Taïeb Fassi Fihri : «On ne sait pas ce que veulent les Algériens»
Lors d’une rencontre avec la presse, lundi à Rabat, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, Taïeb Fassi Fihri, a fait un tour d’horizon de la politique étrangère du Royaume, et s’est arrêté particulièrement sur l’évolution de la question du Sahara marocain.
«Ne vous attendez pas à grand-chose, à l’issue du quatrième round des négociations sur le Sahara». Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, Taïeb Fassi Fihri, ne se fait pas d’illusion sur l’issue de cette quatrième manche, mais s’est gardé d’apporter du crédit au postulat que «le 4ème round sera le dernier». La clef du problème se trouve entre les mains de l’Algérie, qui est à l’origine de l’enlisement du conflit. Tout le monde se rend aujourd’hui à cette évidence. Mais que veulent les Algériens ? «Ne vous attendez pas à une réponse, on ne sait pas ce que veulent les Algériens», tranche le chef de la diplomatie marocaine, lors d’une rencontre organisée lundi avec la presse. L’attitude du voisin algérien est pour le moins incompréhensible. «L’Algérie ne veut pas de l’ouverture des frontières, ni de la normalisation des relations bilatérales, ni de la réalisation de l’édification maghrébine, et moins encore du règlement de la question du Sahara», relève M. Fassi Fihri. C’est le blocage à tous les étages, voulu par l’Algérie, qui continue de mettre les bâtons dans les roues de la construction maghrébine, arguant, à chaque fois, du «blocage» de la question du Sahara. Voilà, le mot est dit. Il paraît qu’il va falloir en penser quelque chose. Or, rien. A part que ce blocage est entretenu par l’Algérie elle-même. Le paradoxe est-il une «invention» algérienne ? En voilà un : le Kosovo. L’Algérie n’a pas reconnu «l’indépendance» du Kosovo, proclamée dernièrement, prétextant que «la procédure n’est pas conforme à la légalité internationale». Mais, en même temps, - et comble d’incohérence -, elle ne se fait aucun scrupule à «féliciter Mohamed Abdelaziz à l’occasion du 32ème anniversaire de la proclamation de la RASD». Partisan, précédemment, de l’édification maghrébine, en dépit de la poursuite du conflit autour du Sahara, la voilà, aujourd’hui, qui change d’avis, en alléguant «l’obstacle» du Sahara, même si la question se traite actuellement dans le cadre des Nations unies. Allez savoir pourquoi le président Bouteflika s’est opposé, récemment, à la tenue d’un Sommet extraordinaire de l’Union du Maghreb arabe uni (UMA). Le Sahara, encore et toujours. Or, le Royaume du Maroc a proposé une issue honorable pour la sortie de ce conflit : une solution d’autonomie qui jouit, au-delà du plébiscite national, d’un accueil enthousiaste de la part du Conseil de sécurité qui a salué, dans les résolutions 1754 et 1783, le caractère «sérieux» et «crédible» de l’offre marocaine, se contentant de prendre «note» de la «proposition» du Polisario qui n’est, en réalité, qu’un remake du défunt «Plan de règlement». «Tout le monde s’accorde à dire que cette option est irréalisable», fait constater le ministre. Mais ce n’est pas de cette oreille que l’autre partie l’entend. L’Algérie, et le Polisario, s’acharnent à faire accréditer une thèse éculée et, par-dessus tout, «inapplicable sur le terrain». Ils ont réussi à faire l’unanimité contre eux, en continuant à s’accrocher bec et ongles au fameux « Plan de règlement». Le ministre Fassi Fihri a fait état de «pressions internationales» actuellement sur l’Algérie et le Polisario. Si le principe de départ des Nations unies a été de «ne pas imposer de solution à aucune des parties au conflit», il n’en demeure pas moins que «l’organisation onusienne a pris fait et cause pour la solution d’autonomie». L’offre marocaine, initiée depuis 2005, a recueilli, -faut-il le rappeler» -, une adhésion massive auprès des Nations unies, avec à leur tête les Etats-Unis, la France et l’Espagne. La majorité des pays membres du Conseil de sécurité s’accorde à dire que «c’est l’initiative marocaine qui est à l’origine, et à la base, du lancement des négociations», souligne le ministre. Le secrétaire d’Etat américain chargé du Moyen-Orient, David Welch, n’a pas manqué de le souligner, lors d’une récente tournée maghrébine. Le soutien, apporté par la France et l’Espagne, à la proposition d’autonomie, est également clair. Mais, de l’autre côté de la frontière, rien n’y fait. Ni le soutien international à l’offre d’autonomie, ni l’adhésion des Sahraouis séquestrés eux-mêmes à cette offre, ne semble avoir fait bouger les sables du côté de Tindouf, pas plus d’ailleurs que du côté du palais El Mouradia, en Algérie. Maintenant, face à l’intransigeance algérienne, le Maroc devra-t-il continuer à pratiquer la politique de «la main tendue» ? Le ministre Fassi Fihri s’est voulu confiant. «Le Maroc se trouve, aujourd’hui, dans une position confortable à l’international», a-t-il rassuré, tout en exprimant la fermeté du Royaume face à toute sorte de provocations qui peut provenir de l’autre côté de la frontière. Le Maroc a d’ailleurs fait une mise au point énergique, dans un communiqué diffusé vendredi dernier en réaction à des informations rapportées par certains organes de presse faisant état de l’intention du Polisario de procéder au peuplement de la localité marocaine de Tifariti, située à l’est du mur de la défense. Le ministre Fassi Fihri a précisé que le Maroc se tient prêt à riposter, par tous les moyens, à toute incursion du Polisario dans cette localité, mettant en garde contre toute tentative de vouloir imposer un quelconque «fait accompli» dans cette zone, que le Polisario veut présenter comme étant «un territoire libéré». Un rappel à l’ordre qui démontre la détermination du Royaume à préserver, par tous les moyens, sa souveraineté sur l’ensemble du Sahara marocain.