Victimes d’inceste, de viol, d’agressions et d’homicides
10 000 femmes dans le bourbier du crime
Par :Farid Belgacem
Autrefois sujet tabou, les atteintes aux femmes atterrissent au quotidien devant les tribunaux. En plus de l’acte criminel proprement dit, la femme continue à subir toutes les méthodes de harcèlement digne d’un autre âge.
Dix mille femmes victimes d’actes criminels abjects, d’actes contre nature, de vol, de coups et de blessures volontaires, de menaces et d’outrages, pour ne citer que quelques aspects du crime, voilà un chiffre qui donne froid dans le dos. Un chiffre loin d’être exhaustif, connaissant la nature de la société algérienne qui dicte “la loi du silence” au sexe opposé et qui lui ferme et interdit toutes les portes et les voies de recours. Sétif, Alger, Oran, Tizi Ouzou, Béjaïa, Khenchela, Batna, Annaba, mais aussi les nouvelles agglomérations, sont les villes les plus touchées.
À commencer par l’inceste.
En dix-huit mois seulement, ce sont 22 femmes qui ont subi les affres de l’inceste dans leur proche environnement. C’est dire que “le sexe faible” est exposé à tous les dangers à partir du milieu familial, avant d’incriminer le quartier ou la rue.
Dans le même registre, plus de 400 jeunes filles ont fait les frais d’attentat à la pudeur, ce qui renseigne de la croissance, souvent inexpliquée, du phénomène et qui n’inquiète pas, en revanche, notre société qui demeure placide. Bien au contraire, elle condamne la victime et lave de tout soupçon le bourreau. Souffre-douleur des réseaux de prostitution et de proxénétisme, 12 autres jeunes femmes sont embourbées durant la même période, alors que plus de 25 autres cas ont cruellement subi les affres des actes de violences physiques. La violence verbale également, avec 180 cas, vient “couronner” ces actes condamnables à bien des égards. Souvent rebelle devant “la loi du sexe supérieur”, que ce soit dans sa famille ou dans la rue, la femme connaîtra un sort beaucoup plus dangereux.
C’est ainsi, comme le démontre un tableau récapitulatif de la Gendarmerie nationale, que près de 1 000 femmes ont été victimes de coups et blessures volontaires (CBV) alors que les homicides volontaires (63 cas) et les homicides involontaires (480 cas) ont connu une ascension gravissime durant ces dernières années. Il y a même des femmes qui ont perdu la vie dans des incendies volontaires.
En effet, 13 cas ont été recensés durant les dix mois d’activité de la GN, en sus des autres cas également recensés par les autres services de sécurité en intra-muros. Faisant une confiance aveugle à son proche environnement (famille, belle-famille, proches, collègues de travail… ), la femme subira aussi d’autres actes comme l’escroquerie et tentative d’escroquerie (83 cas), abus de confiance (6 autres cas), le recel (souvent forcé) avec 4 cas.
L’autre aspect qui fait peur en ces temps qui courent : les femmes victimes de vols. À ce propos, relève t-on, 1 020 cas de vol, suivis d’agressions et de crimes à l’arme blanche, ont été enregistrés par les mêmes services.
Dans le même sillage, ce sont plus de 100 femmes qui ont vu leurs biens dégradés ou volontairement réduits à néant suite à leur farouche résistance. Les bourreaux ne s’arrêtent pas là et s’attaquent aux femmes qui vivent seules.
Pas moins de 204 violations de domiciles, souvent suivis de menaces de mort, de violences physiques et d’actes contre nature, ont été recensés à travers les 48 wilayas.
Le dernier acte étant celui-ci enregistré à Annaba où une dame, pharmacienne de son état, a été délestée de son argent et de ses bijoux, et agressée chez elle à la cité Caroubier.
Dans l’environnement professionnel, ce sont également 55 femmes qui ont porté plainte pour outrage. En outre, ce sont 106 femmes qui ont été victimes d’associations de malfaiteurs alors que des milliers d’autres jeunes filles sont au quotidien “impliquées” et “désignées du doigt” avant d’être sacrifiées par les gangs.
En revanche, le harcèlement sexuel et moral en milieu professionnel n’a pas été relevé, sachant que ce fléau relève encore du tabou, alors que les dégâts collatéraux sont visiblement douloureux pour les victimes. Les femmes poussées au suicide ne sont pas aussi recensées.
Au total, ce sont plus de 10 000 femmes qui sont, “la loi du plus fort” oblige, dans le bourbier du crime, tant en milieu urbain que rural.
Selon le Journal Algérien : "Liberté" du 25/11/2010.