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[b]LE MUR DE ZOUDJ BGHAL[/b]

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1[b]LE MUR DE ZOUDJ BGHAL[/b] Empty [b]LE MUR DE ZOUDJ BGHAL[/b] Lun 4 Juin - 11:16

admin"SNP1975"

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Auteur :
Riquelme10


Maroc/Algérie : La fermeture des frontières fête ses 13 ans



Cette année, la frontière fêtera 13 ans de fermeture

Être Algérien et habiter au Maroc ou Marocain expulsé d’Algérie, on ne s’en sort jamais. On vit avec. Mais comment ? Amale Samie a fait le tour des préjugés, des histoires et des sentiments qui partagent et rapprochent ces frères ennemis.

La finale de la Coupe du monde a connu la plus forte charge émotionnelle de tous les matchs, mais le match Maroc-Algérie, décrit par les journaux comme un "derby", a été un haut moment de passion. C’est qu’il y a un passif, avec nos frères, et l’idéal aurait été qu’il se règle chaque fois sur un terrain de football. D’autant plus que les brouilles et les orages reviennent régulièrement entre l’Algérie et le Maroc. Elles sont alimentées par des stéréotypes qui ont la peau dure. Au Maroc, on dit que les Soussis sont radins, les Fassis couards et les Oujdis, bornés et plus Algériens que Marocains, etc… Chez nos voisins, la tête de turc des Algérois, c’est l’Oranais (proche des frontières de Zouj Bghal) réputé vulgaire et même indécent quand il chante le raï. Il n’y a pas de quoi en faire un drame. Je t’aime, mais je ne tolère pas ta différence, voilà le sentiment complexe qui préside à nos rapports.

Cela prouve au moins qu’Algériens et Marocains constituent un couple tapageur… et vivant. Sinon, ce ne serait qu’indifférence polie. La preuve, pour le petit peuple marocain, "Tounsi" veut dire "péquenot" et à Tunis, "El Merroki" est le Croquemitaine. Avec l’Algérie, c’est tout autre chose. D’abord parce que nous partageons un espace culturel et mental commun, allant de Taza jusqu’à Oran. Ensuite parce que nos deux peuples ont vécu plus protégés des Carthaginois et des influences orientales par la forteresse montagneuse amazighe des Atlas, ce qui n’est pas le cas de la Tunisie. Nos rapports avec les Algériens sont passionnels parce que nous sommes trop semblables, c’est un cliché, mais y a-t-il une autre explication ?

Il y a d’abord les vicissitudes de l’histoire. On peut faire commencer les scènes de ménage en 1844. Les Marocains disent qu’à la funeste bataille d’Isly, "on s’est fait casser la gueule pour l’Émir Abdel Kader", les Algériens disent qu’on "les a laissés tomber". La guerre de libération algérienne commence en 1954, et les Marocains la soutiennent. Mais comme il y avait des factions au sein du FLN, les Marocains se sont retrouvés dans le clan militaire algérien de Houari Boumediene dit "le clan des Marocains", auquel appartient aussi Bouteflika. Il était fatal qu’on se retrouve impliqués dans des querelles où nous n’avions rien à faire. En 1963, l’irréparable est commis. Les frères se sont battus pendant 4 mois. Irréparable, voire. Une bagarre de 4 mois, il y a 40 ans, laisse des traces (70.000 Marocains résidant en Algérie sont expulsés) mais la génération qui a vécu ce drame a passé. Ces mauvais souvenirs expliquent en grande partie la sympathie de l’Algérie officielle pour le Polisario.

En 1975, le Maroc reprenait le Sahara et la brouille politique qui dure aujourd’hui encore a commencé cette année. Depuis, nous avons frôlé la rupture et la guerre à plusieurs reprises. Et ce dossier n’a pas fini d’envenimer les relations politiques entre les deux pays. C’est en 1979 qu’on retrouve le foot, l’Algérie écrase le Maroc par 5 à 1 à Casablanca. Le public, traumatisé, mais sportif, applaudissait les meilleurs. Une défaite salutaire, on lui devra l’équipe nationale de 1986. Voilà pourquoi les Marocains considèrent que l’affront est lavé depuis les 3 à 1 infligés à l’Algérie à Sfax. En 1994, des attentats sont commis à l’hôtel Atlas Asni à Marrakech. Il y a des Franco-Algériens dans le commando terroriste.

Le Maroc impose le visa d’entrée pour les Algériens qui ferment les frontières aussi sec. Et pour finir, lorsque les 6 gendarmes marocains occupent l’îlot Leila, l’Algérie publie un communiqué favorable à l’Espagne qui scandalise tous les Marocains. Plus que lorsque Bouteflika avait dit que le Maroc ne pouvait vendre que de la bimbeloterie et de la drogue, outrances dont écopent aussi les Algériens traités de flemmards, de fuyards, de traîtres et de chômeurs volontaires. Voilà. Le reste appartient aux peuples. Forte identité amazighe, similitude linguistique, contacts permanents depuis la nuit des temps, les deux pays ont même fait partie de l’Empire almohade. Mais si la fraternité est vivace, c’est surtout grâce aux familles mixtes.

L’espoir est dans le camp des jeunes. Nous avons été étonnés que Feriel, Algérienne casablancaise, 17 ans, renvoie tout ce monde dos-à-dos : "Les Marocains manquent de franchise et les Algériens sont bornés". Feriel a suivi la finale de la CAN dans une famille marocaine. Elle est venue avec son drapeau et un maillot de l’équipe algérienne. Elle a pleuré avec ses hôtes à la fin du match. "Il n’y a pas la moindre hésitation pour moi. Je suis pour le Maroc parce que c’est plus mon pays que la Tunisie". Kamal, 20 ans, un jeune homme intelligent et d’ordinaire caustique devient plus sérieux dès qu’on l’interroge sur tout ça. C’est qu’il a obtenu la nationalité marocaine depuis une semaine à peine. Il a le même discours que les autres Algériens sur la tiédeur des rapports avec la Tunisie.

"Avec les Marocains par contre, les rapports sont exacerbés. Malheureusement, j’entends trop souvent dire : 'chez toi, en Algérie, ils mangent même pas de viande, y'a rien à bouffer'… ou encore, 'chez toi, en Algérie, tu poses ton pied sur le tarmac de l’aéroport que t’es égorgé avant d’avoir compris'". C’est dur. Quand on lui fait remarquer que jusqu’en 1997 c’était un peu ça l’Algérie, il répond : "Oui, mais à chaque fois, la suite c’est : 'regarde chez nous, c’est stable, pas comme chez toi'. Chez moi, c’est ici, je me sens plus Marocain, ou plutôt plus Casablancais, qu’Algérien".

Pourquoi Kamal a-t-il pris la nationalité marocaine ? "Je suis né au Maroc, j’y ai vécu toute ma vie. Mais je suis toujours Algérien, c’est quelque chose que je dois cultiver en moi. Malheureusement, avec la fermeture des frontières, on ne peut même plus voir sa famille". Pour un Marocain qui a des attaches avec l’Algérie, il est jubilatoire de rencontrer l’archétype de tous les Algériens dans les blagues marocaines. Il est bougon, entêté et râleur professionnel. Son langage est émaillé de blasphèmes, de jurons et de mots salés, très salés.

L’une des meilleures, c’est celle de l’Algérien qui ne se résout pas à emprunter un cric à un pompiste alors qu’il a un pneu crevé. Ses hésitations le mettent dans une telle colère qu’il prend la courageuse résolution d’aller voir le pompiste, pour lui dire : "Ben, tu sais, ton cric, tu peux te le foutre où je pense !". Samir Benmalek, journaliste à Alger en est témoin (lire ci-contre), les Algériens n’ont pas peur des mots crus. Officiellement, on en arrive parfois à dire dans l’une ou l’autre capitale : "On ne choisit pas ses voisins". Il n’y a pas de phrase plus négative

http://www.marocainsdalgerie.net

2[b]LE MUR DE ZOUDJ BGHAL[/b] Empty Re: [b]LE MUR DE ZOUDJ BGHAL[/b] Dim 10 Juin - 13:45

admin"SNP1975"

admin
Admin

Cet article m’a été demandé par Guy Hennebelle, directeur de la revue Panoramiques, pour son numéro 67 (2ème trimestre 2004) intitulé "Des murs et des hommes". Je ne savais pas que ce serait l’un des derniers numéros de cette revue, malheureusement interrompue peu après par le décès de Guy Hennebelle.
De tout temps, des hommes « civilisés » ont cru pouvoir vivre durablement à l’abri de la menace des peuples « barbares » en s’entourant de murs ou d’autres lignes fortifiées. La Grande Muraille de Chine et le limes romain, presque contemporains, en sont les meilleurs exemples. L’Afrique du Nord a vu les Romains construire sur son sol, à la limite du territoire cultivable et du désert, le limes, alignement de fortins jalonnant un obstacle continu fait d’un mur et d’un fossé propres à décourager les incursions des nomades berbères insoumis. Quinze siècles plus tard, en 1840, le maréchal Valée avait, lui aussi, entrepris la construction d’un obstacle continu de même type, pour empêcher les cavaliers arabes de l’émir Abd-el-Kader d’attaquer les environs d’Alger (collines du Sahel et plaine de la Mitidja), occupés et colonisés par les Français depuis moins de dix ans. Mais le gouvernement préféra suivre l’avis du général Bugeaud, partisan de conquérir et de coloniser l’Algérie entière pour en faire une nouvelle province française.

Au XXème siècle, l’art de la fortification se modernisa. En Afrique du Sud, pendant la guerre des Boers (1899-1901), les Anglais inventèrent l’utilisation militaire du fil de fer barbelé pour protéger des blockhaus, et pour les relier entre eux, afin d’entraver la mobilité des commandos boers. En Afrique du Nord, à la frontière égypto-libyenne, les Italiens construisirent en 1931 un obstacle de 270 km de long pour empêcher les résistants libyens de se réfugier en Egypte et d’en revenir ou d’en recevoir des armes. Celui-ci était constitué de plusieurs épaisseurs de réseaux barbelés (dont certains auraient été électrifiés), longés par une route de contrôle reliant des forts ou des fortins communiquant par téléphone et par radio, et trois aéroports. Efficace contre un ennemi aux faibles moyens, cet obstacle ne servit à rien contre les unités blindées britanniques venant d’Egypte pendant la Deuxième guerre mondiale [1].

En 1956, l’indépendance du Maroc et de la Tunisie obligea l’armée française à envisager une solution semblable pour faire de l’Algérie un champ clos. En effet, la coopération militaire franco-marocaine et franco-tunisienne prévue par des accords bilatéraux avait été vite démentie par une contradiction flagrante entre la poursuite de la guerre par la France contre le FLN algérien, et la solidarité maghrébine que les dirigeants nationalistes des deux Etats nouvellement indépendants ne pouvaient lui refuser. Les troupes françaises maintenues dans les deux pays avaient alors leurs effectifs les plus élevés (125.000 hommes au Maroc et 55.000 en Tunisie) ; mais elles ne pouvaient s’opposer à l’installation de l’ALN algérienne sans l’accord des gouvernements marocain et tunisien. Le 22 octobre 1956, le détournement vers Alger par l’aviation française d’un avion marocain transportant de Rabat vers Tunis les chefs de la délégation extérieure du FLN sonna le glas de la coopération militaire entre la France et ses anciens protectorats. A moins de les reconquérir par la force (solution impossible faute d’effectifs suffisants), il ne restait pas d’autre solution militaire que tenter de boucler hermétiquement les frontières de l’Algérie.

C’est d’abord à la frontière marocaine que fut expérimentée le premier barrage, sous l’autorité du général Pédron, commandant le corps d’armée d’Oran. Dès le mois de juin 1956, un simple réseau de barbelés fut construit entre la frontière et la route nationale n° 7, dans le secteur côtier tenu par la demi-brigade de fusiliers marins (DBFM) près de Nemours. Renforcé à partir de novembre 1956, il fut perfectionné par le minage et par l’électrification (réalisée sur 10 km en janvier 1957).

Le ministre de la Défense nationale du gouvernement Bourgès-Maunoury, André Morice, décida le 26 juin 1957 de généraliser cette expérience de façon à réaliser en quelques mois le bouclage des deux frontières. A l’Ouest, la « ligne Pédron » s’éloignait de la frontière marocaine sur les hauts plateaux arides couverts d’une steppe d’alfa, pour aller protéger la route et la voie ferrée reliant Oran à Colomb-Béchar dans leur traversée de l’Atlas saharien. A l’Est, où tout était à faire, la « ligne Morice » suivait et protégeait également la route et la voie ferrée de Bône à Souk-Ahras et Tébessa, ce qui permit sa réalisation en trois mois. Les espaces qui s’étendaient entre les barrages et les frontières furent transformés en « zones interdites », dont les habitants étaient regroupés autour des postes militaires ou évacués. Les étendues plates et désertiques des confins sahariens à l’Est, et des hauts plateaux à l’Ouest, étaient d’abord surveillés par des batteries de canons à tirs automatique déclenché par radar, avant la construction du réseau électrifié. Etant donné la gravité particulière de la menace que l’ALN de Tunisie faisait peser sur le barrage de l’Est, il était prévu de le doubler par un barrage de l’avant plus proche de la frontière tunisienne. Celui-ci fut d’abord construit de Souk-Ahras à Tébessa, de façon à protéger les centres miniers de l’Ouenza et du Kouif, d’octobre 1958 à mars 1959, puis de Souk-Ahras à la mer, de mars à octobre 1959. Ce barrage de l’avant fut appelé « ligne Challe », du nom du nouveau commandant en chef, successeur du général Salan. Il fit plus que doubler la difficulté du passage de la Tunisie vers l’Algérie.

En effet, le barrage était un ensemble d’obstacles redoutable d’abord par sa largeur : de 100 mètres à plusieurs kilomètres suivant les endroits. On y trouvait au centre, souvent une route et une voie ferrée, et toujours une piste de surveillance utilisée par les véhicules blindés des patrouilles faisant « la herse ». Et des deux côtés (vers l’extérieur et vers l’intérieur) une haie renforcée non minée, puis un réseau intérieur de barbelés miné, une piste technique longeant la clôture électrifiée, puis encore un réseau extérieur miné, et enfin un grillage destiné à tenir les animaux à l’écart. Cet obstacle n’était pourtant pas absolument infranchissable : on pouvait faire sauter les réseaux de barbelés et les mines au moyen de tubes remplis d’explosifs appelés bangalores, et sectionner la clôture électrifiée avec des pinces coupantes à poignées isolantes. Mais l’interruption du courant dans la clôture était immédiatement signalée et localisée par les stations de contrôle technique, ce qui déclenchait l’intervention rapide des patrouilles de la herse sur place, et le bouclage de la zone du franchissement par les troupes du secteur et par les réserves du corps d’armée ou par les réserves générales, avec l’aide des hélicoptères et l’appui de l’aviation. C’est pourquoi les franchissements étaient beaucoup plus difficiles à réussir de l’extérieur vers l’intérieur que dans l’autre sens (tout au moins là où le barrage était proche de la frontière) ; et le doublement de la ligne Morice par la ligne Challe en aggravait énormément la difficulté en enfermant ceux qui avaient réussi à franchir le premier obstacle dans une nasse.

La construction des barrages fut un tournant de la guerre, aux conséquences considérables. Au début, les chefs du FLN en sous-estimèrent tout-à-fait l’importance : ils n’essayèrent pas de s’opposer à sa construction, et autorisèrent les ouvriers algériens à y travailler à condition qu’ils leur reversent une partie de leurs salaires en tant qu’impôt révolutionnaire [2]. Mais une fois le gros-oeuvre achevé, les barrages firent la preuve de leur efficacité. Au début de 1958, les contingents de l’ALN lourdement chargés d’armes et d’équipements militaires tentèrent de rentrer massivement en Algérie. La « bataille des frontières » fut la plus grande bataille de la guerre. Du 21 janvier au 28 mai 1958, sur la ligne Morice, l’ALN perdit 2.400 combattants tués, 300 prisonniers, 350 armes collectives et 3.000 armes individuelles. La seule bataille du djebel Mouadjène, près de Souk-Ahras, lui coûta 624 hommes et 484 armes du 28 avril au 3 mai. Du fait de ces combats, les pertes mensuelles des deux camps atteignirent alors leurs plus hauts niveaux de toute la guerre : 3.803 tués chez les « rebelles » en avril 1958, et 364 dans les « forces de l’ordre » en mai. Le rêve d’un Dien-Bien-Phu algérien se dissipa brutalement.

Il en résulta une très grave crise du moral dans l’ALN, à l’extérieur et à l’intérieur [3]. A l’extérieur des barrages, des troupes refusèrent de tenter de nouveaux franchissements et crièrent « Vive la paix ! Vive de Gaulle ! » devant Belkacem Krim, vice-président du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) et ministre des forces armées. Le commandement opérationnel militaire de l’Est fut suspendu et ses responsables sanctionnés, mais l’indulgence de Krim envers son chef Mohammedi Saïd provoqua en novembre 1958 un dangereux complot [4] des anciens responsables déchus, et une insubordination générale des troupes envers les officiers nommés par Krim. En mars 1959, plusieurs officiers supérieurs furent exécutés, et le capitaine Ali Hambli, en révolte contre Mohammedi Saïd, se rendit aux Français avec 148 hommes. Le mécontentement gagna aussi les wilayas de l’intérieur, qui se sentirent abandonnées par l’extérieur. En décembre 1958, le colonel Amirouche, chef de la wilaya III (Kabylie) réunit ses collègues des wilayas IV (Algérois), VI (Sud Algérois) et I (Aurès-Némentchas) dans un comité interwilayas, qui réaffirma le principe de la primauté de l’intérieur (proclamé par le Congrès de la Soummam en 1956). Le « plan Challe », exécuté en 1959 et 1960 par l’armée française, accrut encore ce sentiment d’isolement et d’abandon. A l’ouest le capitaine Zoubir, de la wilaya V (Oranie) franchit le barrage à l’automne 1959 pour dénoncer l’incurie de ses chefs basés depuis 1955 à l’extérieur, et demander l’arbitrage du GPRA. Econduit par le colonel Boumedienne, il réussit à entraîner la majeure partie des troupes de l’ALN stationnées au Maroc, et finit par se rendre aux Marocains en février 1960. Dans l’Algérois le commandant Si Salah, chef par intérim de la wilaya IV, désespérant de recevoir le moindre secours du GPRA et du nouvel état-major-général de l’ALN, entama en mars 1960 des négociations secrètes avec le gouvernement français, et fut reçu le 10 juin à l’Elysée par le général de Gaulle.

Le GPRA, lui aussi profondément divisé, était conscient du danger. Le CNRA (Conseil national de la Révolution algérienne), qui s’était réuni à Tripoli en décembre 1959 et janvier 1960, avait reconnu que la guerre risquait d’être perdue si aucun secours ne parvenait à l’intérieur durant l’année 1960, et décidé que les officiers venus des wilayas devraient y rentrer au plus vite [5]. Pour atteindre ces objectifs, un nouvel organisme fut créé, l’état-major général de l’ALN, dirigé par le colonel Boumedienne à partir de février 1960.

L’état-major-général (EMG), reprenant des projets antérieurs, réorganisa les unités bloquées aux frontières en renforçant leurs effectifs, leur organisation, leur équipement et leur armement. Il réussit l’amalgame entre les anciens maquisards venus des wilayas et les nouvelles recrues levées dans les communautés algériennes de Tunisie, du Maroc et de France. Il multiplia très vite les opérations militaires contre les barrages et contre les postes français des zones frontalières. Mais les tentatives de franchissement restèrent toujours aussi coûteuses : quelques officiers réussirent à passer avec quelques hommes, d’autres furent tués (comme le colonel Lotfi et le commandant Embarek de la wilaya V, sur le barrage de l’Ouest), d’autres renoncèrent après plusieurs échecs et restèrent à l’extérieur [6]. A partir de juillet 1960, l’EMG renonça sans l’avouer à tout projet de retour en masse à l’intérieur. Il opta en fait pour une tactique de harcèlement contre les barrages et les postes militaires français à partir du territoire tunisien ou marocain, utilisant une artillerie de plus en plus lourde, afin d’obliger l’armée française à immobiliser des effectifs de plus en plus importants et à fortifier de mieux en mieux ses positions [7]. Du 6 au 14 mars 1962, à l’approche du cessez-le-feu, un bombardement général fut déclenché contre le barrage de l’Est avec des moyens sans précédent . Mais la destruction des barrages par des brigades internationales chinoises, arabes et africaines resta un pur slogan de propagande. Les liaisons avec les wilayas furent rétablies en 1961 par des filières clandestines de la Fédération de France du FLN, utilisant les lignes maritimes et aériennes régulières pour faire passer de France en Algérie de l’argent, des armes légères, puis des cadres [8].

En fin de compte, à quoi servirent les barrages ? D’un point de vue strictement militaire, on peut dire qu’ils avaient atteint leur but : couper l’ALN en deux, et empêcher l’ALN extérieure de porter secours à son homologue intérieure, ce qui rendait possible l’étouffement et la destruction de cette dernière par le « plan Challe ». Que ce succès militaire incontestable n’ait pas été exploité à fond par le pouvoir politique français est une autre histoire. Même si la dislocation irrémédiable de l’ALN a été évitée, le ressentiment de l’intérieur contrer l’extérieur a laissé des traces durables. Pendant la crise de l’été 1962, les partisans d’Ahmed Ben Bella et du colonel Boumedienne ont reproché au GPRA d’avoir demandé au gouvernement français de maintenir les barrages fermés aux troupes de l’ALN extérieure après la proclamation de l’indépendance le 3 juillet [9], mais les wilayas III et IV, les plus éloignées des frontières, ont pris parti contre l’EMG. D’un autre point de vue, on peut conclure à l’inverse, que l’EMG a réussi à détourner les barrages de leur but et à les récupérer pour ses propres fins en renonçant à les franchir. En effet, la stratégie de harcèlement à partir des frontières lui a permis de limiter ses pertes et d’accumuler à l’abri des barrages des forces armées de plus en plus nombreuses (22.000 hommes en Tunisie et 10.000 au Maroc en mars 1962), suffisamment bien organisées et bien armées pour prendre le pouvoir contre tout concurrent dès le départ des troupes françaises. Ce résultat n’aurait pu être évité que si l’armée française avait repris les opérations offensives en territoire tunisien et marocain, plusieurs fois étudiées de 1956 à 1958 ; mais les gouvernements de la IVème et de la Vème République les avaient exclues par crainte d’internationaliser le problème algérien depuis le bombardement de Sakiet-Sidi-Youssef [10]. Dans ces conditions, l’EMG fut en fin de compte le principal bénéficiaire des barrages militaires français. Il ne jugea pourtant pas utile de les conserver après l’indépendance pour défendre l’Algérie contre ses voisins [11]. Guy Pervillé

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