2éme partie
L¹immigration algérienne au Maroc à l¹époque coloniale (5/28/2006)
Le cas de la communauté algérienne à Oujda
Les conditions socio-économiques
de la communauté algérienne à Oujda
L¹étude vise l¹évolution du statut de ces immigrés au sein de la société marocaine en général et dans la ville d¹Oujda plus particulièrement.
Leur condition a évolué au fur et à mesure des différentes vagues d¹immigrations. Les premiers exilés, les Mouhajirins, ont été bien accueillis et bien traités par le Makhzen marocain. Il y avait parmi eux de nombreux commerçants aisés et des personnalités influentes. L¹arrivée constante de nouveaux flux migratoires a modifié profondément la composition sociale de cette communauté. En fait, à Oujda, les Algériens n¹étaient qu¹à « demi-étrangers » rapporte H. Lombard. Leurs caractéristiques sociologiques ont aussi évolué durant un siècle d¹immigration, En fonction de plusieurs facteurs liés à la politique coloniale de la France en matière d¹immigration. En 1938, M. Decroux qualifie la situation des Algériens au Maroc d¹«anormale » et de moins nette qu¹en Tunisie. Ils sont traités parfois comme des Français, tantôt comme des Etrangers et tantôt comme des Marocains.
«Les Algériens ne sont assimilés ni aux citoyens Français, ni aux étrangers, ni aux Marocains. Ils ne peuvent comme les citoyens, accéder à tous les emplois du Protectorat, ils ne sont jamais choisis comme assesseurs pour former les tribunaux criminels, ils ne sont pas membres du collège électoral français, etc.
Ils ne peuvent pas, comme les étrangers, adhérer aux syndicats professionnels, participer à l¹¦uvre de la justice française en qualité de jurés. Ils ne participent pas, comme les Marocains, à la vie politique du pays, ils ne font pas partie des Chambres consultatives, du Conseil du gouvernement, etc. (Š) Comme les Marocains, ils sont affectés à un cadre spécial de fonctionnaires, n¹ont pas la liberté syndicale, etc.»20
A début du Protectorat, ils constituaient un groupe social intermédiaire entre la colonie française et les Marocains. Ils étaient mieux traités par les autorités coloniales et jouissaient d¹une place avantageuse dans la société « oujdie ». Ils servaient l¹administration comme intermédiaires entre Français et Marocains : interprètes, fonctionnaires, enseignants, etc. Mais à partir des années trente, la situation évolua au préjudice des Algériens. Ils ont peu à peu perdu leur place d¹intermédiaires. L¹administration française favorisa de plus en plus le recrutement des Marocains. Mais dans l¹ensemble, les Algériens étaient plus avantagés. Chez les Algériens le taux de scolarisation était plus élevé, ils avaient aussi plus accès aux professions libérales. Certains ont même pu parvenir à occuper de hauts postes à Rabat. C¹est le cas de Kaddour Ben Gharbit (1873-1954), directeur du protocole impérial et de la chancellerie, Maameri vizir du palais royal et du protocole auprès du Sultan Mohamed V. 21
Une autre caractéristique de la communauté algérienne d¹Oujda, c¹est qu¹elle a conservé son particularisme. Cela est dû principalement à l¹arrivée successive des nouveaux immigrants. Malgré la similitude des deux sociétés, algérienne et marocaine, et les liens religieux et culturels qui les unissent, les Algériens formaient une communauté à part. Les premiers arrivés avaient une assemblée «la jamaa des gens instruits» qui défendait leurs intérêts auprès de l¹Administration. En 1933 celle-ci est remplacée par l¹Amicale des Algériens d¹Oujda. En réalité ce particularisme ne concernait qu¹une partie des Algériens, la classe aisée qui se distinguait par son comportement extérieur, sa mentalité, son degré d¹occidentalisation. Appelés par les Oujdis les « évolués ». Il s¹agit de l¹ancienne bourgeoisie issue du commerce et des professions libérales et une partie des enseignants. Les mariages entre les membres de cette communauté et les Marocains sont restés très limités. L¹enquête de H. Lombard recense en 1952 quinze mariages «mixtes» seulement. Mais, selon Y. Katan22 dans les milieux populaires les mariages devaient se faire « à l¹amiable» et ne laissait aucune trace administrative.
Evolution numérique et origines
de la communauté algérienne d¹Oujda
- l¹origine de cette immigration :
Les Algériens installés à Oujda et sa région venaient en majorité de l¹Oranie, en particulier de Tlemcen et Nedroma. A. Guitouni23 établit une liste des patronymes répartis par l¹origine géographique. Selon cette liste, sur les 131 noms de familles, l¹Oranie en totalisait 88% répartis de la façon suivante : Tlemcen 33% ; Nedroma 30%, 25 % provenaient des autres localités de l¹Oranie telles que Mascara,Marnia, Mostaganem...etc.
Le reste des patronymes, soit 12% provenait de Kabylie, du Sud oranais ou d¹ailleurs.
- L¹évolution numérique :
Avant l¹occupation française d¹Oujda en 1907 les Algériens ne dépassait pas le millier ; et 1.377 en 1910. Ce nombre connaîtra une augmentation rapide après l¹instauration du Protectorat comme le démontre le tableau suivant :
Source : L. Voinot, 1912, M. Lemaille, 1937. Services Central des Statistiques, Rabat. Cité par A. Guitouni, 1995, p.95.
- Activités professionnelles et répartition géographique à Oujda.
Il n¹y avait pas de quartier algérien à Oujda. Cependant au début du XX e siècle ils étaient plus nombreux dans les villages suburbains comme Dhar Mellah ou « zone des jardins », Darb M¹Basso. Ils avaient même leur propre mosquée.24 Avec l¹afflux intensif d¹Algériens au cours de l¹après guerre et l¹arrivée massive d¹ouvriers sans qualification, ils s¹installent dans les quartiers périphériques. Soit à l¹ouest d¹Oujda tels que Villages Khaloufi, Chrif-N¹Gadi et Mir Ali, où ils représentaient 3,25% de la population totale en 1955, soit dans les villages du Nord où il totalisent 1824 soit 17,49% de la population totale. Dans les villages dits « agricoles » du 3ème arrondissement ils représentent 22%. (644 personnes).25
On peut suivre les activités professionnelles exercées par les Algériens d¹Oujda, grâce aux indications reproduites par M. Lemaille en 1937, de l¹enquête de Lombard en 1951 et de l¹Annuaire marocain.26
La distribution dans les professions en 1937 établie par Lemaille27 permet de remarquer que les chefs d¹entreprise sont plus nombreux que les ouvriers ou les employés. On peut regrouper ces renseignements de la façon suivante :
Les renseignements qui ressortent de l¹enquête de M. Lombard en 1951 qui porte sur 3.200 foyers sont les suivantes :
-620 dans l¹agriculture
-760 dans le commerce
-240 dans l¹artisanat
-808 ouvriers
-262 fonctionnaires
-10 professions libérales dont : (2 médecins, 3 avocats, 1 défenseur agrée, 3 pharmaciens, 1 dentiste). Plus une population flottante de 500 chefs de familles profitant de l¹ « osmose frontalière de la Région d¹Oujda »
Parmi les commerçants, l¹enquête signale « un quart d¹entre eux comme commerçants en gros, industriels, transporteurs etc. 170 sur 760 commerçants correspondant à cette grande bourgeoisie dont nous avons déjà parlé, le reste est formé de «boutiquiers».
Ce mouvement migratoire prit fin subitement avec l¹indépendance de l¹Algérie en 196228. Un mouvement massif de reflux vers l¹Algérie se produisit alors. Ainsi le pourcentage des Algériens dans les villes de l¹Oriental passa de 20% en 1960 à 2% en 1971, avec un peu plus de 7.000 personnes dont 5.000 à Oujda et un millier dans la ville frontalière d¹Ahfir. Au recensement de 1982, 5.500 Algériens seulement vivaient dans la région orientale, cette baisse est due à l¹accès d¹un bon nombre d¹Algériens à la nationalité marocaine. Et presque à la même date (en 1984), le nombre de Marocains résidant en Algérie était estimé à 200.000, soit 17,5% de la population marocaine à l¹étranger.29
Par Mimoun AZIZA
Département d¹Histoire. Faculté des Lettres et des Sciences Humaines. Université de Meknès
Notes :
1- Yvette Katan dans son ouvrage consacré à la ville d¹Oujda à l¹époque du Protectorat et Abdelkader Guitouni dans son étude sur le Nord-Est marocain (voir bibliographie), fournissent des données importantes et essentielles à la compréhension de ce phénomène.
2- A ; Guitouni, Le Nord-Est marocain, réalités et potentialités d¹une région excentrée. Oujda, 1995, p.103
3- Ces documents font partie de ce qu¹on appelle la littérature coloniale, les auteurs de ces documents étaient des responsables dans l¹administration française soit au Maroc ou en Algérie.
4- Centre des Hautes Etudes sur l¹Afrique Musulman.
5- Luis, Voinot, Oujda et l¹Amalat, Fouque. Oran, 1912; H, Lombard, (1938), « aspects de la situation et du rôle de l¹immigration algérienne musulmane dans la région d¹Oujda », mémoire de C.H.E.A.M.
6- Mohamed Bendaoud, ³Tarikh Tétouan² en arabe (histoire de Tétouan), Rabat, 1959-1979, tome 8, p. 314
7- Ibid, p.357.
8- Op.cit. p.9
9- Yvette Katan, Oujda, une ville frontière du Maroc (1907-1956), L¹Harmattan, Paris, 1990. p.432.
10- Y. Kattan cite le Khalifat du pacha d¹Oujda en en poste en 1955 qui, bien qu¹originaire de Géryville en Algérie, se considérait comme marocain.
11- Op. cit. p.37.
12- Augustin Bernard, Les confins algéro-marocains. Larose, 1911.
13- Y. Katan, p.437.
14- Op.cit. p. 5
15- M. Lemaille, Les Algériens à Oujda, Bulletin du Comité de l¹Afrique Française, n°5, mai 1937. p. 42.
16- Rapport de la Fédération des Algériens musulmans au Maroc sur la situation des Algériens musulmans au Maroc, cité par H. LOMBARD, op. cit. p. 26.
17- Il s¹agit de l¹émigration saisonnière des Marocains vers l¹Algérie, c¹est un vieux phénomène qui début vers la deuxième moitié du XIX e siècle et qui a pris de l¹ampleur pendant la période du Protectorat au Maroc. voir à ce propos les articles de Mimoun AZIZA,(2004), « Le Rif : terre d¹émigration. D¹une migration saisonnière vers l¹Algérie à une émigration permanente en Europe», Academia Bruyant, Bruxelles ; et «histoire d¹une migration, les Rifains en Algérie (1912-1956)», in Revue d¹Histoire Maghrébine, numéros 91-92,. Zegouane, Túnez, 1998.
18- H. Lombard, p.31.
19- P. Depis, 1962, notes sur le problème des réfugiés algériens au Maroc oriental (mars 1956- mai 1962), mémoire pour le C.H.E.A.M.
20- P. Decroux, les Algériens musulmans au Maroc ; condition juridique et sociale. Boulogne sur Seine, 1938, p. 95.
21- Charles Andre-Julien, (1978), Le Maroc face aux impérialismes, 1415-1956. Paris, Ed. Jeune Afrique.
22- Y. Katan, op.cit. p.458-459
23- Op.cit. p. 450
24- L. Voinot. P. 40
25- Capitaine HERAND, les villages suburbains d¹Oujda, mémoire pour le C.H.E.A.M. 1952. 64p.
26- Annuaire marocain, Imprimeries réunies, Casablanca 1952.
27- Op.cit., p. 18
28- Je trouve intéressant de signaler qu¹e n mai 1962, juste avant l¹indépendance de l¹Algérie en juillet, suivie du départ massif des Algériens, la formation de l¹équipe de football MCO d¹Oujda était à moitié algérienne , 5 joueurs sur 11 étaient algériens : Dey (gardien de but), Harchaoui, Sabi, Chellal et Boufelja. Cf. A. Guitouni, op.cit., p.25.
29- A. Guitouni, op.cit., pp.103-105
L¹immigration algérienne au Maroc à l¹époque coloniale (5/28/2006)
Le cas de la communauté algérienne à Oujda
Les conditions socio-économiques
de la communauté algérienne à Oujda
L¹étude vise l¹évolution du statut de ces immigrés au sein de la société marocaine en général et dans la ville d¹Oujda plus particulièrement.
Leur condition a évolué au fur et à mesure des différentes vagues d¹immigrations. Les premiers exilés, les Mouhajirins, ont été bien accueillis et bien traités par le Makhzen marocain. Il y avait parmi eux de nombreux commerçants aisés et des personnalités influentes. L¹arrivée constante de nouveaux flux migratoires a modifié profondément la composition sociale de cette communauté. En fait, à Oujda, les Algériens n¹étaient qu¹à « demi-étrangers » rapporte H. Lombard. Leurs caractéristiques sociologiques ont aussi évolué durant un siècle d¹immigration, En fonction de plusieurs facteurs liés à la politique coloniale de la France en matière d¹immigration. En 1938, M. Decroux qualifie la situation des Algériens au Maroc d¹«anormale » et de moins nette qu¹en Tunisie. Ils sont traités parfois comme des Français, tantôt comme des Etrangers et tantôt comme des Marocains.
«Les Algériens ne sont assimilés ni aux citoyens Français, ni aux étrangers, ni aux Marocains. Ils ne peuvent comme les citoyens, accéder à tous les emplois du Protectorat, ils ne sont jamais choisis comme assesseurs pour former les tribunaux criminels, ils ne sont pas membres du collège électoral français, etc.
Ils ne peuvent pas, comme les étrangers, adhérer aux syndicats professionnels, participer à l¹¦uvre de la justice française en qualité de jurés. Ils ne participent pas, comme les Marocains, à la vie politique du pays, ils ne font pas partie des Chambres consultatives, du Conseil du gouvernement, etc. (Š) Comme les Marocains, ils sont affectés à un cadre spécial de fonctionnaires, n¹ont pas la liberté syndicale, etc.»20
A début du Protectorat, ils constituaient un groupe social intermédiaire entre la colonie française et les Marocains. Ils étaient mieux traités par les autorités coloniales et jouissaient d¹une place avantageuse dans la société « oujdie ». Ils servaient l¹administration comme intermédiaires entre Français et Marocains : interprètes, fonctionnaires, enseignants, etc. Mais à partir des années trente, la situation évolua au préjudice des Algériens. Ils ont peu à peu perdu leur place d¹intermédiaires. L¹administration française favorisa de plus en plus le recrutement des Marocains. Mais dans l¹ensemble, les Algériens étaient plus avantagés. Chez les Algériens le taux de scolarisation était plus élevé, ils avaient aussi plus accès aux professions libérales. Certains ont même pu parvenir à occuper de hauts postes à Rabat. C¹est le cas de Kaddour Ben Gharbit (1873-1954), directeur du protocole impérial et de la chancellerie, Maameri vizir du palais royal et du protocole auprès du Sultan Mohamed V. 21
Une autre caractéristique de la communauté algérienne d¹Oujda, c¹est qu¹elle a conservé son particularisme. Cela est dû principalement à l¹arrivée successive des nouveaux immigrants. Malgré la similitude des deux sociétés, algérienne et marocaine, et les liens religieux et culturels qui les unissent, les Algériens formaient une communauté à part. Les premiers arrivés avaient une assemblée «la jamaa des gens instruits» qui défendait leurs intérêts auprès de l¹Administration. En 1933 celle-ci est remplacée par l¹Amicale des Algériens d¹Oujda. En réalité ce particularisme ne concernait qu¹une partie des Algériens, la classe aisée qui se distinguait par son comportement extérieur, sa mentalité, son degré d¹occidentalisation. Appelés par les Oujdis les « évolués ». Il s¹agit de l¹ancienne bourgeoisie issue du commerce et des professions libérales et une partie des enseignants. Les mariages entre les membres de cette communauté et les Marocains sont restés très limités. L¹enquête de H. Lombard recense en 1952 quinze mariages «mixtes» seulement. Mais, selon Y. Katan22 dans les milieux populaires les mariages devaient se faire « à l¹amiable» et ne laissait aucune trace administrative.
Evolution numérique et origines
de la communauté algérienne d¹Oujda
- l¹origine de cette immigration :
Les Algériens installés à Oujda et sa région venaient en majorité de l¹Oranie, en particulier de Tlemcen et Nedroma. A. Guitouni23 établit une liste des patronymes répartis par l¹origine géographique. Selon cette liste, sur les 131 noms de familles, l¹Oranie en totalisait 88% répartis de la façon suivante : Tlemcen 33% ; Nedroma 30%, 25 % provenaient des autres localités de l¹Oranie telles que Mascara,Marnia, Mostaganem...etc.
Le reste des patronymes, soit 12% provenait de Kabylie, du Sud oranais ou d¹ailleurs.
- L¹évolution numérique :
Avant l¹occupation française d¹Oujda en 1907 les Algériens ne dépassait pas le millier ; et 1.377 en 1910. Ce nombre connaîtra une augmentation rapide après l¹instauration du Protectorat comme le démontre le tableau suivant :
Source : L. Voinot, 1912, M. Lemaille, 1937. Services Central des Statistiques, Rabat. Cité par A. Guitouni, 1995, p.95.
- Activités professionnelles et répartition géographique à Oujda.
Il n¹y avait pas de quartier algérien à Oujda. Cependant au début du XX e siècle ils étaient plus nombreux dans les villages suburbains comme Dhar Mellah ou « zone des jardins », Darb M¹Basso. Ils avaient même leur propre mosquée.24 Avec l¹afflux intensif d¹Algériens au cours de l¹après guerre et l¹arrivée massive d¹ouvriers sans qualification, ils s¹installent dans les quartiers périphériques. Soit à l¹ouest d¹Oujda tels que Villages Khaloufi, Chrif-N¹Gadi et Mir Ali, où ils représentaient 3,25% de la population totale en 1955, soit dans les villages du Nord où il totalisent 1824 soit 17,49% de la population totale. Dans les villages dits « agricoles » du 3ème arrondissement ils représentent 22%. (644 personnes).25
On peut suivre les activités professionnelles exercées par les Algériens d¹Oujda, grâce aux indications reproduites par M. Lemaille en 1937, de l¹enquête de Lombard en 1951 et de l¹Annuaire marocain.26
La distribution dans les professions en 1937 établie par Lemaille27 permet de remarquer que les chefs d¹entreprise sont plus nombreux que les ouvriers ou les employés. On peut regrouper ces renseignements de la façon suivante :
Les renseignements qui ressortent de l¹enquête de M. Lombard en 1951 qui porte sur 3.200 foyers sont les suivantes :
-620 dans l¹agriculture
-760 dans le commerce
-240 dans l¹artisanat
-808 ouvriers
-262 fonctionnaires
-10 professions libérales dont : (2 médecins, 3 avocats, 1 défenseur agrée, 3 pharmaciens, 1 dentiste). Plus une population flottante de 500 chefs de familles profitant de l¹ « osmose frontalière de la Région d¹Oujda »
Parmi les commerçants, l¹enquête signale « un quart d¹entre eux comme commerçants en gros, industriels, transporteurs etc. 170 sur 760 commerçants correspondant à cette grande bourgeoisie dont nous avons déjà parlé, le reste est formé de «boutiquiers».
Ce mouvement migratoire prit fin subitement avec l¹indépendance de l¹Algérie en 196228. Un mouvement massif de reflux vers l¹Algérie se produisit alors. Ainsi le pourcentage des Algériens dans les villes de l¹Oriental passa de 20% en 1960 à 2% en 1971, avec un peu plus de 7.000 personnes dont 5.000 à Oujda et un millier dans la ville frontalière d¹Ahfir. Au recensement de 1982, 5.500 Algériens seulement vivaient dans la région orientale, cette baisse est due à l¹accès d¹un bon nombre d¹Algériens à la nationalité marocaine. Et presque à la même date (en 1984), le nombre de Marocains résidant en Algérie était estimé à 200.000, soit 17,5% de la population marocaine à l¹étranger.29
Par Mimoun AZIZA
Département d¹Histoire. Faculté des Lettres et des Sciences Humaines. Université de Meknès
Notes :
1- Yvette Katan dans son ouvrage consacré à la ville d¹Oujda à l¹époque du Protectorat et Abdelkader Guitouni dans son étude sur le Nord-Est marocain (voir bibliographie), fournissent des données importantes et essentielles à la compréhension de ce phénomène.
2- A ; Guitouni, Le Nord-Est marocain, réalités et potentialités d¹une région excentrée. Oujda, 1995, p.103
3- Ces documents font partie de ce qu¹on appelle la littérature coloniale, les auteurs de ces documents étaient des responsables dans l¹administration française soit au Maroc ou en Algérie.
4- Centre des Hautes Etudes sur l¹Afrique Musulman.
5- Luis, Voinot, Oujda et l¹Amalat, Fouque. Oran, 1912; H, Lombard, (1938), « aspects de la situation et du rôle de l¹immigration algérienne musulmane dans la région d¹Oujda », mémoire de C.H.E.A.M.
6- Mohamed Bendaoud, ³Tarikh Tétouan² en arabe (histoire de Tétouan), Rabat, 1959-1979, tome 8, p. 314
7- Ibid, p.357.
8- Op.cit. p.9
9- Yvette Katan, Oujda, une ville frontière du Maroc (1907-1956), L¹Harmattan, Paris, 1990. p.432.
10- Y. Kattan cite le Khalifat du pacha d¹Oujda en en poste en 1955 qui, bien qu¹originaire de Géryville en Algérie, se considérait comme marocain.
11- Op. cit. p.37.
12- Augustin Bernard, Les confins algéro-marocains. Larose, 1911.
13- Y. Katan, p.437.
14- Op.cit. p. 5
15- M. Lemaille, Les Algériens à Oujda, Bulletin du Comité de l¹Afrique Française, n°5, mai 1937. p. 42.
16- Rapport de la Fédération des Algériens musulmans au Maroc sur la situation des Algériens musulmans au Maroc, cité par H. LOMBARD, op. cit. p. 26.
17- Il s¹agit de l¹émigration saisonnière des Marocains vers l¹Algérie, c¹est un vieux phénomène qui début vers la deuxième moitié du XIX e siècle et qui a pris de l¹ampleur pendant la période du Protectorat au Maroc. voir à ce propos les articles de Mimoun AZIZA,(2004), « Le Rif : terre d¹émigration. D¹une migration saisonnière vers l¹Algérie à une émigration permanente en Europe», Academia Bruyant, Bruxelles ; et «histoire d¹une migration, les Rifains en Algérie (1912-1956)», in Revue d¹Histoire Maghrébine, numéros 91-92,. Zegouane, Túnez, 1998.
18- H. Lombard, p.31.
19- P. Depis, 1962, notes sur le problème des réfugiés algériens au Maroc oriental (mars 1956- mai 1962), mémoire pour le C.H.E.A.M.
20- P. Decroux, les Algériens musulmans au Maroc ; condition juridique et sociale. Boulogne sur Seine, 1938, p. 95.
21- Charles Andre-Julien, (1978), Le Maroc face aux impérialismes, 1415-1956. Paris, Ed. Jeune Afrique.
22- Y. Katan, op.cit. p.458-459
23- Op.cit. p. 450
24- L. Voinot. P. 40
25- Capitaine HERAND, les villages suburbains d¹Oujda, mémoire pour le C.H.E.A.M. 1952. 64p.
26- Annuaire marocain, Imprimeries réunies, Casablanca 1952.
27- Op.cit., p. 18
28- Je trouve intéressant de signaler qu¹e n mai 1962, juste avant l¹indépendance de l¹Algérie en juillet, suivie du départ massif des Algériens, la formation de l¹équipe de football MCO d¹Oujda était à moitié algérienne , 5 joueurs sur 11 étaient algériens : Dey (gardien de but), Harchaoui, Sabi, Chellal et Boufelja. Cf. A. Guitouni, op.cit., p.25.
29- A. Guitouni, op.cit., pp.103-105