louis XIV où, au XVIIème siècle, les sujets du roi ne connaissent guère de l’État que la fiscalité. Enfin, on peut dire que, sur le temps moyen récent, la démocratie a été entravée en Algérie par des pouvoirs certes autoritaires mais aussi par une idéologie se défiant de la démocratie comme risquant de contreve-nir au sacré communautaire. Il y a bien des démocrates de cœur, mais guère sur la scène politique active, et la démocratie offerte est de toutes façons clivée entre masse et élite, d’aucuns diraient « censitaire ». Et la société actuelle est encore quelque part tributaire d’ancrages socioculturels de longue durée. La suite ici


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Ali Agouni (président PPA) Le mouvement de libération national

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Un remarquable épisode de la lutte de Libération nationale


Dans un article paru les 28 et 29 juillet 2010 dans El Watan à propos des opérations militaires lancées par l’état-major général (E.M.G.) de l’ALN en juillet 1961 pour soutenir les négociateurs algériens présents à Lugrin (Suisse), Sélim Saâdi avait évoqué deux grandes tentatives de franchissement des barrages frontaliers de l’Est décidées par le commandement de l’ALN, celle d’avril 1958 dans la région de Souk Ahras et celle de novembre 1959 à l’extrême nord-est de l’Algérie à laquelle il avait participé. L’ancien commandant de région avais promis de revenir sur le sujet. C’est l’objet du présent article.
Automne 1959, cinq ans après le déclenchement de la lutte de Libération nationale, des milliers de combattants sont massés face à la frontière algérienne. Bon nombre d’entre eux s’apprêtent à franchir les fortifications françaises connues sous les appellations Challe et Maurice. Ils ont pour mission de renforcer en hommes et matériel les Wilayas I, II, III, IV. Cette opération a été ainsi baptisée en mémoire des colonels Amirouche et Haoues qui étaient en route vers la Tunisie, en avril 1959 et qui tombèrent les armes à la main face à l’ennemi.
Mais avant de relater le déroulement de cette opération «Amirouche», il est utile pour la compréhension de la situation qui prévalait à cette époque de faire une brève rétrospective.
I. Rappel des principaux faits qui ont marqué les cinq années de lutte qui viennent de s’écouler
Devant l’impasse où se trouvait le mouvement national (tous partis confondus) dans la recherche de l’émancipation du peuple algérien du joug colonial par la voie démocratique, et après les massacres du 8 Mai 1945 de Sétif et Guelma, une poignée de patriotes, en rupture de ban, décidèrent le déclenchement le 1er Novembre 1954 de la lutte armée. Celle-ci allait prendre de plus en plus d’ampleur et se transformer en moins de deux ans en un embrasement général. Des milliers de patriotes, de toutes classes sociales, rejoignirent le mouvement qui s’implanta rapidement à travers les campagnes et les villes en se prolongeant bientôt sur le territoire français mobilisant la communauté algérienne qui y vivait.
Le Congrès de la Soummam du 20 Août 1956 va donner à cette mobilisation une assise organisationnelle et doctrinale et lui permettre ainsi, malgré les énormes moyens mis en œuvre par l’ennemi, de parvenir au but qu’il s’était fixé grâce aux lourds sacrifices consentis par notre peuple .
Durant les trois premières années de lutte armée, on assista à une montée en puissance du mouvement à travers l’ensemble des wilayates, malgré les énormes moyen mis en œuvre par l’ennemi. L’approvisionnement, notamment en armes et munitions, était assuré surtout à partir de la Tunisie vers laquelle convergeaient l’aide des pays frères et amis.
Surpris par la rapide extension des opérations militaires de l’ALN sur l’ensemble du territoire national, les autorités françaises déversèrent hâtivement des forces de plus en plus nombreuses passant en deux ans, de 80 000 hommes à quelques centaines de milliers d’hommes.
Elles rappelèrent plusieurs classes de réservistes, allongèrent la durée du service militaire pour les contingents (nouvellement appelés), transférèrent le corps expéditionnaire d’Indochine après les accords de Genève, suite à la défaite de Dien Bien Phu, ainsi que les forces dites «de maintien de l’ordre» qui étaient déployées en Tunisie et au Maroc après l’accession de ces deux pays à l’indépendance en 1956.
A cela s’ajoutent les forces mercenaires (dites supplétives) recrutées localement. Pour empêcher l’approvisionnement des combattants de l’intérieur à partir des pays voisins, l’ennemi fit construire le long de la bande frontalière des barrages fortifiés, rappelant étrangement la fameuse ligne Maginot construite dans les années 1930 pour faire face à l’invasion allemande, mais cette fois adaptés à un mouvement de guérilla. Avec la mise en place d’un blocus maritime et aérien, le peuple algérien était désormais placé sous haute surveillance et soumis à une répression implacable.
Avec l’arrivée au pouvoir du général de Gaulle en 1958 et pour fournir des gages aux partisans de la manière forte, les opérations militaires s’intensifièrent et prirent une autre tournure au plan stratégique. C’est ainsi que les opérations de ratissage et de contre-guérilla qui étaient entreprises ponctuellement par les forces sectorielles en fonction du renseignement, se transformèrent en opération de grande envergure. Elles allaient se concentrer tour à tour sur telle ou telle wilaya et pouvaient durer plusieurs semaines, grâce à la disponibilité des forces de réserves, n’accordant de ce fait aucun répit à nos combattants dont les forces et les moyens s’épuisèrent de jour en jour. Elles durent leur survie qu’en éclatant en petits groupes difficilement repérables.

Pour les isoler davantage des populations paysannes qui assuraient leur soutien sous toutes les formes (puisqu’ils étaient le produit de leur entrailles !), les autorités coloniales n’hésitèrent pas à parquer hâtivement des centaines de milliers d’entre elles dans des camps dits «de regroupement» où (comme j’ai eu l’occasion de le dire auparavant) beaucoup, privés de leurs moyens de subsistance et n’ayant pu être pris en charge à temps, périrent de famine et de maladies dûes à la malnutrition.
(J’ai cité le témoignage de Michel Rocard, militant anticolonialiste, ancien Premier ministre dans les années 1980, qui, à l’époque était chargé officiellement de faire un rapport aux autorités politiques sur cette affaire). Si on ajoute à ce tableau le fait que des milliers de patriotes croupissaient dans les prisons ou les centres d’internement, sans parler des disparus, on peut se faire une idée des terribles épreuves endurées par notre peuple durant cette triste période.
La mise en place des barrages frontaliers rendaient leur franchissement de plus en plus difficile et les nombreux combattants des wilayates de l’intérieur venus aux frontières pour s’approvisionner en équipement militaires divers, furent contraints de stationner sur les bandes frontalières, en attendant que le commandement se prononce sur leur devenir.
La constitution, en septembre 1958, du gouvernement provisoire de la République algérienne (G.P.R.A) et partant, de la création, en particulier, des ministères de l’Armement et des approvisionnements (Mahmoud Chérif), des Renseignements et Liaisons (Abdelhafid Boussouf) et des Forces armées (Krim Belkacem) allait donner une nouvelle impulsion à l’effort de guerre. Le ministère des Forces armées s’employa, à travers la création de l’état-major de l’Est (colonel Mohammedi Saïd dit Si Nacer) et de l’Ouest (colonel Houari Boumediene) à réorganiser les forces stationnées sur les bandes frontalières en les soumettant à un entrainement militaire (ouverture de centres d’instruction et écoles de cadres) et en mettant sur pied des unités de combat solidement structurées, équipées et encadrées.
Mais le problème d’envoi de renforts vers les wilayates de l’intérieur, qui nécessitait le franchissement des barrages restait un casse-tête pour les hauts dirigeants soumis à une pression de plus en plus forte des wilayates, tout en sachant qu’une telle action exposait les combattants à des risques exorbitants.
On avait en mémoire l’expérience du franchissement en force d’avril 1958 (connu sous le nom de la bataille de Souk Ahras), qui, malgré des combats héroïques, avait engendré des pertes humaines démesurées. Cette situation avait créé une tension au sein de l’équipe dirigeante et on sentait que tout le poids s’était porté sur le ministre des Forces armées, premier concerné par l’envoi des renforts vers les wilayates de l’intérieur et a qui on allait inévitablement demander des comptes lors de la prochaine réunion du Conseil national de la révolution (C.N.R.A.) prévue à la fin de l’année 1959.
Aussi, vers la fin de l’été 1959, des instructions furent données pour préparer des détachements de combattants à rejoindre leur wilaya d’origine. A partir de la mi-octobre, de hauts dirigeants (ministres du G.P.R.A., chef E.M. de l’Est, chef de zones de la base de l’Est et des zones V et VI de la Wilaya I) se déplacèrent sur plusieurs endroits où on leur rassembla différents détachements mis sur pied à cet effet. A cette occasion, ils firent appel au sentiment d’abnégation des combattants, à leur devoir patriotique et à l’esprit de solidarité à l’endroit de leurs frères de l’intérieur.
J’ai moi-même assisté à ce genre de manifestation qui se déroulait au PC du capitaine Abderrahmane Bensalem (chef d’une zone de la base de l’Est) où les principaux responsables (Krim Belkacem, colonel Nasser, colonel Saddek Dehiles, Ali Mendjli, etc.) alors que le 9e Bataillon Amirouche, dont j’assumais le commandement, venait de se déployer dans cette zone. J’ai encore en mémoire l’image de ces centaines de combattants composant plusieurs détachements, bien alignés, l’air grave et fier qui écoutaient religieusement les différents intervenants. La cérémonie était ponctuée par le chant Mes frères n’oubliez pas vos martyrs qui ne manque pas de provoquer à chaque fois une forte émotion dans l’assemblée.

II. Déroulement de l'opération «Amirouche» : Mise en place des détachements

Les détachements des différentes wilayates furent déployés sur plusieurs secteurs de la frontière en fonction des directions qu’ils devaient prendre pour aller vers les lieux de leur destination finale. Il appartenait aux unités stationnées dans ces secteurs d’assurer leur protection durant leur déplacement vers les barrages et leurs franchissements. Pour ceux qui passaient par la partie nord située entre la ville de Souk Ahras et le littoral, ils devaient franchir d’abord la 1re ligne, dite «Challe», séjourner dans le massif forestier des Beni Salah, (non sans risques), attendre le moment propice pour franchir un peu plus à l’ouest la dixième ligne dite «Maurice» à hauteur de l’oued Seybouse puis se porter rapidement sur le massif de l’Idough et poursuivre le mouvement vers l’Ouest à travers l’Atlas tellien.
On avait désigné auprès de ces détachements des guides de la base de l’Est qui connaissaient parfaitement le terrain et qui devaient accomplir leur mission jusqu’aux relais suivants. Il en fut de même pour ceux de la Wilaya I directement limitrophe de la frontière tunisienne et qui pouvait utiliser des relais entre ces propres zones.Il ne restait plus qu’à attendre la fixation du jour J pour le franchissement.

Misssion du 9e bataillon

Une compagnie du bataillon fut détachée quelques jours avant le jour «J» au 1er bataillon de la zone commandée par Si Chadli (dont l’un des adjoints était Si Khaled Nezzar) pour participer à la protection des détachements qui devaient franchir les barrages dans ce secteur.Le reste du bataillon qui s’était installé dans le secteur du 2e bataillon Didouche commandé par Si Slimane Hoffman (dont les adjoints étaient Si Abdelmalek Guenaïzia, Mokhtar Kerkeb, Larbi Belkheir et Abdallah dit El Goumi) devait assurer l’escorte et faciliter le franchissement d’un détachement de la Wilaya III commandé par un certain Abdelkader El Bariki, personnage énergique connu pour sa bravoure et qui avait été envoyé par le colonel Amirouche (avant sa mort au champ d’honneur) vers les bases de l’ALN en Tunisie pour s’approvisionner en armes, munitions et autres équipements. Je l’avais connu personnellement quelque temps avant, lors d’une rencontre fortuite au cours de laquelle il m’avait parlé de mon jeune frère, officier de l’ALN, qu’il avait laissé comme chef de la région d’Azazga avant son départ de la wilaya.

Jour «J» -après-midi du 26 novembre 1959

Opérant pour la première fois dans ce secteur, nous avions reçu un certain nombre de guides du bataillon Didouche qui devaient aussi bien servir au sein de nos patrouilles de reconnaissances que dans l’accompagnement du gros des forces chargées d’assurer le franchissement du détachement en question.
Dans l’après-midi, nos patrouilles prirent le départ en direction du lieu de franchissement et devaient progresser à travers un massif forestier jusqu’à la lisière à partir de laquelle elles devaient observer les activités de l’ennemi sur le barrage électrifié. Dès la tombée de la nuit elles devaient se porter vers le lieu de franchissement et se poster à proximité et attendre l’arrivée du gros des troupes.
En fin d’après-midi (les journées étaient courtes en cette saison), nous fîmes partir une avant-garde sur la trace des patrouilles de reconnaissance, suivies quelque temps après par le détachement de la Wilaya III que nos forces encadraient de toutes parts.
Les combattants du détachement en question étant lourdement chargés, puisqu’une partie de leurs équipements était destinée aux combattant de l’intérieur, nous dûmes les aider dans leur tâche au moins jusqu’au franchissement. Je progressais à travers un massif forestier en tête de cet ensemble, sur la trace de l’avant-garde, quand soudain j’entendis un éclat de voix qui venait de l’arrière. Je donnai l’ordre de stopper le mouvement et retournai sur mes pas pour savoir d’où venaient ces éclats de voix qui continuaient de plus belle.
Arrivé sur les lieux j’ai aperçu Abdelkader El Ba riki, en train de sermonner son opérateur radio qui avait fait une chute à terre qui provoqua une entorse à son pied le rendant de ce fait inapte à poursuivre son déplacement. Abdelkader El Bariki était fou de rage, car cet opérateur et son équipement radio étaient destinés à rétablir la liaison entre la Wilaya III et le commandement extérieur, ce qui compromettait, à ses yeux, l’objet même de sa mission. Il prétendait que ce geste n’était pas accidentel et que cet homme méritait un châtiment exemplaire. Je le calmai en lui disant qu’il valait mieux qu’un tel accident, quelle qu’en soit la cause, arrivât avant le franchissement, qu’après. Les conséquences auraient été plus graves.
Nous décidâmes de laisser sur place cet homme, assisté d’un autre, avec l’intention de les récupérer à notre retour.
Nous reprîmes notre progression et quelque temps après nous arrivâmes en vue de la ligne électrifiée.

Amorce du franchissement

Avant d’aborder l’action de franchissement proprement dite, il faut rappeler la psychose qu’entretenait la propagande ennemie autour des lignes de défense qu’ils avaient installées, notamment la partie électrifiée à haute tension
(10 000 volts) , qui, d’après la rumeur, se présentait comme un aimant qui attirait tous ceux qui s’en approchaient et les foudroyait. Nous avions, bien entendu, combattu cette rumeur en insistant uniquement sur le fait de ne pas toucher la ligne par aucune partie du corps et qu’il fallait utiliser des cisailles isolées en rapport avec le haut voltage.



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opération" Amirouche " ( suite et fin)


Aussi, pour lever toute appréhension, j’entrepris moi-même, au moment de l’ouverture de la brèche dans le barrage, de cisailler la ligne électrifiée. C’était impressionnant de voir à chaque coupure du fil les étincelles qui jaillissaient lorsqu’il court-circuitait un autre fil. Pour ceux qui connaissaient les lois de l’électricité ce phénomène n’avait rien d’extraordinaire.
C’est au moment où nous achevions de faire la brèche (la coupure de la ligne électrique avait donné l’alerte aux postes de défense implantés de part et d’autre) qu’on vit se déclencher un déluge de feu d’artillerie, suivi quelque temps après par l’arrivée sur les lieux d’engins blindés qui criblaient de leur tirs toute la bande de terrain longeant le barrage.
Nous nous abritâmes dans un petit cours d’eau qui serpentait à proximité de la ligne en attendant la fin de ces tirs ou leur report vers d’autres cibles.
Nous ne tardâmes pas à entendre et à apercevoir la lueur d’autres feux émanant d’autres secteurs où la même opération se déroulait. Ce fut un embrasement général de toute la bande frontalière aussi loin qu’on pouvait voir ou entendre.Quant à nous, nous continuions à patauger dans cette eau boueuse et glaciale, tandis que les balles continuaient à siffler au-dessus de nos têtes. Juste à côté de moi, un combattant qui s’était redressé pour sortir son corps de l’eau, reçut une balle en pleine épaule, ce qui le projeta de nouveau dans l’eau. Nous dûmes lui porter immédiatement secours pour ne pas qu’il se noie, plus par panique que par la profondeur de la rivière.
Nous restâmes ainsi dans cette position, pour le moins inconfortable, jusqu’à ce que l’ennemi, persuadé de notre repli, ralentit sensiblement ses tirs directs et reporta ses tirs d’artillerie vers la frontière.
Je donnai, à ce moment, l’ordre de repli. Nous passâmes en revue les lieux pour voir s’il y avait des morts ou des blessés, puis nous primes le chemin du retour, ramenant avec nous les blessés qu’on trouvait sur notre passage.
Arrivés à notre base de départ nous fîmes un point de situation des effectifs et nous fûmes soulagés d’apprendre que nos pertes étaient minimes eu égard aux énormes moyens déployés par l’ennemi.Nous nous restaurâmes et nous accordâmes un moment de repos bien mérité après de telles épreuves.

Bilan général de l’opération

Nous apprîmes dans un premier temps que sur la partie Nord (Souk Ahras - Littoral) qu’aucun franchissement n’avait réussi. Cela laissait entendre que si le facteur surprise n’avait pas joué, on ne pouvait que déduire que l’ennemi était renseigné. Cette thèse se confirma lorsqu’on apprit que les autres franchissements vers la Wilaya I avaient connu le même échec. On s’est alors rendu compte qu’une opération d’une telle envergure, annoncée depuis des mois, à travers les tournées faites par les hauts responsables pour sensibiliser les combattants, ne pouvait pas échapper aux services de renseignements ennemis.
Par ailleurs, les pertes auraient été beaucoup plus lourdes si l’ennemi, au lieu de s’empresser à interdire le franchissement, avait lancé des opérations de poursuite sur ces différents détachements le lendemain de leur franchissement, comme ce fut le cas lors de la bataille de Souk Ahras d’avril 1958. Peut être ne voulait-il pas courir le risque de voir échapper quelques détachements et éviter de son côté les pertes dans une confrontation qui ne pouvait qu’être sanglante, à l’instar de celle de Sok Ahras
.
Conséquence de l’opération

Au plan politique, la réunion du C.N.R.A à Tripoli en décembre 1959 a abouti à la suppression du ministère des Forces armées, ce qui peut être interprété comme un désaveu, même implicite, de l’action de Krim Belkacem. Elle renforça le pouvoir de Abdelhafid Boussouf qui récupéra les missions du ministère de l’Armement et des Approvisionnements. Mais l’innovation la plus importante et qui allait faire prendre un autre cours à l’histoire du mouvement de libération, fut la création de l’état-major général ayant à sa tête le colonel Houari Boumediene (assisté des commandants Ali Mendjli (W-II), Azzedine Zrari (W-IV), Kaïd Ahmed (W-V)).
Il faut tout de même reconnaître que si ce type de franchissement pouvait être considéré comme une erreur d’appréciation, (alors qu’aucun autre dirigeant ne s’y était opposé), Krim Belkacem a, depuis sa nomination à la tête du ministère des Forces armées, en septembre 1958, jusqu’à son départ, fin 1959, engagé une action colossale de rénovation et de redynamisation de l’ensemble des forces hétéroclites stationnées à la frontière algero-tunisienne. Il contribua à élever leur niveau d’entrainement, à leur assurer un meilleur encadrement, un meilleur soutien logistique et à améliorer leur capacité de combat, et ce, malgré l’opposition à ses changements qu’il affronta courageusement.Son œuvre fut renforcée par le colonel Boumediene et ses collaborateurs.
Forts de la leçon tirée par les tentatives de franchissement massif, le commandement allait procéder dorénavant à des franchissements par petits paquets, minutieusement préparés. Cette méthode qui réduisait les pertes, avait permis quelques rares réussites, notamment durant le printemps 1960 par le franchissement du nouveau chef de la Wilaya I, le colonel Tahar Zbiri et du commandant Ahmed Benchérif.
D’autres, tel le colonel Lotfi à l’Ouest, le commandant Ali Souaï à l’Est, ainsi que de nombreux officiers accomplissant les mêmes missions payèrent de leur vie ces actes héroïques. Ce fut également le cas de Abdelkader El Bariki lors d’une deuxième tentative franchissement.
Comme j’ai eu l’occasion de le relater dans mes articles du 28 et 29 juillet 2010 le potentiel militaire dont disposait l’ALN aux frontières Ouest et surtout Est, a permis, à travers les attaques continues du dispositif ennemi, de démontrer à l’adversaire que même si les forces de l’intérieur avaient été affaiblies compte tenu des moyens et méthodes employés, la lutte armée pouvait se poursuivre sans relâche.
Cela d’autant que l’ennemi avait fini par comprendre qu’il ne faisait pas face à une armée dans le sens classique du terme mais à un peuple entier, dont l’ALN était son fer de lance ainsi que sa chair et son sang.
Si un certain intellectuel célèbre (prix Nobel) européen d’Algérie disait à cette époque : « qu’entre la justice et sa mère, il avait choisi sa mère. Pour nous l’équation était plus claire, nous avions choisi LA JUSTICE et NOTRE MERE. C’est de là que venait notre force.

Le colonel Sélim Saâdi


El Watan

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Salah Bouakouir, traître ou héros ? (Rappels)

de Le Matin DZ - Les idées et le débat
Ancien directeur général des affaires économiques et de l'industrialisation du gouvernement général français en Algérie, durant la guerre d’indépendance, Salah Bouakouir est un personnage controversé. ...

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Réhabilitation de Salah Bouakouir : Nacer Boudiaf répond à M.Daho Ould Kablia

de Le Matin DZ - Les idées et le débat
"Si nous venons de mourir, défendez nos mémoires" DIDOUCHE Mourad.M. Nacer Boudiaf, fils de feu le Président assassiné en 1992, nous a fait parvenir cette


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El-Mokrani, Boudiaf, Bouakouir, MALG…Il ne faut pas écrire n’importe quoi ! (1)



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El-Mokrani, Boudiaf, Bouakouir, MALG…Il ne faut
pas écrire n’importe quoi ! L’opinion de Alif commence à susciter des
réactions. En voici la plus marquante (en 3 parties) L’histoire n’est
pas un marécage pour y croasser Je ne comprendrai jamais la propension
de certains de nos compatriotes à instiller insidieusement leur parti
pris subjectif, généralement dicté par leur positionnement personnel ou
familial ou même régional qu’ils essaient de lustrer de manière aussi
arrogante que pathétique en usant de contre-vérités et même de manque de
décence dans leurs affirmations qui n’ont rien à envier aux
détournements de l’histoire dont le régime n’a visiblement pas le
monopole. Profitant de la polémique sur Salah Bouakouir et sa qualité de
révolutionnaire contestée par Mohamed Boudiaf et affirmée par Daho Ould
Kablia, pour verser un trop plein de rancune accumulée sur toute une
liste de Personnages auxquels il doit d’être libre d’écrire ce qu’il
veut sur les caïds et autres Bachaghas, un personnage en a profité par
la même occasion pour placer toute sa famille derrière Salah Bouakouir,
aux avant-postes de la révolution et en rétrogradant dans le même lot
Boudiaf, Ben M’hidi, Krim Belkacem et El Mokrani, et c’est certainement
par Oubli qu’il a raté Beaucoup d’autres comme Ben Boulaid. Salah
Bouakouir, ou l'énigme historique Je commencerais par le Cas, Salah
Bouakouir, sur lequel je ne peux dire que c’est un traitre, même si
Boudiaf l’a dit et dans ce cas je ne le contredirais pas aussi, le
personnage étant mieux informé que moi et n’ayant pas l’habitude de
parler dans le vide ou de coller des étiquettes infamantes à ses
adversaires contrairement au affidés du régime et plus particulièrement
ses officines de propagande. S’il a collaboré avec le Malg auquel il
aurait communiqué des informations sur le plan de Constantine et les
recherches pétrolières au Sahara, comme le déclare monsieur Ould Kablia,
il y a lieu de vérifier les motivations effectives de cette
collaboration, ce service ayant des méthodes de persuasion qui dépassent
les sentiments patriotiques du vis-à-vis. Monsieur Bouakouir ayant fait
polytechnique à paris et voyageant fréquemment en France ou à l’époque
une bonne partie de gens de Ain El Hammam sa région natale, étaient
implantés et tous acquis au FLN, et dont de hauts responsables à la
fédération de France du FLN, pour ne citer qu’Ait El Hocine, et
Benyounes. Il est curieux qu’il n’ait jamais essayé de collaborer avec
eux, en toute confiance, et qu’il ait choisi un service installé au
Maroc et sans aucune attache avec lui, ni avec l’intérieur pour
collaborer avec des fantômes qui pouvaient le lâcher à toute occasion.
La nature des renseignements transmis est aussi curieuse en ce sens
qu’elle n’était d’aucune utilité pour le GPRA et qu’une partie était
d’ordre public et même de propagande comme le plan de Constantine, quant
au pétrole l’avenir nous a montré qui est intéressé par ce genre de
tuyau, et ce n’était certainement pas Krim Belkacem ou Ferhat Abbas. Le
nombre d’Algérien ayant fourni ce genre de service à la révolution ou à
une partie de structure du FLN, pour des motifs multiples se comptent
par centaines de Milliers, mais un seul a eu un Boulevard de 4
kilomètres à son nom. Autre question à poser à monsieur Ould Kablia, est
ce que Monsieur Bouakouir qui a eu son nom sur le fronton de ce
Boulevard a eu droit à une attestation communale de Chahid, et sa veuve à
une pension ou non avant que ce boulevard ne soit baptisé à son nom ?
Dans le cas où il n’a pas cette attestation, c’est grave et cela
démontre la légèreté avec laquelle les qualités sont octroyées et
refusées sur habilitation du MALG, qui a certainement témoigné pour
cette opération. S’il avait une attestation avec témoignage, pourquoi la
veuve n’a pas réagi à l’époque et qu’est-elle devenue, n’ayant entendu
nulle part parler d’une déchéance de qualité et d’un reversement de
pension indument perçue, comme c’est la procédure ordinaire. Ce qui
laisse tout aussi perplexe sur la nature du régime et sa conception du
droit. Maintenant revenons au sujet de base, qui consiste en la
diatribe de Monsieur « ALIF » aux relents de régionalisme sordide et de
règlements de compte avec une Histoire dont il ne connait que les
affabulations de son entourage, et d’une révolution qu’on lui présentée
comme un film western. Citant les caïds et Bachaghas Boudiaf dont
j’entends parler, je lui confirme qu’il existait effectivement un Caïd
Boudiaf, et qu’il n’est ni le père ni le grand père de Mohamed Boudiaf,
ce qui au cas où ne diminue en rien la grandeur du père de la
révolution, au moment où beaucoup de gens qui devaient se révolter ne
serait-ce que pour leur misère léchaient les bottes de leurs maitres
pour un sac de semoule ou jouaient aux dominos au café de la marine.
Ferhat Aït Ali
A suivre
Matin dz

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« Si Ahmed, habille-toi et sors, le Conseil vient de te déposer »

Le 19 juin 1965 à 1h30, on frappe à plusieurs reprises avec force, mais sans violence à la porte d?entrée de son appartement. Ben Bella se lève, enfile sa robe de chambre et se dirige vers la porte pour ouvrir. ll interroge : « Qui est là ? » - « Zbiri », répond le chef d?état-major. En toute confiance, il ouvre la porte et voit entrer, tour à tour, le colonel Zbiri(5), suivi du colonel Abbas(6) et des commandants Bensalem(7) de l?état- major, Saïd Abid(8), chef de la première région militaire, Abdelkader Moulay(9) dit Chabou, secrétaire de la Défense nationale, et Draïa(10), futur directeur général de la Sûreté nationale. Ben Bella croit à quelque événement grave. Il n?a pas le temps d?exprimer sa surprise. Le colonel Tahar Zbiri, gêné, lui dit d?une voix mal assurée : « Si Ahmed, un Conseil de la révolution vient de te déposer. Tu as quelques minutes pour t?habiller et nous suivre ; toute résistance est inutile. » Par cette phrase, le président Ben Bella comprend qu?il est trahi. Digne et calme, il ne répond mot. Le seul geste d?intimidation à noter fut un coup de feu tiré en l?air par un officier nerveux. En silence, accompagné des six officiers, il descend à pied les quatre étages. On le fait attendre dans une pièce au rez-de-chaussée, avant de le faire monter dans une « traction avant », qui prend la direction du ministère de la Défense nationale. Vers 2h, une autre voiture va le conduire dans un lieu secret, dépendant de la première région militaire, commandée par Saïd Abid. M. de Broglie, en visite officielle, devait être reçu à Alger, le 19 juin, par le président Ben Bella. Il est reçu au siège de la Défense nationale par le colonel Boumediène. M. de Broglie : « Où se trouve le président ? » Son interlocuteur lui répond par un sourire sardonique : « Sous mes pieds ! » Image très significative, inspirée par l?orgueil du pouvoir. Le caractère présomptueux et à la fois vexatoire a dû certainement indisposer le diplomate français. Le « putsch » s?est opéré sans coup férir. Il a été suivi de plusieurs arrestations, parmi les amis et les collaborateurs les plus proches de Ben Bella, en raison de leur soutien sans défaillance. Le lendemain matin n?est pas comme les autres. Ce samedi 19 juin (1965), les chars commandés par Slimane Hoffman, pointant leur canon vers les principaux axes de la ville, ne semblent pas inquiéter la population. La rumeur se propage, les chars et les troupes sont en place pour tourner le film La Bataille d?Alger, le peuple est troublé et commence petit à petit à comprendre. Il n?est pas révolté. Devant la Grande-Poste, en plein centre-ville, des attroupements d?enfants et de curieux entourent les chars. Apeuré, le conducteur du char fait tourner son engin, faisant ainsi reculer les badauds. L?atmosphère est à l?insouciance, personne ne songe, sauf peut-être le conducteur du char, qu?il suffirait d?une bouteille d?essence ou d?un coktail Molotov, lancé par une main experte, pour faire éclater ce monstre. Pour le moment, les agents de police chargés de la circulation canalisent la foule et pressent les gens de poursuivre leur chemin. Dimanche 20 juin. Des gamins, écoliers ou lycéens, tous adolescents et quelques jeunes travailleurs manifestent en ville, en acclamant le nom de Ben Bella et en huant celui de Boumediène, sous l??il quasi indifférent des adultes. Tous ces manifestants se dispersent en désordre, fuyant les motopompes de la police qui les arrosent d?eau colorée. Un dimanche 20 juin très calme Les manifestants, dont le nombre ne dépasse pas le millier, continuent de provoquer le désordre jusqu?au moment où les matraques remplacent les pompes à eau, mettant un terme à cette explosion de colère. Le public condamne le coup d?Etat, mais on craint une résistance du peuple qui tournerait à l?épreuve sanglante. La Fédération d?Alger est alors la seule structurée et susceptible de mobiliser les masses populaires. Faute d?un encadrement véritable, elle n?envisage pas la possibilité de le faire. Après le congrès, elle a été amputée de certains de ses cadres et contrainte de s?abstenir. Cette opposition larvée n?a pu se mettre en mouvement parce qu?il lui manquait le moteur, celui dont la seule présence suffirait à faire déferler les foules, à donner l?élan nécessaire pour résister aux putshistes et peut-être les battre. Le seul personnage qui puisse remuer les foules et qui soit susceptible de soulever les masses populaires est absent de la scène. Son nom est Ahmed Ben Bella. Un petit groupe décidé à rencontrer le colonel Boumediène et à tout mettre en ?uvre pour obtenir des garanties sur le sort de Ben Bella, de ses ministres et de ses amis arrêtés se constitue. La délégation est composée de : Lebdjaoui Mohamed(11), Zoubir Bouadjadj, Mohamed Merzougui de la Fédération d?Alger ; Mohamed Oumeziane, secrétaire général de l?UGTA ; Madjid Benasser, responsable de la jeunsse FLN ; Houari Mouffok, président de l?Union nationale des étudiants. La plupart sont membres du comité central. Reçus par le colonel au siège de la Défense, les six membres de la délégation écoutent les explications de Boumediène. D?une voix calme et mesurée, il affirme qu?il ne s?agit pas d?un changement d?orientation politique, mais de l?exclusion d?un homme déviationniste ! Le colonel fait état d?un projet dirigé contre le ministre de la Défense nationale et ses principaux lieutenants. Toujours selon ses dires, le « limogeage » envisagé par Ben Bella contre Bouteflika constitue les prémices d?une opération plus importante et le prélude à l?élimination de l?équipe militaire. En termes violents, il dénonce la dictature de Ben Bella. Le colonel révèle qu?il n?avait le choix qu?entre deux attitudes : soit se retirer, soit s?insurger. Il rappelle qu?il avait refusé de siéger au sein de la commission chargée de préparer le congrès. Il expose ses conflits avec Mohamed Khider, avec Ahmed Ben Bella au sujet d?Ahmed Medeghri et de Abdelaziz Bouteflika. Boumediène conclut : « Nous avons pris nos responsabilités, prenez les vôtres, il n?est plus possible de revenir en arrière. » La délégation se retire sous cette menace à peine voilée et comprend que tout le monde est pris de court. Nombreux sont ceux qui redoutent un vaste règlement de comptes, mais il n?en sera rien. La politique du colonel sera d?épargner ceux qui se soumettent et de dompter les durs. Après le désarroi du 19 juin 1965 et la première surprise surmontée, le peuple se réveille brutalement dans la capitale de l?Ouest, Oran, et dans l?est du pays, Annaba. L?armée en place ouvre le feu. Ces manifestations furent vite réprimées. Selon l?Agence France Presse, elle se sont soldées par une cinquantaine de morts sur l?ensemble du territoire. Le 28 juin 1965, le commandant Slimane Hoffman, porte-parole du Conseil de la révolution, affirmera sans crainte d?être démenti : « La tranquillité règne dans tout le pays, le terrorisme n?a aucune chance en Algérie. » La proclamation du 19 juin 1965(12), lue par Gaïd Ahmed(13), porte-parole du Conseil de la révolution à la presse écrite, à la Radio et Télévision algérienne et à la presse internationale, n?éclaire guère l?orientation future du régime oligarchique. C?est une politique de temporisation, visant davantage à garantir tant bien que mal la continuité révolutionnaire qu?à ratifier l?événement lui-même. Après avoir scandalisé les populations, le colonel Boumediène s?efforce de les rassurer en leur promettant la publication d?un livre blanc qui n?a jamais vu le jour. Les hommes du nouveau régime vont s?entourer des anciens dirigeants des Wilayas, y compris ceux qui se sont opposés à eux en 1962. Ils vont s?appuyer aussi sur les techniciens militaires, les anciens officiers de l?armée française. Tous les anciens ministres du GPRA, sans exception, sont laissés de côté. A tous les membres du Bureau politique, à l?exception de ceux qui ont été arrêtés ou de ceux qui se sont exilés, on propose un siège au Conseil de la révolution. Ceux qui ont refusé l?offre sont Aït El Hocine, Hocine Zehouane et M?hamed Ben Mahdjoub, dit Si Omar. Après huit jours de réflexion, l?UGTA apporte un soutien tardif et conditionnel exprimé dans une résolution que le quotidien El Moudjahid ne reproduira pas. Sans jamais citer le nom d?Ahmed Ben Bella, la centrale syndicale note « l?extrême faiblesse du parti en tant qu?organisation structurée ». Elle constate « l?inapplication du centralisme démocratique, l?absence de collégialité et la pratique de méthodes antidémocratiques ». Elle remarque cependant que « malgré les entraves constituées par les aspects négatifs de l?ancien pouvoir, les travailleurs ont enregistré des victoires, représentées particulièrement par les décrets de l?autogestion, la Charte d?Alger(14) et la charte syndicale ». Elle formule des réserves sur le coup d?Etat : « L?ouverture que constitue l?événement survenu le 19 juin 1965 demeure hypothéquée par la présence ou le retour sur la scène politique d?éléments arrivistes et opportunistes qui sont également responsables du non-respect de nos Constitutions. » La conclusion de la résolution porte sur l?attachement indéfectible des travailleurs aux acquis de leurs dix années de lutte, à savoir « l?indépendance nationale, l?autogestion et la constitution du socialisme démocratique ». Le peuple ignorant les mécanismes qui ont progressivement amené le président Ahmed Ben Bella à son isolement, perçu seulement par les initiés, ne comprend pas. Et c?est à une désaffection générale des masses pour l?action politique et pour la participation à la vie économique et sociale du pays qu?aboutit en définitive l?ébranlement du 19 juin 1965. Notes : (1) A cette époque, Boussouf est appelé à d?autres fonctions. (2) Ben Bella n?a pas appris la leçon du défunt Abane Ramdane. (3) Désigné, mais il ne participe pas à l?arrestation. (4) A l?époque, Draïa est responsable de l?école des CNS, sous l?autorité de la Direction générale de la sûreté nationale, dirigée par Taïbi Larbi. (5) Deux ans après, en décembre 1967, le colonel Tahar Zbiri tente lui-même un renversement contre le colonel Boumediène. Après un échec cuisant, il se réfugia à l?étranger. Après la mort de Boumediène, en 1978, et l?avènement du nouveau président Chadli Bendjedid, le colonel Zbiri est rentré en Algérie. Il est vivant à ce jour. (6) Le colonel Abbas est décédé à la suite d?un accident de voiture, en revenant de l?Académie militaire de Cherchell. (7) Le commandant Bensalem est décédé de mort naturelle. (8) Le commandant Saïd Abid est exécuté à l?aide d?une arme silencieuse par deux officiers de l?ALN. Trois jours après son enterrement à Sedrata (sa ville natale), il est déterré par ses meilleurs amis officiers pour constater qu?il a été tué de trois balles dans le dos. (9) Abdelkader Moulay dit Chabou trouva la mort dans un accident d?hélicoptère. (10) Draïa, ex-directeur de la sûreté nationale, est mort d?un cancer. (11) Mohamed Lebdjaoui et Aït El Hocine deviendront les animateurs de l?Organisation clandestine de la révolution algérienne (OCRA), mouvement d?opposition qu?ils dirigeront à partir de l?étranger. (12) Voir proclamation du 19 juin. (13) En mars 1976, il soutient l?appel au peuple (signé par Ferhat Abbas, Benyoucef Benkhedda, Lahouel Hocine et Cheikh Kheireddine). Après une longue maladie, Kaïd Ahmed est mort en exil à Rabat, le 6 mars 1978, inhumé à Tiaret, sa ville natale. Le wali de cette ville est révoqué arbitrairement, parce qu?il n?a pas pu empêcher de nombreuses personnes d?accompagner le défunt à sa dernière demeure. La vérité sur le renvoi du wali, c?est parce qu?il a autorisé l?inhumation du défunt dans le carré des martyrs. (14) Voir la charte d?Alger.

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«Si…les juges n’arrivent pas à une certitude, leur devoir absolu est de l’acquitter…Le doute doit toujours entraîner l’acquittement», René Floriot, «Les erreurs judiciaires.» (1)
Cette règle universelle, s’elle avait été appliquée pendant la révolution algérienne, elle aurait épargné la vie d’un grand patriote, Abane Ramdane. Qui fut alors ce grand homme ? Bien qu’il ait été absent lors du déclenchement de la guerre d’Algérie, le 1er novembre 1954, et ce afin qu’il purge une peine de prison de cinq ans pour ses activités politiques nationalistes, il n’en reste pas moins qu’il rejoignit les rangs de la révolution dés sa sortie de prison, intervenue le 18 janvier 1955. En effet, loin d’être un handicap, cette absence plaça celui-ci en homme neuf susceptible de rassembler l’ensemble des forces vives de la nation. Car à la même époque, les luttes fratricides, suite à la scission du PPA-MTLD, rendirent les acteurs, de l’une ou de l’autre courant, suspects et incapables de rassembler sous leur bannière. Or, pour Abane, il ne pouvait y avoir que deux antagonistes. Selon Khalfa Mameri, «Pour lui [Abane] il y a d’un coté la France avec son énorme puissance et, de l’autre, non pas les Algériens avec leurs contradictions, leurs luttes intestines et fratricides mais l’Algérie et son peuple, lourdement handicapés et affaiblis par rapport à l’ennemi extérieur.» (2) Plus explicite fut le témoignage de l’un des dirigeants centralistes, Abderrahmane Kiouane. Pour ce dernier, Abane ne cherchait nullement à vexer ou à gêner son interlocuteur à propos de la scission du seul parti nationaliste prônant ouvertement l’indépendance nationale. Bien plus que ça, Abane essaya de faire des nouveaux venus au FLN des dirigeants à part entière. Erreur tactique ou naïveté de la part d’Abane, ces nouvelles adhésions ne furent pas accueillies avec joie par des éléments professant l’hostilité à l’égard de ces modérés. Pour Khalfa Mameri, «Cette hostilité s’est transformée chez certains en oppositions larvée et feutrée lorsque les leaders des formations modérées ont été placées ou ont acquis d’eux-mêmes des postes de responsabilités au sein des rouages de la révolution. Qu’on leur ouvre les portes de la révolution, c’était déjà énorme. Qu’ils deviennent des chefs au même titre, voire même au dessus de ceux qui ont eu le redoutable honneur d’allumer le feu de la libération, c’était déjà trahir en quelque sorte cette même révolution.» (3) A ce titre, la détermination d’Abane de faire de la révolution algérienne l’œuvre de tout le peuple ne fut jamais appréciée. Son intransigeance à faire valoir des valeurs universelles le conduisit indubitablement vers la mort. Mais avant cela, il a consolidé le socle de la révolution. Jusqu’à sa déchéance, il resta digne et courageux. Hélas! Le dernier mot revient toujours aux plus forts et non pas aux plus justes.
I) Un engagement sans faille en faveur de l’indépendance.
Abane Ramdane, pour des raisons qui ne dépendaient pas de lui, ne fit pas partie de ce que l’histoire retient comme «les allumeurs de la flamme». Mais s’il était en liberté à ce moment-là, il ferait indubitablement partie du groupe ayant déclenché l’action armée. Car, dés son jeune âge, il avait adhéré au parti du peuple algérien luttant pour l’indépendance nationale. D’ailleurs, dés qu’il sortit de prison, il ne tarda pas nouer le contact avec les dirigeants du FLN. Bien qu’il ait été en liberté provisoire, Abane n’hésita pas à rencontrer, à Azouza, son village natal, l’adjoint du colonel de la zone III, le colonel Ouamrane. Ce dernier le convainquit d’assumer un rôle de haut responsable en zone IV, l’Algérois. Et dans quelques jours, il rejoignit Alger. Selon Khalfa Mameri, «A Alger nous retrouvons la trace de Abane Ramdane auprès d’un autre militant du PPA: Rebbah Lakhdar dont chacun se plait à souligner le rôle si efficace qu’il va jouer en tissant comme une araignée besogneuse le tissu compliqué et impénétrable des relations de celui qui deviendra tout à la fois son chef, son ami et son pensionnaire.» (4)
Cependant, l‘activité politique de l’enfant d’Azouza put être située vers début mars 1955, soit cinq mois après le déclenchement de la guerre d’Algérie. La plupart des militants qu’il rencontra furent ses anciens camarades au sein du PPA-MTLD. Cependant, ce parti qui avait lutté pendant trente ans pour la libération du pays se retrouva bloqué à cause des luttes intestines stériles. Heureusement qu’une partie de ses militants, la branche activiste notamment, engagea avec audace le combat pour le recouvrement de l’indépendance nationale. Cependant, les initiateurs de l’action armée ne furent pas pour autant certains quant à l’aboutissement de leur combat. De son coté, Abane fut réellement coqué de l’improvisation qui avait entouré la préparation du passage à l’action armée. Il fut davantage plus offusqué en apprenant le manque flagrant de moyens et d’armement des maquis. Le colonel Ben Aouda, cité par Khalfa Mameri, relate l’état d’esprit qui prévalut à ce moment-là: «Nous n’avons que très peu de chance de nous en sortir, mais d’autres nous remplaceront. Il faut que nous donnions le départ de la révolution, que l’on sache que notre pays n’est plus amorphe! Les premières actions contre la colonisation ne seront pas grand’ chose, ne vous faites pas d’illusions, mais elles auront une grande importance psychologique. Il faut que les Français se disent: «Ils ont osé!» C’est cela l’important! Il faut allumer la mèche.» (5) En effet, plusieurs historiens confirment que, peu après le 1er novembre 1954, la lutte avait tendance à s’atténuer. Bien que le combat ait continué sans relâche dans les zone I et zone III, cela ne fut possible que grâce à la géographie et à la nature du relief contribuant au maintien des maquis dans l’une ou dans l’autre, argue Khalfa Mameri. En revanche, au moment où Abane prit les hautes responsabilités au sein du FLN, les zones fonctionnèrent au ralenti. Sur les six chefs historiques, écrit encore Khalfa Mameri, qui reçurent un commandement à la veille du déclenchement de la lutte armée; y compris Boudiaf qui devait assurer la coordination entre les zones, mais qui n’a pas pu rejoindre l’Algérie depuis son départ à l’extérieur pour annoncer la Révolution du 1er novembre 1954. (6) Ainsi, le moins que l’on puisse dire c’est que la nouvelle direction avait quand même du pain sur la planche afin de redonner un second souffle à la révolution.
II) La réorganisation de la Révolution.
La première entrée sur la scène politique de Ramdane Abane fut inaugurée le 1er avril 1955. Son appel au peuple algérien restera à jamais indélébile. Ce fut digne de l’appel du 18 juin 1940, prononcé, à partir de Londres, par le général de Gaulle en vue de résister à l’occupation nazie. Que l’on juge alors sa teneur: «Depuis cinq mois, ton armée de libération nationale combat pour que l’Algérie recouvre sa dignité, sa liberté et sa souveraineté…Algériens ! Venez en masse renforcer les rangs du FLN. Sortez de votre réserve et de votre silence. Elargissez chaque jour le champ de votre action. Ainsi, vous vous acquitterez envers votre conscience et votre pays d’une lourde dette.» (7) En effet, bien que qu’il ait été éloigné de la vie politique pendant cinq longues années, Abane n’a rien perdu du sens de l’organisation. Et ce fut dans cette démarche qu’il contacta les responsables des partis nationalistes dits modérés. En tout cas, il eut sa première rencontre avec Ferhat Abbas, président de l’UDMA, le 26 mai 1955. Ce dernier n’hésita pas à apporter l’aide matérielle au front, combien précieuse en ces moments d’indigence. Toutefois, bien qu’ils ne se soient pas revus pendant 8 mois, leur prochaine rencontre aboutit sans ambages à la formule suivante: «Les adhésions doivent se faire à titre individuel et les anciens appareils devront être dissous.» (8)
Les Ouléma, comme les Udmistes, adhérèrent au FLN, sans grands anicroches, à l’issue de leur assemblée générale à Alger, le 7 janvier 1956. Ces adhésions ne furent pas entachées de heurts particuliers dans la mesure où ils ne faisaient pas partie de la même famille politique. En revanche, les centralistes avaient du mal, dans le premier temps, à dissoudre le comité central. Selon Khalfa Mameri: «Au cours de l’une de ces réunions[centralistes] qui se tenaient la plupart du temps chez Bouda au Ruisseau[Hamma] il s’était dégagé, au fil des discussions et des hypothèses , deux tendances: celle défendue par Ben Khedda qui préconisait la dissolution du comité central et celle de Kiouane qui, tout en étant partisan de la lutte armée, estime que par ce principe que le comité central doit être maintenu.» (9) Là aussi, il fallut tout le talent d’Abane, aidé en cela par Ben Khedda, afin que le comité central soit dissous à l’automne de 1955.
Toutefois, les centralistes songèrent, à un moment donné, à créer une formation politique, le RDA (Rassemblement Démocratique Algérien), en vue d’exister à côté du FLN. Trois dirigeants centralistes rencontrèrent à San Remo, en Italie, Ahmed Ben Bella pour lui faire part de leur projet. Gilbert Meynier, dont le travail sur la révolution algérienne est capital, rend compte de cette rencontre en notant à juste titre: «En fait, les dirigeants centralistes –Ben Khedda, Louanchi et Temam- dépêchés à San Remo pour prendre langue avec les extérieurs, se retrouvèrent face à Ben Bella, mandaté par la délégation extérieure. Il est possible que, à San Remo, les trois centralistes aient implicitement joué de l’appui qu’ils avaient pu trouver chez Abbane quant à la réalisation d’une organisation politique légale.» (10) Cette volonté des centralistes d’exister politiquement, ne choqua pas dans le premier temps Abane. Cette attitude fut d’ailleurs reprochée à Abane. Car les centralistes furent taxés d’emblée de tièdes. L’un des adversaires virulents d’Abane, sur ce terrain, fut le membre de la délégation extérieure, Ahmed Ben Bella. Or, plusieurs décennies plus tard, Ben Bella avoue dans une émission sur la télévision qatarie que «Les Français ont pris attache avec nous et étions en négociation quand il y a eu l’affaire de l’arraisonnement de l’avion…Cela fait faisait sept mois qu’on négociait..» (11) Comme quoi, même les nationalistes radicaux n’excluaient pas le recours à la négociation. En tout cas, cet épisode ne freina pas pour autant la volonté d’Abane de réaliser le grand rassemblement de l’ensemble des courants nationalistes au sein du seul FLN. Et la dissolution des partis ne fut qu’une étape. L’adhésion de leurs militants au FLN scella cette union nationale tant convoitée par le passé. Sur le terrain militaire également, il fallait aussi définir une stratégie commune. En effet, avant le congrès de la Soummam, il y avait eu six zones différentes avec des stratégies différentes. Bien que le but poursuivi ait été le même pour ces régions, force est de reconnaître qu’une grande autonomie avait été laissée à chaque chef de zone. Voilà comme résume Khalfa Mameri la ligne politique défendue par Abane: «Dans le cas de la guerre d’Algérie, il était chaque jour plus urgent de l’organiser, de l’encadrer et de la conduire comme une guerre nationale et non plus comme des soulèvements locaux vite étouffés par la réaction de l’adversaire.» (12) Tout compte fait, cette stratégie fut entérinée lors du congrès de la Soummam où les congressistes s’assignèrent comme objectifs deux choses essentielles: Renforcer la lutte armée et donner une direction nationale à la Révolution. Deux principes primordiaux furent aussi adoptés afin d’encadrer l’action des dirigeants. Il s’agissait de la primauté du politique sur le militaire et de la suprématie de l’intérieur sur l’extérieur. Par ailleurs, les critiques qui suivirent l’adoption de ces deux principes furent injustes dans la mesure où ces principes n’étaient pas étrangers au mouvement national. Ainsi, à propos du premier principe cité, Khalfa Mameri écrit ceci: «Ce principe n’est pas nouveau car ses origines lui viennent de l’époque de l’OS où il a été admis, sans controverse apparemment, que ce sont les considérations politiques qui l’emportent sur les considérations militaires ou, si l’on préfère, ce sont les organes dits politiques qui ont la primauté sur les organes militaires au cas où une question importante aurait à être tranchée.» (13) La décision qui mérite d’être citée fut aussi l’interdiction de la condamnation à mort, et ce quel que soit le motif. Il fut décidé en effet que toute peine prononcée devait être examinée au préalable par un tribunal. Du coup, vers la fin de l’année 1956, on peut dire que la Révolution fut encadrée par des principes et unifiée dans son ensemble. Mais pour combien de temps? Hélas! Ces principes ne survécurent pas longtemps.


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III) Les désaccords entre les dirigeants

Le rejet de la plate-forme de la Soummam, dans le fond et dans la forme, par Ben Bella élargit indubitablement le fossé séparant les antagonistes et les partisans des résolutions de la Soummam. Le colonel Ouamrane fut en effet chargé par le CCE de réduire la contestation de Mahsas, un proche de Ben Bella, en Tunisie. En tout cas, Ben Bella contesta la ligne soummamienne en remettant en cause et le texte et la représentativité des congressistes. Mais est ce que c’est son absence au congrès qui a fait qu’il réagisse comme ça? Une chose est sûre, la délégation extérieure fut informée de l’imminence de l’organisation d’une réunion nationale. La publication du livre de Mabrouk Belhocine lève les derniers doutes sur la soi-disant volonté d’Abane d’écarter la délégation extérieure. La lettre du 13 avril 1956, envoyée par Abane à la délégation extérieure est la preuve irréfutable de la volonté des dirigeants de l’intérieur d’associer les délégués du Caire aux travaux du congrès. L’invitation fut ainsi formulée: «Les deux délégués qui rentreront du Caire devront être choisis parmi le comité des six (Khider, Ait Ahmed, Lamine, Ben Bella, Boudiaf et Ben Mhidi). Envoyez de préférence Ben Bella et Ait Ahmed ou Ben Bella et Khider.» (14) Dans ce fameux comité des six, il est aisé de remarquer que le colonel de la zone V, Larbi Ben Mhidi, se trouva à ce moment-là au Caire. A la Soummam, ce fut lui qui présida les travaux du congrès. Comme quoi, les portes furent ouvertes à tous. Partant, on peut affirmer qu’il n’y avait aucune velléité d’exclure quiconque de la plus importante réunion que la Révolution ait organisée.
Toutefois, la nouvelle direction, le CCE en l’occurrence, rencontra des embûches dés son installation à Alger. La violence des ultras de la colonisation obligea les membres du CCE à opter pour des mesures radicales. La grève des huit jours, défendue notamment par Ben Mhidi, provoqua une répression inouïe sur la population d’Alger. La stratégie de ces promoteurs, selon Khalfa Mameri, fut d’inciter la France à tomber dans le piège de la répression afin que le peuple bascule définitivement du coté du FLN. En effet, en 1956, le basculement n’a pas encore eu lieu. Saad Dahlab, un des membres du CCE issu du congrès de la Soummam, cité par Khalfa Mameri, rendit compte des tergiversations qui existèrent: «Il ne se passait rien à Alger. Il y avait même une certaine collaboration entre Algériens et Français.» (15)

Au printemps 1957, en pleine bataille d’Alger, la répression fut telle que les membres du CCE, moins Ben Mhidi arrêté quelques jours plus tôt par les paras, se trouvaient dans la cruelle alternative de quitter le sol national. Selon Gilbert Meynier, ce repli fut diversement interprété. Il note à ce propos: «Pour Abane, les replis sur Tunis ou le Caire n’étaient que provisoires. Le principe soummamien de la suprématie de l’Intérieur sur l’Extérieur faisait partie d’une vraie ligne politique, puisée dans l’histoire des mouvements de libération dont ses innombrables lectures l’avaient rendu familier.» (16) Ainsi, les quatre survivants du CCE décidèrent de se scinder en deux groupes. L’un emprunta la voie orientale (Krim et Ben Khedda). L’autre passa par le Maroc (Abane et Dahlab) pour rejoindre Tunis. Pour Khalfa Mameri, le sort d’Abane lui joua le détour. Il étaye cette thèse en écrivant: «L’itinéraire emprunté par celui-ci [Abane] contribuera à lui creuser sa tombe car déjà, à l’époque, on ne va pas au Maroc comme on se rend en Tunisie…non pas à cause de l’autorité légale du pays mais plutôt à cause du pouvoir de fait qui s’y est établi parallèlement à elle. Ce pouvoir c’est celui d’Abdelhafid Boussouf qui règne en maître absolu sur sa partie frontalière avec l’Algérie.» (17) En tout cas, le moins que l’on puisse dire c’est qu’Abane, en constatant ce qui se passait en wilaya 5 ou plutôt sur la frontière algéro-marocaine, ne voulut pas avaler sa langue. Il reprocha d’emblée à Boussouf de ne pas être au combat au milieu de ses hommes. Il exigea ensuite, selon Gilbert Meynier, la dégradation de Boumediene, devenu commandant à l’âge de 25 ans. Mais ce qui causa sa mort fut son doute le différend qui l’opposait à Krim Belkacem. La tension fut palpable entre les deux hommes à chaque réunion du CCE. Ces réunions eurent lieu le plus souvent chez Gaid Mouloud, responsable de l’UGTA. La rivalité a été telle que l’élimination de l’un ou de l’autre de la direction fut inéluctable. Le témoignage de Ferhat Abbas, en vue de réconcilier les deux hommes, est à ce titre édifiant: «En dernier ressort, je me suis rendu chez Cheikh El-Bachir El-Ibrahimi prendre conseil. Ta mission est de concilier Krim et Abane, me dit-il. Le reste est sans importance. Quand deux kabyles sont en conflit, il arrive que l’un d’eux meure. C’est cela qu’il faut éviter.» (18)
Toutefois, l’isolement d’Abane commença bien avant la convocation du CNRA, instance suprême, censée aplanir les difficultés. Mais, en Tunisie déjà, bien avant la réunion du CNRA, les colonels tinrent des réunions informelles sans la présence des civils. Selon Gilbert Meynier, «la réunion du CCE fut doublée non loin de là par une autre, informelle, au centre logistique du FLN à Montfleury. Y siégèrent les 3B, les colonels Ouamrane et Mahmoud Cherif, ainsi que les principaux chefs militaires dans la capitale tunisienne… A Montfleury, l’élimination du CCE de Ben Khedda et de Dahlab fut sans doute d’ores déjà programmée. Une motion avait été rédigée à destination du CNRA qui demandait le remplacement de Ben Mhidi par Boussouf, la désignation des historiques emprisonnés au CCE et de Ben Tobbal, Ouamrane, Lamine Debaghine et Abbas. La motion demandait l’élargissement immédiat du CNRA par le CCE qui serait désigné au Caire.» (19) Pendant ce temps là, Abane prépara, avec sérieux et abnégation, son dossier à défendre au CNRA. Le jour J, son rapport fut adopté sans bruit. Quant à la désignation de la nouvelle équipe dirigeante, Abane ignora que les dés avaient été jetés bien avant la réunion. En effet, lors des réunions informelles, les colonels décidèrent de revenir sur les principes arrêtés à la Soummam. Saad Dahlab qualifia la réunion du CNRA du Caire de «premier coup d’Etat». D’ailleurs, il ne suffisait que quelques heures au CNRA pour entériner toutes les décisions dans la journée du 27 aout 1957. Selon Gilbert Meynier, l’allégation selon laquelle il y eut une semaine de travaux du CNRA, du 20 au 27aout 1957, est fausse. Toutefois, bien qu’Abane ait été maintenu au CCE, la tension entre les colonels et Abane alla crescendo. Ils cherchèrent le moment opportun pour l’écarter des organismes dirigeants. Et pour le discréditer, toutes les méthodes furent bonnes à employer.

IV) Floraison d’accusation contre Abane

Il est difficile d’expliquer comment un homme qui a réussi à rassembler toutes les forces vives de la nation puisse tomber en disgrâce aussi rapidement. Pour y parvenir à leur fin, les colonels proférèrent des accusations, mensongères il faut le dire, afin de le discréditer. Et ces accusations furent légion. La plupart des accusations furent sans fondement car colportées par des personnes souhaitant sa chute. Cependant, tant que l’accusation ne se transforme pas en peine, on peut dire que chacun a le droit d’avoir une opinion, négative soit-elle, sur une autre personne. Or, dans le cas d’Abane, ces accusateurs ne tardèrent pas à se placer en juges afin de châtier un patriote ayant consacré sa vie à la libération de son pays. Les interrogations de Khalfa Mameri méritent d’être posées et reposées jusqu’à ce que la vérité soit admise par tous: «Quel est au juste le verdict? Au nom de quoi et de qui a-t-il été prononcé? Est-il fondé sur des règles établies, des exigences morales ou tout simplement sur impératifs du moment?» (20)
Toutefois, quoi qu’on ait pu épiloguer sur cette tragédie, il va de soi que le mis en cause n’a pas bénéficié d’un procès équitable, disant même d’un procès tout court, et ce bien qu’à la Soummam les tribunaux à l’échelle de secteur et zone aient été chargés de juger les civils et les militaires. Plus grave encore, les colonels ne saisirent ni le CNRA ni le CCE d’un danger qui guetta la révolution, nommé Abane. Dans une lettre écrite par Krim Belkacem, citée par Khalfa Mameri, le chef des forces armées du CCE avoua que «ce sont les cinq colonels membres du CCE [qui ont eu] à se constituer en tribunal de salut public. Etrange manière d’écarter les autres membres du CCE, commente Khalfa Mameri, «ceux qu’on appelle habituellement les civils (Abbas, Debaghine et Mehri) par opposition aux militaires.» (21) Plus tard, en 1959, les colonels dissident, Mohamed Amouri, bénéficia de la directive de la Soummam enjoignant aux dirigeants de juger les fautifs dans un tribunal. Ce dernier a eu l’occasion de se défendre et même d’avoir un avocat, le colonel Slimane Dehiles.
Cependant, cet aréopage de militaires accusa notamment Abane de dictateur. Quelle contre vérité. En effet, pour qu’un homme politique parvienne à instaurer la dictature, il faudrait qu’il contrôle des effectifs militaires importants en vue d’affermir son pouvoir et de pouvoir aussi anéantir les forces de l’opposition, si besoin s’en faisait sentir. Par ailleurs, bien qu’il ait été respecté par les maquisards, Abane n’a pas exercé de pouvoir direct sur les soldats de l’ALN. Dans ce cas là, comment peut-on croire les colonels qui accusèrent Abane de vouloir marcher sur Tunis dans le but de détrôner l’équipe dirigeante. D’ailleurs, même les éventuelles forces sur lesquelles il se serait appuyé furent imaginaires. Toutefois, le nom d’un officier fut avancé. Il s’agissait du commandant Hadj Ali. Or ce dernier, selon des versions concordantes, ne fut pas un homme de terrain. En effet, en 1956, le commandant Hadj Ali avait été chargé d’une mission de ravitaillement de la wilaya I. En aucun cas, il ne disposa de troupes susceptibles de renverser le CCE. Par ailleurs, les colonels ne se contentèrent pas d’isoler Abane. Ils décidèrent de le mettre en quarantaine. Le témoignage d’Allal Taalbi est hallucinant. En effet, Boussouf lui demanda carrément de ne plus adresser la parole à Abane. Quelques jours plus tard, son responsable hiérarchique, Krim Belkacem, lui tint le même discours. Dans les derniers mois de sa vie, Abane ne fut même pas invité aux réunions du CCE bien qu’il ait été membre à part entière. Selon Khalfa Mameri, «Il est vrai qu’au sein de cet organe se dessine déjà un pouvoir de fait qui sera monopolisé par trois de ses membres, tous anciens chefs de wilaya.» (22) Tout compte fait, cet isolement ne put en rester là car Abane ne se laissa pas faire.

V) La déchéance

Le rubican fut franchi lorsque la décision d’emprisonner Abane fut prise sans qu’il ait eu la possibilité de se défendre. Pire encore, il ignorait tout de la sentence. A partir de là, on peut affirmer que ses adversaires pouvaient se permettre tout, y compris la liquidation physique. Pour Khalfa Mameri, «Le scénario imaginé pour sa fin prochaine est largement connu et n’a jamais été, si peu que ce soit, démenti. Abane fut attiré dans un traquenard. Sa présence au Maroc avait été déclarée nécessaire pour régler avec Mohamed V un litige qui aurait opposé les forces du Royaume à celle de l’ALN.» (23) En agissant de la sorte, le premier président du GPRA, Ferhat Abbas, qualifia le comportement des colonels, responsables de la mort d’Abane, de dignes héritiers des Beni Hillal pour qui la légitimité se fonde sur la raison du plus fort.
Cependant, en dépit de son isolement, Abane continua à critiquer à outrance ces adversaires. Sa cible fut Krim Belkacem. Selon Khalfa Mameri: « Abane, qui ne peut se contrôler dans une situation qui ne cesse de se détériorer et qui est propice aux surenchères, ne perd rien de son esprit caustique. Il redit à qui veut l’entendre que si la France avait fait de Krim un garde champêtre, il n’aurait jamais pris les armes et qu’il serait même prêt à les abandonner si jamais elle lui offrait à présent d’être Caïd.» (24) Cet excès de langage ne fut pas de nature à apaiser les tensions. Son langage direct le mena du coup droit à la tombe. Et celle-ci allait être arrivée à plusieurs reprises. Lors de la rencontre de la Soummam, écrit Khalfa Mameri, ce langage franc et direct allait lui être fatal en 1956: «Amirouche, pas encore chef de la wilaya III mais déjà sous la ferme autorité de Krim, aurait envisagé de liquider l’organisateur du congrès de la Soummam au moment où la rencontre se tenait dans sa zone, excédé qu’il était par l’expansionnisme et les injonctions de Abane qui voulait s’occuper de tout et de tout le monde.» (25)
Cependant, bien que l’ambassade du royaume chérifien ait démenti l’information selon laquelle il y aurait eu les accrochages sur le territoire marocaine, Abane, après une hésitation, décida de se rendre au Maroc. De cette journée maudite, Khalfa Mameri écrit: «Ce jour-là, 25 décembre 1957, il est plus nerveux que d’ordinaire. Pressentiment d’un drame qui allait le faucher ou nervosité extrême, il hésitera à répondre à un appel qui le trouble, lui pourtant qui n’a jamais timoré. Il se fait accompagner par Gaid Mouloud dans la propre voiture de celui-ci, un service insignifiant lorsqu’on sait qu’Abane loge chez lui depuis prés de huit mois. La conversation roule sur les ambiguïtés de la mission et sur ses possibles dangers. Il se laisse convaincre sans résistance à rebrousser chemin. A peine revenu au domicile du responsable de l’UGTA, il éclate en colère. La pression est très forte sur ses nerfs et il ne cesse de répéter: «Je ne veux pas être considéré comme un dégonflé. Qui peut toucher à Abane? Je ne veux pas être détourné de mon devoir.» (26) La suite fut extrêmement violente et douloureuse. Abane fut ccompagné de Krim et de Mahmoud Cherif. Ils arrivèrent à Tétouan le 27 décembre 1957. Ils furent accueillis à l’aéroport par Boussouf et quelques uns de ses subalternes. D’emblée, Boussouf s’assura que ses hôtes n’avaient pas d’armes. D’après Khalfa Mameri, «Arrivés sur place, deux villas attendaient les trois voyageurs de Tunis. Abane est conduit dans une villa alors que Krim et Mahmoud Cherif sont déposés dans une deuxième, apparemment mitoyennes ou proches l’une de l’autre. Boussouf et un certain Abdeljalil ont fait quelques va-et-vient entre les deux villas. Jusqu’au moment où Boussouf est venu dire à Krim et à Mahmoud Cherif: «Venez constater Abane est mort.» Il avait été ceinturé dés son entrée dans la première villa par les deux accompagnateurs de Boussouf, puis étranglé à l’aide d’une corde.» (27) Ainsi, avec la mort d’Abane, la révolution algérienne opta pour le camouflage patriotique du meurtre, explique Gilbert Meynier.
En guise de conclusion, il va de soi que cet épisode fut en quelque sorte la plus grave dérive pendant la Révolution algérienne. D’où l’interrogation de Khalfa Mameri: «Où sont-elles cette noblesse, cette souplesse, cette générosité, cette magnanimité des premiers chefs de la Révolution…?» (28) En effet, au début de la révolution, la préoccupation des responsables fut la réalisation de l’unité nationale. Avec le temps, les appétits pour le pouvoir firent que des dirigeants pensaient à l’après guerre et au pouvoir. Abane ne voulut pas être témoin de cette déviation. Ce refus lui couta la vie. En tout cas, un assassinat ne servant pas la révolution, pourrait-on dire. Car aucune preuve sérieuse ne fut présentée par les colonels pour justifier son assassinat. En effet, Abane était un pur qui «est entré dans la révolution algérienne comme on entre en religion», écrit Khalfa Mameri. Et s’il y avait un procès digne d’une grande Révolution, il y aurait, avant le jugement, la confrontation. Mais, comme le souligne Khalfa Mameri, «Le CNRA ignoré, CCE réduit à 5 membres tous détenteurs de forces militaires, alors qu’il en comptait 9, absence de l’accusé, absence d’un défenseur, même commis d’office, élasticité incompréhensible et jamais vue nulle part de la peine: prison ou exécution, blanc seing donné au geôlier, libre de décider (seul?) De la peine finale.» (29) On peut dire in fine que l’histoire retiendra surtout d’Abane qu’il fut un homme ne fuyant jamais ses responsabilités ni son devoir envers sa patrie.
Par Ait Benali Boubekeur

Notes de renvoi:
1) Khalfa Mameri, « Le faux procès », page 70,
2) Khalfa Mameri, « Abane Ramdane, héros de la guerre d’Algérie », page 133,
3) Id, page 155,
4) Id, page 95,
5) Id, page 100,
6) Id, page 139,
7) Id, page 112,
8) Id, page 165,
9) Id, page 168,
10) Id, page 185,
11) Khalfa Mameri, « Le faux procès », page 45,
12) Khalfa Mameri, « Abane Ramdane, héros de la guerre d’Algérie », page 197,
13) Id, page 213,
14) Khalfa Mameri, « Le faux procès », page15,
15) Khalfa Mameri, « Abane Ramdane, héros de la guerre d’Algérie », page 255,
16) Gilbert Meynier, « Histoire intérieure du FLN », page345,
17) Khalfa Mameri, « Abane Ramdane, héros de la guerre d’Algérie », page 273,
18) Ferhat Abbas, « Autopsie d’une guerre », page 212,
19) Gilbert Meynier, id, pages 341, 342,
20) Khalfa Mameri, « Abane Ramdane, héros de la guerre d’Algérie », page 292,
21) Id, page 293,
22) Id, page 289,
23) Id, page 297,
24) Id, page 289,
25) Id, page 272,
26) Id, page 297,
27) Khalfa Mameri, « Le faux procès », page 87,
28) Khalfa Mameri, » Abane Ramdane. héros de la guerre d’Algérie », page 297,
29 Khalfa Mameri, » Le faux procès », page 75.



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Sous un portrait le représentant à l'époque où il était au pouvoir.© Omar Sefouane.

Son parcours, ses anciens compagnons, le printemps arabe, Abdelaziz Bouteflika… Le premier président de l’Algérie indépendante nous livre ses vérités. Sans prendre de gants.Resté très proche d’Ahmed Ben Bella, Mohamed Benelhadj, ancien secrétaire général du Mouvement pour la démocratie en Algérie (MDA), le parti qu’avait créé l’ex-président algérien après sa libération, en 1980, nous avait prévenus : « Si je le lui demande, Si Ahmed vous recevra sûrement volontiers un soir pour évoquer à bâtons rompus tous les sujets que vous voudrez, mais pas sous la forme d’une interview formelle. » La promesse sera tenue in extremis, vingt-quatre heures avant notre départ, lors d’un petit séjour à Alger et dans ses environs dont l’objet était de réunir quelques derniers témoignages et de visualiser des « éléments de décor » pour un livre en chantier sur la guerre d’indépendance. Décidée le matin même, l’entrevue aura lieu juste après le dîner, vers 20 heures, dans la vaste et confortable villa El-Menzel, située dans le quartier Paradou, à Hydra, sur les hauteurs d’Alger. C’est là que vit tranquillement, en compagnie de sa fille Mahdia – son épouse Zohra est morte il y a un an –, le premier leader de l’Algérie d’après 1962.Directement intéressé par les propos de Ben Bella, puisqu’il envisage de mener à bien d’ici à deux ans une biographie de ce dernier, Benelhadj nous aidera à maintes occasions à faire parler notre interlocuteur. Pour traduire certains de ses propos – ou un mot – qui ne lui venaient à l’esprit qu’en arabe quand la fatigue et quelquefois une mémoire défaillante – « cela se brouille dans ma tête », dit-il alors – laissaient les questions sans réponse ou le conduisaient à s’éloigner trop longtemps du sujet abordé. Mais, avouant pour sa part 94 ans – certains pensent même qu’il est en réalité plus âgé –, l’ancien responsable le plus connu du FLN n’eut en général besoin d’aucune aide – et de moins en moins au fil de la discussion – pour affirmer avec conviction pendant une bonne heure et demie, souvent il est vrai à l’occasion d’apartés, ses vérités sur son parcours et sur l’état de la planète, à commencer, bien entendu, par celui de l’Algérie et du monde arabe.Tout sourire Nous pensions le voir dans la pièce qui lui sert de bureau, où nous avons patienté devant un beau portrait en noir et blanc le représentant à l’époque où il était au pouvoir. Devant nous, une petite table transparente sur laquelle sont disposés deux superbes Corans et sous laquelle est exposé un sabre magnifique – une arme qui a appartenu, m’assurera-t-on, à l’émir Abdelkader et qui serait un cadeau d’Abdelaziz Bouteflika. Finalement, quittant ce lieu empli de souvenirs et de photos de famille ou en compagnie de personnalités – avec Che Guevara, des responsables américains… –, nous retrouverons un Ben Bella très accueillant dans un salon à l’autre bout de la villa. Vêtu d’un pyjama aux rayures multicolores sur lequel il porte une djellaba blanche très légère, il nous invite à nous installer à ses côtés sur un divan – sans doute pour qu’il puisse nous entendre de sa meilleure oreille, car il n’aime pas mettre son appareil auditif. Ce qui nous place tous les deux face à un tableau figurant une belle femme volontaire au regard extraordinairement perçant – nous apprendrons qu’il s’agit de sa mère. Souriant et chaleureux, au point de poser parfois son bras sur notre épaule, s’exprimant de sa voix grave qui dérape souvent vers les aigus, il acceptera sans façon que ses propos soient enregistrés. Il ne craindra pas pour autant de parler crûment de nombreux sujets.Après lui avoir demandé s’il suivait toujours de près l’actualité – « bien sûr ! » –, nous l’interrogeons pour recueillir les sentiments que lui inspire l’effervescence actuelle dans le monde arabe. Il parle d’une région « en ébullition » et trouve « naturel » qu’on s’agite pour « aller de l’avant ». D’autant qu’il y a de bonnes raisons de vouloir « dépoussiérer » – c’est le vocable très modéré qu’il emploie – les régimes en place. Il ne pense d’ailleurs « pas du tout » qu’on puisse parler de révolution pour qualifier les changements en cours depuis plusieurs mois, en particulier en Tunisie.Quand on évoque les Tunisiens, il ne peut s’empêcher d’ailleurs – ce qui n’est peut-être pas sans rapport avec son scepticisme sur leur capacité à réaliser une véritable révolution – de les comparer immédiatement avec les Marocains, « qui, eux, sont de vrais combattants » et « pas des poules mouillées ». La figure qui lui vient à l’esprit pour illustrer son propos sur les Marocains est celle d’Abdelkrim, héros de la guerre du Rif contre les puissances coloniales espagnole et française, dans les années 1920. Ses réserves à l’égard des Tunisiens ne semblent pas étrangères à son rejet sans appel de la personne de Bourguiba. D’ailleurs, elles ne l’empêchent pas de reconnaître qu’on a pu voir ces derniers mois en Tunisie des hommes prêts à courir des risques pour provoquer le changement. Mais ne trouve-t-on pas « dans tous les pays » des gens « prêts à prendre les armes pour quelque chose » ?Un pays "pas facile"Et l’Algérie ? Risque-t-elle aussi de voir son régime ébranlé par le « printemps arabe » ? « Je ne le voudrais pas », répond-il immédiatement, avant de signifier plus tard qu’il ne croit pas qu’un scénario de rupture serait bénéfique à son pays. « Nous avons quelqu’un qui est là, je préfère que cela reste comme cela », poursuit-il, en défendant la personne de Bouteflika. Parce que ce qui viendra après pourrait ne pas être à la hauteur des aspirations du peuple ? « C’est cela », acquiesce-t-il. Tout en affirmant qu’il n’est pas d’accord avec Bouteflika sur beaucoup de points. Qu’il préférerait « autre chose ». Mais s’« il y a des moins et des plus chez lui, pour l’instant, c’est le moins mauvais, et je m’en contente ». Car, poursuit-il en expert, « l’Algérie, vous savez, c’est un pays pas facile ». Un jugement qu’il répétera plusieurs fois au cours de l’entretien, le plus souvent en disant que « diriger les Algériens, c’est vraiment pas facile ». Ce qu’il voit manifestement de plus évident à reprocher au président algérien actuel, c’est d’abord… qu’« un homme de son âge ne soit pas encore marié ». Mais, ajoute-t-il en souriant, « il n’est jamais trop tard pour bien faire ». Quoi qu’il en soit, « il est comme un petit frère pour moi », et « je voudrais qu’il ne lui arrive rien de mal ».Considère-t-il que l’Algérie, presque cinquante ans après l’indépendance, a achevé sa libération et peut prétendre avoir réalisé un parcours satisfaisant ? « Non », dit-il sans hésiter. D’abord parce que l’Algérie, qui fut un exemple pour les autres pays du Tiers Monde en matière de développement – entendre : pendant les premières années de l’indépendance –, ne l’est plus. Mais aussi et surtout parce qu’elle n’a pas encore véritablement exploité ses énormes potentialités économiques, ce qui en fait « un pays plein d’avenir ». En effet, « nous n’avons pas utilisé tous nos arguments, même si nous sommes le quatrième producteur mondial de gaz. Le Sahara, le plus grand désert du monde, regorge de ressources ».On n’en saura pas plus sur sa vision actuelle du développement du pays. Pense-t-il, cependant, que l’avènement d’une véritable union du Maghreb constituerait un pas important dans la bonne direction ? Il répond par l’affirmative, avec un enthousiasme certain : « Il faut faire le Maghreb. Les frontières devraient être ouvertes. Et c’est tout à fait possible. Comment pourrais-je penser autrement alors que, même si je suis né en Algérie, même si j’y ai vécu, même si j’ai été le chef de la révolution algérienne, ma mère et mon père étaient tous deux marocains. » D’ailleurs, « il n’y a rien, pas le moindre accident géographique, qui sépare l’Algérie du Maroc. Dans la région d’Oujda, en particulier, on se ressemble comme deux gouttes d’eau des deux côtés de la frontière, qui est restée ouverte pendant longtemps. Et puis je n’aime pas les frontières de toute façon. J’aimerais vivre dans un monde sans frontières ».Mais pourquoi, alors, n’a-t-il pas agi dans ce sens quand il était au pouvoir ? La question du Maghreb n’a pas pu être posée, car il était « impossible de faire cela avec Hassan II ». Il suffit effectivement de l’entendre parler de l’ancien roi du Maroc, son « ennemi », « un florentin », pour imaginer qu’il lui aurait été difficile de trouver un accord avec lui. Alors que son père, Mohammed V, était, lui, « un brave type », avec qui il aurait été possible de s’entendre. Et que pense-t-il de Mohammed VI ? Que du bien : « C’est un type sympathique. »Quand on lui demande de quoi il est le plus fier en regardant rétrospectivement son parcours, Ben Bella ne pense pas à sa présidence dans les années 1960. Ce qui lui vient immédiatement à l’esprit, c’est « la poste d’Oran », où « j’ai volé de l’argent ». C’est en effet grâce à l’attaque de cet établissement, en avril 1949, par un commando de l’Organisation spéciale (OS) – créée dans la clandestinité en 1947 par le parti nationaliste de Messali Hadj, le PPA-MTLD –, que les indépendantistes algériens purent financer un temps le groupe de militants chargé de préparer la lutte armée contre le colonisateur et qui sera plus tard le fer de lance du déclenchement de la guerre en 1954. « C’est l’OS, rappelle-t-il avec fierté, qui a servi à faire le 1er novembre. » Quel rôle a-t-il joué dans cette attaque, le patron de l’OS à l’époque étant Hocine Aït Ahmed ? Dans ses Mémoires, ce dernier affirme en avoir été le principal organisateur, avec pour adjoint Ben Bella, lequel lui succédera à la tête de l’OS. Mais pour l’ex-président, « même si je respecte Aït Ahmed », bien qu’il ait été souvent « beaucoup plus kabyle qu’algérien », l’organisateur principal du coup, « jusqu’au moindre détail, c’est moi ».FacilitateurTout comme, nous dira-t-il à plusieurs reprises, sans fausse modestie, « le 1er novembre, c’est moi ». Que veut-il dire par là, puisque, même s’il a été le dernier chef de l’OS avant son démantèlement en 1950, il ne fut que l’un des neuf chefs « historiques » qui ont créé le FLN et lancé le combat final pour la libération de l’Algérie en 1954 ? Il précise alors qu’il ne cherche pas à exagérer son rôle, mais simplement à dire qu’il ne fut pas facile avant le déclenchement de la lutte armée de faire travailler ensemble les divers responsables du soulèvement et que c’est lui qui a réussi à aplanir les difficultés, à parler à tous de façon telle que la plupart des obstacles ont pu être surmontés. Il pense en particulier à la coordination et à la cohésion du groupe des pionniers du FLN qui n’allaient pas de soi. D’autant que, « parmi eux, il y avait des Kabyles » – il pense bien sûr surtout à Krim Belkacem, avant tout un « type très courageux » à ses yeux. Évoquant au passage quelques-uns des dirigeants du FLN pendant la guerre, il ne fait pas mystère, en revanche, du peu de considération qu’il avait pour Abane Ramdane, la tête politique du FLN à Alger en 1955 et 1956, qui l’a empêché – cela ne fait pas de doute pour lui – d’aller assister au fameux congrès de La Soummam, en 1956. Et, à un moindre degré sans doute, pour Mohamed Boudiaf, qui n’était pas, selon lui, un véritable combattant, « zéro sur le plan militaire ». Quoi qu’il en soit, il n’approuve pas les éliminations physiques de dirigeants. Il n’a jamais approuvé en particulier celle d’Abane, en 1957, et s’est dit mécontent, assure-t-il, dès qu’il l’a apprise. Quant à Messali Hadj, chef nationaliste qui n’a pas rejoint le FLN, il fut avant la guerre un homme courageux, mais « il faisait trop de cinéma, il jouait trop un personnage », avec sa barbe, sa tenue vestimentaire.La guerre aurait-elle pu être plus courte si d’autres décisions avaient été prises ? Peut-être. « Excusez-moi de parler ainsi », mais il est certain que « nous avons fait énormément de conneries ». Même si « je suis peut-être celui qui s’est le moins trompé ». Cependant, la durée des combats, « ce n’est pas de notre faute », cela dépendait surtout des Français, si puissants en face de nous, qui « étions bien plus faibles ». L’arrivée au pouvoir de De Gaulle en France a-t-elle plutôt compliqué ou facilité la solution ? Il est clair pour lui que l’arrivée au pouvoir de cet homme, « qui est au-dessus de tous les autres », ne pouvait être qu’une bonne nouvelle. La direction du FLN n’a-t-elle pas pourtant été dubitative pendant un bon moment ? Lui, en tout cas, n’a pas fait d’erreur de jugement sur de Gaulle. « J’ai pensé tout de suite que c’était une bonne chose, assure-t-il, et cela n’a aucun rapport avec le fait qu’il m’avait décoré lors de la Seconde Guerre mondiale à Monte Cassino. »Vive l’autogestion ! S’il n’a pas de réels regrets quant à son action durant la guerre de libération, pense-t-il avoir pris la bonne voie en tant que président avec le choix du « socialisme arabe » ? « C’était un socialisme fondé sur l’autogestion », tient-il à préciser tout de suite, manifestement peu disposé à se livrer à une autocritique : « Et c’était ce qu’il fallait faire. » Il reste convaincu d’ailleurs que l’autogestion, qui n’est plus guère à la mode, est le meilleur système, car elle permet de ne pas imposer les décisions, « de discuter à la base, de permettre aux gens d’être engagés dans ce qu’ils font. […] Des gens qui décident à la place des autres, je suis contre, totalement ».Il n’est donc guère étonnant qu’il se déclare ennemi des idées libérales en vogue depuis la fin du XXe siècle. Et qu’il soit très critique vis-à-vis des États-Unis. Il reconnaît, certes, leur puissance sans égale – « actuellement, Dieu, c’est le président américain » –, mais ajoute que ce sont « des tueurs ». Il ne leur pardonne surtout pas – et il insistera sur ce point en y revenant plusieurs fois – leur passé d’exterminateurs de « la race rouge ». Même si les Espagnols ont peut-être été encore plus expéditifs pour éliminer les Amérindiens, des peuples pour lesquels il avoue avoir toujours éprouvé une passion. Les Américains d’aujourd’hui devraient-ils signifier une repentance à ce sujet ? Lui qui ne se dit pas favorable à une telle déclaration de la part de la France à propos de la guerre d’Algérie le souhaiterait manifestement dans ce cas, pour réparer « une faute historique ». Mieux, dit-il en riant, « la terre appartient aux Indiens et il faudrait que les États-Unis déménagent, mais ça va être difficile ».Au moment de se séparer, qu’il n’a pas précipité, le premier président de l’Algérie indépendante ne se dit pas du tout pressé de quitter ce monde. Il se considère en pleine forme physique pour son âge. Ses visiteurs lui disent tous qu’il « n’a pas changé », qu’il a gardé son corps et son visage de toujours, et il pense que c’est vrai. Aucune raison de le contredire après avoir passé un long moment avec lui jusqu’à 22 heures. Et on peut le croire quand il dit, en réponse à notre dernière question, que, au fond, il se verrait bien ­centenaire.__Par Renaud de Rochebrune, envoyé spécial à Alger



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28.05.2011 Ben Bella, l’historique, Harbi l’historien, archives explosives


La récente sortie médiatique de Ben Belle, prions qu’elle ne soit pas la dernière, a suscité un tollé dans les rangs de ses haineux adversaires, spécialisés ès coups bas, qui n’ont pas répugné de recourir aux plus hideux mensonges et à la calomnie dans l’espoir de lui faire barrage, de le bâillonner et à travers de lui, de décourager les algériens qui seraient tenté de suivre la voie du premier président de la république algérien qui vient de réussir un coup de génie qui se nomme dans le jargon médiatique : «Prêcher le faux pour savoir le vrai »
Prêcher le vrai pour savoir le faux. Au lendemain du coup du 19 juin 1965, Houari Boumediene, au nom du conseil de la révolution, avait solennellement promis au monde et aux algériens :
« …Un livre blanc sur les méfaits de Ben Bella sera écrit et publié et le premier président algérien juger».
Or, l’accusé a été séquestré 14 années durant lesquelles il n’avait jamais été présenté à un juge. Faute de charges, peut être de plumitifs audacieux, le « Livre blanc » reste à écrire. Par conséquent, Ben Bella n’est pas plus coupables que les responsables politiques de sa génération.
Une certaine presse algérienne reproche à Ben Bella d’avoir failli à ses missions de représentation de la révolution algérienne au niveau international et de fournir des armes aux combattants de l’ALN. Que ceux qui ont fait plus que lui dans ces domaines lèvent la main et brandissent leur lot de preuves exigibles.
D’aucuns croient que la dernière sortie de Ben Bella relève plutôt d’une maladresse. En réalité il s’agit d’un coup de maître. Sans cette sortie, sans doute que Sid Ahmed Ghazali, un haut dignitaire du pouvoir algérien, plusieurs fois ministre de souveraineté, ancien Premier ministre, peut-être connaît-il les coulisses de ce pouvoir, n’aurait pas, en 2011, révélé aux algériens:
« … Il existe deux pouvoirs en Algérie, un « Apparent » et un autre « Caché ».
Il va sans dire que le premier est un pouvoir de parade dont les prérogatives se limitent à inaugurer les « Chrysanthèmes » (poser des fleurs sur les tombes). C’est le deuxième pouvoir qui détient touts les pouvoirs en Algérie. L’Algérie est gouvernée par des fantômes des Dracula.
Et peut-être que le journal el Watan du 26 mai 2011 n’aurait-il pas sollicité l’historien algérien, Mohamed Harbi, pour une interview des plus énigmatiques de toute sa longue carrière : d’homme d’action, de réflexion et d’historien efficace et intègre.
Pourquoi, à 94 ans révolus, Ben Bella hante-il encore les nuits de certains dirigeants politiques et militaires, « Apparents » et « occultes », qui mobilisent leur valetaille intellectuelle et médiatique pour : lyncher, harceler, calomnier… un humble vieil homme ?
Mohamed Harbi, dans un langage qui lui est inhabituel et fort alambiqué, vient de donner, dans son interview à el Watan, une réponse cinglante qui ouvre toutes les hypothèses sur la haute trahison de certains dirigeants algériens.
Harbi : un nouveau converti à la langue de bois. En 2012, la France, l’ancienne puissance coloniale, normalement, doit déclasser une partie des archives liées aux « Evènements d’Algérie ». L’éminent historien algérien qualifié ces archives de :
: «De lave en fusion », « D’explosives », « De nature à discréditer la politique », «à dévaloriser la révolution ».
Or, il s’agit d’archive encore protégées pas le sceau de secret d’Etat. Par définition, qu’il n’a pas encore consultées. D’où tient-il ses informations pour qualifier, a priori, ces archives de ravageuses pour la classe politique algérienne et pour l’image de la révolution ?
De tels propos, venant d’un historien connu pour sa rigueur intellectuelle et son courage politique, doit, à tout le moins, exciter les curiosités de ses lecteurs et alimenter leurs méditations et, surtout, ils devaient soulever un tollé au moins égal à celui provoqué par la sortie de Ben Bella par ses propos plutôt évasifs.
Concernant l’assassinat d’Abanne Ramadhane que d’aucuns l’attribuent indirectement à Ben Bella, Harbi rappelle :
« Boussouf n’endosse pas seul l’assassinat d’Abane Ramdane ».
Pourquoi n’a-t-il pas donné le ou les noms des complices de l’assassin d’Abanne ? Puisque Harbi ne donne le nom d’aucun complice, osons nous interroger à haute voix, si Krim Belkacem et Amar Aouamran, deux kabyles, ensembles ou séparément, s’étaient opposé à l’assassinat d’Abanne, d’un autre kabyle, Boussouf aurait-il osé toucher à un seul de ses cheveux ?
Que peuvent bien contenir ces maudites archives qui, un demi siècle après les faits, avant d’être déclassées, continuent à donner des sueurs froides à nos dirigeants « révolutionnaires ?
Les véritables harkis, les authentiques bourreaux du peuple algérien… ne seraient-ils pas au sommet du pouvoir, derrière un rideau de fer, dans la partie « Cachée », depuis 1958, depuis le premier GPRA à nos jours ?
Personnellement, j’ai vécu pendant 4 années, de janvier 1957 à décembre 1960, en contact quasi quotidien avec des nationalistes algériens affectés ou de passage dans la zone 4 de la wilaya 4 (arrière pays de Gouraya-Tipaza). J’atteste sur mon honneur qu’à partir d’avril 1958, les maquis de ma zone étaient : infiltrés, instrumentalisés et manipulés par les services du 2ème bureau du 22ème RI (régiment d’infanterie), Dirigés par le lieutenant Jean Lacoste, basés aux Bois Sacré, dans une résidence d’été du gouverneur d’Algérie.
J’atteste également sur mon honneur qu’au printemps de 1958, un certain si Taieb, qui n’était autre que le colonel Boulem Oussedik, avait voyagé de Larhat, près de Damous à Alger, à bord d’une voiture d’un notable de Gouraya, sous la protection des services coloniaux. Selon toute probabilité, ce même individu, avait continuait son voyage d’Alger en passant par la France pour atteindre l’Egypte où il sera nommer ministre de l’information dans le premier GPRA.
Houari Boumediene était un agent des services français. Pour tout fait d’arme pendant la révolution algérienne, Mohamed Boukharouba, alias Houari Boumediene, cite sa croisière, entre Alexandrie et Nador espagnol, à bord d’un yacht royal, que le Roi de Jordanie : « Vient d’offrir à sa nouvelle épouse, en voyage de noce en Espagne… » (Un algérien nommé Boumediene, Ania Francos et J. P. Séréni).
En 1954, Dinah n’était plus princesses d’Egypte. Elle a épousé le Petit roi de Jordanie en 1955. Son auguste roi va la répudier quelques mois plus tard pour épouser en une anglaise en 1957.
En 1954, avant que le petit roi de Jordanie n’épouse la princesses déchue d’Egypte, Le dinah, le yacht qui était censé appartenir à la reine de Jordanie, se trouvait abandonné dans un coin perdu de Port-Saïd. Sa conque était rongée par la rouille et ses machines bloquées. Pour lui donner un aspect royal et le remettre en état de prendre la mer, pas moins d’un mois de travaux acharnés et couteux, à la charge du FLN, ont été nécessaires. Le Petit roi de Jordanie aurait-il offert à sa première reine une antiquité nabatéenne ou pharaonique ?
En faire, avant de devenir célèbre sous le nom de Dianh et de rendre fameux Mohamed Boukharouba, le yacht s’appelait : « Fakhr al Bahr ». Il avait appartenu au roi Farouk d’Egypte. Suite à son renversement par la révolution de juillet 1952, le yacht restera immobile, quasi abandonné dans un coin retiré de Port. Il avait pour armateur un notable égyptien de l’époque de la monarchie, qui avait pour hommes de confiance, Ibrahim al Nial et Milan Bachich, entre autres. Cet armateur va disparaître au cours d’une affaire connue en Egypte sous le nom : « Affaire d’al Manchia », nom d’un quartier d’Alexandrie quartier d’Alexandrie où Nasser, en plein discours, avait fait l’objet d’un mystérieux attentat. Ibrahim al Nial et Milan Bachich vont s’avéré être des agents des services nommés plus haut. C’est le même Ibrahim al Nial qui, le 16 octobre 1956, livrera l’Athos, un bateau plein d’armes destinées à l’ALN basée au Maroc, à la marine français qui l’a capturé au large des côtes oranaises.
Le Dinah, le yacht qui a rendu fameux Boumediene est un mythe créé de toute pièce par les services tripartite : MI6 britannique, MOSSAD israélien et SDECE français pour impliquer et punir le régime de Nasser pour son soutien aux nationalistes algériens et légitimer leur agression d’octobre 1956 contre l’Egypte.
Il est également avéré que Boumediene n’a pour tout fait d’arme qu’une croisière à bord d’un yacht royal entre Alexandrie et Nador. Bien que sans aucun diplôme, aucune formation politique ou militaire, il va devenir colonel en temps miraculeux. Il deviendra surtout, au Maroc comme en Tunisie, le point de ralliement et le garant des promotions d’autres félons. Dans sa marche forcée vers le pouvoir, il va assassiner plus de vaillants combattants algériens, notamment des officiers, que tout l’état major colonial réuni.
La direction de la révolution algérienne, aussi bien à l’intérieur du pays qu’à l’extérieur, était passée sous le contrôle d’éléments félons, aux ordres et à la solde des services coloniaux. Dès 1958, Boumediene avait commencé à confier l’encadrement de l’armée des frontières à des convertis au nationalisme algérien de la 25ème heure. En fait la plus part des « DAF » (déserteurs de l’armée français) n’étaient pas des déserteurs mais des envoyés en mission par leur hiérarchie dans la perspective de s’emparer, dans un premier temps, de la direction de l’ALN et dans un deuxième temps, une fois l’Algérie décolonisée, de confisquer l’indépendance, le pouvoir politiques et les privilèges qui allaient avec. Ceux qui on tenté de faire barrage à Boumediene et à ses félons, ont soit liquidés physiquement soit contraints d’entrer en Algérie pour être éliminer par les forces coloniales. Le cas du colonel Lotfi et ses compagnons, l’une des bêtes noires de Boumediene, par exemple.
A noter que sur neuf fondateurs de FLN historique, trois : Mohamed, Khider, Krim Belkacem, et Mohamed Boudiaf, ont été physiquement liquidés par le système de Boumediene. Ait Ahmed et Ben Bella, ont été éliminés politiquement par le même système. Mustapha Ben Boulaïd a été tué par les forces coloniales avec le soutien d’éléments retournés ou infiltrés par les services coloniaux dans ses rangs. Larbi Ben M’hidi a été donné aux parachutistes du colonel Allard par un collabo. En 1990, le judas de Ben M’hidi occupait un poste politique éminemment important à Bruxelles.
Dans mon village, Gouraya, au moins la moitié des effectifs des anciens moudjahidin sont des faux flagrants.
En 1980, pour faire pression sur les dirigeants algériens, la France avait laissé courir des rumeurs selon lesquelles elle allait déclasser des archives des « Evènements d’Algérie ». En secret, des dirigeants algériens ont refusé au motif que c’était trop tôt, en d’autres termes ils n’en voulaient pas. Jacques Roseau, ancien de l’OAS, Président du RECOURS (association de pieds noirs), s’était bruyamment et farouchement opposé au transfère de ces archives en Algérie, en précisant que les pieds noirs ne risquaient plus rien pour leurs crimes commis en Algérie cependant, il s’était interroger : «… Que vont devenir nos complices restés là-bas ? »
Si ces archives venaient à être déclassées, la vérité historique enfin connue par les algériens, la France doit immédiatement se préparer à rapatrier ou à accueillir sur son sol au moins 3,5 millions de français d’Algérie, soit 10% de la population, des français à part entière, nés sur le sol français, qui ont versé leur et fidèlement servi la France.
Je ne crois pas que la France soit prête à accueillir autant de monde en temps de crise sociale aiguë. Donc, que Monsieur Harbi se rassure, les archives, au sens scientifique et historique du terme, des « Evènements d’Algérie » ne seront pas déclassifiés en 2012. C’est mon opinion

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Par (Soir d'Algérie)

Nordine Aït Hamouda:« Ben Bella, l’homme des Français et des Egyptiens »

La dernière sortie de Ben Bella pose, une fois de plus, la place de l’Histoire dans la vie politique nationale. «Un âne bâté», c’est le qualificatif qu’use l’épouse d’Abane pour qualifier Ahmed Ben Bella. Cette réaction a suivi les ignominies qu’il a déversées contre Abane Ramdane et les acteurs du Congrès de la Soummam. Signalons au passage que dans le procès que la veuve de l’artisan de la révolution avait intenté à Ali Kafi pour diffamation d’Abane, elle s'était retrouvée seule au tribunal. Les incohérences et les outrances de Ben Bella sont des constantes dans un parcours marqué par une indigence intellectuelle que n’ont suppléée ni les années passées en prison ni l’aisance matérielle dans laquelle il a toujours baigné dans le mouvement national et la vie politique algérienne en général quand il était libre.

Une instabilité originelle
La lecture de sa déposition, le 12 mai 1950, dans l’affaire de l’attaque de la poste d’Oran, devant l’officier de police judiciaire, Havard Jean, aujourd'hui sur le net, est stupéfiante. Sans subir la moindre violence, il s’efforce, avec une précision d’horloger, de donner et d’enfoncer tous ses camarades et de faire valoir ses états de service pour la France. «J’ai fait la campagne de France 1939-1940, puis la campagne d’Italie. J’ai été démobilisé avec le grade d’adjudant en juillet 1945. Je suis titulaire de la médaille militaire avec 4 citations. Je n’ai jamais été condamné, je suis lettré en français.» Bien évidemment, Ben Bella souligne son intégration française pour mieux se démarquer de ses co-accusés qui, eux, n’ont pas eu «la chance» d’avoir servi le drapeau français avec tant d’enthousiasme. Ce qui l’amène à expliquer aux renseignements généraux que : «Comme dans tous les partis politiques, il y a les réfléchis, les pondérés, les exaltés, les violents qui trouvent qu’on n’en fait pas assez… et c’est toujours sous la pression des perturbateurs et pour céder à leurs exigences que certains actes de violence sont commis. Parmi eux, je citerai le cas de l’attaque de la poste d’Oran. Je vais dans le détail vous dire tout ce que je sais. Je ne peux pas vous dire si c’est Madjid (Aït Ahmed) qui était à ce moment-là le chef de l’OS ou bien le député Khider, qui a imaginé ou conçu ce coup de force. En tout cas, cette affaire n’a pas pu se réaliser, à condition que ce soit Madjid qui l’ait conçue sans en référer à Khider.» Tous les militants de l’OS, y compris les plus clandestins, y passent : avec leurs fonctions, les réunions, leurs dates et lieux, les sources d’argent de l’organisation pour conclure sur : «J’ai appris par Madjid lui-même que l’argent (de la poste d’Oran) avait été transporté chez Boutlelis où le député Khider devait prendre livraison. Le produit du vol (la poste d’Oran) a été entièrement versé au MTLD par Khider, la somme d’argent découverte chez Kheder, le chauffeur, représentait un prêt consenti par l’OS pour lui permettre de monter un garage personnel. Si par la suite il me revenait certains détails, je ne manquerais pas de vous en faire part ou de les dire au juge d’instruction. » C’est un document qui s’apparente plus à un rapport de mission qu’à des informations arrachées ou glanées sur un ennemi. Comment un homme aussi fragile a-t-il pu rebondir dans le mouvement national et, pire, s’imposer à tous ses acteurs ? Sans verser dans la paranoïa ambiante, nous verrons dans la suite de cette intervention que c’est parce que les grands choix d’après-guerre ont échappé très tôt aux Algériens. Ben Bella, qui n’entreprit aucune action significative pendant son passage à l’OS, a, par contre, eu le temps de connaître tous les rouages de l’organisation. Le résultat de sa collaboration avec l’administration française se chiffre par des centaines d’arrestations en chaîne (363 dont 251 présentés devant la justice), le démantèlement total de l’OS (hommes, armes, explosifs, caches, complicités…) et la reconstitution des liens de la structure clandestine avec le MTLD qui activait encore dans la légalité. Le désarroi semé par cette «coopération» parmi ses codétenus à la prison de Blida avait poussé Amar Ould Hamouda (1) à tancer vertement Ben Bella pour avoir donné tous les militants de l’OS de l’Oranie dont il connaissait la plus grande partie. Vu sous l’angle des dégâts qu'il n'aura de cesse d’assener à l’Algérie ; on peut croire Ben Bella quand il déclare que son plus haut fait d’armes est l’attaque de la poste d’Oran. Le personnage se plaçait déjà sur une démarche qu’il n’a jamais abandonnée : étranger aux souffrances et aspirations du peuple algérien, il sera rapidement repéré et sponsorisé par la France et plus tard par Gamal Abdennacer. Il s’est ainsi, très tôt, ouvert la voie pour se faire introniser à la tête du premier gouvernement de l’Algérie indépendante par la force de deux puissances étrangères contre la direction légale de la révolution. Ceci étant dit, et toujours sur le registre anti-algérien, il passe sous silence dans ses sorties un autre exploit, il est vrai obtenu après l’indépendance. L’élimination de 450 moudjahidine de Kabylie dans la crise de 1963, avec le concours de Boumediène. Pour l’Histoire, il faut dire que cette fois-ci, il a été grandement aidé par la politique d’exclusion de son ex-compère de la délégation extérieure du Caire, Hocine Aït Ahmed, qui a semé doute et désespoir en voulant rester le seul opposant et en condamnant, dès le départ, une insurrection qu’il avait chevauchée en cours de route. On remarque, cette fois encore, que la relation des deux compères est à la fois singulière et complexe. En effet, Aït Ahmed qui entretient des rapports en dents de scie avec Ben Bella s’est bien gardé de répondre à l’attaque de ce dernier. Mais ceci est une autre histoire.


L’histoire à contre-courant

Revenons au parcours de Ben Bella dans les années 50, à commencer par son évasion de la prison de Blida. Cette étrange évasion, de l’avis de plusieurs acteurs de l’époque et même de ceux qui connaissent cette prison, le mène directement au Caire, où c’est désormais établi, il est aussitôt pris en charge par le chef des moukhabarate égyptiens, Fethi Dib, qui se chargera de le présenter à Nasser. Membre de la délégation extérieure du MTLD, les services égyptiens et français mettent tout leur poids pour le présenter comme le chef de l'insurrection algérienne allant jusqu'à lui attribuer la paternité de l'appel du Premier Novembre alors que le rôle mineur des membres de la délégation extérieure est de notoriété publique. Mais comme dans de nombreuses batailles, il y a ceux qui les préparent, ceux qui les font, ceux qui les subissent et ceux qui, tapis dans l'ombre, en guettent les dividendes en cas de succès : Ben Bella a toujours appartenu à cette dernière catégorie. Il le démontre encore aujourd'hui. Pour l'enfant gâté, la détermination, la conviction et l'énergie de Boudiaf déployées pour ouvrir une issue à la crise du mouvement national et remobiliser ses camarades ne sont qu’une agitation d'activiste. C'est monsieur Ben Bella qui aurait tout commandé à partir des résidences cossues des moukhabarate égyptiennes. L’imposture ne fait que commencer. Sans légitimité politique et se cachant derrière les blindés de Boumediène, il se distingue, le 5 juin 1962, lors de la réunion du CNRA à Tripoli en menaçant le président Ben Khedda de lui «enlever publiquement le pantalon». Au diable la légitimité de toutes institutions et la légalité du pouvoir. La culture du pouvoir officiel venait de naître. Elle dure toujours. Auparavant, chargé d’acheminer des armes pour les maquis de l'intérieur, il les détourne, sur ordre de Nasser, au profit des opposants au président Bourguiba qui était en désaccord avec les prétentions du raïs égyptien à régenter l'ensemble des pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord. Il est inutile de dire que ces armes ont été achetées grâce aux sacrifices des travailleurs algériens, en particulier ceux de l'émigration. Le voyage de Ben M'hidi, au Caire, fait au risque de sa vie, ne changera rien à la conduite de l'agent de Fethi Dib. Après une discussion houleuse avec Ben Bella, Ben M’hidi décide de rentrer au pays pour rejoindre, une nouvelle fois, la résistance. Lui aussi rejette catégoriquement le fait que les Egyptiens s'immiscent dans les affaires de la délégation extérieure du FLN et dénonce particulièrement le choix fait par Fethi Dib sur Ben Bella pour en faire l'interlocuteur exclusif du FLN auprès du maître du Caire. Pour le reste et avant d’être intercepté par les Français, en octobre 1956, alors qu'il n’a eu comme seule conduite que de se tenir loin du front de la lutte armée, Ben Bella s'est acharné à semer la division et la démoralisation par le biais de son acolyte Ahmed Mahsas, envoyé en Tunisie pour détruire la Wilaya I, casser du Kabyle et jeter l'anathème sur les résolutions du Congrès de la Soummam. Il a fallu l’intervention radicale du CCE, qui a emprisonné Mahsas, pour arrêter le travail de sape commandité par Ben Bella. Il est vrai que pour quelqu'un que les services égyptiens et français destinent à gouverner l'Algérie, la stratégie de la division était normale. Il fallait se préserver et détruire toute autre alternative. C'est ce à quoi Ahmed Ben Bella s'attelle pendant que d'autres combattent et exposent leur vie. Il veut même délocaliser le Congrès de la Soummam pour que les militants de l'intérieur viennent vers lui à San Remo, en Italie. Après cela, il accusera Abane de l'avoir écarté de la réunion. Le monde à l'envers !

Les séquelles de la falsification
Aujourd'hui, à l'heure d'internet et de la globalisation, les médias éclairent d'un jour nouveau des faits et des pseudo-légitimités, traités jusque-là par les seules officines du système. L'épisode du détournement, par le gouvernement français, de l'avion menant Boudiaf, Khider, Aït Ahmed, Lacheraf, Ben Bella, du Maroc vers Tunis est à méditer. La photographie des cinq insurgés diffusée dans la presse est le produit d'un montage exécuté par un gendarme français à l'aéroport d'Alger qui intima l'ordre à Boudiaf, qui tenait un classeur, de le remettre à… Ben Bella. La surmédiatisation du rôle de ce dernier (on parlait de l'avion de Ben Bella) symbolisée aussi par la question de De Gaule : «Je crois que quelqu'un m'a posé une question sur Ben Bella» alors que personne ne l’avait cité en dit long sur le marketing français mené en faveur de l’homme d’Oujda. Plus tard, porté par l'ivresse du parvenu et, sans doute briffé par Pablo (Michel Rabtis dirigeant trotskyste français et conseiller de Ben Bella), il se hasarde même à disserter sur la théorie de «l'Etat et la Révolution» pour assener au milieu d'un discours prononcé à l'occasion du congrès du FLN (16-21 avril 1964) qu’«il faut combattre sans répit ceux qui affirment que la construction d'un Etat est un préalable à la révolution. Un telle voie aboutirait, si on la prenait, à remettre le pouvoir entre les mains de ceux qui possèdent la culture et l'expérience politique»!! Sans commentaire. Sans états d'âme, le protégé des services français et néanmoins agent direct de Fethi Dib était, tour à tour, respectueux de l'ordre de la France coloniale pour sauver sa peau en enfonçant ses camarades, arabiste contre les Kabyles pour éliminer de dangereux rivaux politiques, islamiste contre la liberté et l’islam populaire des Algériens et contre «ceux qui possèdent la culture » dans l'Algérie indépendante. Pour compléter ce slalom, il arborera longtemps le col Mao avant de replonger dans l’exhibition islamiste. Si le coup d’Etat de juin 1965 a eu raison de la mégalomanie du personnage, le système est toujours dominé par une mémoire de l'indigénat et sur ce point précis, Ben Bella n’est que l’acteur le plus emblématique d’une tendance générale où chacun fait évoluer l’Histoire, non pas en fonction de l’apport de nouveaux documents ou témoignages, mais selon les positionnements politiques de l’heure. Des hommes comme Mohamed Harbi n’échappent pas à ces tentations. Cela fait deux fois qu’il s’en prend au livre écrit par Saïd Sadi sur le colonel Amirouche. A deux reprises, il décoche ses fléchettes par le recours au jugement moral (Saïd Sadi, démocrate, n’aurait pas montré de la compassion avec les victimes du FLN) au lieu de traiter, en tant qu’historien, des faits, des témoignages et des documents constitutifs d'un ouvrage qui déconstruisent certaines de ses analyses. Sujets sur lesquels il était attendu en tant qu'historien : (fausse allégation d’un conflit entre Amirouche islamiste et sanguinaire, et Zighout à propos du contrôle de la ville de Sétif, rôle d’Ali Kafi…). Son annonce de la menace de mort contre Bentobal par Krim est, même nuancée dans une mise au point, une surprise pour quelqu’un qui a tant écrit sur le mouvement national. M. Harbi dit avoir fait cette révélation après avoir pris connaissance du livre testament de Bentobbal auquel il avait eu accès. Ni Omar Boudaoud, ni Ali Haroun (responsables de la Fédération de France du FLN) qui étaient en contact direct avec Bentobal pendant la guerre et qui ont gardé une relation permanente avec lui n’ont entendu l’ancien ministre de l’Intérieur du GPRA leur faire part d'un tel projet. Mieux, dans son ouvrage sur les Accords d’Evian (2), préfacé par M. Harbi, Haya Djelloul rapporte que Bentobal dément toutes les accusations qui ont été portées contre Krim. Se pose alors la question de la fidélité des mémoires de Bentobal qui a été «persuadé», dans une situation d'extrême fragilité morale, de ne publier son témoignage… qu'après sa mort !! Dans le même registre, et sur un autre personnage, monsieur Harbi, «reliftant» le profil de Abdelhafid Boussouf, en donne une image exactement contraire à celle qu'il a décrite auparavant (3). Autre sujet abordé dans la dernière interview accordée à El Watan, ses propres écrits dans Révolution Africaine, au lendemain de l'indépendance. Il se trouve que j’ai pu consulter les archives de cette revue où monsieur Harbi officiait. Ses positions n’ont rien à envier à tous les idéologues de l’époque. Cela d'ailleurs peut se comprendre dans un climat dominé par la violence générale ; mais de là à faire croire que l’organe central du FLN de l’époque était une tribune où s’écrivait librement l’histoire de la guerre, c’est prendre de grandes libertés avec la réalité. Il serait temps que les acteurs de la guerre parlent librement et déposent leurs documents ou témoignages pour un traitement serein et méthodique le moment venu. Faute de quoi, la guerre de Libération continuera d’être la source de nouveaux abcès et drames. Cette tradition qui consiste à accommoder l’Histoire aux conjonctures politiques est dangereuse et contagieuse… Le révisionnisme qui commence à polluer Avril 80 témoigne de la profondeur du mal. La régression générale, produit d’une école squattée par l'idéologie et la diffusion d’une culture d’aliénation, ne pouvait que faire émerger le «leadership» d’un Belkhadem, d’un Mazrag ou d’un Benaïcha avec des faire-valoir kabyle, féministe ou technocrate pour les besoins d'un scénario négateur de l'Histoire et dangereux pour l'avenir. Louisa Hanoune, avec laquelle j'ai eu récemment quelques échanges – aujourd'hui intégrée dans les manœuvres du système et qui garde ses verbiages aux relents gauchistes – résume bien les risques de ces confusions et dérives en déclarant : «Il faut des réformes et pas un changement» !! Tout est dit. Avant de terminer, je tenais aussi à interpeller Saïd Barkat (un délinquant en sursis) prompt à investir la surenchère nationaliste pour lui demander de réclamer que Ben Bella, qui revendique sa filiation marocaine, soit déchu de sa nationalité, dès lors qu’il a dénié à Saïd Sadi et à ses camarades leur qualité d’Algériens. Je ne peux m’empêcher aussi de penser à Monsieur Lahouari Addi qui s’empressera, cette fois encore, de me répondre au motif que je m’attaque à «des symboles qu’on ne traite pas comme des moins que rien». Cette sensibilité à la carte manque de crédibilité car elle ne se réveille que dans des cas bien répertoriés et précis. Son silence devant la haine récurrente de Ben Bella à l’endroit des martyrs de la révolution illustre cette indignation sélective. La trahison des clercs, avait récemment déploré Maître Ali Yahia. Ce n'est pas la première fois que j'interviens à propos des manœuvres politiques qui prennent appui sur le détournement ou la falsification de l'Histoire. Je le sais, il y a, pour moi aussi, une part de subjectivité dans mes interventions. Je me suis néanmoins toujours interdit de manipuler des événements, des témoignages ou des documents. C'est sur ce minimum concret que j'appelle les acteurs, anciens ou nouveaux, à se fédérer. Pour le reste, laissons le jugement à l'Histoire.


N. A. H., député du RCD

Contribution parue au Soir d'Algérie de mardi 31 mai.


1*Amar Ould Hamouda, membre du BP du PPA/MTLD Responsable régional de l’OS
2*Le dernier combat, Haya Djelloul Casbah éditions 2008 Préface de M. Harbi
3*Le FLN, documents et histoire 54-62 M. Harbi G. Meynier Casbah Editions 2004


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دخول الجيش المغربي إلى الأراضي الجزائرية نوفمبر 63 أشعل حرب الرمال


"المراركة حقرونا"..صرخة بن بلة التي ألهبت الجزائريين

جريدة الشروق 2011.09.21 [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] طاهر زبيري


شعباني ومحند أولحاج أوقفا تمردهما وانضما إلى الجيش


المغرب عرض علينا خريطة قال إن حدوده تمتد إلى السنيغال جنوبا

بداية من اليوم ستشرع الشروق اليومي في نشر جزء من مذكرات العقيد زبيري قائد أركان الجيش الجزائري الأسبق في شكل حلقات مسلسلة تتناول في كل حلقة قضية شائكة لم تأخذ نصيبها من التحليل، وفي الحلقة الأولى يقدم زبيري شهادته حول حرب الرمال ضد المغرب في الفترة ما بين (19 أكتوبر ـ 2 نوفمبر 1963)، على أن تتناول الحلقة الثانية قضية إعدام العقيد محمد شعباني نائب قائد الأركان وأصغر عقيد في الجيش الجزائري.


  • بومدين: كل حبة رمل حررناها ملك للجزائر

  • كانت للمغرب أطماع توسعية ليس على حساب الصحراء الغربية وفقط بل حتى في الأراضي الجزائرية وموريتانيا وشطر من السنيغال، وقام المغرب بعرض خريطة علينا ادعى بأنها تمثل الحدود التاريخية للمغرب قبل دخول الاستعمار الفرنسي والإسباني إلى أراضيه، وزعم أن القبائل التي تعيش في هذه المناطق بايعت ملوك المغرب وسلاطينه على السمع والطاعة.
  • ورفض المغرب الاعتراف بموريتانيا كدولة مستقلة في 1960 معتبرا إياها جزءا من التراب المغربي، وكان الجيش الإسباني الذي يحتل الصحراء الغربية حائلا بين المغرب وموريتانيا مما جنب البلدين حربا كان من الممكن أن تنشب بينهما، خاصة وأن الجزائر رفضت في 1963 أن تسمح باستخدام تيندوف كمعبر للجيش المغربي لاحتلال موريتانيا مقابل تسوية المسائل الحدودية مع المغرب، ولم يعترف المغرب بموريتانيا كدولة مستقلة إلا بعد نجاح الوساطة التي قام بها بومدين في 1966.
  • من جانبها ردت الجزائر على المزاعم المغربية بأن "كل الأراضي التي كانت خاضعة للاستعمار الفرنسي وقام جيش التحرير الوطني بتحريرها هي أراض جزائرية"، وكان الوفد الجزائري المفاوض قد طلب خريطة الجزائر الكاملة أثناء المفاوضات مع السلطات الاستعمارية ويبدو أنه تحصل عليها حسبما ذكره لي المرحوم كريم بلقاسم وزير القوات المسلحة في الحكومة المؤقتة خلال الثورة.
  • وسعى الرئيس بن بله لحل هذا المشكل مع المغرب بالطرق السلمية وإيجاد صيغ للتفاهم مع هذا البلد الشقيق، لكن بومدين كان أكثر صرامة في هذه المسألة وقال بوضوح "كل حبة رمل حررناها من أيدي الاستعمار الفرنسي باسم الثورة الجزائرية فهي ملك للجزائر"، وسمعته في إحدى المرات يعلق على المزاعم المغربية في الجزائر وموريتانيا والصحراء الغربية والسنغال بالقول "يحسبون الشعوب قطعان غنم"، أما شريف بلقاسم فرد على هذه المزاعم قائلا "المغرب لم يواصل النضال من أجل استكمال تحرير الأراضي التي اقتطعتها فرنسا منه".
  • وحتى عندما كانت الجزائر في خضم حرب التحرير أحرجنا الأشقاء المغاربة بمطالبهم في الأراضي الجزائرية، وقد رد عليهم فرحات عباس رئيس الحكومة الجزائرية المؤقتة "نحن الآن في حرب، وبعد الاستقلال سيكون هناك مجال للحديث في هذه المسألة والتفاوض بشأنها"، وبنى المغرب موقفه على هذا الكلام.

  • الشرارة التي أشعلت الحرب
  • بعد استقلال الجزائر أرسلنا الجيش إلى المناطق التي يدَّعي المغرب أن لديه حقوقا تاريخية فيها والمتمثلة في بشار وتيندوف وأقصى الجنوب الجزائري، وقام المغرب بعمليات لجس النبض للتعرف على ردة فعل الجزائر، فأرسل عدة أفراد مسلحين من جيشه إلى منطقة حاسي البيضاء الواقعة بتيندوف داخل التراب الجزائري بحجة جلب الماء من هذه المنطقة، فوجهنا لهم تحذيرا من دخول الأراضي الجزائرية لأي سبب كان.
  • وتكرر دخول الوحدات العسكرية المغربية إلى الصحراء الجزائرية رغم تحذير الجيش الجزائري لهم مرتين وثلاثة، مما جعل قيادة الناحية العسكرية الثالثة التي تضم بشار وتيندوف تمنع دخول الجنود المغاربة الذين حاولوا انتهاك حرمة التراب الوطني، ووقع هناك قتلى وجرحى، وحمّل كل طرف مسؤولية هذا الاشتباك للطرف الأخر.
  • ودخل الأشقاء في حرب دامية استمرت لقرابة أسبوعين (من 19 أكتوبر إلى 2 نوفمبر 1963) سميت بحرب الرمال لوقوع رحاها في الصحراء، وجرت عدة معارك بين الجيشين الجزائري والمغربي في حاسي البيضاء وعين تينفوشي وبوعرفة وبني ونيف وتنجدوب وغيرها من المناطق، واستولى الجيش المغربي على بعض الأراضي الجزائرية ولكن مقاتلينا أجبروهم على التراجع.
  • وتولى العقيد بومدين قيادة العمليات الحربية في مركز عسكري متقدم بتلمسان، ومن هناك كان يوجه التعليمات العسكرية إلى قواتنا المسلحة، واستعان بومدين بمحمد الصديق بن يحيى في ملف المغرب وكان يستشيره في القضايا القانونية.
  • ورغم شراسة المعارك إلا أن قيادة البلدين في الجزائر والمغرب لم تكونا متحمستين لهذه الحرب التي اندلعت دون أن يكون هناك سابق تخطيط لها من الطرفين، لذلك حرص البلدان على أن لا تسفك الكثير من الدماء في هذه الحرب.
  • كانت الجزائر حديثة العهد بالاستقلال، والجيش الوطني الشعبي لم يمر عليه سوى عام واحد من تحوله من جيش تحرير إلى جيش نظامي، كان جيشنا منقوصا من ناحية التسليح والتدريب على الحروب التقليدية خاصة في الصحراء المفتوحة والمنبسطة، على عكس حرب العصابات التي كنا نجيدها خاصة في الجبال والغابات والأحراش وحتى المدن بالاعتماد على الكر والفر وإنهاك العدو بهجمات مباغتة وكمائن محكمة.
  • بينما كان الجيش المغربي حينها أكثر تنظيما ودراية بالحروب التقليدية وذلك لأنهم استلموا وحدات عسكرية منظمة من فرنسا بقيادة إدريس بن عمار قائد أركان الجيش المغربي الذي كان ضابطا كبيرا في الجيش الفرنسي، ويعرف جيدا الجزائر والانقسامات التي كانت تعصف بقياداتها.

  • حقرونا
  • تعتبر منطقة بوعرفة جيبا جزائريا ممتد داخل الأراضي المغربية، وهي واقعة في شمال غربي بشار، وسهل موقعها المحاط بالأراضي المغربية من ثلاث جهات على جيش الملك محاصرة قواتنا المرابطة بها، وهاجموا قواتنا من الخلف وتمكنوا من أسر العديد من رجالنا، وكان واضحا عدم التكافؤ بين الجانبين خاصة بعد أن بدأ المغرب في استعمال سلاح الطيران.
  • أما الجزائر فلم تكن تملك قوات جوية بالمعنى الحقيقي باستثناء طائرات هيليكوبتر، وطائرات تدريب، وحتى سرب الطائرات الحربية الذي أرسلته إلينا مصر خلال الحرب لم نسمح باستخدامه ضد أشقائنا في المغرب تجنبا لزيادة ضراوة المعارك.
  • وفي خضم هذه الحرب غير المتكافئة مع المغرب، وخاصة وأن الجزائر كانت تواجه تمرد قوات العقيد شعباني في الصحراء وقوات محند أولحاج وحسين آيت أحمد بالقبائل، وجه أحمد بن بله صرخة مدوية قال فيها كلمة مؤثرة "حقرونا" كانت كافية لتحرك نخوة الجزائريين من أقصى البلاد إلى أقصاها وهب أفراد الشعب عن بكرة أبيهم للاستجابة لنداء الوطن والدفاع عن حرمة أراضيه.
  • كانت مكبرات الصوت المثبتة في ساحات كبرى المدن الجزائرية كعنابة وقسنطينة والعاصمة ووهران تبث الخطاب الحماسي لبن بلة إلى الأمة (لم يكن التلفزيون منتشرا حينها)، وألهبت هذه الكلمة المشاعر الوطنية لأبناء الشعب الذين التحق الكثير منهم بمقر وزارة الدفاع وبجبهات القتال وتم تزويدهم بالبنادق والرشاشات وحتى بالمدافع، وشكلت تسعة فيالق من المتطوعين، في حين بقي الآلاف منهم في الانتظار، لأننا كنا ننتقي العناصر المدربة على السلاح فقط ونرسلهم إلى نواحي تيندوف وعين تيمفوشي وسيدي بلعباس وتلمسان، وفيهم من وصل إلى الحدود المغربية.

  • حتى الأطفال ألهبتهم كلمة بن بله
  • ومن الطرائف التي حدثت خلال هذه الحرب أن طفلا صغيرا في عنابة لم يتجاوز تسع سنوات من عمره كان فوق شجرة يستمع إلى خطاب الرئيس أحمد بن بله عبر مكبرات الصوت وهو شبه عار، إذ أنه لم يكن يرتدي سوى قميص وبدون سروال، ويبدو أنه تأثر بشكل مبالغ فيه لخطاب بن بله وراح يصرخ بشجاعة الرجال:
  • ـ رانا (نحن) هنا يا سيد أحمد.. رانا هنا يا سيد أحمد.
  • وكلما نتذكر هذه الحادثة نضحك كثيرا، ولكنها تعكس قوة التأثير الذي تركه هذا الخطاب الذي كان مؤثرا للغاية جعل كل فئات الشعب تفزع من جديد لمقارعة الغزاة الجدد.
  • حتى النساء أردن أن يذهبن إلى جبهات القتال، فالإحساس بمرارة حقرة الأشقاء بعد ظلم الأعداء جعل الجزائريين يهبون هبة رجل واحد للدفاع مجددا عن أرضهم وكرامتهم ونشوة النصر على الجيش الفرنسي لازالت تراودهم.

  • أولحاج وشعباني يوقفان التمرد ويلتحقان بالجيش
  • تأثير صرخة بن بله كان لها صداها في جبال القبائل وفي صحراء بسكرة، فالعقيد محند أولحاج المتمرد في جبال القبائل نزل من الجبال وضم خمسة فيالق إلى الجيش الوطني الشعبي وقال كلمته الخالدة "الجزائر قبل كل شيء"، أما العقيد شعباني فهو الآخر أوقف عصيانه وأرسل ثلاثة فيالق من قواته لمواجهة الجيش المغربي.
  • وخلال حرب الرمال كنت حديث التعيين كقائد للأركان وتوليت إدارة الأمور بقيادة هيئة الأركان بالعاصمة بالتنسيق مع وزير الدفاع العقيد هواري بومدين الذي كان في جبهات القتال ولم يكن بوزارة الدفاع سواي لتنظيم عملية تجميع السلاح والرجال من المتطوعين وإرسالهم إلى جبهات القتال، وكان أحمد بن بله يزورني من حين لآخر في قيادة الأركان لمساعدتي في هذه المهمة.
  • إلا أن بومدين لم يكن متحمسا لقوافل المتطوعين التي كانت تصل من العاصمة ومن مختلف جهات الوطن إلى جبهات القتال، واعتبر أن النداء الذي وجهه بن بله إلى الشعب جلب الفوضى إلى القوات المسلحة التي هي في غنى عن هذه الأعداد الكبيرة من المتطوعين، على أساس أن الجيش بإمكانه تجنيد المتطوعين حسب احتياجاته ولكن ليس بهذه الأعداد الهائلة.

  • عبد الناصر وكاسترو يدعمان الجزائر عسكريا
  • وتجاوز صدى صرخة بن بله حدود الوطن ليصل إلى عدة عواصم عالمية كالقاهرة وهافانا اللتين أعلنتا وقوفهما إلى جانب الجزائر دبلوماسيا وعسكريا، حيث أرسلت كوبا قوات رمزية مشكلة من نحو 50 مقاتلا إلى الجزائر، كما أرسلت ثلاثة سفن محملة بالأسلحة إلى الجزائر ولكنها وصلت بعد انتهاء الحرب بأسبوع لذلك لم نستعمل هذه الأسلحة ضد المغرب، أما "مصر جمال عبد الناصر" فأرسلت إلينا كتيبة من الرجال وزودتنا بسرب مشكل من ست طائرات مقاتلة ولكننا لم نستعملها خلال الحرب.
  • وهددت مصر وكوبا المغرب بالتدخل العسكري في الحرب إذا واصل اعتداءاته على الجزائر، وبلغ الضغط الدولي على المغرب مداه، حيث طالبت الكثير من الدول الطرفين بتوقيف القتال، وتدخل العديد من الزعماء في العالم للضغط على الملك المغربي الحسن الثاني لوقف عدوانه على الجزائر على غرار "موديبو كايتا" رئيس مالي، وتيتو رئيس يوغسلافيا، ونيكروما رئيس غانا فضلا عن جمال عبد الناصر وفيدال كاسترو اللذين كان دعمهما للجزائر غير مشروط، كما أبدى الاتحاد السوفياتي تضامنه معنا.

  • وقف إطلاق النار
  • الملك الحسن الثاني كان أكثر حكمة من قادة جيشه عندما وافق على وقف القتال والرجوع إلى الخطوط الأولى قبل بداية الحرب، والبدء في المفاوضات بشأن ترسيم الحدود، حيث توجهت مع بن بله إلى مالي لمقابلة رئيسها موديبو كايتا الذي قام بوساطة لحل الأزمة بين الجزائر والمغرب.
  • وبعد وقف إطلاق النار تم تبادل الأسرى بين الجانبين، حيث أسرت الجزائر نحو خمسين أسيرا مغربيا بينما أسر المغرب قرابة أربعين من رجالنا، وفي نفس العام (1963) تأسست منظمة الوحدة الإفريقية التي أقرت مبدأ الحفاظ على الحدود الموروثة عن الاستعمار لتجنب اندلاع مزيد من الحروب بين الدول الإفريقية حديثة الاستقلال بسبب تغير الحدود بعد عقود بل قرون من الاحتلال الأوروبي لإفريقيا.
  • وكما يقول المثل "رب ضارة نافعة" فإن هذه الحرب زادت من سمعة الجزائر على الساحة الدولية وأظهرت قدرتها على حشد التضامن الدولي لصالحها، خاصة وأن زخم الثورة الجزائرية كان لازال مؤثرا في استقطاب تعاطف شعوب العالم مع الجزائر.
  • وزادت هذه الحرب في تلاحم الجزائريين فيما بينهم، وإحساسهم بكينونتهم الواحدة، وإدراكهم للأخطار الخارجية التي تهدد أمنهم ووحدة أرضهم إن بقوا منقسمين، وعجلت حرب الرمال بوقف تمرد العقيد محند أولحاج في منطقة القبائل والذي كان من الرجال الأوفياء لكريم بلقاسم، وحتى العقيد شعباني الذي كان مخاصما لبومدين تناسى خلافاته وانضم مع فيالقه إلى الجيش الوطني الشعبي.
  • كما سرّعت هذه الحرب عملية تحوير الجيش وتطويره من جيش مدرب على حرب العصابات إلى جيش تقليدي مزود بمختلف الأسلحة الحديثة خاصة سلاح الطيران الذي شرعنا في تكوينه وتدريب طيارينا بمساعدة دول صديقة كمصر والاتحاد السوفياتي.
  • ومن جهة أخرى اقتنع المغرب باستحالة اقتطاعه لأجزاء من الأراضي الجزائرية بالقوة المسلحة، رغم أن الجزائر في حرب الرمال كانت دولة في طور التشكل، وجيشها في مرحلة تحول من وحدات قتالية مدربة على حرب العصابات إلى جيش نظامي حديث، ورغم الانقسامات التي كانت حاصلة بين أبرز الزعامات والقيادات الغاضبة من حكم بن بله ومع ذلك تمكن الجيش الجزائري من التصدي للقوات المغربية بفضل التلاحم الشعبي الواسع مع القيادة والدعم الدولي الكبير سواء دبلوماسيا أو حتى عسكريا خاصة من الكتلة الاشتراكية، وبالأخص مصر جمال عبد الناصر، وكوبا فيدال كاسترو


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العقيد محمد الصالح يحياوي يرد على الطاهر زبيري


جماعة بومدين جهّزت طائرة للفرار في حالة فشل الانقلاب على بن بلة

2011.10.23 [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]بقلم العقيد: محمد الصالح يحياوي

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رفضت أن أطعن بومدين في الظهر


يتعرّض الإنسان في مسار حياته إلى فترات دقيقة وحرجة، يشتد فيها التنازع بين العقل والعاطفة، إزاء مواقف محددة، سيما إذا كانت تمس، وفي العمق، قضايا وطنية ومصيرية، ويكثر حولها الجدل، وتتعدد الروايات، إلى درجة أن كل من له ضمير حي، ويحرص على إبداء الحقيقة، خدمة للتاريخ وإنصافا للرجال، يجد نفسه مجبرا على تجاوز الاعتبارات العاطفية، والاحتكام إلى العقل والضمير.


  • وهذا ما حدث لي وأنا أتابع قراءة مذكرات الأخ العقيد "الطاهر الزبيري"، والتي ذكر فيها معلومات غير دقيقة، وأخرى مبتورة مجزأة، تستدعي التصحيح والتوضيح.
  • لقد ربطتني بالأخ الزبيري، علاقات مودة وصداقة متينة، أحكمت عراها سنوات من الكفاح المسلح، أثناء حرب التحرير، ورسّختها بعد الاستقلال قناعات مشتركة، وأهداف واحدة، ناضلنا في سبيل حمايتها وتحقيقها، واتخذنا معا مواقف صريحة وقوية، ضد ما بدا لنا من انحرافات عن مبادئ أول نوفمبر، ومن نزوع إلى التفرّد بالحكم، والسعي لبناء نظام بوليسي جائر. فانتقدنا بشدة ممارسات الرئيس أحمد بن بلة، ثم الرئيس بومدين، عند نزوعه هو الآخر إلى التفرّد.
  • وسأتناول بشيء من التفصيل وقائع ما حدث في هذه الفترة الحساسة من تاريخ الجزائر، متجاوزا كل العواطف، ملتزما الأمانة والصدق.
  • سأروي كل ذلك بنزاهة وتجرد ما استطعت كشهادة، خدمة للتاريخ، وإنصافا للرجال، كما أسلفت، وتطهيرا لنفسي من الإثم، لأن الله عز وجل يقول في كتابه الكريم: "لا تكتُموا الشهادة، ومن يكتُمْها فإنه آثِـمٌ قـلبُه" صدق الله العظيم. ولنبدأ رواية الوقائع من بداياتها الأولى، ليتضح سياقها العام...

  • كيف ساءت العلاقة مع الرئيس بن بلة؟
  • في أواخر سنة 1962 تقرر انتدابي للعمل مع "المكتب السياسي" لتنظيم الحزب وإنشاء هياكله على المستوى الوطني، والتحضير لمؤتمره الأول، ممثلا لولاية الأوراس. وكنت، وقتها، مازلت أمشي بالعِصِىّ، إذ لم أكن قد شفيتُ بعد من جراح معركة الوادي الأحمر، بناحية آريس، بتاريخ 18 جانفي 1962. ولقد أتاح لي هذا التعيين فرصة التعرف على أعضاء المكتب السياسي الذين عُيّنوا في مؤتمر طرابلس، وعلى الكثير من الأطر والقادة من مختلف النواحي والمناطق. وبحكم عملي في الحزب، وكممثل أيضا لولاية "الأوراس"، انتخبتُ في مؤتمر 1964، عضوا في قيادة الحزب.
  • وفي آخر دورة من دورات اللجنة المركزية التي سبقت حركة 19 جوان 1965 ببضعة أشهر، وكان الرئيس "بن بلة" وقتها أمينا عاما للجنة المركزية، يدير أشغالها، ورئيسا للحكومة، ولعدد من الوزارات والهيئات العليا. طلبت منه الكلمة، وتحدثت عن الاعتقالات السياسية، والنفي إلى الصحراء لشخصيات وطنية، وضباط من جيش التحرير الوطني، وكيف تتعامل وتتصرف معهم الشرطة السياسية التابعة مباشرة للرئيس بن بلة.
  • كان يجلس بجانبي الأخ "عبد العزيز زرداني"، والذي حاول الإمساك بسترتي طالبا مني الجلوس. غير أني واصلت الحديث. ثار الرئيس بن بلة، وانتفض واقفا، ورفع الجلسة، وغادر القاعة إلى مكتبه القريب.
  • اتصل في الحين بنائبه، وزير الدفاع، العقيد "بومدين"، وكانت تجمعني به علاقة احترام، فأنا الذي استقبلته، في الحدود الجزائرية ـ التونسية، في أواخر صائفة 1962، بعد أن تأزمت العلاقة بين قيادة الأركان والحكومة المؤقتة، وجئت به إلى مدينة خنشلة، حيث قضينا الليل هناك، في منزل المناضل "بوزيان"، وفي الصباح غادرنا إلى مركز الولاية القريب من غابة الابراجة، حيث كان قائد الولاية "سي الطاهر الزبيري" في الانتظار.

  • كانت فرصة ثمينة، أني تعرفت وتحدثت طويلا مع قائد الأركان الذي أصدرت الحكومة المؤقتة قرارا بعزله.
  • قلت، اتصل به بن بلة، ليقول له، إنه لا يريد أن يراني مرة أخرى في اللجنة المركزية. كان الرئيس بن بلة يعتقد خاطئا أنني تدخلت بإيعاز أو تنسيق مع قيادة الجيش، التي لم يكن يطمئن لها، ولا هي تطمئن له. وفي اليوم الموالي، اتصل بي "سي الطاهر"، وأخبرني أن بن بلة لا يريد أن يراني مرة أخرى في قيادة الحزب، وأن بومدين يقترح عليّ العودة إلى الجيش كنائب للعقيد عباس بكلية شرشال؛ حيث كان العقيد عباس، رحمه الله، من أعز أصدقائي وأخلصهم، حتى وافته المنية.
  • تم وضعي في الصورة عن حركة 19 جوان 1965 أسابيع قبل اليوم الموعـود. وكنت أشرف، بنفسي، على تحضير الوحدة التي تقرر أن تتجه للعاصمة، للمشاركة في كتابة فصل جديد من تاريخ الجزائر.
  • لم أكن مع المجموعة التي ذهبت إلى »فيلا جولي"، مقر إقامة الرئيس بن بلة، في ذلك الوقت، بل قمتُ تلك الليلة بمهام أخرى داخل العاصمة، وكنت مع الوحدة التي قدتها قريبا من الجميع. أما الذين ذهبوا إلى "فيلا جولي"، فهم:

  • العقيد الزبيري، والعقيد عباس، والرائد السعيد عْبيد، وأحمد دْراية.
  • كيف كانت الأوضاع في تلك الليلة؟
  • (ليلة 19 جوان 1965)
  • في سنة 1978، زارني في مقر الحزب، بعد وفاة بومدين، وكنت وقتها المسؤول التنفيذي المكلف بالحزب، زارني الأخ "الطيّبي العربي"، عضو مجلس الثورة، ووزير الفلاحة سابقا رحمه الله.
  • قال لي أنتم تجهلون شيئا مهمّا وخطيرا يتعلق بليلة 19 جوان 1965، ليلة أن كنتم تقودون عملية من أخطر العمليات، وكنتم بين الحياة والموت... كانت مجموعة أخرى من أعضاء مجلس الثورة، وذكر لي أسماء: بومدين، ومدغري، وبوتفليقة، وقائد أحمد، والشريف بلقاسم، وشابو عبد القادر. قال لي إن هؤلاء أحضروا طائرة في المطار العسكري ببوفاريك، تحسّبا لأي طارئ، قد يُفشل العملية.
  • لم يتعرّض "الزبيري" لهذا، غير أن الطيّبي العربي كان واثقا مما يقول. ولقد أكدتْ هذه العملية، مرة أخرى، أننا كنا نحن قيادات الداخل، نصنّف دائما في خانة الأنصار وغيرنا في خانة المهاجرين، فهم الأمراء كما قال "أبوبكر الصديق" رضي الله عنه.

  • أزمة خريف 1967
  • قبل الفاتح من نوفمبر1967 بأسابيع، جاءني إلى "بشار"، قائد الأركان العقيد سي الطاهر الزبيري، مصحوبا بالرائدين: "زرقيني" و"بوتـلة". وكان الثلاثة غير راضين عن وضع قيادة الأركان والصلاحيات الممنوحة لها، وعلاقتها بوزارة الدفاع. فضلتُ أن لا أشارك في الحديث، فأنا لم أكن أطمئنّ لبعضهم. ولم يقل لي العقيد سي الطاهر، طيلة وجوده بالناحية الثالثة، أيّ شيء عن خططه، وعمّا كان ينوي القيام به في الفاتح من نوفمبر.
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  • وقبل أيام قليلة من التظاهرة، اتصل بي الملازم الأول "عيسى بخوش"، قائد مدرسة المدفعية "بالتلاغمة"، والذي كان بالعاصمة مع المجموعة التي ستشارك في الاستعراض العسكري. قلت اتصل بي وأخبرني أنهم تسلموا أمرا من قيادة الأركان للمشاركة في الاستعراض العسكري بالذخائر الحية، وهذا شيء خطير، وغير مألوف من قبل، فنبّهته للمخاطر، وحذّرته من سلوك هذا الطريق... كل هذا وقائد الأركان لم يقل لي شيئا.
  • كان الملازم الأول عيسى بخـوش من أعز زملائي، حتى اليوم. عمل مرؤوسا لي بالمنطقة الأولى، ثم بالمنطقة السادسة "النمامشة"، بولاية الأوراس، وكانت هذه الأخيرة من أخطر وأصعب المناطق بالأوراس، وأنا مازلت أعاني من جروح معاركها حتى اليوم...
  • أما غياب قائد الأركان يوم الفاتح من نوفمبر عن الاستعراض، فقد أخبرني به العقيد عباس، رحمه الله. وبعد حادثة الغياب هذه، كلف الرئيس بومدين، العقيد عباس، والرائد بن سالم، بالانضمام إلى قائد الناحية الأولى، الرائد "السعيد أعبيد"، للمشاركة في تهدئة الأوضاع التي بدأت تطفو على سطح الأحداث، وجَعْـل حد "للشوشرة" داخل الجيش، والتي أثمرت فيما بعد حركة سميت بـ: حركة "14 ديسمبر"، التي قادها العقيد "الزبيري".

  • ذهاب العقيد زبيري إلى ثكنة "اللّيدو" والاحتماء بفيلق الدبابات
  • كان أول من أخبرني بذهاب قائد الأركان، إلى ثكنة "الليدو"، حيث يوجد الفيلق المدرع بقيادة الملازم الأول "العياشي"، هو الرئيس بومدين بنفسه، في الثالثة أو الرابعة صباحا، عن طريق الخط المباشر. وكنت في مقر قيادة الناحية العسكرية الثالثة ببشار. وقال لي، وقتها، إن سي الطاهر الزبيري قد ذهب إلى ثكنة "الليدو"، بضواحي العاصمة، عند صهره العياشي. وأردف قائلا: "...لقد كلفت عباس وبن سالم وعْـبَيد، بالاتصال به، وأرجو أن تكونوا يقظين، فالناحية الثالثة وضْعها حساس. وسأعاود الاتصال بك عندما يعود عباس ومن معه من عند سي الطاهر".
  • وفعلا عاود الاتصال بي، في نفس اليوم، ليخبرني أن سي الطاهر، عـاد إلى منزله. وطلب مني العقيد بومدين القدوم إلى العاصمة للمشاركة في المساعي التي يبذلها الإخوة الثلاثة المذكورون آنفا.
  • لذلك، فأنا لم أذهب قط مع الإخوة الثلاثة إلى»الليدو"، كما قال العقيد الزبيري. وقد عملنا، نحن الأربعة، كل ما في وسعنا لتفادي المحظور، ونجحنا في إقناع الزبيري، بإبعاد فيلق المدرعات إلى ولاية" الشلف".( الأصنام وقتئذ).
  • لم يكن أيّ منا، نحن الأربعة، يفكر في عمل عسكري. فلا بن سالم الذي كانت وحداته على بعد أمتار من الرئاسة، ولا السعيد عـبيد الذي كان هو أيضا قاب قوسين أو أدنى من مقرات القيادة، ولا عباس الذي كان على بعد بضعة كيلومترات من تواجد بومدين، ولا يحياوي الذي كانت جل وحداته بمنطقة تندوف، على بعد 2000 كيلومتر من العاصمة.
  • كانت مواقفنا نحن الأربعة متعاطفة مع سي الطاهر سياسيا، وكنا نصارح بومدين بهذا، كما كان يفعل سي الطاهر. ولم نكن ندفعه ثم نتخلّى عنه، كما يقول، خاصة في حديث له مع قناة الجزيرة، وهذا شيء لم يحصل أبدا.
  • وطيلة أيام الأزمة التي استمرت أسابيع طويلة،. تجنبت لقاء سي الطاهر على انفراد. كنت أعلم انه ينسق مع العُقـداء القدامى، ومنجلي، ولعروسي وآخرين، وهم كثرة، وكان فعلا يخطط مع هؤلاء لعملٍ ما، كما أكد ذلك "ملاح".
  • قلت تجنبت لقاء سي الطاهر على انفراد. ما عدا مرة واحدة، تلاقينا فيها أمام منزلي، قبل منتصف الليل، وطلب مني أن نذهب معا إلى منزله فذهبنا. وكان منزله دائما مليئا بأناس لا أعرفهم، أو لا أطمئن إليهم. جلسنا معا في غرفة منفصلة عـن الصالون، وكان ثالثنا الملازم موسى احواسنية رحمه الله. تحدثنا عن الأوضاع. وفهمت أنه يريد التغيير، ولكن ليس لديه برنامج واضح، لم يقل وقتها ما لونه، وما شكله، وما طعمه.
  • قلت له في تلك الليلة بصراحة، وأظنه يتذكر الآن ذلك جيدا.. قلت له: "سي الطاهر، ليس من طبعي الخيانة والغدر؛ بومدين وضعني على رأس قيادة ناحية من أخطر النواحي، ولا يمكن أن أطعنه في الظهر!".
  • ربما كنت في قرارة نفسي لا أعتقد هذا.. ولكني قلته بقصد إبعاد سي الطاهر عن هذا التفكير.. غضب مني وقال لي: هذا أنت؟ وافترقنا.
  • سي الطاهر يقول كنت أنتظر المدد من يحياوي ونزار، ومرات من عباس، وبن سالم، واعبيد.. كيف ينتظر المدد من يحياوي الذي سمع منه هذا الكلام، وتبعد وحداته عن العاصمة بـ2000 كم؟
  • ....يتبع


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الرائد عمر ملاح القائد الميداني لحركة 14 ديسمبر 1967: دبرت محاولة اغتيال بومدين لأنه كان يحمي ضباط فرنسا

| المحرر | 10 أكتوبر 2011| تاريخ| تعليقات { 4 }

القائد الميداني لحركة 14 ديسمبر 1967
الرائد عمر ملاح للشروق: دبرت محاولة اغتيال بومدين لأنه كان يحمي ضباط فرنسا
2011.10.09 مصطفى. د

حركتنا كانت انقلابا عسكريا وبومدين هدّدني إن لم أخلف شعباني في منصبه

شدد الرائد عمار ملاح، نائب قائد الأركان في 1967، على أن حركة 14 ديسمبر 1967 التي قادها العقيد الطاهر زبيري ضد العقيد هواري بومدين كانت انقلابا عسكريا بكل ما تحمله هذه الكلمة من معنى، وأن الهدف من هذه العملية التي كان قائدها الميداني تحت إشراف العقيد زبيري، كانت تهدف بكل وضوح إلى تنحية العقيد هواري بومدين من السلطة دون تفاوض.

ورفض الرائد عمار ملاح، في اتصال هاتفي مع الشروق، ما جاء في مذكرات العقيد زبيري بأن حركة 14 ديسمبر كانت تهدف لإجبار بومدين على التنازل عن جزء من صلاحياته لمجلس الثورة، مؤكدا أن ما كان متداولا بين قادة حركة 14 ديسمبر وعلى رأسهم العقيد زبيري هو “تنحية بومدين”، وقال مستهجنا، “بومدين يستحيل أن يقبل أن يأتي إلى زبيري للتفاوض معه حول السلطة”
بومدين هدّدني إن لم أتولّ مكان شعباني
وبالنسبة لقضية العقيد محمد شعباني، قائد الولاية السادسة التاريخية (الصحراء) والذي عيّن نائبا لقائد الأركان دون أن يلتحق بمنصبه الجديد، ذكر عمار ملاح أنه في أفريل 1964 عيّنه بومدين قائدا للناحية العسكرية الرابعة (ورقلة) التي كان شعباني ممسكا بزمامها، كما عيّن الشاذلي بن جديد مكانه (ملاح) في قيادة الناحية العسكرية الخامسة (قسنطينة).
وأشار الرائد عمار ملاح أن العقيد بومدين استدعاه إلى مكتبه بعدما لم يلتحق بقيادة الناحية العسكرية الرابعة وسأله باستنكار، “عيّنت في ورقلة لماذا لم تمشي؟”، فرد عليه الرائد ملاح “حلّوا مشكل شعباني”، ملمّحا إلى أنه لا يريد أن يصطدم مع العقيد محمد شعباني، فقال له بومدين متوعدا: “أعطيتك أمرا… يطبّق”.
وأضاف ملاح، أنه ذهب رفقة الرائد عبد الرحمان بن سالم (نائب قائد الأركان ورئيس الحرس الجمهوري) إلى العقيد شعباني وطلبا منه الصعود إلى العاصمة (الالتحاق بمنصبه في قيادة الأركان) لكن شعباني رفض، فأسرّ له ملاح منفردا “سيهجمون عليك”.
وتساءل عمار ملاح عن السبب الذي جعل العقيد زبيري لا يذكر في مذكراته اللقاء الذي جمعه بالعقيد شعباني في بلدة القنطرة (بسكرة بالقرب من باتنة) بحضوره شخصيا، بالإضافة إلى إبراهيم زروال، واجتمعوا واقفين وحاول العقيد الطاهر زبيري إقناع العقيد شعباني للصعود إلى العاصمة ولكن بدون جدوى.
وشدد الرائد ملاح على أن مخطط العملية العسكرية ضد العقيد شعباني انطلقت من محورين، الأول من بوسعادة والجلفة بقيادة الرائد سعيد عبيد قائد الناحية العسكرية الأولى والرائد أحمد عبد الغني، أما المحور الثاني قسنطينة باتنة بسكرة بقيادة الرائد الشاذلي بن جديد ومحمد عطايلية، ودخلت هذه القوة مقر قيادة شعباني في بسكرة وخطب عطايلية أمام أعيان بسكرة وقال ما قال.
العقيد زبيري رفض تلقي الأوامر من الرائد شابو
على صعيد آخر أوضح الرائد عمار ملاح، الذي يعد حاليا عضوا في مجلس الأمة عن الثلث الرئاسي، أن العقيد الطاهر زبيري لم تكن له صلاحيات واضحة منذ تعيينه قائدا للأركان في 1963، وأضاف أن “كافة القادة العسكريين كانوا يتلقون الأوامر من الرائد عبد القادر شابو الأمين العام لوزارة الدفاع بأمر من بومدين”.
وبرر ملاح سبب تهميش بومدين للعقيد زبيري “لأنه لن ينسى أن العقيد زبيري عيّنه بن بله قائدا للأركان عندما كان بومدين في روسيا”، وأضاف ملاح: “قلنا للزبيري: مادام عيّنك بن بله إذهب إلى العاصمة، وكان حينها في باتنة فرد علينا: عينوني حتى ندخل في بعضنا البعض”.
وأضاف أنه في اجتماع لقادة الجيش في أفريل 1967 تساءل العقيد زبيري مستهجنا “كيف يتلقى عقيد أوامره من رائد”، وكان يقصد الرائد عبد القادر شابو الذي كانت صلاحياته تفوق صلاحيات قائد الأركان، رغم أنه أعلى منه رتبة. وبحسب عمار ملاح، فإن قادة النواحي العسكرية اتفقوا على ضرورة تحديد صلاحيات قائد الأركان، باستثناء العقيد أحمد بن شريف، الذي قال إنه “لم يحن بعد تحديد صلاحيات قيادة الأركان”.
في هذا الخصوص، أكد عمار ملاح أن العقيد الطاهر زبيري لم يمارس صلاحياته كقائد أركان فعلي إلى غاية أزمة 1967، مستدركا أنه عندما عاد من دورة تكوينية من الاتحاد السوفياتي عيّن نائبا لقائد الأركان مكلف بالتنظيم. أما الرائد محمد زرقيني فعيّن نائبا لقائد الأركان مكلف بالعمليات وفي هذه المرحلة بدأت صلاحيات قيادة الأركان تتوضح أكثر.
بومدين كان يحمي ضباط فرنسا
وأشار ملاح إلى أن الضباط الفارين من الجيش الفرنسي كانوا أحد الأسباب التي أدت إلى الانقلاب العسكري على بومدين لأنه كان يوفر لهم الحماية. وأضاف، “أن بومدين في أحد لقاءاته بمجموعة من الضباط، كان من بينهم عبد المجيد شريف (كان قائدا للناحية العسكرية الأولى برتبة جنرال) والنقيب محمد علاق والملازم الأول اليمين زروال والمتحدث وآخرون، أثار أمامه عبد المجيد شريف ما كان يُعرف بيننا بضباط فرنسا، فردّ عليه بومدين “لو أسمع واحدا يتكلم عن ضباط فرنسا سأرمي حجرة في فمه”.
وعن السر وراء عداء قدماء ضباط جيش التحرير والضباط المتخرجين من الأكاديميات العسكرية في المشرق العربي للضباط الفارين من الجيش الفرنسي، قال عمار ملاح “هناك من الضباط الفارين في الجيش الفرنسي من ارتكبوا جرائم في حق الشعب الجزائري إبان حرب التحرير ولم يلحقوا بالثورة إلا في السنوات الأخيرة قبل الاستقلال”، وأشار إلى أن “مدير المخابرات قاصدي مرباح كان يعرفهم بالاسم منهم الرائد بورجل وبوشنافة”.
ونفى ملاح ما قاله العقيد زبيري عن الضباط الفارين من الجيش الفرنسي بأنهم كانوا أكثر كفاءة من قدماء ضباط جيش التحرير، وقال “الضباط الفارين من الجيش الفرنسي لم يتخرّجوا من معاهد عسكرية فرنسية بل جلهم ذوي رتب بسيطة”.


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وأعطى ملاح مثالا عن الدورة التدريبية في الاتحاد السوفياتي التي كان على رأسها ملاح ونائبه آيت مسعودان (قائد القوات الجوية) رفقة 34 ضابطا ساميا أغلبهم من الضباط الفارين من الجيش الفرنسي مثل بوزادة وسليم سعدي وخليل وعبد المجيد علاهم وعبد الحميد لطرش وشقيق عبد القادر شابو وأنه عندما قدم لهم في روسيا تمرين حول كتيبة الدفاع، سأل ملاح عبد المجيد علاهم حول هذه المسألة فنفى معرفته بالحل، ونقل ملاح هذا الكلام لبومدين وأضاف “الضباط الفارين من الجيش الفرنسي لم يكونوا أحسن منّا مستوى”.
ثلاثة فيالق تحركت والفيلق الرابع استجاب لأوامر سعيد عبيد
وبالنسبة لمعركة العفرون قال الرائد عمار ملاح إن العقيد بومدين استدعاه بصفته نائبا لقائد الأركان رفقة الرائد محمد زرقيني نائب قائد الأركان في أواخر نوفمبر 1967 وقال لهم “ابتداء من اليوم كل الأوامر تصدر من عندي وتحسّبوا للتشويش الذي يقوم به كمال الورتي (نقيب في قيادة الأركان) وشريف مهدي (الكاتب العام لهيئة الأركان)”، فردّ عليه زرقيني “حضرة العقيد لا يوجد”، ولكن بومدين كان واثقا مما يقول، وكان محقا لأن الورتي وشريف مهدي كانا من أنصار زبيري وكانا يتحركان في هذا السياق، وفهمت من كلام بومدين أن العقيد زبيري لم يعد قائدا للأركان، خاصة عندما قال: “ابتداء من اليوم…”.
وفي تلك الفترة أكد الرائد عمار ملاح أن العقيد زبيري قال لهم “نحيو بومدين”، مشددا على أن زبيري حينها لم يتحدث أبدا عن التفاوض مع بومدين، وأن تنحية بومدين بالقوة هو الكلام المتداول بين الضباط الموالين للعقيد زبيري، وقال “بومدين كان ديكتاتورا حقيقيا لكن مشكلتنا كانت مع ضباط فرنسا وبومدين هو من كان يحميهم ويسيرهم وفي مؤتمر الحزب في 1964 قال لنا: إذا خيّرت بين المتعاونين الأجانب وضباط فرنسا سأختار ضباط فرنسا”.
اتصل العقيد زبيري بالرائد عمار ملاح (يوم 12 ديمسبر 1967) وأمره بتحريك الفيالق إلى قيادة الناحية العسكرية الأولى في البليدة، لكن ملاح، بحسب قوله، طلب منه مزيدا من الوقت، لأن تحريك الفيالق يتطلب تحضيرات تستغرق وقتا، وكانت هناك أربعة فيالق معنية بهذا التحرك واحد مشاة في المدية والثاني ميكانيكي بمليانة (عين الدفلى) واثنان في الشلف أحدهما مدرع والثاني مشاة.
ذهب عمار ملاح لتبليغ الأوامر إلى العياشي حواسنية قائد الفيلق المدرع في الشلف وإلى قائد فيلق المشاة أيضا، فاستجاب العياشي حواسنية وأراد إخبار سليمان لكحل فرفض ملاح وقال له “هذا خان شعباني فكيف لا يخوننا”، لكن العياشي كان يثق فيه وأخبر لكحل على 10:30 فأسرع لكحل إلى بومدين وأخبره بخطة تحرك الفيالق.
أمر سعيد عبيد قائد الناحية العسكرية الأولى الفيالق الأربعة بعدم التحرك، فاستجاب فيلق المشاة بالشلف لهذا الأمر، ورفض التحرك فانتقل ملاح إلى مليانة فوجد عبد السلام مباركية قائد الفيلق الميكانيكي مترددا بعدما جاءه أمر سعيد عبيد بعدم التحرك، فقال له ملاح لماذا لا تتحرك، فقد كانت مليانة قريبة من البليدة؟، فقال له جاءتني أوامر من سعيد عبيد بعدم التحرك، فلن أتحرك. لكن عندما تحدث ملاح إلى جنود الفيلق استجابوا له، كما أن مباركية عندما علم أن فيلق المدية بقيادة معمر قارة تحرك هو الآخر قرر المضي معنا إلى البليدة.
وعبر عمار ملاح عن عدم معرفته الأسباب التي جعلت سعيد عبيد لا يقف معهم في عملية الانقلاب على بومدين، ملمحا إلى أن تفاصيل هذه المسألة يعرفها العقيد زبيري ويحياوي وبن سالم والعقيد عباس وسعيد عبيد، على أساس أن هؤلاء الضباط الخمسة هم الذين كانوا معنيين بأيّ عملية ضد العقيد بومدين ولكن تفاصيل حدثت بينهم قال ملاح إنه يجهلها.
معركة العفرون
ويروي الرائد عمار ملاح مجريات معركة العفرون كما عاشها وقال “الفيلق المدرع بقيادة العياشي حواسنية كان أول الواصلين إلى العفرون، رغم أنه كان أبعد فيلق عن العاصمة والدبابات تحمل على شاحنات إلى ميدان المعركة ولا تجري في الطريق، وعندما وجدنا جسر بورومي مغلقا سرنا على السكة الحديدية وقتلنا 4 جنود موالين لبومدين وبدأت الاشتباكات”.
وأشار ملاح إلى أن قوات بومدين لم تكن كثيفة في البداية ولكن بدأ يصلهم المدد من عدة جهات، وأضاف “من الصباح إلى المساء ونحن نقصف بالدبابات والمدافع والطائرات ثم وصلت قوات المظليين وتم إنزالها جوا على جبل عفرون، كما وصلت قوات الشاذلي بن جديد من الغرب (الناحية العسكرية الثانية وهران) وتم تطويقنا”.
في تلك الليلة جاء العقيد زبيري لتفقد قواته وقدم له ملاح تقريرا حول المعركة وقال له “إبقَ معنا لأن الدعوة فشلت”، فرد عليه العقيد زبيري “تراجعوا إلى حمام ريغة وسأنظر ماذا فعل العقيد عباس والرائد يحياوي”.
وأوضح عمار ملاح، أنه طلب من القوات التي بقيت معهم بعد انسحاب فيلق المدية التحصّن بالجبال وعدم تدمير الدبابات والمدرعات التي بين أيديهم.
القدر أفشل محاولة اغتيال بومدين
اعترف الرائد عمار ملاح أنه من كان وراء التخطيط وتنفيذ محاولة اغتيال العقيد هواري بومدين رئيس مجلس الثورة والتي نجا منها بأعجوبة. وكشف أن رئيس الحرس الجمهوري والشرطة، أحمد دراية، ومحافظ الشرطة، كمال حمودي، كانا مؤيدين لفكرة تنحية بومدين دون أن يكون هذا الأخير على علم بذلك.
وعندما دخل عمار ملاح إلى العاصمة بعد معركة العفرون، اتفق مع ضابط من عين ياغوت بباتنة يدعى زروال (ليس اليمين زروال) بتدبير عملية لاغتيال بومدين، وكان مع زروال جماعة من الأوراس من بينهم بورزان من عين البيضاء (أم البواقي) من الحرس الجمهوري.
وحتى إذا وقع الاشتباك مع الحرس الجمهوري قام زروال بقلب الرصاص داخل رشاشاتهم باستثناء رصاصتين ركبتا بشكل صحيح، وبدل أن يأخذ بورزان الرشاش السليم أخذ أحد الرشاشات مقلوبة الرصاص، وعندما حان وقت التنفيذ أطلق بورزان رصاصتين على بومدين الأولى أصابت شاربه والثانية أصابت سائقه “الطيب” في الكتف وبعدها تعطل الرشاش ولم يتمكن من إفراغ ذخيرته على السيارة التي كانت تقل بومدين. أما الرجل الثاني المكلف بالعملية، فقد اشتبك مع الحرس الجمهوري وقتل في الحين.

كنت أخشى أن يقتلني دراية في السجن ليدفن سرّه
استطاعت قوات بومدين أن تكتشف مخبأ عمار ملاح وتعتقله، لكن عمار ملاح يؤكد أن الأمن العسكري بحث معه ولم يعذبه، لكنه تعرّض لتعذيب شديد على يد أحمد دراية قائد الحرس الجمهوري والشرطة، وقال “كنت واثقا أن بومدين لن يقتلني (رغم علمه بتورطه في محاولة اغتياله) ولكني كنت أخشى أن يقتلني دراية في إحدى الزنزانات حتى لا تنكشف حقيقة علاقته بحركة 14 ديسمبر 1967 لبومدين”.
وتحدث ملاح عن التعذيب الشديد الذي تعرّض له في السجن والظروف اللاّإنسانية التي عاشها، وقال بتأثر “طلبت من القاضي العسكري محمد تواتي أن يسمح بإعطائي ملعقة حتى لا آكل مثل الحيوان فرفض، خوفا من أن أستعملها في محاولة الهرب من السجن، فقلت له إذن أعطوني ملعقة من البلاستيك لكنهم رفضوا، فاتخذت من “قابصة شمة” ملعقة للأكل”.
الرائد عمار ملاح نائب قائد الأركان السابق

كان مجاهدا في الولاية الأولى الأوراس بالمنطقة الثانية في جبل شيلية تحت قيادة محمد الصالح يحياوي، ورُقي إلى رتبة رائد في جيش التحرير وعضو قيادة الولاية الأولى الأوراس تحت قيادة العقيد الطاهر زبيري.

بعد الاستقلال أصبح قائدا للناحية العسكرية الخامسة (قسنطينة) بعد أن رقي العقيد زبيري قائدا للأركان، ثم عيّن قائدا للناحية العسكرية الرابعة (ورقلة) خلال عملية القبض على العقيد محمد شعباني في 1964.

كان على رأس دفعة متكونة من 34 ضابطا ساميا ذهبوا إلى الاتحاد السوفياتي لتلقي دورة تكوينية، ولما عاد إلى أرض الوطن عيّن نائبا لقائد الأركان مكلفا بالتنظيم.

كان من المفروض أن يقود الدفعة الثانية من القوات الجزائرية المتجهة إلى الجبهة المصرية للمشاركة في حرب الاستنزاف ضد اليهود، لكن اندلاع أزمة زبيري مع بومدين جعلته ينحاز إلى صف زبيري، وبعد فشل عملية الانقلاب على بومدين دبّر عملية فاشلة لاغتياله.

ألقي عليه القبض في 1968 وحكم عليه بالإعدام، وبعد وفاة بومدين وصعود الشاذلي إلى الحكم في 1980 أصدر قرارا بالعفو عنه بعد نحو 12 سنة قضاها في السجن. عيّنه الرئيس عبد العزيز بوتفليقة عضوا في مجلس الأمة عن الثلث الرئاسي.

تجدر الإشارة، إلى أن عمار ملاح من المجاهدين القلائل الذين لهم عدة إصدارات وكتب عن الثورة وما بعد الثورة أبرزها كتاب “حركة 14 ديسمبر 1967″.


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Djamed El-Dine Habibi : le Chiffre de un million et demi de martyrs est un mensonge que l’on paye cher.

September 19, 2011
By onelas


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L’ex sénateur et combattant Djamel eddine habibi

L’ex sénateur et moudjahid Djamal El-Dine Habibi était l’invité du journal hebdomadaire El Khabar Hebdo du 28 août 2009. Le débat est on ne peut plus passionnant. Difficile de lire le compte rendu des journalistes sans éprouver le besoin lancinant de partager les « vérités» du combattant. Par ailleurs, devant l’erreur qui empêche la vérité de poindre à l’horizon, l’on ne peut que saluer le courage de l’homme; il ne mâche pas ses mots, parle cru, creuse dans les tempêtes, pour reprendre le propos d’un poète.

En ces temps de disette où l’on conjugue le pesant de poudre des hommes en «avoirs bancaires», en ces temps où personne ne daigne labourer ses jachères, l’on ne peut qu’encourager et saluer toute lueur de vérité, fût-elle fluette; pourvu qu’elle soit susceptible d’éventrer la nuit et d’y ébruiter le crime échafaudé à la barbe de la dignité des hommes et au nez de toute humanité. Nos intellectuels en ripaille, s’ébattant dans les alcôves du sérail à se dénoyauter tel le fruit de leurs âmes, ces poltrons de tout acabit, n’ont plus l’envie de dire, de dénoncer, de revendiquer. N’est-ce pas qu’un peuple se meure lorsqu’il arrête de rêver et donc de revendiquer, d’aspirer à davantage de droits, d’apprendre de ses erreurs et d’accrocher à son futur de grands idéaux subséquemment. Djamal El-Dine Habibi crache le feu. Dit-il vrai ou faux? Est-il à la hauteur de ce qu’il énonce? Les questions sont à chercher ailleurs. Que l’on soit d’accord avec ses dires ou pas, le combattant aura eu néanmoins le mérite d’avoir dit… l’inédit; il aura eu le mérite d’être sorti des sentiers battus. Du reste, c’est d’ores et déjà à méditer.



L’attaque du Maroc en 1963 : une pure invention de Ben Bella :





Djamal El-Dine Habibi ne va pas par trente six chemins crever le premier abcès : « Ceux qui ont pris le train de la révolution aux
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Le colonel Mohand Oulhadj


derniers moments sont ceux qui aujourd’hui se targuent d’avoir libéré le pays; ils gouvernent, règnent en maîtres incontestables, s’approprient tous les droits d’aînesse ». Mieux, pour lui l’attaque du Maroc en 1963 n’a jamais eu lieu; c’est un pur mensonge adossé à l’histoire du pays : « Le conflit était à son apogée entre la wilaya 4 et la wilaya 5. La Kabylie sous les ordres du colonel Oulhadj. Il fallait un subterfuge et Ben Bella savait que le colonel Oulhadj était féru de patriotisme et d’amour pour la patrie. Il n’accepterait jamais, aussi soient divergentes ses opinions sur la manière de gouverner, que l’on attaque l’Algérie. En 1963 Ait Ahmed lui-même était armé et habillé en militaire. Et à l’occasion, j’ai envie de dire qu’Ait Ahmed est le dernier rempart du nationalisme. Jamais il n’aurait accepté que l’on attaque son pays, car s’il y en avait eu une attaque il aurait été le premier à rejoindre les frontières pour défendre sa patrie. Dans nos frontières avec le Maroc pour répondre, nous avions 6000 soldats postés et prêts à réagir à tout moment. Le Maroc n’avait ni l’ambition de s’élargir, ni n’en avait les moyens. D’ailleurs nous ne suscitions pas les envies au point que l’on dit. C’était simple, Ben Bella voulait tuer dans l’œuf les aspirations et les dissensions sur le pouvoir alors très contesté, d’autant plus que le GPRA avait réalisé les objectifs qu’il avait tracés ». Plus loin, le combattant, un tantinet en colère lâche le leste à sa langue : « Je le dis et je le répète, l’Algérie est condamnée à ne jamais quitter son arrêt; elle en est ligotée. Et s’il ne soufflait pas un nouveau souffle révolutionnaire, le train de l’histoire transportant notre pays demeurerait à tout jamais à l’attente du signe de départ qui ne viendra jamais bien évidemment. Nous sommes en train de vivre une autre saison du film de la colonisation française. Ils parlent de l’université, de l’éducation, de tout, comme d’une maison privée. Cela veut tout bonnement dire que les portes de la réussite sont fermées pour les enfants d’ouvriers et de fellahs. La privatisation telle qu’elle est conçue en hauts lieux n’est que pour entériner la domination du déjà dominant et le retour du colonialisme. Moi je dis, arrêtons le féodalisme, car ces mercenaires se sont accaparés de tout et en ont tout vendu sans qu’ils supervisent le propriétaire de ces biens : le peuple. Où va ce pays? La révolution algérienne a été minée de l’intérieur grâce à des gens qui lui sont étrangers et qui gouvernent maintenant. Il y a deux sortes de victimes, celles assassinées par la France et celles assassinées par le clan de Oujda et de Gardimaou (frontière Tunisie)».



Les un million et un demi million de martyrs : un mensonge que l’on paye très cher :

L’invité du « débat» revient encore à la charge, le mensonge le fait baver. Cette, il pousse trop loin; il emprunte un sentier encore plus abrupt: « L’holocauste qui est un crime des plus odieux que l’homme ait commis sur terre, ose Djamal El-Dine Habibi, a, nonobstant la douleur que cause le souvenir à la mémoire, profité dans une certaine mesure aux juifs. D’ailleurs, ils en ont exagéré les faits et les chiffres. Mais ça a été un moteur indéniable dans la constitution d’un grand état des plus nucléarisés; une démocratie et puissance qui a son mot à dire dans la planète; bref, ils sont des gens qui sachent bénéficier de leur mémoire et qui sachent y investir leur futur. L’allemand jusqu’à aujourd’hui dépense, au profit des juifs, de faramineuses sommes sur son passé nazi. Cependant, l’Algérie a avancé le mensonge de 1 million et demi de martyrs et elle en a perdu des milliards et des milliards».


Un journaliste interroge le sénateur sur la dernière polémique provoquée par Nourredine Ait Hamouda, deputé du RCD, lorsqu’il a
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Le colonel Amirouche


défié les autorités à produire des preuves tangibles sur la véracité des 1 et demi million de martyrs, Djamal El-Dine Habibi répond : « Ait Hamouda a évoqué le problème d’un point de vue politique et récemment. Moi, j’avais évoqué le problème bien avant ça. On m’avait répondu qu’on ne pouvait toucher à pareil sujet et qu’on ne pouvait aucunement réviser le chiffre, car il est trop tard, et cette politique de ne pas pouvoir se pencher sur son passé cause bien des tracas sur les statistiques : on ne peut pas par exemple destituer les milliers de faux moudjahiddines de leur statuts de combattants libérateurs. Il y a un peu plus de 600.000 faux moudjahidines. Dans une rencontre avec l’ex ministre des moudjahidines, Mr Mahmoud Guenz a tenu sa tête entre ses mains et m’a dit « J’ai un harki (un traître) dans mon ministère». Selon l’ex sénateur, à la veille de l’indépendance, 111000 personnes qui faisaient partie des unités françaises avaient rejoint « Le rocher noir» à Boumerdès pour rejoindre soi-disant le maquis avec les combattants de libération; ils sont tous aujourd’hui des moudjahiddines : « Tout le monde, assène-t-il, connaît le harki et le moudjahid, mais qui osera accuser ces gens». Et plus loin, il enchaîne : « Je présidais une commission chargée de reconnaître les vrais moudjahiddines des faux. J’avais un dossier sur un bonhomme que tout le monde disait être un harki. J’ai alors contacté la gendarmerie nationale de Mostaganem ainsi que sa police. Bref, une petite enquête était suffisante pour savoir que le bonhomme était un harki. Il est aujourd’hui non seulement déclaré moudjahid mais il est un cadre de la révolution et il jouit de tous les privilèges ».



Krim Belkacem n’a pas participé à l’assassinat de Abane Ramdane:



Fait inédit dans l’histoire entourant les héros de la révolution algérienne : Krim n’a jamais cautionné l’assassinat de Abane Ramdane, le cerveau de la révolution. Djamel El-Dine Habibi le renie en tout cas catégoriquement. Selon lui Krim Belkacem n’était pas à Oujda, lieu où a été assassiné Abane. La version habituelle que l’on connaît est que Krim avait accompagné Abane dans la prairie où allait-on exécuter le père de l’Algérie républicaine. Deux sbires de Abdelhafith Boussouf allaient se charger de l’ignoble besogne : « J’ai eu l’honneur de le rencontrer ( c’est-à-dire Krim Belkacem) en 1961. Un homme amoureux de son pays et qui n’avait rien d’un criminel. Un vaillant homme qui avait rejoint le maquis en 1947 déjà. Krim n’était pas à Oujda le jour de la mort de Abane».



La France n’a pas assassiné les colonels Amirouche et Si El Houas :


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Ben Bella


Le sénateur va à l’encontre de ce qu’a rapporté Hemou Amirouche, le secrétaire spécial du colonel Amirouche, dans son livre Akfadou…Une année avec le colonel Amirouche, où l’auteur dit que les colonels Amirouche et Si El Houas avaient été assassinés un jour de ramadan durant un violent accrochage qui avait opposé une quarantaine de moudjahiddines contre 2000 soldats français dans la montagne de Tamer. L’auteur du livre ne cache pas toutefois ses soupçons quant à la possible implication ou complicité de gens membres au sein du gouvernement provisoire sur la base que le code secret des communications avait été découvert par la France voila un temps alors que le colonel Amirouche n’en a pas été informé par le gouvernement provisoire qui était alors placé en Tunisie. Le sénateur dément, car il ne reconnaît même pas qu’Amirouche ait eu un secrétaire mais bel et bien une secrétaire : « Amirouche n’avait pas un secrétaire mais une secrétaire qui était professeure de dessin au lycée Omar Racim. Vous pouvez le vérifier de vous-même».

Au sujet de la liquidation physique de moudjahiddines par d’autres moudjahiddines durant la révolution, Mr Habibi ne trouve pas d’autre qualificatif : « Qu’est-ce que signifie tuer un révolutionnaire? C’est quoi le sens de l’assassinat d’un officier de l’ALN? C’est tout simplement du terrorisme. Au nom d’intérêts partisans, de grands hommes avaient été assassinés». D’ailleurs, il dit: « Les autorités algériennes réellement n’ont aucune envie de récupérer les archives concernant l’époque coloniale, surtout la période de 1954 à 1962. Bien des responsables et de hauts cadres aujourd’hui gouvernant les destinées du pays se retrouveraient en prison si la France restituait les archives…».

« Oui, Amirouche et Si El Houas ne sont pas tombés dans les champs d’honneur dans les montagnes de Boussaâda. Ils ont été liquidés par les soi-disant guides de la révolution qui étaient à Ouajda et Gradimoue en Tunisie». Amirouche et Si El Houas, explique le sénateur, étaient deux grands héros de la nation dont il fallait que les comploteurs pour le pays de demain se débarrassent. En 1982, continue le sénateur, alors qu’il se trouvait avec le colonel Oumrane dans le cimetière d’El Alia, Kasdi Merbah, alors ministre de l’industrie, lance, railleur, au colonel Oumrane : « Viens, espèce de harki!». C’est alors que le colonel rétorque : « Pourquoi vous séquestrez toujours les cadavres de Amirouche et Si El Houas dans les locaux d’une gendarmerie. Pourquoi avez-vous peur d’eux même morts?».



Boumedienne et Bouteflika : Du prestige à gogo mais le travail… zéro.



Selonle Djamel El-Dine Habibi, l’Algérie traverse la pire période de son histoire après l’indépendance. Sa crise cependant est
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Boumedienne


strictement politique. Les gens la gouvernant n’ont rien à cirer des intérêts du peuple et de la patrie. La politique de Boumediene était une politique de «prestige» qui ne se préoccupait guère des problèmes intérieurs alors que le pays avait besoin impérieusement d’une politique d’édification et de projets pour la société. Au départ était Ben Bella, un bonhomme sans scrupules qui a fait de l’Algérie une victime jetée en pâture à des idéologies surannées. Boumediene, revient à la charge le sénateur, n’avait cure d’une Algérie qui soit forte, prospère et sereine. Il a préféré une Algérie médiatiquement «internationalisée» au détriment de son économie, de ses institutions, de sa politique. Aussi, a-t-il gaspillé des milliards et des milliards de dollars en festivals internationaux, en congrès divers, en projets futiles, etc. Bref, de l’argent qui aurait pu servir pour élever la qualité de vie de tout un pays. C’est cela d’ailleurs qui engendré la crise que l’on vit. Qu’a-t-on moissonné des congrès internationaux? Qu’a-t-on eu du fait qu’il ait discouru en langue arabe à l’ONU?

Le sénateur n’en démord pas, il critique jusqu’à la politique de soutien aveugle pour la cause palestinienne au détriment du peuple algérien : «On a dépensé des milliards de dollars pour faire entrer Yasser Arafat dans les enceintes de l’ONU. On a dépensé l’argent du peuple sur l’Afrique… Et tout cela rien que pour entendre les ovations de pays lointains… ».

Quant à Bouteflika, selon le sénateur, à l’instar de Zeroual son prédécesseur, il a accentué le régionalisme au sein de l’état. Toutefois, il n’omet pas de souligner un détail : « J’ai eu une discussion avec Zeroual à l’époque sur ce sujet, je lui ai dit : l’Algérie est la mère de tous, n’est-ce pas? Oui, m’a-t-il répondu. J’ai dit : je vois 20 ministres originaires d’une même tribu à Batna. Alors, il m’a tenu ces propos : Ils sont d’une même tente même, mais ils sont tous liés pas l’amour du travail bien fait. Il avait raison. En ces temps, on avait peu de ministres et il n’y avait pas les scandales et crimes financiers que l’on connaît à l’ère de Bouteflika. Désormais, à l’ère des miracles de Bouteflika, même l’eau est distribuée en denrées rares pour s’acheter des allégeances comme on le faisait pour les produits alimentaires durant la deuxième guerre mondiale. L’Algérie est un immense champ de voyoutisme, une île de mercenaires… comment a fait l’ex président du parlement, Mr Amar Saadani, pour dérober 3000 milliards. Il n’y a pas de pays qui soit civilisé où l’on vole de cette façon. Tout cela est voulu afin que continue le clan d’Oujda à dominer. On ne sait même pas combien d’argent quitte le pays, ni combien y entre. Comme si on n’avait ni douanes, ni police, ni conseil des comptes, ni gouvernement, etc. Pendant le règne de Chadli l’argent était destiné pour se procurer des frigidaires, des bananes et des fromages… Et maintenant? Tout est privatisé, tout est vendu ».



Boumediene et Ben Bella sont les responsables de l’assassinat du colonel Chaabani :



Le sénateur relate le colonel Chaabani avec des mots forts élogieux. Il se rappelle qu’en 1964, il était à la ville de Lille en France
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Bouteflika


lorsqu’il a vu un jeune entraîneur d’un groupe de jeunes filles qui portait le journal La voix du nord. Il lui demande s’il pouvait feuilleter le journal. C’est alors qu’il tombe sur la nouvelle de l’assassinat du colonel Chaabani : «Il avait été liquidé parce qu’il était fidèle à une certaine idée de l’Algérie, fidèle à ses principes, fidèle à la révolution. Il n’était pas permis qu’on le laisse vivant. Il fallait qu’il rejoigne les colonels Amirouche et Si El Houas. Et pour les gens qui disaient qu’ils ne voulaient pas qu’il meure, je leur dis que vous avez souhaité sa mort et vous l’avez liquidé… Il avait été liquidé par Boumediene et Ben Bella ».



Bouteflika, Boumediene et la révolution :



Bouteflika et Boumediene, affirme Mr Habibi, n’ont rien apporté à la révolution comparativement aux combattants que le peuple connait. Le sénateur raconte une petite histoire où Bouteflika en 1957 prenait des photos en compagnie de journalistes. L’histoire se répète deux mois après avec Boumediene. Mr Habibi commente l’histoire en disant que beaucoup de gens qui n’avaient aucun lien avec la révolution se faisaient prendre en photos en compagnies des combattants de renom afin qu’on les dise faisant partie de la même trempe. La quasi-majorité de ces gens étaient à mille et un lieux de l’aspiration libératrice du peuple algérien. D’ailleurs, ces gens qui se prenaient comme cela en photos avaient d’autres dessins pour l’avenir, ils s’en foutaient royalement de la révolution : « l’histoire n’est pas aveugle», commente le sénateur.

Par ailleurs, Mr Habibi, à l’évocation de la véracité ou pas du rôle de Boumediene dans le passage des armes aux frontières du Maroc, se gausse du rôle que ce dernier aurait soi-disant joué. Selon lui, Boumediene n’a pas joué un rôle important dans le premier bateau transportant des armes du Maroc vers l’Algérie. Cette opération était effectuée grâce à son compagnon de l’époque, alias Si Mourad, le bonhomme que l’on surnomma Si Youcef un peu plus tard pour devenir ensuite, pour des raisons strictement stratégiques, Lehbib Zone. C’est lui qui a transporté les armes jusque dans le bateau. Boumediene ne faisait que superviser de loin. Oui, c’est grâce à monsieur Helfaoui Mohamed Essaleh de son vrai nom. Il est de à Azzaba, de la wilaya de Skikda. Lui, il a préféré rejoindre la révolution à l’intérieur du pays. Mais il a été rappelé par le groupe de Oujda pour qu’il soit exécuté afin que l’on efface sa trace de l’histoire et que l’on raccommode au Raȉs l’histoire qui «sied» à un président. D’ailleurs, le Moudjahid en question avait été restitué en 1999 pour qu’on lui reconnaisse enfin son énorme service rendu à la nation.



Il y a encore tant d’autres sujets qu’a évoqués l’ex sénateur; des sujets tous aussi sensibles vis-à-vis de cette autre histoire que l’on plante comme des certitudes inébranlables dans les caboches de nos gamins. Une question s’impose: il y a combien de vérités en termes quantifiables dans notre histoire? Une question qui se pose, au risque de me répéter, d’elle-même lorsque on sait que les historiens, les vrais, pas les flagorneurs, sont interdits d’expression ou d’écriture carrément, quand on sait que le pays a été gouverné depuis l’indépendance pas ses ennemis; les ennemis du peuple, de la révolution, etc. Décidément, il n’est pas aisé de se frayer un chemin de juste au milieu de cette brousse de mensonges.



Tiré en grande partie de l’interview d’El Khabar Hebdo du 28. 08. 2009


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[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Témoignage
Pourquoi et comment le colonel Chaabani a été exécuté ?

Par Mahdi Chérif *,

Le Soir d’Algérie, 21 février 2012

Mohamed Chaabani a été supplicié à l’heure des clartés incertaines du petit jour. Il a regardé sans trembler les visages impavides des exécuteurs commis à ses fins dernières. Pour lui et pour les autres qui ont été suppliciés seuls, dans le noir des cachots, je dédie ces lignes.»
M. C.

Mahdi Cherif, dans cette contribution à l’écriture de l’histoire, va, une fois de plus, au fond des choses. L’exécution du jeune colonel Mohamed Chaabani après une parodie de procès, sur ordre de Ben Bella, a déjà fait couler beaucoup d’encre. Mahdi Chérif, témoin et acteur privilégié des évènements qui se sont déroulés juste après l’indépendance de l’Algérie, évoque cet épisode tragique qui a marqué la mémoire de toute une génération. En démêlant l’écheveau compliqué des actes, et des raisons cachées, des principaux protagonistes qui ont joué un rôle déterminant dans la dynamique qui a conduit le chef de la Wilaya VI devant le peloton d’exécution, il casse des tabous solides. Lorsqu’il évoque Ahmed Bencherif, ancien chef de la Gendarmerie nationale, son analyse est d’une grande sévérité. Il précise cependant, — nous le citons — : «A aucun moment, je ne fais la confusion entre l’homme et l’institution. La Gendarmerie nationale, corps d’élite, corps de sécurité prestigieux de la République, a fait son devoir dans les moments les plus tragiques de l’histoire récente de l’Algérie. Des hommes de courage et de conviction, officiers de la Gendarmerie nationale, ont su dire “halte !” aux dérives et “non !” aux ukases quand Ahmed Bencherif considérait la gendarmerie comme un legs parental et que ses ordres contrevenaient au droit ou lorsqu’ils heurtaient leur conscience. Ils furent nombreux : Youssef Bensid, Mokrane Aït Mahdi, Lakhdar Belhadj ou encore Mohamed Touati pour ne citer que les plus connus. Le grand bourreau a dû faire appel à d’autres, proches de sa personne ceux-là, pour sa carrière macabre de croque-cadavres. En exhumant de l’oubli la personnalité attachante de Mohamed Chaabani et en essayant de rendre leur juste dû à ceux qui ont joué un rôle dans sa condamnation à mort, j’ai voulu absoudre mon âme du péché de silence pour rentrer, quand l’heure sera venue, l’âme en paix dans la paix du seigneur.»
R. N.

Le colonel Mohamed Chaabane dit «Chaabani» est, en 1962, le plus jeune colonel de l’ALN. Il est né le 4 septembre I934, à Oumèche (Biskra). Successeur du colonel Ahmed Benabderrazak, dit Si El Haouès, tombé face à l’ennemi le 29 mars 1959 à Djebel Thameur, près de Boussada, il est le chef de la Wilaya VI (Sahara) pendant les trois dernières années de la guerre de Libération. Il n’a jamais voulu, sans doute par modestie naturelle, arborer l’insigne du grade de colonel que lui confère le GPRA en I961. Le jeune chef de la Wilaya VI paye le prix de son implication dans les concurrences qui font rage au sein du gotha politique qui s’accapare du pouvoir au lendemain de l’indépendance. La période du 19 mars 1962 à septembre 1964, date de son exécution, est riche en manœuvres de toutes sortes où le chef de la Wilaya VI est entraîné, quelquefois malgré lui. Allié sincère et déterminé de Ben Bella, lors de la course vers Alger, au lendemain de l’indépendance, il se heurte à ce dernier qui a sa propre vision sur le pouvoir, sur la façon de le conquérir, comment l’exercer et avec quels hommes l’exercer. Très vite, les heurts des ambitions et les calculs des uns et des autres créent une situation telle que chacun des responsables au sommet de l’Etat recherche des alliances parmi les chefs de Wilaya encore dans l’ANP, pour conforter sa position. Le jeune colonel ne sut pas rester à l’écart de l’imbroglio algérois qui se complique constamment. Houari Boumediène ne peut envisager son action à la tête du ministère de la Défense nationale sans le départ obtenu, d’une façon ou d’une autre, de tous ceux qui ne rentrent pas dans le moule de l’obéissance telle que codifiée par lui. Il s’attaque d’abord à ceux qui se sont ligués contre l’EMG, après la réunion inachevée du CNRA et qui ont tenté de lui barrer la route, par les armes, en juillet-août 1962 : Moh Ou El Hadj, Salah Boubnider et Hassen Khatib, puis aux autres qui lui rappellent, trop souvent à son gré, qu’il leur doit sa deuxième carrière. Le colonel Zbiri, chef de la Wilaya de l’Aurès est fourvoyé rapidement dans une mission qui ressemble à une antichambre de mise à la retraite, la direction de l’Académie de Cherchell. Chaabani, qui est l’objet de sollicitations nombreuses et intéressées de la part de Ben Bella et de Khider, pose un vrai problème à Boumediène. Le chef de la Wilaya VI ne veut à aucun prix quitter son commandement à Biskra. Il ne veut pas entendre parler de l’affectation en Wilaya VI des officiers désignés par Abdelkader Chabou, officier issu de l’armée française, qui devient après l’indépendance le plus proche collaborateur du ministre de la Défense. Fort du préjugé favorable dont il bénéficie auprès du président de la République et de Mohamed Khider, Chaabani entre en conflit ouvert avec Houari Boumediène. Ses griefs sont d’abord réduits à un seul objet, puis la confrontation devenant ouverte, ils s’élargissent et prennent de l’ampleur. Le premier objet de la colère de Chaabani est la place de plus en plus prépondérante, au sein du commandement de l’armée, des plus en vue parmi ceux qui sont venus s’intégrer à l’ALN pendant la guerre de Libération. Ils sont accusés par lui de viser, par un entrisme envahissant, tous les postes de décision au sein de l’ANP. Le deuxième congrès du FLN, qui se déroule dans la salle du cinéma Afrique en avril 1964, à Alger, est pour lui l’occasion de dire tout «le bien» qu’il pense de ce parti-pris de Houari Boumediène pour les quatre ou cinq officiers algériens qui ont fait leurs classes en Indochine, en Allemagne ou tout simplement dans les écoles de guerre françaises. Il voue à Chabou, à Zerguini, à Hoffman, à Boutella et surtout à Ahmed Bencherif, une méfiance tenace. Il change cependant son jugement quand il évoque les jeunes gens qui, fuyant les casernes françaises, ont rejoint l’ALN pendant la guerre de Libération nationale. Il n’ignore pas que ce n’est pas Houari Boumediène qui les a accueillis à bras ouverts, mais bel et bien un des géniteurs de la révolution — et quel géniteur ! — puisqu’il s’agit de Krim Belkacem. A Boumediène qui interroge : «qu’est-ce qui est préférable, réorganiser l’armée avec des Algériens ou faire appel à des étrangers ?» Il rétorque qu’il ne vise pas ceux qui ont commandé, dans les moments les plus forts de la guerre, des unités engagées chaque jour contre les forces françaises et tout en rendant hommage aux dizaines de «DAF» morts les armes à la main aux côtés de leur frères moudjahidine. Il précise : «Je vise la demi-douzaine de mercenaires qui se “cachent” derrière Boumediène, qui ont les mains libres pour tout se permettre au sein de l’ANP.» Il dit craindre que, profitant de sa position, Chabou ne soit tenté, un jour ou l’autre, par une opération «d’aimantage» pour attirer ceux qui ont eu le même parcours que le sien pour constituer une force avec laquelle il faudra compter. Sa prévention à l’égard de Chabou et de son entourage («ils travaillent pour la France») bâtie sur des jugements de valeur subjectifs, beaucoup plus que sur des éléments de preuves irréfutables, démontre que le jeune chef de la Wilaya VI est à la recherche de pièces «rapportées» à introduire dans son dossier et qu’il se saisit du grief «popularisé» par les compétiteurs de ces soldats de carrière qui affirment n’avoir d’autre ambition que celle de servir l’armée de leur pays. Cette obsession de «la main de l’étranger» aura la vie longue. Chadli Bendjedid, le 27 novembre 2008, à Tarf, lors du colloque consacré au créateur de la Base de l’Est, Amara Bouglez, reprendra à son compte la fable de l’infiltration de la révolution par «la promotion Lacoste». Dans son désir de régler ses comptes avec Khaled Nezzar, qu’il cite nommément, l’homme qui l’a empêché de brader l’Algérie pour un demi-mandat, il prononce des mots d’une extrême gravité : «Sentant la fin de leur présence sur notre sol, les Français ont préparé leur supplétifs… » L’avenir — trois décennies plus tard — démontrera que cette crainte de certains maquisards, sincère chez Chaabani, obéissant aux circonstances chez d’autres, de voir l’Algérie retomber dans l’escarcelle des Français à l’issue du «complot» ourdi par de Gaulle et muri sur le long terme, se révélera infondée. Ce sera, pour l’essentiel, les anciens élèves des écoles de guerre d’outre-Méditerranée et les déserteurs des casernes françaises, trop longtemps victimes de jugements injustes et outranciers, qui, devenus chefs de l’ANP, barreront la route à l’intégrisme et sauveront la République. Chaabani, outre son opinion bien arrêtée sur la poignée de collaborateurs immédiats de Houari Boumediène, est animé par une forte prévention contre les rejetons des grands notables. Il refuse de voir leurs enfants jouer des rôles prépondérants dans l’Algérie post-indépendance. On constate, à l’analyse de cette conclusion chaabanienne, la survivance d’une frustration ancienne quand les réalités sahariennes du temps des bureaux arabes, lorsque les grandes familles de Biskra ou de Touggourt, distinguées et choyées par les généraux de l’armée d’Afrique, étaient l’interface stipendiée de l’administration militaire française en charge du Sud algérien. Dans l’esprit du jeune colonel, aucun doute ne peut subsister quand à la qualité «d’agents de la France» de Bencherif ou de Chabou. Ce dernier est fils d’un officier supérieur spahis, longtemps caserné à Batna. On ne peut comprendre le sentiment de colère du successeur de Ahmed Ben Abderrazak devant les faits accomplis de Houari Boumediène si on ne tient pas compte de l’habitus du groupe social où sa prime adolescence s’est accomplie, dominée par l’hagiographie chantée sur tous les tons par les valets des grands guennours et des porteurs de burnous d’apparat. On ne peut comprendre l’indignation du successeur de si El Haouès de voir Ahmed Bencherif à la tête de la Gendarmerie nationale, si on oublie qu’il nourrit de graves soupçons sur l’implication du beau-père de Bencherif — le bachagha Ahmed Lahrèche en personne — dans le renseignement obtenu par l’armée française sur la présence dans la région du Djebel Thameur, en mars 1959, des colonels Amirouche et si El Haouès. On ne peut comprendre le sentiment qui pousse Chaabani à la révolte si on oublie que, pour toute une génération de maquisards, la révolution où ils se sont jetés corps et âme est également une revanche sociale. Elle a chamboulé, de fond en comble, l’échelle des valeurs admises, cassé des certitudes et attiré au-devant de la scène le petit, le laissépour- compte, pour en faire l’auteur d’une nouvelle Histoire. Le fils du pauvre, promu par ses sacrifices, au moment où il pense que l’ère des «sidis» est définitivement révolue, voilà qu’il se retrouve face au fils du maître d’hier. Houari Boumediène plaide sans état d’âme l’efficacité. Chaabani défend avec toute son âme la morale. L’association Boumediène-Bencherif le révolte. Bencherif, fils de grande tente, ancien sergent de l’armée française, naturalisé français en 1948, engagé volontaire pour l’Indochine où il combat de 1949 à 1952, déserte l’armée française au début de la guerre d’Algérie, après avoir mis à sac le camp militaire où il est affecté. Promu officier-instructeur en Wilaya IV, il est envoyé en Tunisie à cause de ses brutalités envers les civils et après que, de son propre chef, il tue, à larme blanche, à l’insu du colonel si Mhamed, des dizaines de prisonniers kobussistes confiés à sa garde. Désormais commandant et collaborateur de Krim, il est chargé d’exécuter les colonels Lamouri, Nouaoura et Aouchria, ainsi que le commandant Mostepha Lakhal, condamnés à mort par Houari Boumediène, président du tribunal devant lequel ils comparent en 1959. Ces moudjahidine sont étranglés de sa propre main. Il utilise pour les mettre à mort un fil de fer qu’il passe autour de leur cou et qu’il serre jusqu’à la mort, alors qu’il dispose d’une arme à feu munie d’un silencieux. Le colonel Mohamed Aouchria réussit à échapper à ses gardiens. Il court vers le mur d’enceinte. Bencherif le rattrape. Il lui administre une terrible correction. Il le traîne vers l’endroit où gisent les cadavres de Lamouri et de Ahmed Nouaoura et il lui fait subir le même sort. Les corps des moudjahidine suppliciés d’aussi atroce manière, par pure sadisme, sont jetés par lui dans une fosse à peine ouverte. «Les chiens s’en chargeront !» est l’oraison funèbre de leur bourreau. Si tôt Bencherif ayant quitté les lieux, le commandant du camp entreprend de donner une sépulture décente aux officiers martyrs. Bencherif, connaissant désormais le chemin qui mène à la prison de Denden, s’y rend sans être mandaté par personne et sans en référer à Abdelmadjid Rafa, le juge d’instruction qui a la haute main sur les pénitenciers du GPRA. Au cours d’une de ses incursions inopinées, il prend à partie et torture des prisonniers. Saouli Mohamed, ancien normalien, détenu à Denden, en conservera des séquelles à vie. Le sulfureux Bencherif, renvoyé en Algérie par Krim en 1960, est blessé au cours d’un combat dans la région de Sour El Ghozlane, tandis que le capitaine Fellah, son compagnon, résiste jusqu’à la mort, lui, il lève les bras, se fait reconnaître et se rend aux forces françaises. Il est transféré à Paris sur décision d’Edmond Michelet, ministre de la Justice du général de Gaulle. Son transfert est obtenu par son beau-père et oncle, qui avait mobilisé ses amis, entre autres les Chicheportiche, Israélites connus à Djelfa et à Boussaâda, qui ont beaucoup d’entregent, et Jacques Chevalier, homme politique algérois, bien introduit au Gouvernement général. Ces personnalités font valoir l’intérêt d’utiliser Bencherif dans la stratégie anti-FLN. Alors que le GPRA lance une grande campagne médiatique et diplomatique pour lui sauver la vie, Bencherif joue le jeu des Français. (N’est pas Larbi Ben M’hidi qui veut !) Chaabani est révolté de voir l’homme qui somme Ferhat Abbès, le 10 octobre 1960, de reprendre les négociations avec la France, au risque de voir la Wilaya 4 accepter une paix séparée avec l’armée française, être en charge d’un corps de sécurité prestigieux de l’Algérie indépendante. Chaabani affirme que c’est le même Bencherif qui a joué à l’entremetteur entre les responsables de la Wilaya IV et Charles de Gaulle. Ces contacts sont, bien sûr, destinés à remettre en cause la cohésion de l’ALN autour du GPRA. Gilles Meynier, dans son livre intitulé : Histoire intérieure du FLN, 1954-1962,page 566, évoque les péripéties du séjour parisien de Ahmed Bencherif, grand étrangleur de moudjahidine devant l’Eternel et futur receleur de cadavres de colonels de l’ALN, morts au combat. La scène politique algéroise est de plus en plus en ébullition du fait de la gouvernance de Ben Bella. Fin 1963, Mohamed Khider commence à prendre ses distances avec Ben Bella qui devient dangereusement boulimique. Mohamed Khider est originaire de Biskra. Dans son souci de se concilier les bonnes grâces du chef de la Wilaya VI, il joue avec succès la carte de l’affinité régionale. L’officier indigné et le politique déçu se rejoignent. Khider est déjà à la périphérie du pouvoir, mais il est encore influent. Il suggère la nomination de Chaabani au poste de chef d’état- major. Chaabani rétorque qu’il serait souhaitable de réunir les chefs des wilayas historiques afin de les faire participer à la désignation du chef d’état-major. Il ajoute que, dans le cas où cette démarche ne conviendrait pas, on pouvait toujours désigner le plus âgé d’entre les colonels, en l’occurrence Moh Oul Hadj. Houari Boumediène, craignant que, par l’entremise de Moh Oul Hadj, certains anciens du GPRA, tel Belkacem Krim, ne reviennent au pouvoir, s’oppose avec toute sa force de persuasion à la proposition de Chaabani, arguant que le poste doit revenir au chef de la Wilaya de l’Aurès, le plus légitime à l’occuper. C’est ainsi que le colonel Tahar Zbiri est nommé chef d’état-major. Mohamed Chaabani, le colonel Abbès et le commandant Abderrahmane Bensalem sont ses adjoints. Le décret n°64/88 du 4 mars 1964, paru dans le Journal officiel du 6 mars 1964, précise la composition de l’état-major général de l’ANP ainsi que ses prérogatives, créé sur proposition du ministre de la Défense nationale et non pas comme, on a pu l’écrire ici et là, sur décision unilatérale de Ben Bella pendant un voyage à Moscou de Houari Boumediéne. Quelque temps plus tard, au gré des fluctuations de ses rapports avec Ben Bella, Khider propose de nommer Chaabani ministre de la Défense nationale. Pendant quelques semaines, l’idée de devenir ministre de la Défense nationale emballe Mohamed Chaabani. Il s’agite, prend des contacts, démontre par son attitude que ce qui n’est encore qu’une vague configuration est déjà acquis. A la villa Jolly, où il croise Houari Boumediène, le ton monte. Les deux hommes échangent des regards assassins. La tension entre les deux colonels est à son comble. Beaucoup de responsables militaires dont les colonels Tahar Zbiri, Abbès et le commandant Saïd Abid, essayent de faire revenir Chaabani à de meilleurs sentiments. Le colonel Tahar Zbiri fait à trois reprises le voyage de Biskra – je l’accompagne à chaque fois — pour tenter de convaincre le chef de la Wilaya VI de patienter et de parier sur une inéluctable décantation politique, plutôt que de tenter de la forcer dans les plus mauvaises conditions. Peine perdue ! Chaabani qui n’a que paroles de mépris à l’égard «du planqué de Ghardiamou» ne s’embarrasse pas de précautions oratoires pour dire le fond de sa pensée. Il dénie à ce dernier la légitimité de faire de l’armée son marchepied et de la restructurer à sa guise. Selon lui, la légitimité à être le chef de l’ANP, Boumediène l’a perdue le jour même où il a fait ouvrir le feu sur les moudjahidine des Wilayas III et IV. Il ne s’arrête pas à l’objection que lui aussi a été présent sur le champ de bataille, du côté de Médéa, en juillet 1962. Il argue : «Etre ministre de la Défense, dans un gouvernement de Ben Bella, ne fait pas de lui (Boumediène) une icône à adorer derrière une vitrine, mais un homme politique dont on peut critiquer l’action. Le jeune colonel, comme beaucoup d’autres avant lui, et bien d’autres après lui, n’a jamais mesuré jusqu’à quel point Houari Boumediène tient au pouvoir et jusqu’à quel point il est convaincu que pour le conquérir entièrement et le garder jusqu’au dernier souffle de sa vie, il lui faut être le maître absolu de l’armée. Cette méconnaissance du ressort profond qui fait agir Boumediène causera la perte de son compétiteur. L’expédition militaire contre la Wilaya VI est désormais sur la table de dessin de Abdelkader Chabou. Il est intéressant de voir comment l’accélération de la dynamique de l’inéluctable épreuve de force est réalisée par Chabou. Lorsque toutes les parades sont en place, Chabou va précipiter le moment de vérité, d’abord par des tentatives à peine discrètes, signées Bencherif, pour circonvenir certains des cadres de la Wilaya VI et les inciter à la rébellion. Ces manœuvres du chef de la Gendarmerie nationale mettent à vif les nerfs de Chaabani. L’incident de l’hélicoptère fait partie du traitement à base d’aiguillons psychologiques destiné à faire monter son ire. Chaabani, désireux de se rendre à Biskra par la voie des airs, demande qu’il soit mis à sa disposition un hélicoptère. Il essuie un refus, au prétexte d’une indisponibilité de «ventilos». Chaabani prend la route au volant de sa Fiat 2300. Arrivé à destination, il voit un MI 04 évoluer au-dessus de l’aérodrome de Chetma (Biskra). L’hélicoptère atterrit. Mohamed Boutella en descend, tout sourire… Ben Bella, devant le forcing du ministre de la Défense qui veut réaliser la restructuration de l’armée et par là même éliminer les dernières figures de proue du «wilayisme», nomme Chaabani membre du bureau politique pour conforter sa position face à celui qui veut l’éliminer. La lune de miel entre le président de la République et Mohamed Chaabani ne dure pas longtemps. Le changement intervint insidieusement, au gré des humeurs fantasques de l’un et des humeurs chagrines de l’autre. Les évènements de Kabylie, quand Aït Ahmed s’engage dans l’opposition armée, viennent démontrer à Ben Bella que Mohamed Chaabani ne sera jamais un instrument docile entre ses mains. Le chef de la Wilaya VI refuse de s’impliquer militairement contre le FFS. «On m’a eu une fois. On ne m’aura pas une deuxième fois» est sa réponse invariable à Ben Bella qui le presse d’envoyer des unités en Kabylie pour en découdre avec les partisans d’Aït Ahmed. Puis les choses s’accélérèrent avec, tour à tour, la dissolution de «Djemiat al oulama du Cheikh Abdelhamid Ben Badis» puis avec le placement en résidence surveillée du Cheikh Bachir El Ibrahimi. Mohamed Chaabani, qui a été le disciple du cheikh Ben Badis, et avec lequel il partage les mêmes valeurs spirituelles, est choqué par une mesure que rien ne justifie. Peut-être Hamadèche, le Béria du régime, a-t-il attribué au vénérable cheikh un tract qui circule sous le manteau et qui dénonce les professions de foi pro-soviétiques de Ben Bella. Le président, grisé par les hurlements des foules, imprime un autre rythme à sa démarche pachydermique. Le fracas de la porcelaine brisée devient un bruit de fond quotidien. La politique du «45 fillette » n’épargne ni les historiques, ni ceux qui le sont moins, ni ceux qui ne le sont pas du tout. Mohamed Chaabani exprime avec force son indignation devant le mépris affiché par Ben Bella à l’égard de Boudiaf, de Khider, d’Aït Ahmed, de Krim, de Boussouf, de Bentobbal, de Ferhat Abbès et des autres personnalités historiques. Il proteste devant l’activisme des hommes du commissaire Hammadèche qui remplissent les prisons et les camps. A la veille du 19 juin, date du renversement de Ben Bella, il y a 3 000 prisonniers d’opinion dans les prisons benbellienes. Tous ceux qui osent exprimer leur rejet d’une politique chaotique sont passibles d’une lettre de cachet. Un exemple de la paranoïa qui s’est emparée de Ben Bella est l’enlèvement de Hadi Khediri en pleine rue et son emprisonnement à Lambèse pendant un an sans qu’aucune accusation lui soit signifiée. Le futur DGSN est arrêté sur un simple soupçon. De la même façon est traité Ahmed Taleb El Ibrahimi qui se retrouve à Sidi El Haouari sans jamais savoir pourquoi. Chaabani s’indigne des exécutions capitales d’opposants politiques qui se suivent à un rythme terrifiant et qui sont tenues secrètes. Du 11 juillet au 3 septembre 1964, Ben Bella fait exécuter 8 opposants, tandis que ses services préparent les procès de plusieurs dizaines d’autres prisonniers d’opinion. Le président Chadli Bendjedid charge, au début des années 1980, Abdelkrim Guehairia, officier de l’ALN et de l’ANP, cadre au ministère des Moudjahidine, de faire exhumer les corps des suppliciés qui sont enterrés au Carré des martyrs. (Bendjedid leur décernera, à titre posthume, les plus hautes distinctions honorifiques de l’Etat). Les critiques de plus en plus sévères de Chaabani finissent par le rendre persona non grata au troisième étage de la villa Jolly. L’heure attendue patiemment par Houari Boumediène vient enfin de sonner… Pour séparer Chaabani de ses hommes, Ben Bella somme le chef d’état-major adjoint de rejoindre son poste. Ce dernier refuse et se retrancher au milieu de ses unités. Le ton monte entre les deux hommes. Les insultes fusent des deux côtés. «Tu n’es qu’un politicien cynique» est la réponse que vaut à Ben Bella sa décision (décret du 4 mars 1964) qui met fin à la qualité de membre de l’état-major de Chaabani. Un autre décret, signé le 2 juillet I964, le casse de son grade de colonel. Au plus fort de la crise, avant les décisions extrêmes prises par Ben Bella contre le chef de la Wilaya VI, beaucoup de personnalités, et à leur tête les colonels Zbiri et Hassen Khatib, tentent, en vain, une médiation. Chaabani est trop engagé pour reculer, d’autant que Houari Boumediène, craignant la réussite de ces bonnes volontés, et jouant à l’incendiaire, envoie Mohamed Zerguini, un des DAF les plus honnis par le chef de la Wilaya VI, pour prendre le commandement des unités fidèles à ce dernier. Le président Gamal Abdenasser, craignant le pire pour son allié de toujours, Ahmed Ben Bella, décide de s’en mêler. Il délègue auprès de Chaabani son ambassadeur, Ali Khachaba. La réponse de Chaabani est très claire : «Dites à celui qui vous a mandaté mon respect et ma considération. Je suis convaincu que sa démarche est inspirée par son souci de la stabilité de l’Algérie, mais il m’est impossible de travailler avec un homme qui change dix fois par jour d’opinion.» Chaabani ne veut pas se rendre compte qu’il n’a plus d’allié dans la place, puisque Khider a dû également se retirer, forcé à l’exil par le comportement de Ben Bella. Il ne veut pas se rendre compte que ceux qui ont tenté une médiation ont fini par déclarer forfait du fait de l’intransigeance des deux parties. Fethi Dib, chef des Moukhabarate égyptiennes, qui espère pouvoir régler «le problème Chaabani» par le ricochet de Genêve, se rend en Suisse, pour demander, au nom du président Gamel Abdennasser, à Khider de restituer l’argent, dont il était un simple dépositaire, et dont il s’est emparé pour le mettre à «la disposition de l’opposition». Fethi Dib s’entend répondre : «Je suis un patriote. Je viens de refuser l’aide de Sa Majesté le roi du Maroc pour l’élimination de Ben Bella du pouvoir. Mon problème est la manière avec laquelle Ben Bella gouverne l’Algérie. Tous les hommes qui osent émettre la moindre critique, y compris les anciens responsables historiques, sont foulés aux pieds et emprisonnés. Puisqu’il semble que le président Abdenasser jouirait d’une certaine considération auprès de Ben Bella, demandez-lui d’intervenir pour faire libérer les personnalités emprisonnées et pour que le président s’engage à mettre fin au pouvoir personnel. De la réponse que ce dernier lui donnera dépendra mon retour en Algérie.» La réaction de Ben Bella à l’écoute du compte rendu de Fethi Dib montre que les ponts sont définitivement coupés avec ses opposants. Il dit à Fethi Dib : «Tous ceux qui sont emprisonnés seront jugés par un tribunal. Ils sont accusés de tentative de coup d’Etat. s’ils sont condamnés à mort, ils seront exécutés. Khider lui-même est impliqué». Le président exhibe un document où il est question d’un projet de gouvernement avec Ferhat Abbès, Khider, Boudiaf, Aït Ahmed, Ahmed Francis, Tewfik El Madani et Omar Ouzeguène et, bien sûr, Chaabani à la Défense nationale. La mission de Fethi Dib s’étant conclue par un échec, Ben Bella donne l’ordre de réduire Chabaani par la force. La confrontation tourne à l’avantage des troupes gouvernementales, après quelques escarmouches qui font deux morts à El Kantara. Les unités de la Wilaya VI ne sont pas très motivées pour s’engager dans un combat fratricide. Chaabani a trop présumé de ses possibilités. Au bout de huit jours, il est arrêté.

L’HEURE DE AHMED BENCHERIF

Chaabani arrêté par les hommes de Saïd Abid est remis, sur ordre de Houari Bouediène, à Ahmed Bencherif. Il est transféré immédiatement à Djelfa, ligoté, les yeux bandés et couché de force sur le plancher d’une Land Rover, les pieds de son gardien, un ancien adjudant de l’armée française appelé Gigi, alias Mohand Akli, posés sur son corps tout le long du voyage. Ahmed Bencherif suit, derrière, dans une DS palace. Arrivé à Djelfa, Chaabani est d’abord interrogé sommairement par le même adjudant, sous le regard goguenard de Bencherif. Chaabani demande un café. Bencherif envoie un homme le ramener. Au moment où le prisonnier tend la main pour saisir la tasse, Bencherif lui en balance le contenu à la figure. «Ceci de la part d’un ancien de l’armée française !» Chaabani, aveuglé par le liquide, le cingle d’un terrible : «Abna Bariss youhinouna abna Badis», puis il se mure dans le silence. Bencherif donne ensuite la véritable raison de l’étape de Djelfa quand il ajoute : «Tu as fait tuer combien des miens par ici ?» Il faut savoir que les bellounistes, au moment où ils avaient le vent en poupe dans la région, étaient les bienvenus chez le bachagha Lahrèche, beau-père de Bencherif, lequel, peut-être n’en pouvait mais. Les «officiers » de Bellounis, ainsi que la majorité des chefs harkis qui combattaient l’ALN et qui sévissaient dans la région de Djelfa avaient table ouverte chez le bachagha Lahrèche. Après ce règlement de comptes personnel de Bencherif (les hommes de la Wilaya VI n’avaient pas fait dans le détail en combattant les traîtres de Bellounis), Chaabani est tranféré sur Oran et incarcéré dans la prison militaire de Sidi El Houari, dans la cellule n°62. (Tout un symbole !) Dans les geôles voisines se trouvent Ahmed Taleb El Ibrahimi, le capitaine Bouanani et peu de jours après Saïd Abadou. Les membres de l’état-major de la Wilaya VI sont arrêtés et transférés à leur tour à Sidi El Houari, après un passage par «Dar ennekhla », la villa Sésini de B en Bella. Le choix de la prison appelée «Sidi El Houari» n’est pas fortuit, sa sinistre réputation, due au régime carcéral moyenâgeux qui y est appliqué, est résumée par le nom qu’elle porte. Le prisonnier doit ressentir à chaque heure du jour et de la nuit qu’il est livré sans défense à un système de murs, de portes massives, de gardiens aux visages froids, d’horaires immuablement fixes, mais qui, au-delà de ces apparences, possède une âme maléfique, terrifiante de venin insidieusement distillé, celle de l’homme au regard vipérin, dont elle porte le nom, fixé dans la pénombre du cachot sur sa victime terrassée.
MOHAMED HARBI, LE BIEN-PENSANT
Le 3 août 1964, Houari Boumediène signe, en qualité de vice-président du Conseil des ministres et ministre de la Défense nationale, le décret portant nomination des juges assesseurs devant faire partie de la cour martiale. Ce sont, dans l’ordre : le colonel Ahmed Bencherif, les commandants Abderrahmane Bensalem, Chadli Bendjedid et Saïd Abid. Le président du tribunal, Mahmoud Zertal, conseiller à la cour d’appel, est désigné par le ministre de la Justice, Mohamed El Hadj Smain, par un autre décret signé le même jour. Ahmed Draïa est nommé en qualité de procureur de la République. Le colonel Bencherif, désigné membre de la cour martiale pour veiller personnellement au verdict, et certain de ce qu’il sera, se rend dans la petite forêt de Canastel, qui a vu tant de moudjahidine tomber sous les balles de l’armée française, pour faire creuser la tombe de Mohamed Chaabani, avant même la tenue du procès. L’endroit choisi par Bencherif vient à bout de deux pioches, vigoureusement maniées par les deux fossoyeurs Mohamed Ghozali et Tayeb Mrabet, tant il est dur. Lorsque les deux hommes commencent à avoir la paume des mains pleine d’ampoules, l’emplacement est abandonné pour un autre, où le sol est plus meuble, sous un grand pin maritime. Tandis que Bencherif est occupé à ces préparatifs macabres, les compagnons de Chaabani, Saïd Abadou, Rouina Mohamed, Chérif Kheirredine, Amor Sakhri, Slimane Slimani, Hocine Sassi, Mohamed Tahar Laadjel, sont regroupés dans la morgue de la prison sous bonne garde. Ils sont physiquement anéantis par les tortures qu’ils ont subies à «Dar Ennekhla». Là-bas, ils ont eu le temps de mesurer combien Chaabani avait eu raison de s’opposer à Ben Bella. Les horreurs dont ils ont été les témoins marquent encore leur mémoire. Au dernier jour de leur présence dans la maison de la mort, ils ont assisté au martyre de Aïssa Messaoudi, la voix célèbre de la Révolution algérienne. «Houna El Djazaïr touhayikoum min kalb El Djezaïr» est devenu, dans la bouche des tortionnaires de Aïssa Messaoudi, et pendant que ce dernier hurlait de souffrance : «Houna El Djezaïr touhayikoum min Dar Ennekhla…». La parodie de procès aligne les chefs d’inculpation : haute trahison, atteinte à l’intégrité du territoire, rébellion armée, association de malfaiteurs, etc. Chaabani, abasourdi par le déluge des fausses accusations qui s’abattent sur lui, est invité à dire un dernier mot, il s’exprime pour assumer la responsabilité de sa position. «j’ai défendu le bon droit de mon pays. Je m’en remets à Dieu.» Il réussira à épargner à ses compagnons d’infortune le sort qui va être, dans quelques heures, le sien. Le colonel Chaabani est condamné à mort. La décision est prise à la majorité des voix, moins une voix, celle du futur président de la République, Chadli Bendjedid ! Bendjedid n’a pas voté la mort alors que Houari Boumediène lui a personnellement téléphoné pour lui recommander, au nom de Ben Bella, de n’avoir aucune pitié. Les minutes du procès qui sont au ministère de la Justice en font foi. Chadli Bendjedid prendra sur lui de faire une ultime faveur à Chaabani, lui permettre de s’entretenir avant son exécution avec Cherif Kheiredine. Le condamné demande à son ami et compagnon de toujours de veiller à ce que sa mère soit soutenue dans l’épreuve et que son jeune frère, alors âgé de 15 ans, puisse poursuivre ses études Le décret portant décision de l’exécution de la sentence est signé le 3 août I964, par Houari Boumediène, AVANT LA TENUE DU PROCÈS. Ce décret précise les modalités pratiques de l’exécution. Houari Boumediène empêche le colonel Tahar Zbiri d’aller solliciter auprès de Ben Bella la grâce du condamné à mort. Tahar Zbiri passe outre l’interdiction de Boumediène. Dans l’illyouchine 18 qui nous emmène au Caire pour une réunion des chefs d’Etat arabes, le 3 septembre au matin, le colonel Zbiri revient, encore une fois, à la charge auprès de Ben Bella. Il ignore que la décision de faire exécuter Chaabani a été prise et qu’elle est irréversible ! Chadli Bendjedid, quand il évoque, à Tarf le 27 novembre 2008, avec quels termes injurieux l’appel à la clémence de Saïd Abid est reçu par Ben Bella, est encore au-dessous de la vérité. Ben Bella ne demande qu’à une seule personne son avis sur l’opportunité politique de faire exécuter la sentence, à Mohamed Harbi. Le révolutionnaire véhément, devenu l’icône de la bien-pensance algérienne outre Méditerranée, conseillera, «dans l’intérêt de la Révolution» le rejet de la grâce. Harbi, le lendemain de la mort de Chaabani, dira son sentiment dans un éditorial incendiaire de Révolution Africaine. La décision de faire exécuter Mohamed Chaabani, alors que tout plaidait pour la grâce, est la résultante tragique de deux calculs. Ben Bella voulait adresser un avertissement à Boumediène : «Voilà ce qui t’attend si jamais…» Boumediène voulait que Ben Bella commette l’erreur de sa vie en mettant à mort un colonel de l’intérieur, acte qui provoquera une réprobation horrifiée, surtout chez les moudjahidine. Le colonel Mohamed Chaabani meurt courageusement à 5 heures 14 m du matin, le 3 septembre I964, après avoir refusé d’avoir les yeux bandés et de demander son pardon à Ben Bella. Il regarde la mort en face. «A Dieu nous apparte…» La salve qui lui fracasse la poitrine le fait taire pour l’éternité… Le corps du supplicié subira le même sort que ceux des colonels Amirouche et El Haouès. Ahmed Bencherif refusera d’indiquer l’endroit où il l’a fait enterrer. La dépouille sera frappée de séquestre pendant 20 ans. La famille du colonel Chaabani remuera ciel et terre pour la retrouver, en vain.

* Mahdi Chérif officier retraité, ancien secrétaire général de l’EMG ANP 1963 – 1967


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>> Lire également

Enquête : Dans les coulisses du coup d’Etat qui a renversé Ahmed Ben Bella en 1965 (Episode1)

Enquête : Quand Ben Bella qualifie ses futurs putschistes de «marionnettes» (Episode 2)


Lire l'article original : Boumediene : « Il ne nous faudra pas plus de deux heures pour renverser Ben Bella » (Episode3) | DNA - Dernières nouvelles d'Algérie


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Amar Bentoumi : Pour Guérir l’Algerie , laissons parler les sages bien
pensants ,et les authentiques nationalistes, et non « les hauts salariés
corrompus



Posté par iferhounene le 05 fév 2009 à 12:27 | Dans : algerie, CULTURE, economie, histoire, kabylie

Me


Amar Bentoumi, premier ministre de la justice de l’Algérie indépendante




« Le pouvoir s’est offert une justice aux ordres… »

« Un
régime se définit d’abord selon la manière dont il traite le pouvoir
judiciaire. » François Mitterrand (Le coup d’Etat permanent)


En
politique, la sagesse est de ne point répondre aux questions. L’art de
ne pas se les laisser poser. Les souvenirs ne sont en général jamais
exempts de souffrance. Le droit et la loi, telles sont les deux forces :


de leur accord naît l’ordre, de leur antagonisme naissent les catastrophes



Le métier
d’avocat nécessite du souffle, de l’endurance et de la résistance. Il ne
diffère guère de celui du sportif. On y va comme en compétition et on
n’est pas toujours sûr de gagner. « Cette comparaison serait complète si
vous y ajoutiez le courage, la compétence, sans oublier qu’il faut se
mettre constamment à jour », suggère Me Bentoumi, ancien bâtonnier,
doyen des avocats qui a connu Nasser, Nehru, Castro, Tito, Gandhi, Mao,
Mandela, Arafat, le Che et une flopée des grands de ce monde. Même s’il
n’est pas sanglé dans son habit d’avocat, il a le verbe solennel,
orateur, mais aussi causeur. Amar nous conte avec un débit précipité
l’histoire de sa vie, plus d’un demi-siècle a


u service de la justice.

Le long
tamis des jours défile, agrémenté parfois de succulentes anecdotes qu’il
évoque avec sa sensibilité à vif, ses angoisses, ses espoirs enrobés
d’un humour insoupçonné. Une naissance à Constantine et une enfance ordinaire
à Alger. Les descriptions des endroits où il a vécu sont quasi
photographiques. Dans l’éternelle Cirta, à Zankat El Djazarine, pas loin
de Rahbat Essouf et à La Casbah d’Alger avec ses senteurs, ses bruits
et ses fureurs. Amar est


le fils de Hadj Arab, un travailleur besogneux originaire de Michelet qui a exercé de nombreux
métiers : limonadier, cheminot, journalier en s’offrant même quelques
épisodes syndicalistes qui lui ont valu bien des déboires. Au plus fort
de la crise économique de 1929, Hadj Arab, lâché par tous, a dû partir
gagner sa croûte ailleurs. Et cet ailleurs, c’est Alger que la petite
famille ralliera au début des années 1930. Quant à la mère de Amar, elle
est de Constantine. Sa famille est liée à la zaouïa locale des Amaria,
d’où le prénom de Amar, dont notre avocat a hérité.


DE constantine à Alger

Amar a
toujours été rétif aux embrigadements, en voulant être soi par soi-même,
sans les préjugés qu’inflige l’éducation ou plus simplement
la vie. « De par ma nature, confesse-t-il, je ne retiens que ce que je
comprends. On voulait m’apprendre coûte que coûte le Coran par la
“falaqa”, à tel point que mes pieds ont enflé, se souvient-il. Après, je
suis entré à l’école française Arago. » A Alger, Amar fit ses études
primaires à l’école Fatah, où il a eu comme camarade de table un certain
Rouiched. Puis l’école Sarrouy, enfin le brevet et l’école normale de
Bouzaréah. Il est ensuite versé au lycée de Ben Aknoun et Bugeaud où il
décroche son bac. Se


s sympathies pour le mouvement national sont déjà visibles en 1943.

« J’ai été recruté par Asselah Hocine, dirigeant
de l’équipe de basket-ball du MCA. Dans la formation mouloudéenne, les
deux arrières étaient Abdelmalek Temam et moi. En septembre 1943, j’ai
participé à la première manifestation lors de l’Aïd El Fitr. J’ai été
arrêté en compagnie de Sid Ali Abdelhamid et défendu par des avocats
français. Au bac, j’avais obtenu une très bonne note en philo et me
destinais à préparer une licence d’histoire, mais Asselah m’en a
dissuadé. » « Fais du droit pour être l’avocat du parti. C’est ce que
j’ai fait en prêtant serment le 10 juillet 1947 pour plaider toutes les


affaires où le PPA était impliqué. Cela s’est passé au barreau d’Alger aux côtés de mes collègues Gonon, Ali Boumendjel et Hocine Tayebi. »

Document officile de l’ALN -1959


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Redha Malek-un grand homme de la Révolution algérienne

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Mohand Oul hadj-Docteur BENABID-AMIROUCHE-encore BENABID-MEZAI-Adjout+un grand révolutionnaire à ses cotés


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Medeghri-Yaker-Tayebi Hocine

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Ces trois
avocats et d’autres confrères se réunissaient dans les sous-sols des
immeubles de la rue Tanger pour soulever le cas de disparitions de
militants après leur passage dans les dédales enfouis de la préfecture
d’Alger. Dès le déclenchement de la lutte, Amar fera partie du collectif
des avocats du FLN. Plusieurs d’entre ces robes noires, dont Amar,
seront arrêtés en février 1957 et incarcérés à Berrouaghia puis à
Bossuet. « J’en étais devenu le responsable clandestin avec Cheikh
Sahnoun comme muphti, aux côtés de Djennas, Kerbouche, Aroua, le Dr
Belouizdad. » Libéré et assigné à résidence, Amar s’évade
clandestinement d’Alger sur le Sidi Ferruch. Il traverse la frontière
italienne, rejoint Rome, où il est réceptionné par Tayeb Boulahrouf
avant d’être dirigé sur Tunis, où il est accueilli par M’hamed Yazid et
Ben Khedda.
Au
printemps 1959, Djllali M’barek, alors patron de l’UGTA, le sollicite
pour faire réapparaître L’ouvrier algérien. Sept numéros seront mis en
chantier. Puis Ferhat Abbas, en signe de solidarité, envoie des
intellectuels algériens pour aider le nouveau gouvernement marocain.
Amar en fait partie. Il travaille avec le MALG en restant en contact
avec la Fédération de France du FLN. Avant le cessez-le-feu, Amar est
rappelé par Ben Khedda pour faire partie de l’équipe rédactionnelle de
la Charte de Tripoli. Quelques semaines après, notre avocat est désigné
membre de la commission centrale du référendum. Amar participe également
à la proclamation de l’indépendance de l’Algérie en 1962. « La crise de
l’été 1962, je l’ai vécue de près, notamment après l’arrivée de Khider à
Alger. J’ai pris position pour le groupe de Tlemcen, parce que je
sentais la nécessité absolue d’une autorité centrale, quelle qu’elle
soit.


Il fallait
éviter le wilaysme, l’émergence des seigneurs de la guerre, tout en
restant vigilant, car l’armée française avait encore ses garnisons en
Algérie. J’ai été proposé député de Constantine à l’Assemblée
constituante et ministre de la Justice dans le premier gouvernement de
l’Algérie indépendante. » A ce titre, Amar n’a pas flirté qu’avec les
honneurs. « En 1964, le premier incident a lieu à propos de
l’arrestation de Boudiaf et de Kebaïli. Lorsque j’ai tenté de m’y
opposer, Ben Bella m’a rétorqué ‘’ça ne concerne pas la justice. C’est
un problème politique’’. J’avais pris des dispositions avec Medeghri en
matière d’assignation à résidence. Il ne fallait pas qu’on viole les
règles pour lesquelles on avait combattu. La deuxième affaire avait
trait à l’interventionnisme de Ben Bella auprès du procureur d’Oran,
M. Tilikete pour libérer deux assassins, présentés comme des
moudjahidine. »


Au parti,
dont le patron était Khider, Amar s’est appliqué à mettre en place les
fondements. « Lorsque Ben Bella a eu des démêlés avec Khider, il m’a
pris en grippe et m’a sorti du gouvernement. J’ai été arrêté avec Brahim
Mezhoudi. Je n’étais pas d’accord avec la manière de Ben Bella de
diriger et son socialisme à la noix de coco qui ne se soucie ni de la
rentabilité ni de la création de richesses. Ben Bella m’a convoqué et
m’a proposé le poste d’ambassadeur itinérant en Amérique latine, sinon
d’aller me faire soigner en Suisse. Comme j’ai refusé, il a envoyé ses
barbouzes pour m’arrêter. J’ai contribué, je pense, d’une manière
importante à la création du ministère. J’ai été élu bâtonnier en 1967 et
réélu en 1975. »


Ministre de la justice

La marche
de Amar a été stoppée net par une ordonnance créant un nouveau statut
d’avocat suscitée par Boualem Benhmaouda, garde des Sceaux à l’époque
qui avait fait annuler les élections. Mais en matière de plébiscite
notre avocat est gâté. Jugez-en ! Secrétaire général adjoint de l’Union
des avocats arabes, vice-président de l’Union internationale des
avocats, membre de l’Association internationale des juristes démocrates.
« Après, j’ai fait carrière dans cette association puisque élu en 1976
membre du secrétariat et secrétaire général en 1980. C’était la première
fois qu’un avocat issu du tiers-monde accède à ce poste. » En 1996,
Amar est élu président de l’association, au congrès de Cape Town et
élevé au rang de président émérite en 2000 avec Nelson Mandela.


Par devoir
de mémoire, acteur et témoin de l’évolution du nationalisme, Amar a
consigné son témoignage dans un livre autobiographique intitulé La
défense des patriotes. Il affirme que Abane Ramdane et Larbi Ben M’hidi
inséparables étaient les principaux artisans du congrès de la Soummam
qui a doté la Révolution naissante d’une véritable organisation
politique et militaire en citant Ben Khedda qui considérait ces deux
personnalités comme les deux faces de la même médaille. Parlant de Abane
qu’il a défendu en 1951, 1952 et 1953 et même à titre posthume « quand
il a été diffamé par Ali Kafi ».


Amar dira :
« Il était exigeant avec les autres et davantage envers lui-même. Il
avait tout fait pour fédérer les énergies, les forces nationalistes au
sein du FLN. » Me Bentoumi a fait partie avec son ami et complice Me
Verges du collectif des avocats de Saddam. « Les dés étaient pipés.
Bremer qui dirigeait pratiquement l’Irak avait gelé le code pénal, pondu
une Constitution sur mesure et créé une cour pénale pour juger le raïs
en contradiction de l’article 2 de la Charte de Genève et du droit
irakien. » « Il y a une justice à deux vitesses quand il s’agit de juger
des Arabes ou des Occidentaux, même nazis. Enfin il y a le timing de
l’exécution. A-t-on jamais vu quelqu’un exécuté le jour de Pâques ou de
Noël ? »


Soutien à la Palestine

Vedette de
procès retentissants, Amar a été au cœur de l’actualité et des
événements. Comme au procès de Abane et ses compagnons à Béjaïa en
1950/1951, ensuite à Alger. « C’était le début de ma carrière. Mes
premières plaidoiries. Ce procès m’avait profondément marqué. » Après
l’indépendance, Amar a pris une part importante dans le soutien à la
cause palestinienne. Il a défendu les fedaiyine, introduit l’OLP dans
les ONG. Il a été fondateur et président du premier comité de soutien à
la Palestine avec Pierre Chaulet, l’évêque Scotto et Abderahmane Farès.
Avec Mr Verges, il participe à la défense des Palestiniens dans les
procès d’Athènes, de Zurich et de Munich, d’où ses amitiés avec Arafat
et Aboudjihad. Il est observateur au procès de New York, où était
impliqué l’homme qui a abattu le rabbin raciste Kahan.


Amar a
défendu l’ancien ministre tunisien de la Défense, M. Mestiri, et
Bounailate du nom de cet officier marocain à la tête d’une armée
clandestine voulant destituer le roi Hassan II. Amar a aussi pris part
au procès du Printemps berbère et celui de Benflis. L’ancien ministre de
la Justice n’est pas tendre ave ce qui se passe actuellement dans le
domaine qui est le sien : la justice. « Il faudra des générations pour
la remettre sur pied. Il n’y a pas de justice, mais un appareil
judiciaire au service du pouvoir dans les affaires sensibles et dans les
autres affaires. Le magistrat est sous la surveillance à caractère
policier de l’inspection de la magistrature et sous le contrôle étroit
des directions de la tutelle. Les magistrats sont privés de leurs
attributions, notamment les chefs de juridictions, dont l’autorité sur
leurs collègues a été confisquée.


Ces
magistrats sont jetés en pâture, même si certains d’entre eux ne sont
pas à la hauteur. » Amar en parle avec passion et colère. Les émotion
fortes font toujours un bruit pas comme les autres et l’avocat hausse le
ton pour dire son opposition aux « méthodes peu orthodoxes employées
qui dénaturent la justice. » Aussi, pour lui, dire des vérités devient
un pari risqué. Le harcèlement de la presse ne l’étonne pas de la part
d’un pouvoir qui est dans son rôle. « Le pouvoir est confronté à deux
impératifs. Le premier est de ne pas apparaître comme un pouvoir qui nie
la liberté d’expression et d’autre part, limiter cette liberté dans ses
diverses expressions médiatiques.


Ne parlons
pas des médias lourds qui sont carrément ‘’privatisés’’ par le
pouvoir. » Malgré tous les avatars, Amar demeure optimiste pour l’avenir
de l’Algérie. « Ce système est le dernier avant l’accession de
l’Algérie à la démocratie et des Algériens à la jouissance de leurs
droits individuels et collectifs », pronostique-t-il. La justice un
utopique dessein ? Doit-on s’y accrocher inexorablement ou s’aligner sur
les thèses de cette célèbre juriste qui s’était interrogée un jour :
« Je ne crois pas que la justice règne jamais parce que l’injustice
n’est pas dans les lois, elle est en chacun de nous… »


Parcours

Amar
Bentoumi est né le 26 décembre 1923 à Constantine. Il est l’avocat
conseil des nationalistes, notamment des militants du PPA/MTLD et du FLN
après le déclenchement de la lutte armée en 1954. Interné en 1957 à
Berrouaghia et à Bossuet, assigné à résidence, il s’évade pour aller à
Rome puis à Tunis, où il est rédacteur de L’ouvrier algérien, organe
central de l’UGTA. Rapporteur de la commission justice pour les accords
d’Evian, il participe à la rédaction de la Charte de Tripoli et à
l’organisation du référendum. Il figure dans le premier gouvernement de
la République algérienne en tant que ministre de la Justice, garde des
Sceaux. Arrêté en 1964, il reprend son métier d’avocat. Bâtonnier de
l’Ordre national, il sera élu et réélu durant de longues années. Amar
défend la cause palestinienne et prend part à des procès retentissants
comme celui de Saddam. Me Bentoumi a obtenu de nombreuses distinctions
et figure en bonne place dans les instances judiciaires internationales.
A 86 ans, il fréquente assidûment son cabinet d’avocat.




Par Hamid Tahri


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Ben Bella, l’agneau qui se voyait plus méchant que les loups

Si l’Histoire de l’Algérie est fâchée avec la vérité, il est un cas sur
lequel tous (historiens, témoins, acteurs directs, journalistes,
politiques) sont résolus à mentir. C’est l’épisode de la passation de
pouvoir entre la France et l’Algérie, en 1962. Le tabou des tabous. Il
est donc normal que le principal personnage de cette transition
frelatée, Ben Bella, soit sous l’emprise de l’imposture permanente et du
mensonge soigneusement entretenu.
On aura beau savoir que Ben Bella
est le fossoyeur de tous les rêves des Algériens, le mythe persiste,
colporté de plume en plume, d’ouvrage en ouvrage, un demi-siècle durant.
Qui est donc Ahmed, Ben Bella ? Comment s’y est-il pris pour supplanter
des révolutionnaires aguerris, Abbane, Krim, Abbas, Khider, etc. ? Ben
Bella est-il un patriote ou un être méprisable ?
Vu du côté
français, il a fait la campagne d’Italie et s’est distingué par sa
bravoure. Il a été décoré de la main du général de Gaulle. Missionné
pour garantir l’«étroite coopération avec la France» de l’Algérien
indépendante, il a fait de son mieux, n’hésitant pas à livrer les
populations touarègues aux radiations nucléaires pour permettre à son
mentor de se forger l’arme de la dissuasion. Mais, somme toute, le
compte n’y fut pas et l’Algérie se mua vite en intarissable source de
turpitudes pour la France. Vu du côté algérien, c’est la dictature, la
police parallèle, les exécutions sommaires, les privations, les injures,
le vol, le viol, et le renvoi aux calendes grecques de tous les rêves
de liberté. Au final, Ben Bella aura trahi tout le monde…
Adjudant de l’armée française, arriviste accompli
Le premier épisode de son militantisme a lieu à la fin des années 1940.
Et le seul acte «révolutionnaire» à mettre à son actif est le rapt de
la Poste d’Oran. Un travail d’amateur délinquant. C’est Mohamed
Belouizdad, créateur de l’organisation secrète, l’OS, branche militaire
du PPA-MTLD, qui y initie Ben Bella. Belouizdad succombe à la
tuberculose. Hocine Aït Ahmed le remplace. Puis, «crise berbériste»
aidant, celui-ci est destitué par Messali, au profit de Ben Bella, sous
la direction duquel l’OS est démantelée en un temps éclair.


Tous les hommes de valeur de cette révolution se sont vite méfiés de
lui. En 1956, dit Ferhat Abbas, «le Dr Lamine Debaghine […] me mit en
garde contre Ben Bella.» Quant à Abbane Ramdane, il ne mâche pas ses
mots : «C’est Ben Bella qui dénonça en 1950 notre organisation spéciale,
l’OS ; du moment qu’il était arrêté, rien ne devait subsister après
lui. C’est un ambitieux sans courage. Pour parvenir à ses fins, il
passera sur le corps de ses amis. Il est sans scrupule.» Il fit mieux,
il passa sur le corps de son peuple, avec des chars.
Alors que tous
les appels des maquis en mal d’armement restent lettre morte – pour
rappel, cette logistique est la principale mission de Ben Bella au Caire
–, «Ouamrane et Abbane échangèrent […] avec Ben Bella une
correspondance tumultueuse, raconte Yves Courrière : « Envoie-nous des
armes ou des fonds pour les acheter, écrivaient les Algérois. Il faut au
moins 100 millions. » « Impossible, répondit Ben Bella, nous n’avons
pas un sou ! » La réponse arriva sous forme d’ultimatum : « Si vous ne
pouvez rien faire pour nous à l’extérieur, revenez crever avec nous.
Venez vous battre. Autrement, considérez-vous comme des traîtres ! »»

Lors d’une réunion des chefs de la révolution au Caire, en 1956, «Ben
M’Hidi, l’un des plus courageux Fils de la Toussaint, n’avait jusque-là
fait qu’observer les hommes et écouter attentivement les propos. Depuis
le début de la conférence, il semblait écœuré par l’attitude dominatrice
de Ben Bella. « Dis-donc, Grunther, tu te prends vraiment pour le
leader ! C’est toi qui commandes tout ! » L’allusion de Ben M’Hidi
cingla Ben Bella. Perdant son sang-froid, il bondit sur son compagnon
pour le frapper ! Aït-Ahmed et Mahsas l’en empêchèrent.
Ben Bella
dut sans répliquer entendre Ben M’Hidi, méprisant, dénoncer ses méthodes
personnelles et surtout son manque d’empressement à trouver des armes. «
Tu as raison Ben Bella. Il est temps que chacun regagne son poste. Le
mien est à l’intérieur. Je vais rejoindre Krim et Abbane. Au moins,
là-bas, nous lutterons.» Et ils moururent, laissant le champ libre à Ben
Bella, l’incurable comploteur.
On chercherait en vain, hors de ses
marionnettistes (Hervé Bourges, Abdelaziz Bouteflika, Fathi al-Dib,
etc.) quelqu’un qui dirait du bien de Ben Bella. Le parti pris ici est
de faire confiance au portrait qu’en donnent ses camarades de lutte… Un
homme rongé par une ambition à laquelle ses potentialités intrinsèques
ne le destinent pas (il avait le niveau de 4e), égocentrique, «sans
scrupules» et prêt à passer «sur le corps de ses amis» pour parvenir à
ses fins.

Deux épisodes principaux de l’épopée d’Ahmed Ben
Bella méritent l’attention : sa rencontre avec Fathi al-Dib, pour le
compte de Nasser au Caire, et avec Hervé Bourges, pour le compte du
général de Gaulle. Chaque fois, il dut trahir la cause algérienne pour
préserver l’éclat de son étoile. Manœuvrant dans un univers hostile,
démasqué par tous les vrais combattants, il n’en finit pas moins premier
Président d’une Algérie dite indépendante.
Lors de son arrestation
en 1950, nul ne porte atteinte à son intégrité physique (c’est lui qui
en témoigne). Pourtant, la police parvient en un temps record à
démanteler tout l’appareil aux destinées duquel il présidait. Plus de
500 personnes arrêtées, dans une organisation secrète soumise à un
cloisonnement sévère. En comparaison, «le Constantinois fut relativement
peu touché par la répression. L’appareil, dirigé par Boudiaf, resta
pratiquement intact, à la différence de l’Oranie où il fut décapité»,
note Gilbert Meynier.
Emprisonné à la prison de Blida, il s’en évade
dans des conditions rocambolesques. Les témoignages postérieurs font
peser de lourds soupçons sur Ben Bella. La suite de l’histoire démontre
qu’il est, sans l’ombre d’un doute, déjà un agent de la DST. Il se
retrouve alors au Caire. Partant de là, pour faire sens, son action doit
être considérée sous deux points de vues antagonistes. Pour les
Algériens, il doit seconder Mohamed Khider et Aït Ahmed pour ravitailler
les maquis en armes. Pour la DST, il s’agit d’avoir un œil sur Gamal
Abdel Nasser dont les visées nationalistes inquiètent déjà et, bien sûr,
contrarier autant que faire se peut l’efficacité des réseaux du FLN de
l’extérieur.

«Officiellement, c’est Mohamed Khider que le MTLD
a envoyé au Caire, Ben Bella et Aït Ahmed ne l’ont rejoint que plus
tard. Mais Ben Bella a pris le pas sur ses deux compagnons grâce aux
bonnes relations qu’il a su lier avec […] Gamal Abdel Nasser.»

Est-ce quelque charisme irrésistible qui lui a permis de trouver ces
bonnes grâces ? En fait, note Yves Courrière, dès son arrivée, «Ben
Bella avait été humilié de ne pouvoir s’exprimer qu’en français […].
L’exposé de Ben Bella « en français » avait fait scandale devant la
Ligue arabe où il avait expliqué la situation algérienne.» Venu pour
organiser la logistique de la guerre, il n’obtint rien des Égyptiens.
«Les services spéciaux de Fathi al-Dib […] auraient volontiers fourni
armes et subsides si Ben Bella s’était engagé à participer en tant que
section algérienne au grand projet nassérien de Révolution
Nord-Africaine, groupant la Tunisie, l’Algérie et le Maroc. […] Pour
l’heure, Ben Bella ne pouvait jouer d’autre rôle que celui de « public
relations » de la révolution en marche. L’action ne pouvait venir que
d’Algérie, que de l’Intérieur.» Mais ce n’est que partie remise.

C’est Fathi al-Dib qui est l’homme de Nasser pour la révolution
algérienne, et qui fait sienne la cause de Ben Bella. Or, pour ce
dernier, fournir des armes au maquis, c’est aider l’ennemi, les
«Kabyles». Comment montrer qu’il est le chef de la Révolution
algérienne, sans ravitailler les maquis ? Cet exploit improbable, Ben
Bella le réussit néanmoins. Quelle promesse fit-il pour convaincre
Nasser de l’aider dans sa quête ? On peut supposer que le Président
égyptien n’est pas homme à se contenter d’effusions amicales.
Dès
lors, «Ben Bella fait bande à part, avaient confié les deux beaux-frères
[Mohamed Khider et Aït Ahmed], il joue un jeu bizarre avec Nasser. Il
est le seul à le voir. Ils semblent assez liés.» Voyant que Fathi al-Dib
n’a que le nom de Ben Bella à la bouche, Aït Ahmed explose : «Apprenez,
Major, qu’il n’y a dans notre mouvement aucune place prépondérante. Je
suis l’égal de Ben Bella, tout comme l’est Khider et les chefs de
l’intérieur.»

Mouvement d’humeur qui n’est pas du meilleur
effet. Et pour enfoncer le clou, Ben Bella dépeint ses camarades comme
de dangereux activistes, «accusant Khider, le fidèle à la religion,
d’être un frère musulman, secte dont Nasser se méfiait comme de la
peste, et Aït d’être communiste. Seul Ben Bella jouait le rôle de « pur
révolutionnaire ne pensant qu’à son pays. La manœuvre préparée par
l’ancien adjudant auprès de ses amis égyptiens allait coûter très cher
au FLN. […] Mais dès que la grossière tactique serait connue à Alger,
elle allait provoquer une crise entre l’intérieur et l’extérieur qui
allait influer sur toute la conduite des opérations en Algérie. Elle
marquait en outre le début d’une rivalité sans exemple entre Ben Bella
et Abbane Ramdane.»
si Ben Bella est un agent des services français…
Une crise profonde, en 1956 déjà ? Si Ben Bella est un agent des
services français, il aspirerait illico à une médaille militaire et sa
promotion serait assurée. Si Khider est un «frère musulman», Aït un
«fanatique Kabyle», Abbane apparaîtra bientôt aux yeux de Fathi al-Dib
comme un poison au sein de la révolution algérienne et Ben Bella
l’antidote. D’autant que les récriminations envers l’Égypte sont
injustifiées puisque Nasser finance de fait depuis des mois le
ravitaillement en armement des maquis algériens.
Les injures dont
Ben Bella est la cible ne peuvent dès lors provenir que de velléitaires
incompétents et ingrats. Et lui-même de se donner le beau rôle, balayant
tout cela d’un revers de main, plaidant même l’indulgence, comme Jésus
sur son chemin de croix proclamant : «Ne les condamnez pas mon [frère],
ils ne savent pas ce qu’ils font.» Ben Bella, le saint Ben Bella !

Reste à s’assurer que les armes ne parviennent jamais aux maquis
algériens laminés par la répression. Pour cela, Ben Bella parvient à
convaincre le chef des services égyptiens que le meilleur itinéraire est
non pas via la Tunisie et la Libye, mais par le Maroc et la wilaya 5,
au prix d’un immense et périlleux détour. La wilaya 5 contrôlée par
Boussouf. Les armes parvenant au Maroc s’entassent ainsi dans des
hangars et les maquis intérieurs continuent à se battre dans des
conditions indigentes. Cela donne lieu à quelques révoltes que
Boumediene, successeur de Boussouf dans l’Oranie, réprime – comme
d’ordinaire – dans le sang.

La double propagande égyptienne et
française fait progressivement de Ben Bella «le leader de la Révolution
algérienne». Si bien que lorsque, en juin 1957, au Congrès du Caire,
Abbane Ramdane tente de dénoncer l’imposture auprès du chef des services
secrets égyptiens, il tombe sur une fin de non-recevoir. Voici ce qu’en
dit Fathi al-Dib lui-même. «Nous devions cependant prendre conscience
du fait […] qu’il nous faudrait éviter les situations pleines d’embûches
qui ne manqueraient pas de se produire du fait de la présence d’Abbane
Ramdane, connu pour son ambition personnelle.»
Comment un Kabyle,
laïque, aspirant à mettre l’Algérie sur les rails de la démocratie, de
la modernité, peut-il convaincre le chef des services égyptiens que Ben
Bella est un traître à la cause de son peuple ? Le même Ben Bella qui,
depuis des années, s’est attaché à le convaincre qu’il était seul à se
battre pour préserver l’Algérie future dans le giron de
l’arabo-islamisme. Un Ben Bella qui, selon les termes mêmes de Fathi
al-Dib, «faisait de son côté tous les efforts possibles pour empêcher
l’éclatement de la révolution, même au détriment de sa santé.» Et pour
couronner le tout, Abbane explique que Ben Bella a failli dans sa
mission de ravitailler les maquis auprès d’un Fathi al-Dib qui s’est
personnellement chargé depuis des mois des envois.
c’est Fathi al-Dib qui fait tout le boulot
Car c’est Fathi al-Dib qui fait tout le boulot ; c’est lui qui affrète
les bateaux (7 envois, selon ses dires) pour assurer leur transport. Le
rôle de Ben Bella s’est borné à fournir les coordonnées de destination,
au Maroc. Charge à Boussouf et à Boumediene de faire que leurs légitimes
destinataires ne les reçoivent ensuite jamais. Si l’on examine Ben
Bella sous l’angle du révolutionnaire algérien, il a totalement failli.
En revanche, si on le conçoit comme un agent de la France, alors il a
accompli sa mission à la perfection.
À ce stade, Ben Bella peut même
s’offrir le luxe de la grandeur : les reproches que lui font les maquis
de l’intérieur, disait-il à Fathi al-Dib, il faut les mettre sur le
compte de la fatigue des combattants, plaidant pour que «ces événements
n’aient pas de conséquences sur la livraison d’armes par l’Égypte et que
ce conflit soit minimisé.» Et de surtout ne pas tenir rigueur à ses
invités : «Ben Bella m’avait demandé de bien accueillir Ferhat Abbas et
son groupe pour leur remonter leur moral et leur faire sentir que
l’Égypte soutenait leur cause.» Machiavel aurait-il ressuscité en cet
homme ?
Au sortir de ce congrès, les leaders de la révolution
s’alignent sur les thèses des militaristes, les «3 B» [colonel Belkacem
Krim, Ben Tobbal Lakhdar, Boussouf Abdelhafid]. Éconduit par Fathi
al-Dib, Abbane ressort écœuré. «Contre les thèses sécularisées de la
Soummam, satisfaction était aussi donnée à Ben Bella : la résolution
finale réaffirmait la légitimation religieuse : la future « république
algérienne démocratique et sociale » ne serait « pas en contradiction
avec les principes de l’islam. »».
Les germes de la dictature sont
plantés. Abbane exprime alors son souhait de rentrer en Algérie pour
reprendre la lutte aux côtés des maquisards. Sentant le danger, décision
est prise de le liquider physiquement. Il est étranglé dans une ferme
isolée à la frontière marocaine où Belkacem Krim et Bentobbal
l’entraînent pour le remettre à Boussouf.

En apprenant
l’assassinat d’Abbane, Ben Bella exulte : «En vérité, nous n’avons
jamais désespéré de voir un jour se normaliser nos relations. Il est en
effet impensable qu’une révolution comme la nôtre puisse se laisser
égarer par une ou plusieurs personnes quand ces dernières sont animées
d’un esprit malsain, partout intéressé et partout malfaisant. Nous ne
pouvons que vous encourager dans cette voie de l’assainissement. Il est
de notre devoir à tous, si nous tenons à sauver la révolution de
l’Algérie et de demain, de nous montrer intraitables sur le chapitre de
l’épuration […] Nous considérons qu’un grand pas vient d’être fait. Le
devoir vous commande, vous qui êtes libres, de ne pas vous arrêter là
[…] Nous ne pouvons que vous appuyer dans la chasse de tous les germes
de la décomposition qui ont pu se faufiler dans notre sein.»
La
radio «Saout al-Arab» forge la légende Ben Bella, charge à Fathi al-Dib
de remplir la mission qui lui incombe. Une fois cependant, il décide de
donner de sa personne. Et quel navire Ben Bella affrète-t-il ? L’Athos,
un yacht universellement connu pour le trafic d’armes : «J’avais eu une
discussion très vive à ce sujet avec Ben Bella […], raconte Fathi
al-Dib, car j’avais déjà préparé pour le voyage [un autre navire…] le
Davax et d’autre part parce que je n’avais confiance ni en Ibrahim Nayal
[l’armateur], ni dans le navire Athos […]. Au cours de cette
discussion, je m’étais rendu compte que Ben Bella voulait occuper le
devant de la scène depuis son conflit avec Abbane.» Il était temps !
Mais cette prise de conscience n’infléchit en rien le soutien qu’il
accorde à son protégé.
Qu’advient-il à l’Athos ? Il est arraisonné
au large du Maroc. Ce qui permet à la France de présenter au monde la
preuve que l’Égypte finance «les terroristes», de claironner que le
Caire est le siège de la rébellion et que Ben Bella en est de ce fait le
«Chef» suprême. Rappelons qu’à ce stade, l’homme n’a à son actif que
l’attaque de la Poste d’Oran, un fiasco, et l’armement de l’Athos,
arraisonné en haute mer par la marine française. Ou l’art de faire
d’aucune pierre deux coups.
De la prison dorée à la Présidence

Le 22 octobre 1956, l’avion transportant la délégation extérieure de la
révolution de Rabat à Tunis est arraisonné en plein ciel. C’est encore
un de ces épisodes invraisemblables de cette drôle de guerre. Toujours
est-il que voici maintenant Ben Bella en prison. Dès lors, la Fédération
de France ne lésinera pas sur les moyens pour l’en extraire.


Les réseaux Curiel, les réseaux Jeanson, tout ce qui compte comme
«porteurs de valises», amis de la cause algérienne, se mettent à la
disposition de la rébellion pour l’aider à s’évader. Ben Bella laisse
faire et attend. À l’approche du jour J, il trouve un prétexte
quelconque pour différer l’opération ou pour l’annuler. Les bruits ont
couru sur le projet d’une évasion qui se solderait par la liquidation
des fuyards. Un homme y a cru fermement : Fathi al-Dib.
Qui se donne
pour mission de sauver le soldat Ben Bella à tout prix. «Nous avions
chargé, fin 1957, nos attachés militaires en Europe de prendre contact
avec des spécialistes des opérations d’évasion parmi ceux qui avaient
déjà une réputation», raconte-t-il. Il renonce à ce premier projet, trop
violent à son goût, avant de se voir proposer une autre option, «grâce à
deux hautes personnalités allemandes, aidées par huit jeunes nazis, et
en s’appuyant sur l’accord conclu avec l’un des directeurs de la prison
de la Santé [contre] 15 000 livres égyptiennes.»
Tout est prêt. Mais
Fathi al-Dib a la malencontreuse idée de soumettre le plan à Ben Bella.
«Après quatre jours d’attente, […] à la demande de Ben Bella, […]
l’opération [est reculée] de trois jours […]. Quatre jours plus tard,
les Allemands nous [font] savoir que Ben Bella demandait de reculer
encore de huit jours l’opération et que, pendant ce temps, il ne fallait
pas le contacter. […] Le 28 juin, […] l’avocat de Ben Bella était
arrivé […] pour m’informer que l’opération avait été découverte.»
La
raison pour laquelle Ben Bella ne voudrait quitter la prison pour rien
au monde tient à cela qu’il est au centre de toutes les sollicitudes.
Une fois au chaud en Métropole, il n’est pas question pour lui de
repartir au front, où on «purge» à tout va. Il faut préparer l’avenir,
l’Algérie indépendante. Nasser veut quelqu’un pour l’ancrer dans le
giron «islamique et arabe». Ben Bella sera cet homme-là.
Mohamed Bourges, et Hervé Bella, ou vice versa…
Hervé Bourges est missionné pour chaperonner cet ambitieux
désillusionné. Cela se passe alors que de Gaulle piétine, et n’entrevoit
de porte de sortie que dans une «Algérie indépendante, en étroite
coopération avec la France». Il lui faut quelqu’un pour assurer cette
perspective. Ben Bella sera cet homme-là.
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Hervé Bourges dans les années 1990
Ben M’Hidi est éliminé par le 11e de Choc du général Aussaresses, après
qu’il ait décliné l’habituelle offre de «retournement». Abbane est
étranglé dans une ferme isolée à la frontière marocaine par les «3B». Ce
sont les deux yeux lucides de la révolution qui sont ainsi crevés, l’un
par les militaires français, l’autre par les militaires algériens. Les
«3B» : Trois colonels qui éprouvent l’un pour l’autre une haine sourde.
Une aubaine pour plus ambitieux et plus résolu qu’eux : Boumediene.
Lequel a besoin d’une caution politique. Ben Bella sera cet homme-là.
Ben Bella est prêt à servir la cause de quiconque lui promet un bel
avenir. Fathi al-Dib le bien nommé chef des services égyptiens,
Boumediene, le sanguinaire, de Gaulle, l’éternel Sauveur pressé par le
temps. Trois hommes aux grandes ambitions, et dont les plans désignent
le futur président de l’Algérie : Ben Bella. Pourquoi voudrait-il
quitter cette prison dorée où tout lui sourit ?
On connaît
l’argumentation de Boumediene pour l’enrôler, on peut aisément imaginer
celle développée par Hervé Bourges. Ben Bella, c’est l’homme de la
campagne d’Italie, un «vrai» révolutionnaire, que des gueux sans
épaisseur risquent de reléguer à des accessits insignifiants. Qu’il joue
le jeu du Général et il sera le prochain Président.
Un coup d’État, et l’impossible partage du butin…
Ben Bella sort de prison après la signature des accords d’Évian, qu’il
s’empresse de dénoncer, disqualifiant en un coup toute la frange
politique de la révolution. Reste à s’imposer par la force. Il s’envole
illico pour le Caire.
Fathi al-Dib l’accueille : «Ben Bella a
cherché refuge auprès du Président Gamal Abdel Nasser pour lui exposer
le plan qui pouvait lui permettre d’affronter les partisans du compromis
avec la France et pour lui demander de renforcer ses effectifs afin de
donner plus de force à son action.» Il rencontre Nasser en tête à tête.
«Ben Bella avait renouvelé sa demande de soutien à Nasser pour faire
face à la situation de l’intérieur, surtout du côté de l’armée. […]
Nasser lui avait demandé de quelle nature étaient les difficultés
auxquelles il s’attendait. […] Nasser avait conclu en assurant Ben Bella
du soutien inconditionnel et illimité de la RAU à l’Algérie. Après
s’être donné l’accolade, les deux chefs s’étaient séparés.»
À la
frontière tunisienne, l’armée des frontières commandée par Boumediene
reçoit rapidement du renfort. Ses troupes, raconte Fathi al-Dib,
«seraient appuyées par une force aérienne de : 12 Mig-17 (dont les
pilotes avaient été formés sur ces appareils). 8 hélicoptères d’une
capacité de 16 hommes. 1 poste central radio. Tous les techniciens
égyptiens nécessaires pour faire fonctionner l’aéroport. Nasser avait
lui-même porté la mention suivante sur le plan : « La livraison sera
effectuée dans 30 jours à partir du 9 avril 1962″ pour les matériels
[suivants] : 100 jeeps, 100 camions de 3 tonnes, 100 camions divers, 20
cuisines roulantes, 5 voitures de dépannage, 50 voitures 750 kg pour
tracter les canons, 40 voitures blindées, 6 Mig-15, 6 avions égyptiens.»
Mais contre qui cette armada restée inerte durant les années de feu
compte-t-elle se battre, puisque la France a entériné la fin de la
colonisation ?
Fort des garanties de Nasser, Ben Bella se rend le 11
avril à Tripoli pour préparer le Congrès qui sonnera le glas de la
liberté pour les Algériens, inaugurant le malheur d’un million
d’Européens, et la mort pour plusieurs milliers d’entre eux, tandis que
la chasse déjà ouverte au harki fera au moins 50 000 victimes. «De leur
côté, écrira Fathi al-Dib, Khider et Aït Ahmed étaient restés au Caire
quelques jours pour se reposer avant de rejoindre Tripoli.» Il est des
repos de guerrier qui se paient cher.
l’armée des frontières envahit l’Algérie
Telle une nuée impitoyable, l’armée des frontières envahit l’Algérie.
Elle écrasera sous les chenilles de ses blindés ce que les opérations du
général Challe ont épargné de l’ALN, l’armée de libération nationale.
Et jettera aux orties tous les rêves de liberté des Algériens.

Devenu président, Ben Bella doit maintenant payer la facture de son
couronnement. Il a dû tout promettre à Nasser. Promettre le même tout à
de Gaulle. Et le promettre de nouveau à Boumediene. C’est dans cette
conjoncture où une proie frêle, l’Algérie, est convoitée par maints
prédateurs, que se déroulent les premiers pas de l’Indépendance. Une
indépendance de polices parallèles, de services égyptiens, de services
français, de KGB, de torture, de liquidations sommaires, d’exodes,
d’exils, de deuils individuels par millions que les décennies
n’apaiseront jamais. Une dictature qui ira en se sophistiquant.
Mais
Ben Bella en avait posé les jalons essentiels : pour régner en maître,
il suffit d’accuser les uns d’être «frères musulmans, secte dont le
monde se méfie comme de la peste», et les autres d’être «communistes» ou
«berbéristes». Un cocktail imparable, pour diviser et régner, une
malédiction que le peuple algérien ne parvient pas à conjurer cinquante
ans après…
Lounis Aggoun


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