Conférence de presse du ministre sahraoui des Affaires étrangères «Il y a un complot pour déstabiliser toute la région»
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Le ministre sahraoui des Affaires étrangères estime que les manoeuvres politiques et militaires entreprises par le Maroc révèlent l'existence d'un complot visant la déstabilisation de toute la région du Maghreb. Mohamed Salem Ould Essalek a fait ces déclarations lors d'une conférence de presse qu'il a animée, hier, au siège de l'ambassade de la République sahraouie, à Alger. Il a saisi l'opportunité de la tenue, aujourd'hui, à Manhasset aux Etats-Unis, du 4e round des négociations entre le front Polisario et le Maroc en vue d'un règlement du conflit qui les opposent depuis 1975, et pour s'exprimer aussi sur la situation des droits de l'Homme dans les territoires occupés.
«Le 4e round se tient au moment où une grande quantité d'armes a été vendue au Maroc qui mène des manoeuvres militaires au sud du Sahara et rassemble ses troupes tout au long du mur», a déclaré le MAE qui pense que «ce sont là des signes d'une guerre pour laquelle le Maroc se prépare». Il estime, dans ce même ordre d'idées, que «le Maroc entrave ainsi les possibilités d'une solution pacifique devant être prise dans le cadre de la légalité internationale».
Le ministre sahraoui rappelle la responsabilité «politique et juridique» de l'Espagne dans la question sahraouie pour souligner que «la livraison par Madrid d'une quantité d'armes à Rabat est grave et lourde de conséquences». Il fait part, dans ce cadre, de l'acquisition par Rabat, entre autres, de 1.200 véhicules blindés de type léger pour le transport des troupes et des appareils de lancement de bombes à fragmentation.
«Ce qui révèle l'existence d'un complot, non seulement contre le peuple sahraoui mais pour déstabiliser toute la région», affirme-t-il. Il estime que «tant que le Maroc ne respecte pas les frontières de ses voisins, de tous ses voisins, nous ne croyons pas à cette stabilité». Il reste, cependant, optimiste en espérant que «le 2e mandat de Zapatero inaugure une nouvelle ère où l'Espagne reprendra la position qu'elle a défendue jusqu'en 2003 auprès des Nations unies à savoir: la nécessité d'un référendum pour une solution mutuellement acceptable».
Au sujet du Maroc qui accuse l'Algérie de torpiller les négociations, le ministre sahraoui répond «ce n'est pas nouveau, le Maroc utilise le Sahara Occidental pour ses ambitions expansionnistes, vis-à-vis, de tous ses voisins». Il tient à signaler que les négociations que le front Polisario mène avec le Maroc depuis 11 mois «ont été entravées par le fait que le Maroc a exigé, au préalable, que lui soit reconnue la souveraineté sur les territoires sahraouis, au titre de ce qu'il appelle l'autonomie». Une condition qui, dit le ministre «est rejetée aujourd'hui et demain».
Alors pourquoi des négociations quand les trois premiers rounds ont échoué? lui demandons-nous. «L'ONU nous a demandé de les reprendre, nous nous devons de faire preuve de bonne volonté et nous sommes pour la paix», dit-il. Le ministre sait, cependant pertinemment, que les choses ne sont pas aussi simples quand il parle de «complicités de certains pays, de complot contre la région et de la politique de deux poids deux mesures».
«C'EST LA FRANCE QUI ENCOURAGE LA GUERRE»
Ould Essalek ira au bout de ses idées en précisant «qu'il y a au moins une capitale -Paris- qui ne veut pas de stabilité dans la région, c'est la France qui encourage la guerre et a armé le Maroc depuis longtemps, l'Espagne a un héritage au Sahara Occidental et les Etats-Unis ont eu, jusqu'à il y a trois ans, une position quelque peu équilibrée en appuyant le plan Baker». Ceci pour qu'il note «qu'il n'y a pas que l'Algérie qui soutient le front Polisario mais le Maroc est aussi soutenu par des pays puissants». Que devient la troisième voie? «L'autonomie comme une option de solution dans le plan de règlement, si nous l'avons acceptée c'est parce que nous tenons toujours à choisir la paix, nous nous sommes dit qui peut le plus, peut le moins», estime Ould Essalek qui retrace avec amertume la gravité de la situation des droits de l'Homme dans les territoires occupés.
«Nous sommes très préoccupés par la situation des droits de l'Homme dans les territoires occupés notamment pour ce qui concerne la santé de plus de 60 détenus sahraouis dans les prisons marocaines qui sont depuis plus de quatre semaines en grève de la faim», avait-il affirmé tout au début de son intervention. Il dénoncera «la campagne de répression et de terreur menée depuis 1975 par le Maroc contre le peuple sahraoui en contradiction avec tous les accords et traités internationaux».
Le ministre indique qu'en parallèle, le royaume marocain vit «depuis 2005 une intifadha pacifique pour dénoncer le reniement du système marocain des engagements qu'il a pris par rapport à la question sahraouie à savoir son acceptation du plan de règlement et les accords de Houston conclus en 1997». Deux éléments qui confirment la solution retenue pour le règlement du conflit qui est, rappelle-t-il «la tenue d'un référendum pour permettre au peuple sahraoui d'opter ou pour l'indépendance ou pour l'intégration au Maroc».
Le MAE fera état d'une sauvage répression de cette intifadha par les forces de sécurité marocaines, de multiples assassinats, de tortures, de viols, de disparitions forcées, de violation de tous les droits humains et autres refus d'entrée dans les territoires occupés aux journalistes étrangers et ONG internationales.
«Nous en appelons aux Nations unies, notamment la commission onusienne des droits de l'Homme à Genève, la communauté internationale dans son ensemble, pour une intervention urgente auprès des autorités marocaines pour libérer les prisonniers sahraouis et s'enquérir du sort des disparus», dit le MAE.
Il rendra hommage à la société civile espagnole qui défend fortement la cause sahraouie.
L'université de Madrid organise, selon lui, la semaine prochaine «une chaîne humaine de 1.000 personnes qui se dressera devant le mur pour dénoncer la dégradation des droits de l'Homme au Sahara Occidental: c'est très significatif».